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Le Languedoc
Aperçu
Antiquité et Haut Moyen-âge
La guerre des Albigeois* De 1271 à la Guerre de Cent ans
Des Guerres de Religion à la Révolution
Le Languedoc est une province et grand gouvernement de l'ancienne France, bornée au Nord-Est par le Lyonnais, à l'Est par la Provence, le Comtat-Venaissin et le Dauphiné, au Sud-Est par la mer Méditerranée, au Sud par le comté de Foix et le Roussillon, et à l'Ouest et au Nord-Ouest par l'Auvergne, la Guyenne et la Gascogne

Cette province se divisait en trois parties : 

1° le Haut-Languedoc renfermant le Toulousain, l'Albigeois, le Lauraguais et les pays de Mirepoix et de Carcassonne

2° le Bas-Languedoc, renfermant les pays de Narbonne, de Béziers, de Nîmes et d'Uzès

3° les Cévennes, qui contenaient le Vivarais, le Velay, le Gévaudan et le pays d'Alès.

Toulouse, capitale de la province, était aussi celle du Haut-Languedoc; Montpellier était la capitale du Bas-Languedoc. 

Cet ensemble territorial se compose de trois parties bien différentes : au Nord le massif montagneux des Cévennes (bassins du Rhône, de la Garonne et de la Loire), au Sud une grande plaine assez accidentée (bassins de l'Aude, de l'Hérault et partie du bassin du Rhône), enfin à l'Ouest le bassin particulier de la Garonne et de quelques affluents de ce fleuve. Ce sont là des régions très diverses; aussi le Languedoc ne doit-il son unité politique qu'à plusieurs siècles de vie commune tant intellectuelle que politique. 

Le Languedoc a laissé la place, à partir de la Révolution, aux départements suivants : Gard, Hérault, Aude, Tarn, Lozère, la majeure partie de la Haute-Garonne, une partie du Tarn-et-Garonne, de l'Ariège, des Pyrénées-Orientales, de la Haute-Loire et de l'Ardèche

Origine du nom de Languedoc et formation de cette province

Le Languedoc se compose principalement d'une portion de l'ancienne Provincia romana, appelée Narbonensis prima à dater du Ve siècle, à laquelle sont venus s'ajouter, par la suite des temps, des lambeaux de l'ancienne Viennensis et de l'Aquitania prima. Cet ancien gouvernement ne correspond donc ni à une province ecclésiastique, représentant une ancienne province romaine, ni à une région naturelle, car il s'étend à la fois au Nord et au Sud de la grande chaîne de partage des eaux de la France. C'est, nous le disons plus haut, au XIIIe siècle que le Languedoc apparaît; il se compose à ce moment des anciens domaines de la maison de Toulouse réunis à la couronne en 1229 (traité de Paris ou de Meaux; départements actuels du Gard, de l'Hérault, partie de l'Aude, du Tarn et de l'Ariège), et en 1271 (à la mort d'Alphonse de Poitiers; partie de la Haute-Garonne, du Tarn, Tarn-et-Garonne et Aveyron). A ce noyau principal s'ajoutent successivement le Gévaudan (Lozère, après 1229) et le Vivarais, terre d'Empire (partie de l'Ardèche, après 1307). Enfin, pour faciliter l'administration de ces domaines éloignés, les Capétiens rattachent à l'une des sénéchaussées royales le Velay, où leur influence s'est fait sentir dès le règne de Louis VII et devient prépondérante au début du XIVe siècle.

Ces pays avaient autrefois porté bien des noms différents; jusqu'au XIIIe siècle, on emploie l'expression Provincia, souvenir de l'ancienne Province romaine. On a dit encore Septimania, terme qui s'appliquait à la partie orientale, longtemps possédée par les Wisigoths, puis regnum ou provincia Gothiae en souvenir de ce même peuple; enfin, au XIIIe siècle, Albigeois (conquesta ou terra Albigensis), par allusion aux hérétiques proscrits par l'Eglise romaine (Les Cathares). 

A la fin du XIIIe siècle parait l'expression Lingua Occitana, qui veut dire le pays où on dit oc pour oui. Cette étymologie, proposée dès le XVIe siècle, et soutenue par D. Vaissète, a fini par être acceptée de tous. C'est dans les foires de Champagne que l'expression est employée dès 1290; elle est alors opposée à celle de langue d'oil qui désigne le Nord et le centre du royaume. Mais les limites de cette région restent longtemps indéterminées. Elle comprend au début du XIVe siècle tout le domaine royal dans le Sud de la France, et elle s'accroît ou diminue du côté de l'Aquitaine, suivant les hasards de la guerre avec l'Angleterre; les limites en varient également suivant les caprices du pouvoir central, qui les détermine à chaque nomination d'un nouveau lieutenant en Languedoc. 

En 1360, la Langue d'oc comprend encore quarante-quatre évêchés. Après le traité de Brétigny, les possessions royales sont réduites dans cette région aux trois sénéchaussées de Toulouse, Carcassonne et Beaucaire; la province de Languedoc est désormais constituée. Elle perdra encore en 1469, lors de la formation de l'apanage de Charles de Guyenne, le pays situé à gauche de la Garonne, mais c'est bien de 1360 que date la limitation définitive du Languedoc tel qu'il existera jusqu'à la Révolution, et on n'y unira ni le comté de Foix, lors de l'avènement de Henri IV, ni le Roussillon, cédé par l'Espagne en 1659.

Histoire du Languedoc

Antiquité et haut Moyen-âge. 
Le Languedoc romain.
Avant la conquête romaine le Languedoc, occupé d'abord par les Volces Tectosages et Arécomiques, faisait partie de la Gaule celtique ou Braccata, ainsi appelée des braies que portaient ses habitants; conquis l'an 121 avant JC, par le proconsul Domitius, il prit alors le nom de Provincia romana, d'où est venu celui de Provence; mais ses habitants conservèrent leurs lois et leurs libertés. Du reste, Domitius établit à Narbonne (Narbo Martius) une colonie militaire, afin de contenir les peuples vaincus, et de servir d'avant-poste; cette ville était en outre un lieu de station et de passage pour les légions qui se rendaient en Espagne.

Cette colonie parvint, après les conquêtes de César, à un haut degré de prospérité ; bientôt elle eut, comme la métropole, un amphithéâtre, un capitole, des temples, des institutions semblables à celles des municipalités romaines. Auguste donna à la contrée environnante le nom de Narbonnaise, et l'assemblée générale des Gaules fut convoquée dans cette ville, à la prospérité de laquelle Agrippa ajouta encore en faisant creuser un superbe canal de ses murs à la mer.

Au temps des Antonins Narbonne et Toulouse avaient déjà fourni des martyrs à la religion chrétienne; et elles comptaient des églises où devait se garder, dans toute sa pureté, ce christianisme prêché dans la Gaule méridionale par les apôtres eux-mêmes, s'il faut en croire les traditions. A l'avènement de Constantin le Languedoc fut compris dans la nouvelle organisation de l'Empire romain, sous le nom de première Narbonnaise; et devint l'une des sept provinces du vicariat de l'Aquitaine. 

Les invasions barbares.
Plus tard il fut envahi par les Vandales, les Alains et les Suèves, qui venaient de saccager Mayence. Ne pouvant franchir les Pyrénées, dont Didyme et Valérien leur fermaient les passages, ces envahisseurs parcoururent la Narbonnaise, et bien longtemps après leur départ cette province offrait encore de tristes vestiges de leur fureur.

En 412 Narbonne fut pillée par les Wisigoths; leur chef, Ataulph , conclut dans cette ville une alliance avec Honorius, en épousant Placidia, sa soeur; mais bientôt il fut forcé de fuir à Barcelone, et son successeur, Vallia, reçut de l'empereur la deuxième Narbonnaise et la Novempopulanie, à la condition de repousser les invasions des Vandales.

Toulouse devint alors la capitale de l'empire des Wisigoths, qui s'étendit de l'Espagne jusqu'à la Loire; mais la prospérité de ce royaume dura peu. Les Wisigoths, qui étaient ariens, furent, à l'instigation de l'Église, attaqués par Clovis, et vaincus à la bataille de Vouillé; Toulouse, leur capitale, tomba au pouvoir du roi franc; les vaincus furent poussés jusqu'en Espagne, et ils ne conservèrent dans la Gaule que la Septimanie, province de Narbonne, ainsi appelée, soit parce qu'elle renfermait 7 diocèses (Narbonne, Agde, Béziers, Maguelonne, Carcassonne, Elne et Lodève), soit parce que les soldats de la 7e légion, Septimani, y avaient, formé une colonie.

Francs et Wisigoths.
L'inimitié des deux nations voisines était cependant trop violente pour ne pas amener des combats continuels; la prétendue persécution de Clotilde par Amalaric amena une armée de 50,000 Francs sous les murs de Narbonne; la ville fut prise, et le roi wisigoth assassiné. Peu de temps après, Récarède le vengea en battant l'armée des princes francs; mais ces guerres eurent enfin un terme; et une alliance de famille, conclue à la satisfaction des deux parties, cimenta la bonne intelligence et l'union. Le roi goth épousa Clodosvinde, mère de Gontran, et abjura l'arianisme en 589.

Alors la Septimanie était habitée par cinq peuples différents : les Romains, naturels
du pays, et les Goths, les Syriens, les Grecs et les Juifs; mais ces trois derniers n'étaient sans doute en Languedoc qu'en qualité de commerçants, et ils devaient résider principalement dans les villes maritimes, telles que Agde et Maguelonne, que leurs richesses et leur importance faisaient alors placer, dans l'énumération des chefs-lieux de la province, avant Nîmes, Béziers, etc.

Cependant des dissensions intérieures affaiblirent la puissance des Wisigoths. En 672, Hildéric, comte de Nîmes, fit, de concert avec l'évêque de Maguelonne, prendre les armes aux habitants de Nîmes, pour secouer le joug du roi Wamba, alors à Tolède. Celui-ci envoya contre eux le duc Paul, qui trahit son maître, se fit couronner à Narbonne, entraîna dans sa révolte les autres peuples de la Septimanie, et s'unit au comte Hildéric. Wamba marcha contre les rebelles; il reprit Narbonne, Béziers, Agde, Maguelonne et Nîmes, où il eut un double siège à soutenir contre les habitants qui se retirèrent dans les arènes; il parvint cependant à pacifier la Septimanie , qui jouit d'environ soixante années de repos.

L'occupation maure.
La paix fut troublée tout à coup, en 719, par une invasion de Sarrasins, sous le commandement d'Abd-el-Rahman; ils parcoururent tout le territoire de Narbonne et de Carcassonne, en ramassant d'immenses richesses.

A l'époque de cette incursion l'Aquitaine était, sous le titre de duché héréditaire, un véritable royaume, gouverné par des princes mérovingiens, descendant de Caribert; Eudes venait de lui donner un nouvel éclat, et défendait courageusement contre l'ambitieux Charles Martel ses possessions situées au sud de la Loire, lorsqu'il apprit l'arrivée d'un nouveau général arabe, El-Samah. Il rassembla une nombreuse armée, alla à sa rencontre, gagna sur lui une sanglante bataille, et El-Samah y fut tué. Les restes de l'armée sarrasine se retirèrent à Narbonne, où ils furent joints par Ambessa, successeur d'El-Samah, qui, à la tête de nouvelles troupes, faisait une nouvelle descente en Septimanie. Ambessa reprit Carcassonne, Béziers, Agde, Maguelonne, Lodève, Nîmes, etc., et mourut peu de temps après, blessé mortellement dans un combat contre Eudes, qui remporta encore une victoire éclatante.

A Narbonne résidait un wali où gouverneur maure; mais les autres villes étaient administrées par des comtes goths ou gallo-romains, ce qui prouve que l'une des conditions les plus importantes du traité conclu entre les vainqueurs et les vaincus était fidèlement observée; cette clause était celle qui assurait le libre exercice des lois anciennes, appliquées par des officiers choisis entre les habitants. Les églises chrétiennes de la Septimanie avaient sans doute aussi conservé leur culte aux mêmes conditions que celles de l'Espagne; mais, soit par ordre de l'autorité musulmane, soit par le fait même de son existence, des huit ou neuf églises dépendantes de la métrople, il n'en est pas une dont on puisse produire le moindre acte durant toute la période de la domination arabe.

Le Languedoc dans l'Empire carolingien.
Dans les premières décennies du VIIIe siècle, la puissance maure s'étiole. Charles Martel, profita de cet affaiblissement en vainquant et tuant Abd-el-Rahman, et, furieux de la résistance qu'il éprouvait, et de deux ou trois soulèvements successifs des Maures vaincus, il détruisit Béziers, Agde, Nîmes et Maguelonne, dont la ruine commença la prospérité de Montpellier. Charles Martel s'empara ensuite des États de celui qu'il était prétendument venu secourir; les derniers ducs mérovingiens, Hunald et Waïfre, luttèrent et moururent en héros, et bientôt l'Aquitaine put prévoir ce qu'elle allait devenir sous la main de Charlemagne. En échange de sa liberté politique l'empereur franc lui rendit la civilisation romaine, l'organisa en nouveau royaume et y installa son fils Louis, protégé et soutenu par le duc Guillaume. En 793 ce seigneur eut à lutter contre Abd-el-Mélik, qui envahit l'Empire carolingien naissant, à la tête d'une armée arabe, et s'empara de Narbonne, dont les richesses servirent à la construction du pont et de la mosquée de Cordoue.

Guillaume cependant reprit bientôt ce que les musulmans lui avaient enlevé; et sous Charlemagne et les règnes qui suivirent le pays fut assez tranquille quant à l'invasion extérieure; car l'excursion des Vikings, en 858, n'eut pas de grands résultats. L'Aquitaine et la Septimanie, tantôt révoltées, tantôt soumises, sous Louis le Débonnaire, Charles le Chauve et Louis le Bègue, ne tardèrent pas à se constituer en fiefs indépendants; dès le temps de Charles le Gros il y avait des comtes de Toulouse et des marquis de Narbonne, qui gouvernaient librement ces villes riches et puissantes, souvent ravagées dans les querelles de ces seigneurs hautains. 

Epoque féodale.
A l'époque de la féodalité on voit les évêques employer souvent activement leur influence en faveur des bourgeois et des colons contre le despotisme et l'arbitraire des seigneurs. En 1004, Guy, évêque du Puy, défendit, dans un concile, de troubler à l'avenir la culture des terres et de dépouiller les clercs; un second concile, tenu en 1041, vint fortifier ce premier essai de la trêve de Dieu, en le sanctionnant par une pénalité civile et religieuse; Jean XIX rétablit, par une bulle, le siège archiépiscopal de Maguelonne, qui redevint alors un centre de richesses, où se portèrent en foule les plus savants clercs et les plus puissants laïques. A cette époque, les juifs, qui avaient recouvré peu à peu leurs droits sous Lothaire, avaient une synagogue à Nîmes, où en 1164 on voit le rabbin Abraham attirer des disciples des pays les plus éloignés. Urbain II donna à Maguelonne le signal de la première croisade; cent mille combattants partirent de cette ville pour la Palestine, sous les ordres de Raymond de Saint-Gilles.

Tandis que les populations en travail faisaient renaître les vieilles municipalités romaines, et se groupaient en communes, le pouvoir des seigneurs se réduisait à une sorte de protectorat, qui n'exigeait du subordonné qu'une simple redevance; bientôt le mouvement d'émancipation imprima au commerce des villes du littoral un essor extraordinaire; Montpellier frétait alors des vaisseaux pour tout l'Orient, et avait ses consuls à Constantinople.

La Guerre des Albigeois.
La Guerre des Albigeois porta la désolation dans ces florissantes provinces. On a donné le nom d'Albigeois à des sectaires des XIIe et XIIIe siècles, qui abandonnèrent l'Eglise romaine et s'appelèrent eux-mêmes Cathares ou les Purs. Leur nom d'Albigeois vient de ce que les armées du Nord attaquèrent le vicomte d'Albi, avant de réduire les autres villes où les Cathares étaient en grand nombre. Ils étaient en fait répandus dans tout le Languedoc; on les persécuta d'abord comme Manichéens (1163); ils se révoltèrent.

Le pape Alexandre III autorisa une croisade contre les sectaires de Provence (1179) et le légat Henri, abbé de Clairvaux, porta partout le fer et le feu. Un autre légat, Pierre de Castelnau, encore plus violent, fut assassiné par un gentilhomme de Beaucaire qu'il avait offensé (1208). 

A l'incendie de Béziers (1209), le légat fit égorger amis et ennemis, en disant :

« Tuez-les tous; Dieu reconnaîtra les siens ». 
Minerbe, il fit brûler vifs 150 Albigeois, et à Lavaur, il fit torturer les femmes. Après avoir tout exterminé dans le pays d'Albi, les Croisés se tournèrent du côté de Toulouse qui leur offrait une riche proie. 

Aussitôt le pape Innocent III ordonna une nouvelle croisade. 500,000 hommes, qui répondirent à son appel, se placèrent sous les ordres de Simon de Montfort. Toute la France du Nord se précipita sur la France du Midi. Le comte de Toulouse se soumit, et l'armée des Croisés se porta contre le vaillant Raymond Roger, vicomte d'Albi et de Béziers, dont les domaines furent donnés à Simon de Montfort après la bataille de Muret. Philippe-Auguste l'investit du comté de Toulouse, du duché de Narbonne, et des vicomtés de Béziers et de Carcassonne, qui se trouvèrent ainsi inféodés à la couronne. En effet, Amaury de Montfort, fils de Simon, fit cession de ces provinces à Louis VIII pour obtenir son alliance; et bientôt le fils de Raymond, un instant soutenu par les populations du midi, se trouva réduit au seul domaine de Toulouse.  Il fallut l'intervention des rois Louis VIII et Louis IX pour le réduire à l'obéissance. Il dut abdiquer, en 1229, et livrer ses sujets au tribunal de l'inquisition qui poursuivit les Cathares pendant plus d'un siècle. 

Enfin , après avoir marié sa fille au comte de Poitiers, frère de Louis IX, il mourut sans enfants mâles, et ses possessions furent réunies à la couronne de France, sous la condition expresse que les institutions et les franchises communales seraient respectées par le roi.

Le Languedoc réuni à la couronne de France.
Sous ce nouveau pouvoir le commerce reprit dans ces contrées une nouvelle importance; Louis IX fit creuser le canal d'Aigues-Mortes, qui ouvrit à l'industrie un nouveau débouché; des négociants lombards et toscans, qui parcouraient le Languedoc, s'établirent à Nîmes et à Montpellier, avec des privilèges considérables, qui leur furent concédés par Philippe III

Sous Philippe le Bel la circulation des denrées et des marchandises devint si active, que les commerçants de Nîmes conçurent le projet d'un canal qui devait mener de leur ville à la Méditerranée. A cette époque les juifs étaient étaient assujettis à certaines conditions humiliantes, qui les tenaient dans un état d'abaissement, dont les populations chrétiennes ne voulaient pas les laisser sortir, tout en jouissant de leur activité : ceux qui s'étaient établis à Nîmes devaient, chaque fois qu'ils enterraient un mort dans le cimetière dépendant de Saint-Bauzile, payer à l'abbaye deux sous, ou une livre de poivre.

Le Languedoc pendant la Guerre de Cent ans.
Sous le règne de Jean et plus tard le Languedoc fut dévasté à plusieurs reprises par les Anglais et les routiers; mais ses habitants supportèrent courageusement ces désastres  lors de la convocation des états à Toulouse, sous le règne de Jean, on décida d'accorder de grands secours au roi, et la ville de Nîmes, à elle seule, donna 1300 florins d'or; les sacrifices pécuniaires ne furent pas les seuls que le Languedoc s'imposa : la bataille de Poitiers vit succomber, parmi les braves qui s'y firent tuer aux côtés du roi, les Languedociens Bernard de Languirel , Rebuffel , Raymond de Nogaret, etc.

En 1358 et 1359 le Languedoc paya des sommes énormes pour la rançon du roi; il établit sur les vignes un droit nommé souquet, de souqua ( = souche), afin d'avoir des fonds pour résister aux ennemis; mais cela ne l'empêcha pas d'être ravagé par les grandes compagnies.

Un peu après vinrent les invasions des Bourguignons; ils s'emparèrent de Nîmes , et en furent chassés par le dauphin Charles, qui se réfugia en Languedoc, pendant que sa mère livrait Paris aux Anglais. Enfin , après avoir été, depuis la mort de Charles V, dévasté par les étrangers et les compagnies franches, et avoir passé aux mains du duc d'Anjou, du duc de Berry, et d'autres gouverneurs subalternes, le Languedoc se reposa, et reprit un peu de vie sous Louis XI, malgré les impôts dont ce prince l'accabla; il recouvra ses libertés sous François ler

De la Renaissance à la Révolution.
Après avoir souffert de la peste et de la famine sous Henri II, il fut, sous les successeurs de ce prince, agité par les Guerres de Religion; l'édit de Nantes lui rendit pour quelque temps un peu de repos; mais la guerre civile recommença sous Louis XIII. Les protestants traitèrent d'égal à égal avec ce prince; puis ils furent forcés de plier sous la main de fer de Richelieu. Le maréchal de Montmorency, gouverneur du Languedoc, paya de sa tête, sous l'administration de ce ministre, sa rébellion d'un jour, et dès lors l'habile cardinal sépara l'autorité civile et le gouvernement militaire de la province; un simple intendant l'administra au nom du roi, et le Languedoc, perdant désormais toute personnalité historique, passa sous le niveau commun des autres parties du royaume. 

Sous Louis XIV, Riquet creusa le magnifique canal qui unit l'Atlantique à la Méditerranée; le port d'Aigues-Mortes, obstrué depuis longtemps par des ensablements, fut remplacé par celui de Sète; et le commerce s'étendant, sous Colbert, dans toutes ses branches, doubla les revenus du pays. Malheureusement ces grands bienfaits n'étaient qu'une faible compensation pour les dragonnades et la guerre dite des Camisards, qui firent périr un si grand nombre de citoyens et appauvrirent tant le royaume.

A la Révolution, 55 des magistrats de Toulouse furent mis à mort à Paris; Narbonne se distingua sous la Terreur, en donnant asile aux proscrits. La grande insurrection de l'an VII fut étouffée; une demi-brigade de l'armée d'Égypte et d'Italie, la 32e, était toute formée de Toulousains; enfin, à l'invasion de 1814, le 10 avril, le maréchal Soult livra à Wellington, sous les murs de la capitale de ce qui était désormais l'ancien Languedoc, une bataille indécise. De fait l'ancienne province, comme les autres grandes divisions administratives de l'Ancien régime, en 1790, en même temps qu'étaient formés les nouveaux départements.

Géographie administrative

Il ne sera pas inutile ici de dire quelques mots de la géographie administrative de la province du Languedoc depuis le XIIIe siècle, c.-à-d. à dater du moment où elle se constitue définitivement. Elle formait trois sénéchaussées, dites de Toulouse, de Carcassonne et de Nîmes; la première comprenait une partie des départements actuels de Haute-Garonne, Tarn-et-Garonne, Gers, Tarn et Aude; elle était subdivisée en jugeries d'Albigeois, Villelongue, Lauragais, Rieux, Rivière et Verdun, plus la viguerie de Toulouse; en 1469, une partie notable des jugeries de Rivière, Verdun et Rieux avait été rattachée à la Guyenne. La sénéchaussée de Carcassonne s'étendait sur les départements actuels du Tarn, de l'Aude, de l'Ariège et de l'Hérault; elle était divisée en vigueries : Carcassonne, Cabardès, Minervois, Les Allumans, Limoux, Fenouillèdes, Béziers, Narbonne, Gignac, plus la châtellenie de Montréal et le bailliage de Sault, ces différentes circonscriptions furent créées successivement et remaniées plusieurs fois. La sénéchaussée de Nîmes ou de Beaucaire s'étendait de l'Hérault au Rhône et comprenait de plus les diocèses du Nord : Viviers, Le Puy et Mende. Elle se divisait en vigueries Beaucaire, Nîmes, Sommières, Meyrueis, Anduze, Alès, Uzès, Bagnols, Roquemaure, Saint-André, Le Pont-Saint-Esprit, Aigues-Mortes, Lunel, une rectorie et baylie, Montpellier, et trois bailliages, Gévaudan, Velay et Vivarais. De chacune de ces sénéchaussées dépendaient les différents feudataires du roi; le comté de Foix fut de 1242 à 1336 dans le ressort de Carcassonne; à cette dernière date il fut rattaché au siège de Toulouse.

La plupart de ces circonscriptions devinrent plus tard de simples ressorts judiciaires et furent remaniées plusieurs fois. Au XVIe et au XVIIe siècle, beaucoup de cours inférieures furent érigées en cours présidiales. Jusqu'au commencement du XVe, les impôts sont établis par vigueries et bailliages. Mais bientôt appparaît une nouvelle division, celle des diocèses civils. Le terme est emprunté à la terminologie ecclésiastique, mais les diocèses civils ne correspondent pas fort exactement aux diocèses religieux; tantôt un diocèse a formé deux circonscriptions civiles, tantôt au contraire le diocèse civil ne renferme qu'une partie du diocèse religieux. Ces diocèses s'administrent eux-mêmes par des assemblées nommées assiettes, composées généralement de représentants des trois ordres. Ce sont pour ainsi dire des succédanés des Etats de Languedoc; en Gévaudan, en Velay et en Vivarais, les anciens Etats provinciaux qui ont subsisté jouent le rôle d'assiettes. A dater du XVe siècle, ces assiettes règlent toutes les affaires locales, répartissent les impôts, connaissent des contestations entre les communautés; elles jouent en somme le rôle des conseils généraux actuels. Au point de vue judiciaire, le Languedoc a un parlement siégeant à Toulouse; dès le règne de Philippe le Hardi, tous les ans le parlement de Paris envoie dans cette ville une commission judiciaire chargée de juger en dernier ressort les causes des pays de droit écrit; cette commission est supprimée en 1291, et n'est pas rétablie en 1302, comme on l'a affirmé parfois. En 1420, le dauphin Charles établit à Toulouse, puis à Béziers, un parlement pour le Midi du royaume, qui lui est resté fidèle; en 1428, cette cour est réunie à celle de Poitiers, puis en 1436 le parlement royaliste est rétabli à Paris. Mais, dès 1443, le parlement de Toulouse est institué, et son ressort définitivement réglé après 1462, date de la création du parlement de Bordeaux; il comprend l'ancien Languedoc tout entier, moins le Périgord et l'Agenais, qui dépendent de Bordeaux. La justice administrative et financière est rendue par une cour des aides et une chambre des comptes, dont la première mention remonte au XIVe siècle et qui, après avoir été longtemps ambulatoire, fut établie définitivement à Montpellier en 1486.

Pour finir, un mot des Etats de Languedoc. Dès le XIIIe siècle, les sénéchaux de Carcassonne sont tenus de prendre pour certaines affaires administratives l'avis d'une assemblée où figurent des représentants des trois ordres. Ces assemblées n'ont pas à s'occuper de l'octroi ni de la levée des impôts. En 1291, elles sont supprimées. Mais en 1302 Philippe le Bel convoque les Etats de la Langue d'oc comme ceux de la Langue d'oil. Toutefois, ce n'est pas avant le règne de Jean II que les sessions deviennent à peu près annuelles, et qu'au lieu d'aller de ville en ville obtenir le consentement des habitants à de nouveaux subsides, les commissaires royaux réunissent les représentants de toute la province. A ces Etats figurent les évêques du pays, mais à titre de grands propriétaires, un certain nombre de nobles, puis les consuls des villes principales. Peu à peu le nombre des personnes convoquées diminue; on n'y admet plus qu'un ou deux nobles par diocèse et en plus des villes diocésaines, une ou deux communautés par circonscription. En somme, cette assemblée était très singulièrement composée, et ces bizarreries choquaient fort les gens du XVIIIe siècle, amoureux de régularité et de proportion. Evidemment, elle n'était rien moins que populaire, et les intérêts surtout y étaient représentés. Elle n'en a pas moins rendu des services signalés au Midi de la France, et grâce à cette institution le Languedoc a été une des provinces du royaume les mieux administrées et les moins malheureuses.

Lettres, sciences et arts

Les sciences et les lettres.
La culture littéraire dans l'ancien Languedoc a été fort inégale suivant les temps. Dans les premiers siècles de l'Empire romain, la Gaule méridionale était florissante; Pline affirme que les habitants de cette partie de l'Empire étaient dès lors aussi civilisés que ceux de l'Italie; un peu plus tard, Ausone vante les professeurs de Toulouse et de Narbonne et célèbre leur science et leur habileté. Cette culture survit-elle aux invasions germaniques? On ne saurait l'affirmer; toutefois, il est probable qu'à l'époque wisigothique cette partie de la Gaule participa dans une certaine mesure à la renaissance des études en Espagne au VIIe siècle. Mais l'Aquitaine, ravagée chaque été durant plus de trente ans par les bande franques, la Septimanie, dévastée par les Sarrasins, perdent les dernières traces de l'ancienne culture, et les efforts de Charlemagne pour le relèvement des études ecclésiastiques restent sans résultats appréciables dans cette partie de l'Empire. Le pays se couvrira d'abbayes nouvelles richement dotées; les églises cathédrales obtiendront du pouvoir suprême des privilèges étendus; rien n'y fera, et durant trois siècles, de l'an 900 à 1200, le Midi de la France ne produira aucun théologien, aucun écrivain latin digne de mention. Le latin des anciennes chartes, seuls monuments historiques que nous possédions pour cette longue période, prouve suffisamment l'ignorance extraordinaire du clergé languedocien à cette époque. Le Midi, au surplus, a une culture particulière, mais de caractère tout différent, tout laïque; la littérature provençale brille pendant cent ans d'un vif éclat ; en même temps prend naissance à Montpellier une science plus spéciale, celle du droit romain, si utile dans un pays de droit écrit. Le XIIIe siècle est marqué par la renaissance des études ecclésiastiques. Comme plus tard, au XVIe, l'Eglise romaine éprouve le besoin, d'enlever à ses adversaires un de leurs griefs les mieux fondés; elle veut guérir le clergé de son ignorance séculaire. 

Le traité de 1229 institue l'université de Toulouse qui, longtemps languissante, deviendra au XIVe siècle une des meilleures écoles de droit de l'Europe. Dans toutes les villes importantes s'élèvent des couvents de dominicains, d'augustins, de carmes, de franciscains, dont chacun a son école théologique. Mais ces nouvelles écoles ne peuvent enseigner que la science du temps, c.-à-d. la scolastique, et les nombreux travaux qui en sortent sont des oeuvres rebutantes et stériles, écrites dans un latin déplorable et ne prouvant qu'une chose, à savoir la subtilité de leurs auteurs; dans le Midi comme dans le Nord, la scolastique, arbre desséché, ne pouvait rien produire. Plus fécondes, les universités de Toulouse et de Montpellier fournissent à la France entière des juristes éminents, des administrateurs éprouvés, malheureusement trop dévoués aux idées d'absolutisme, et des médecins renommés, dont quelques-uns, comme Guy de Chauliac, jouiront d'une réputation européenne. Le Languedoc, qui n'est encore qu'à demi français, ne voit naître, jusqu'à la Renaissance, aucun écrivain célèbre de langue vulgaire; la littérature provençale n'est plus que l'ombre d'elle-même.

Le Languedoc, dans les siècles plus modernes, produira plus d'un homme illustre dans les sciences et les lettres, mais il serait impossible de trouver dans les oeuvres d'un Cujas, d'un Fermat ou d'un Guy du Faur de Pibrac trace d'une culture particulière propre à cette province. Au XVIIe et au XVIIIe siècle, les sciences historiques et archéologiques sont en grand honneur dans le Midi; des cabinets d'antiquités, des collections importantes de manuscrits se forment, dans lesquels des amateurs éclairés recueillent tout ce qui peut intéresser l'ancienne histoire du Languedoc. Citons seulement les collections du marquis Baschi d'Aubais, et les travaux du grand épigraphiste nîmois Joseph Séguier. Longtemps avant la publication de l'Histoire générale de Languedoc des bénédictins, la province avait trouvé, des historiens tels que le conseiller au parlement de Toulouse, Guillaume Catel, ou l'annaliste de la même ville, Lafaille; un peu plus tard, Léon Ménard dote Nîmes, sa ville natale, d'une monumentale histoire, et il n'est guère de villes importantes dont le passé ne soit étudié avec amour. En même temps paraissent les premières sociétés savantes : à Nîmes, une académie (1682); à Toulouse, on réorganise, en 1614, le vieux collège du Gai Savoir, qui devient l'Académie des jeux floraux; dans la même ville, la Société des Lanternistes (1640) devient, en 1729, l'Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres, encore aujourd'hui existante, et qui a son siège à l'hôtel d'Assezat.

On trouve encore à Béziers une académie royale datant de 1723; à Montpellier, dès 1706, une Société royale des sciences, etc. Quelques-unes de ces compagnies littéraires publient des mémoires assez intéressants, toutes s'occupent de recherches intellectuelles, et leur zèle prouve l'existence d'une certaine culture générale dans les classes élevées. L'instruction est, depuis le XVIe siècle, donnée principalement dans les collèges établis par les jésuites dans les principales villes de la province; la puissante compagnie est arrivée à se substituer à peu près partout aux anciens établissements analogues, dont quelques-uns, celui de Nîmes notamment, n'avaient pas laissé de briller au XVIe siècle ; elle a également fait oublier les vieilles universités de Toulouse et de Montpellier. La première, en dépit de quelquel tentatives de réforme, restera toujours languissante, et seul l'enseignement du droit y restera brillant jusqu'à la Révolution; à Montpellier, la médecine, par contre, est toujours en grand honneur, et au XVIIIe siècle encore, l'école de cette ville, la meilleure de France, est célèbre dans l'Europe entière.

Les arts.
Ces indications, fort brèves,  une fois données sur l'état des sciences et des lettres en Languedoc avant la Révolution française, un mot maintenant des arts proprement dits. A l'époque romaine, la province était couverte de monuments somptueux; Ies inscriptions en citent un grand nombre, dont les vestiges couvrent encore le sol; d'autres, plus heureux, ont été épargnés par le temps, et Nîmes, par exemple, peut montrer avec orgueil d'admirables constructions, rivalisant avec les plus beaux restes romains de l'Italie. Des derniers temps de la domination romaine date encore une partie de l'enceinte de Carcassonne, construite à la hâte au moment des invasions et qui, pendant plus de 1600 ans, a mis la Cité à l'abri de tout coup de main.

Les vestiges du haut Moyen Age sont peu communs en Languedoc; on y trouve quelques monnaies wisigothiques; on sait que des églises somptueuses décoraient plusieurs des grandes villes de la province, Narbonne par exemple Toulouse, où une riche basilique s'éleva au VIe siècle, sur la tombe de saint Sernin, mais rien de tout cela n'a subsisté.

De l'époque romane, au contraire, on a beaucoup de monuments de grande importance, et le patriotisme local s'est donné carrière à leur propos. Viollet-le-Duc a inventé de toutes pièces une prétendue école de sculpture toulousaine qui aurait fleuri pendant plus de deux siècles, jusqu'à la guerre des Albigeois, et qui serait en partie un produit de l'influence byzantine. Cette théorie a fait fortune; elle paraît malheureusement de tous points erronée. Bien plus, il n'y a pas eu à proprement parler à l'époque romane d'école architecturale languedocienne. En effet, prenons les plus célèbres monuments religieux de cette période Saint-Sernin de Toulouse qui date de la fin du XIe siècle et en majeure partie du XIIe, la cathédrale du Puy qui remonte au XIIe, et la célèbre église de Saint-Gilles sur le Rhône dont la dédicace remonte à l'an 1115. Voilà trois monuments d'aspect bien divers, situés tous trois en Languedoc. Mais le premier est visiblement une imitation de la célèbre église abbatiale de Conques en Rouergue, à laquelle l'architecte a emprunté la disposition curieuse du transept à triple vaisseau; Notre-Dame-du-Puy est un monument auvergnat; enfin l'admirable façade de Saint-Gilles est, sans aucun doute possible, l'oeuvre d'un artiste de l'école provençale, émule de l'auteur du porche Saint-Trophime à Arles. Sans doute, à Toulouse, la sculpture fut extrêmement florissante durant cette période, mais ces oeuvres, puissantes bien que frustes, n'ont pas de caractère particulier et rappellent plutôt les statues similaires de Moissac, de Beaulieu et de Souillac. Voilà donc une nouvelle influence dont on peut constater l'action, celle de l'école limousine du XIe siècle. Inutile de discuter la partie de la théorie de Viollet-le-Duc relative à l'action de l'art byzantin; la question est trop générale et trop compliquée; on sait d'ailleurs qu'aujourd'hui on a prudemment réduit à peu de chose cette part d'influence, trop exagérée par les archéologies d'antan.

Faut-il conclure que le Languedoc n'a pas eu un art particulier au Moyen âge? Ce serait trop dire; au début du XIIIe siècle, le mode de construction qui devait rester en faveur pendant le reste du Moyen âge dans cette province était tout établi, et le meilleur spécimen en est la nef de Saint-Etienne de Toulouse; ce beau vaisseau, en brique, voûté d'ogives, est une imitation évidente des grands monuments du centre de la France, une seule nef, fort vaste, et ce type va se répéter un peu partout jusqu'à la fin du XVe siècle. La plupart des églises seront donc à une seule nef; tantôt ce seront des constructions de faibles dimensions (église de la ville basse de Carcassonne, l'église du Taur à Toulouse, etc.), tantôt au contraire ce seront des monuments gigantesques (Sainte-Cécile d'Albi). La plupart de ces monuments datent de l'époque gothique. Le Languedoc renferme d'autres spécimens fort intéressants de l'art roman, cette fois monuments civils; citons seulement : l'hôtel de ville de Saint-Antonin, les maisons de Cordes encore romanes, bien que du plein XIIIe siècle, et enfin une quantité énorme de constructions militaires. Les plus intéressantes sont à Carcassonne; elles sont d'ailleurs moins importantes que celles du Nord de la France, et on ne saurait trouver en Languedoc des châteaux aussi vastes et aussi habilement disposés que le donjon de Gisors ou le Château-Gaillard.

Avec la domination française, l'art gothique pénètre dans le Languedoc, mais assez lentement et sans faire oublier entièrement aux artistes méridionaux leurs anciennes traditions. Toutefois, dès le XIIIe siècle, des architectes du Nord élèvent dans les nouveaux domaines de la royauté capétienne des constructions entièrement gothiques; citons seulement les choeuurs de Saint-Nazaire de Carcassonne, de Saint-Just de Narbonne et de Saint-Etienne de Toulouse. Ailleurs l'influence du nouvel art se fait sentir dans l'ornementation, notamment à Sainte-Cécile d'Albi, et de là sort un mélange assez heureux et fort original. Mais peu à peu le nouvel art gagne, et les artistes languedociens subissent les mêmes influences que leurs congénères du Nord. Le style gothique flamboyant apparaît, au jubé de Sainte-Cécile par exemple, puis nous trouvons le style Renaissance qui produit quantité de belles constructions civiles, notamment à Toulouse une foule d'hôtels parlementaires des plus luxueux et des plus variés comme plan et comme décoration. L'art religieux se transforme à son tour et on a de ce chef quantité de monuments, en général peu agréables d'aspect. L'un des plus remarquables est l'église de Saint-Pierre-des-Cuisines à Toulouse, vaisseau clair et spacieux, admirablement construit, d'aspect froid il est vrai et déplaisant. Mais il n'y a pas là trace d'art à proprement parler méridional; le Languedoc produira des artistes en tout genre; il en verra naître plus encore à partir du XIXe siècle, et l'école toulousaine de sculpture sera justement renommée, mais bien clairvoyant serait le critique qui pourrait dire à quels signes on distingue une oeuvre produite par un artiste du Sud de celle d'un artiste du Nord de la France. (Didot / A. Molinier).

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Dictionnaire Territoires et lieux d'Histoire
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