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Avignon

Avignon, Avenio Cavarum, Avinio a été l'une des villes des Cavares. C'est aujourd'hui le chef-lieu du département du Vaucluse et un lieu bien plus beau que maintes cités célèbres d'Italie et d'ailleurs admirées avec béatitude par le troupeau des touristes. La nature et l'art en ont fait une ville magnifique au bord du Rhône orgueilleux, près de la sauvage Durance, entre les Cévennes et les Alpes, sous le soleil éclatant,  à 687 kilomètres au Sud-Est de Paris; population : 86 000 habitants.  Son Palais des papes fut, au XIVe siècle la capitale de la chrétienté à la lois militaire et civile c'est un des édifices les plus grands, les plus complets, les plus sombres du Moyen âge. Ses remparts, aussi du XIVe siècle, sont, encore debout, intacts avec leurs 30 tours rondes. 
Son aspect général est celui d'une place de guerre. Le style de tous ses grands édifices est militaire et ses palais comme ses églises semblent autant de forteresses. Des créneaux, des machicoulis couronnent les clochers, enfin tout annonce des habitudes de révolte et de guerres civiles» (Prosper Mérimée). 
Son célèbre pont de Bénezet sur le Rhône, construit à partir de 1178, ne s'est effondré qu'en partie dans le fleuve tourbillonnant. Son église de Notre-Dame des Doms va du XIIe au XVIe siècles; maintes autres églises remontent en tout ou en partie aux temps médiévaux. Beffroi du XIVe siècle : ancien palais épiscopal de Ia même époque; Hôtel des monnaies et Hôtel-dieu du XVIIe siècle; vieilles maisons en grand nombre, etc.
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Avignon : le palais des Papes.
Le palais des Papes, à Avignon. A gauche, la cathédrale Notre-Dame des Doms.
Source : The World Factbook.

Les coteaux de Villeneuve-lès-Avignon, s'élevant sur la rive droite du Rhône, couverts des ruines du fort Saint-André de la Chartreuse, et la tour de Philippe-le-Bel se mirant dans le fleuve, complètent le paysage, et font d'Avignon une des villes les mieux situées et les plus pittoresques de la région méridionale. Ville musée sans doute, Avignon est aussi une ville de culture vivante, et accueille tous les ans un festival d'art dramatique célèbre, fondé en 1947, par Jean Vilar.

Histoire d'Avignon.
La situation géographique d'Avignon a considérablement influé, à toutes les époques, sur son histoire. Occupé dès l'époque la plus reculée par des tribus celtes, le rocher d'Avignon fut connu des Phéniciens et surtout des colonies massaliotes. Ces deux peuples y fondèrent des comptoirs et y bâtirent des temples dédiés à Heraclès et à l'Artémis d'Ephèse.

Plus tard, à l'époque romaine, Avignon figure parmi les villes les plus importantes de la Gaule Narbonnaise, surtout de la grande tribu des Cavares : Avenio Cavarum urbs munitissima. De bonne heure alliée des Romains, elle devint ville latine, selon Pline; elle eut son organisation municipale, ses privilèges, ses temples, son cirque, son théâtre, ses thermes, preuves incontestables de son importance et de son état florissant. Elle vit périr ces monuments lors des invasions barbares. Au déclin de l'Empire d'Occident, elle passa sous la domination des Burgondes (413). Un de leurs rois, Gondebaud, vaincu par Clovis, près de Dijon, se réfugia à Avignon où il soutint un siège mémorable contre le roi des Francs (500). En 509, le puissant roi des Ostrogoths, Théodoric, était maître d'Avignon et y plaçait Wandila, l'un de ses lieutenants. Lors du partage entre les fils de Clotaire, en 567, Avignon, bien qu'enclavée dans le royaume burgonde, devint le chef-lieu de la marche du roi d'Austrasie, Sigebert, et c'est Avignon que le patrice Mummolus choisit pour lieu de retraite et pour y mettre en sûreté sa famille et ses trésors. Un peu plus tard, en 733, la Provence ayant été envahie par les Sarrasins, les lieutenants de Charles Martel essayèrent de défendre Avignon, mais l'esprit hostile des habitants et le traité conclu avec les envahisseurs par Mauronte livrèrent la ville à Youssouf, gouverneur de Narbonne qui fit massacrer la garnison austrasienne (736). Charles Martel reparut bientôt devant Avignon, la prit et la reprit trois fois et finit par en rester maître. 

« Les murs de cette triple cité furent renversés; la garnison et les habitants furent exterminés par le fer et la flamme. »
C'est à cette époque d'opiniâtre résistance et de terribles représailles que remonte la destruction presque complète de tous les monuments de la grandeur d'Avignon, pendant la période romaine.

Si cette première époque de l'histoire d'Avignon est pleine de lacunes et d'obscurités, il n'en est pas de même de celle qui suit. A partir de sa rentrée sous la domination franque, nous la voyons reprendre son rang parmi les cités importantes. Elle relève successivement des rois de la Bourgogne Cisjurane, d'Arles ou des Deux-Bourgognes et enfin des comtes de Provence, et traverse, avec les Boson, une ère de calme, de paix et de prospérité qui lui permet de réparer les désastres causés par les invasions et aussi de reprendre ses vieilles traditions municipales. Au commencement du XIIe siècle, au mois de septembre 1325, Avignon est partagé entre Raymond Bérenger, comte de Barcelone, et Alphonse Jourdain, comte de Toulouse.

Dix ans plus tard, en 1135, Guillaume III, comte de Forcalquier, cède tous ses droits sur Avignon à Rostaing, évêque, et aux consuls. En 1154, l'évêque Geoffroy dresse et publie la charte du consulat, c.-à-d. les lois municipales. Elles sont confirmées, en 1457, par l'empereur Frédéric Barberousse et, de 1198 à 1251, cette ville se gouverne elle-même, s'organise en république sous la suzeraineté de ses évêques et de l'empereur dont elle place l'aigle dans ses armoiries. La république impériale d'Avignon désignée dans les documents par les mots de Commune, universitas civitatis, respublica civitatis ou respublica, exerça, avec ses consuls, toutes les prérogatives de la souveraineté. Elle élit ses magistrats annuels, elle a sa milice, son trésor, elle jouit du droit de battre monnaie et de conclure des alliances et des traités de commerce, elle possède enfin la même indépendance et la même puissance que ses soeurs et voisines, les républiques italiennes avec lesquelles, elle entretient des relations commerciales et des traités d'alliance. 

Cet état heureux et florissant dura peu de temps; la guerre des Albigeois et les événements dont elle fut le signal lui portèrent un coup mortel. La République d'Avignon prit le parti de Raymond de Toulouse, contre Simon de Montfort. Elle subit les conséquences de sa défaite. Une guerre civile éclata dans ses murs et ne fut apaisée que par l'élection d'un podestat. Bientôt, au danger des dissensions intérieures, vint s'ajouter le péril extérieur. 

Louis VIII, roi de France, parut sous les murs d'Avignon; après un siège de courte durée, il s'en rendit maître, fit massacrer ses défenseurs pendant que l'envoyé du pape Innocent III, le cardinal de Saint Ange, condamnait les Avignonnais à détruire eux-mêmes leurs murailles, à combler leurs fossés, à raser trois cents maisons à son choix, à abattre toutes les tours, à remettre au roi de France toutes leurs machines de guerre et à lui payer une forte rançon. C'était plus qu'il n'en fallait pour préparer la ruine de la République qui fut encore précipitée par les querelles intérieures, par la mauvaise administration et la trahison de ses podestats. Elle finit en 1251, époque à laquelle, grâce à sa faiblesse et aux manoeuvres de son podestat Barral de Baux, elle fut contrainte de signer une convention avec Alphonse, comte de Toulouse, et Charles, comte de Provence, frères de Louis IX; roi de France. Avignon, subissant dès lors la suzeraineté des comtes de Toulouse et de Provence, vit disparaître son rôle politique qui avait duré cent vingt ans, non sans grandeur et sans prospérité. Elle sauva toutefois une partie de ses privilèges de ville libre; elle ne fut unie ni à la Provence, ni au Comtat-Venaissin, ni au Languedoc; elle fut considérée comme terre adjacente et gouvernée par des officiers, particuliers, et cette organisation spéciale, dernier vestige de ses institutions républicaines, lui fut conservée à travers les siècles. 

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En 1290, la suzeraineté entière de cette ville passa à Charles Il d'Anjou, comte de Provence, roi de Naples et de Sicile. Il la laissa, à sa mort, avec son royaume et son comté, à son troisième fils Robert et celui-ci à sa petite-fille Jeanne de Naples qui la posséda jusqu'au 9 juin 1348, époque à laquelle elle vendit cette suzeraineté, moyennant 80.000 florins d'or, au pape Clément VI qui, comme ses prédécesseurs depuis Clément V, y avait établi sa résidence. La papauté qui, depuis 1274, possédait déjà le Comtat-Venaissin à elle cédé par Philippe le Hardi et qui, depuis 1305, siégeait à Avignon, posséda désormais, sur les bords du Rhône, un petit Etat dont cette ville devint la capitale.

L'établissement de la papauté dans ses murs (1309) est le grand événement de l'histoire d'Avignon. Ce séjour prolongé des pontifes donne à cette cité une grande importance. Elle devient le centre de la politique européenne; elle prend un accroissement considérable et se couvre de monuments. Les papes qui ont siégé à Avignon sont : 

Clément V (Bertrand de Goth), 1305-1314. - Jean XXII (Jacques d'Euse), 1316-1334. - Benoît XII (Pierre Fournier), 1334-1342. - Clément VI (Pierre-Roger de Beaufort), 1342-1352. - Innocent VI (Etienne Aubert), 1352-1362. - Urbain V (Guillaume Grimoard), 1362-1370. Grégoire XI (Pierre-Roger de Beaufort), 1374-1378. Les antipapes Clément VII (Robert de Genève); 1378-1394, Benoît XIII (Pierre de Luna), 1394-1409.
Le départ de Grégoire XI, en 1376, fut pour Avignon une nouvelle source de calamités, et cette ville, si riche et si florissante, vit revivre les mauvais jours du XIIIe siècle avec les violences et les guerres que l'éclosion du schisme ramena dans ses murs. L'anti-pape Benoît XIII se laissa assiéger dans le palais apostolique; la ville subit deux sièges et fut mise à feu et à sang par les Catalans, conduits par Rodrigue de Luna (1411). Après le concile de Bâle et la fin du schisme, le cardinal de Foix, envoyé du pape Eugène IV comme légat d'Avignon, en fit encore le siège et y rétablit définitivement le pouvoir pontifical. Depuis le départ des papes, Avignon fut gouvernée par des légats dont la plupart étaient les neveux des papes, et aussi par des vice-légats dont quelques-uns portaient des noms célèbres. Toutefois, les souverains pontifes ne furent jamais tranquilles possesseurs de cette ville qui ne perdit pas, au milieu des événements dont elle fut le théâtre, son goût pour les guerres civiles et qui était, d'autre part, sans cesse sollicitée par les rois de France de secouer le pouvoir pontifical pour se donner au royaume. Elle fut l'objet de tentatives d'annexion sous Louis XI et sous Louis XII; elle fut occupée une première fois par les troupes de Louis XIV et réunie à la France en 1663-1664; une seconde fois en 1688, et rendue au Saint-Siège, et réunie de nouveau sous Louis XV (1768).

Lors de la Révolution française, les événements eurent leur contre-coup à Avignon et dans le Comtat-Venaissin jusqu'à ce qu'un décret de l'Assemblée nationale du 14 septembre 1791 prononçât la réunion d'Avignon et du Comtat-Venaissin à la France. Le traité de Tolentino (1797) confirma cette réunion. La période révolutionnaire fut ensanglantée par des émeutes locales et par les massacres de la Glacière (1791). Plus tard, lors de la réaction de 1815, Avignon vit encore, comme toute la région méridionale, de nouveaux excès et de nouveaux crimes, tels que celui qui coûta la vie au maréchal Brune, dans les murs mêmes de la vieille cité.
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Les conciles d'Avignon

Il a été tenu en cette ville de nombreux conciles; on en compte vingt et un de 1050 à 1745, en outre, un concile provincial en 1849. Nous ne mentionnerons que ceux dont les décisions présentent quelque intérêt pour l'histoire. 

1209, sous le pontificat d'Innocent III, au début de la persécution contre les Albigeois, un an après le meurtre de Pierre de Castelnau, les légats du pape assemblèrent un concile où quatre provinces ecclésiastiques furent représentées et auquel assistèrent quatre archevêques et vingt évêques. Ce concile fit 21 canons. Il. Les seigneurs et toutes autres personnes jureront d'exterminer les hérétiques, d'ôter aux juifs toutes sortes de charges et de n'employer pour serviteurs que des chrétiens. III. Tous les dimanches et à toutes les fêtes, on excommuniera les usuriers. VI. Les terres des seigneurs qui auront imposé des taxes sans l'autorisation du prince seront frappées d'interdit. VII. Défense aux laïques, sous peine d'excommunication, de lever des impôts sur les clercs et sur les églises. XVII. Défense de danser dans les églises la veille des fêtes et de chanter des chansons obscènes. XX. Les parents jusqu'au quatrième degré des meurtriers de P. de Castelnau et de Milon sont déclarés incapables de posséder jamais aucun bénéfice.

1270. Concile provincial, 8 canons. Le Vlle excommunie les clercs qui recourent à l'autorité séculière contre leur évêque.

1279. Concile convoqué par Bernard de Saint Martin, archevêque d'Arles; 15 canons, dont l'objet principal est d'assurer les immunités et les privilèges des biens et de la juridiction de l'Eglise et de renouveler les mesures répressives contre les juifs, les excommuniés et les usuriers. 

1282. Second concile assemblé par Bernard de Saint Martin; 11 canons conçus dans le même esprit que ceux du précédent. 

1326. Concile où trois provinces, Arles, Aix, Embrun, furent représentées; 59 canons pour le rétablissement de la discipline, rappelant et confirmant des dispositions antérieurement édictées. LVII. Les juifs porteront un signe les distinguant des chrétiens; ils paieront à l'Eglise une taxe pour les oblations et les dîmes des maisons et des biens qu'ils possèdent. 

1337. Concile provincial; 70 canons, reproduisant pour la plupart des règlements anciens. Le cinquième contient une décision indiquant que l'abstinence du gras le samedi, en l'honneur de la Vierge, n'était pas encore imposée en ce temps, comme obligation générale. (E. H. Vollet).

Armoiries
Les armoiries d'Avignon ont varié aux diverses époques de l'histoire. Les premières étaient une ville carrée, enceinte de murailles formées de pierres de taille à créneaux bâtis à l'antique; plus tard, lors de l'établissement de la République, elle eut pour armes : une ville crénelée, ouverte, maçonnée, à trois tours, celle du milieu avec dôme crucifère; au devant, un pont sur un fleuve. Sur son contre-sceau était figurée une aigle déployée tournée à gauche avec la légende : Sigillum Communitatis Avinionensis. Aquila. Un autre sceau représente les quatre consuls vus à mi-corps et presque de face, tête nue et portant un manteau agrafé sur l'épaule gauche. Et le contre-sceau : un gerfaut déployé. Légende : Bulla consulum Avinionis Gerfalcus. Après l'acquisition de la ville par le Saint-Siège, ces armes changèrent et devinrent : de gueules à trois clefs d'or posées en fastes. On ajouta plus tard, comme supports à l'écu, deux gerfauts avec la devise : Unguibus et rosira. Ce sont les armoiries actuelles. Le plus ancien exemple qu'on connaisse de ces armoiries remonte au commencement du XVe siècle.

Monuments anciens.
Durant la période antique, Avignon était couvert de monuments dont il ne reste rien, sauf quelques arcades romaines, quelques murs d'un hippodrome, quelques substructions noyées dans des constructions modernes. Il n'en est pas de même des monuments du Moyen âge très intéressants et très nombreux surtout pour la période correspondante au séjour des papes, qui vit s'élever une foule de monuments civils et religieux.

Le Palais des papes.
Il faut citer, en première ligne, le Palais des Papes, l'une des constructions les plus vastes et les plus prodigieuses du Moyen âge, dont la superficie est de 15.165 m², dont les murs atteignent jusqu'à 4 m d'épaisseur et dont la principale tour s'élève à 60 m de hauteur. Cette masse gigantesque, moles miranda, comme l'appelle un auteur, est l'oeuvre de plusieurs papes et de plusieurs architectes. Le palais de Benoît XII, qui en forme la plus petite mais la plus ancienne partie, a été bâti de 1334 à 1342, sous la surveillance des architectes Guillaume de Cucuron et Pierre Poisson. Il comprenait, outre les appartements du pape, à l'étage au-dessus de la grande Audience, une chapelle dont la voûte est à près de 19 m de hauteur et dont la longueur est de 48 m, un cloître intérieur formé d'immenses arceaux, et était couronné par quatre tours portant les noms de la Campane, de Trouillas, de Saint-Jean et de la Cloche d'argent. 
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Avignon : Palais des papes.
Notre-Dame des Doms et le Palais des papes, à Avignon.

Dans la tour Saint-Jean existent encore deux oratoires couverts de peintures à fresque dont quelques-unes, très remarquables, sont attribuées à Mathieu de Viterbe (Matteo Giovanetti). La deuxième partie (1342-1360) est due aux papes Clément VI, Innocent VI et Urbain V. Elle est presque entièrement l'oeuvre de Pierre Obreri, architecte vivant à la cour de Clément VI. Elle comprend  une vaste cour intérieure formant un carré régulier d'environ 1800 m², et où se donnent aujourd'hui les principales représentation du festival annuel de théâtre. Elle est entourée de constructions aux proportions gigantesques parmi lesquelles on remarque la grande salle du Consistoire dont la voûte mesure 15,60 m de hauteur et qui a 52 m de longueur; la chapelle basse, la galerie dite du Conclave. Dans cette partie du palais se trouvent les trois tours des Anges, de Saint-Laurent et de La Mirande, la salle contenant les peintures des Prophètes, l'ancienne salle du jeu de paume, la salle des gardes, etc. Le départ des papes d'Avignon n'arrêta pas complètement les constructions de ce palais. En partie ruiné par les sièges qu'y subirent Benoît XIII et Rodrigue de Luna, avec leurs garnisons catalanes au XVe siècle, et aussi par des incendies qui faillirent le détruire, il reçut de nouveaux embellissements au temps de Julien de la Rovère, premier archevêque d'Avignon et plus tard Jules II; et, en 1513, le cardinal de Clermont construisit un corps de logis au Sud-Est, dit la Mirande. 

Le Palais des Papes a été l'objet de plusieurs projets de restauration élaborés par les architectes Viollet le-Duc et Revoil. Ces projets ont même reçu, à la fin du XIXe siècle, un commencement d'exécution, et l'antique chapelle de Benoît XII a été relevée de ses ruines. Mais l'ensemble de ce monument, spécimen unique de l'architecture française au Moyen âge, n'en est pas moins dans le plus triste état, grâce aux transformations et aux mutilations sans nom dont il a été l'objet.

Les Remparts.
Les Remparts sont également une oeuvre d'architecture militaire du XIVe siècle. Commencés en 1358, sous la pontificat de Clément VI, ils ne furent terminés qu'en 1368 sous celui d'Urbain V. Ils furent élevés en plusieurs parties aux frais du trésor pontifical et aussi de celui de la ville, par une foule de tailleurs de pierre, mais il ne paraît pas y avoir eu d'architectes spéciaux. Ils ont, en moyenne, 2,10 m d'épaisseur et de 10 à 12 m de hauteur dont la moitié est malheureusement enfoncée sous des remblais. Ils sont couronnés par un système de machicoulis et de meurtrières qui continue sur tout leur parcours. Ils sont flanqués de trente-neuf tours carrées ou rondes distantes les unes des autres de 100 à 120 m. Ils étaient percés primitivement de sept portes défendues par des ouvrages avancés aujourd'hui disparus. 
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Les remparts d'Avignon.
Les Remparts d'Avignon.

Les remparts d'Avignon, qui forment à cette ville une enceinte continue d'environ 5 kilomètres (4800 m), sont un des plus beaux exemples que nous possédions de la fortification du Moyen âge. ils ont été l'objet de travaux de restauration considérables qui sont actuellement continués. Ces remparts donnent à la ville une physionomie toute spéciale.

« Les machicoulis, dit Stendhal, sont supportés par un rang de petites consoles d'un profil ravissant; les créneaux sont d'une régularité parfaite [...]. Le temps a donné à des pierres si égales, si bien jointes, d'un si beau poli, une teinte de feuille sèche qui en augmente encore la beauté. C'est l'art de l'Italie avec ses charmes transporté tout à coup au milieu des Gaules. »
Le pont Saint-Benezet.
Le pont Saint-Benezet, dont l'origine remonte à l'époque gallo-romaine, relie les deux rives du Rhône entre Avignon et Villeneuve. Il fut reconstruit à la fin du XIIe siècle au moyen d'aumônes, à la grande joie des riverains qui virent là un miracle ayant donné naissance à la légende de saint Benezet. Emportées à diverses reprises par le courant rapide du Rhône, ses arches ont été souvent reconstruites, notamment au XIVe et au XVe siècle. Sa longueur totale était d'environ 900 m. Il se composait de dix-huit arches séparées en amont et en aval par des demi-becs très aigus. Ses arches étaient formées de quatre cintres juxtaposés d'une épaisseur totale de 4,90 m. Il était terminé par deux chatelets bâtis au commencement du XIVe siècle dont l'un, celui de la rive droite du Rhône, était commandé par la tour de Philippe le Bel, très bien conservée, et l'autre, celui de la rive gauche, par un ouvrage fortifié dans lequel s'ouvrait un pont-levis et dépendant des bâtiments de l'hôpital Saint-Benezet, situés au pied du pont. Au milieu de la douzième, arche se trouve la Chapelle Saint-Benezet, jadis consacrée à saint Nicolas, comprenant trois Chapelles superposées dont la plus ancienne remonte à l'époque carolingienne. Elles ont été  restaurées par les soins de L. Révoil. Le pont Saint-Benezet ne compte plus que trois arches qui s'étendent sur le plus petit bras du Rhône.
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Avignon : pont Saint-Benezet.
Le pont Saint-Benezet, à Avignon, construit entre 1177 et 1309,
 et en partie détruit par une crue du Rhône, au XVIIe siècle.

Les autres monuments.
On remarque encore parmi les monuments civils ou religieux le Séminaire situé au fond de la place du Palais, ancien palais des évêques d'Avignon, dit le Petit Palais, construit primitivement sur l'emplacement de l'hôtel du cardinal Arnaud de Via, neveu de Jean XXII, reconstruit aux XIVe et XVe siècles par Main de Coetivy, évêque d'Avignon, et par Julien de La Rovère, et où sont exposées aujourd'hui les toiles de primitifs italiens et français; l'ancien Hôtel des Monnaies (XVIe siècle), l'Hôtel de Sade (XIVe et XVe siècles), ancienne demeure particulière de cette célèbre famille; l'Hôtel des ducs de Crillon (XVIIe siècle), la tour du beffroi de l'Hôtel de Ville avec son jacquemart dont la base remonte au XIVe siècle et le sommet au commencement du XVe, ainsi qu'une foule d'anciens hôtels, palais de cardinaux, de princes, d'évêques, de grands seigneurs, de riches bourgeois dont l'ensemble donne à cette ville un caractère original.
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Avignon : tour.
Avignon : la tour.

Les monuments purement religieux y sont également fort nombreux, et quelques-uns remontent aux premiers siècles du Moyen âge.

L'église cathédrale ou métropolitaine a été bâtie primitivement, entre le VIIe et le IXe siècle, sur les débris d'un temple d'Hercule. Son porche est carolingien. Il se compose, à l'extérieur, d'un arc en plein cintre entre deux colonnes corinthiennes cannelées soutenant un fronton. Il était décoré de fresques dues au pinceau de Simon Memmi; c'est à peine s'il en reste quelques traces. La nef est du XIIe siècle, les chapelles latérales sont des XIVe, XVe et XVIe siècles, le choeur et les tribunes du XVIIe. On remarque dans l'intérieur les tombeaux presque entièrement refaits des papes Jean XXII et Benoît XII; une Vierge de Pradier, des Apôtres de Bemus, un autel du XIIe siècle, et, dans le choeur, un siège en marbre blanc qui a servi aux souverains pontifes. Cette église, comme la plupart de celles d'Avignon, conserve également de fort belles peintures de maîtres, parmi lesquelles on peut citer la Visitation de la Vierge, l'Annonciation et la Purification, de Nicolas Mignard, l'Assomption, de Pierre Mignard, la Présentation de J.-C. au temple, de Reynaud Levieux, une Résurrection et plusieurs tableaux de Parrocel, des toiles de Deveria, entre autres l'Adoration des Mages. Dans le trésor se trouve un groupe en argent, la Flagellation, sculpté et ciselé par P. Puget.

L'église Saint-Agricol date, en majeure partie, du XVe siècle. Fondée, en 680, sur les ruines du cirque antique, détruite par les Sarrasins, elle fut reconstruite à l'époque de Jean XXII qui y fonda une collégiale. On y remarque un retable de la Renaissance vulgairement appelé le Tombeau des Domi, un beau bénitier du XVe siècle, en marbre blanc, un autel et une statue de Coysevox, et parmi les peintures une Notre Dame des Sept Douleurs, de N. Mignard; le Sauveur prêchant, de Parrocel; une Assomption attribuée au Bourguignon; parmi les sculptures : les statues de saint Jean et de sainte Elizabeth, de Péru, le tombeau de l'architecte, Mignard et une foule d'inscriptions obituaires.

L'église Saint-Pierre, fondée en 433, reconstruite en 1358 par le cardinal Pierre de Prato qui y créa une collégiaIe, possède une belle façade gothique du XVe siècle, des vantaux de portes admirablement sculptés représentant le Combat de saint Michel avec Lucifer et l'Annonciation de la Vierge (1505), une chaire en pierre blanche, ornée de statuettes, et quelques débris de tombeaux.

Les constructions principales de l'église Saint-Didier sont du XIVe siècle. Elle fut érigée en collégiale, en 1355, par le cardinal Bertrand de Dencio. Elle possède un beau Portement de croix du sculpteur italien Francesco Laurana, une Descente du Saint-Esprit, de Simon de Chalous, une Adoration des Mages, de Parrocel, etc.

La ville d'Avignon compte encore de nombreuses chapelles contenant une foule de tableaux de maîtres : la Chapelle des Pénitents Noirs, avec des toiles des Mignard, de Parrocel, du Dominiquin, de Reynaud Levieux; la Chapelle des Pénitents Gris, appartenant à une confrérie fondée, en 1226, par Louis VIII, roi de France, pour l'extirpation de l'hérésie albigeoise; la Chapelle du lycée possédant la Visitation, une des belles oeuvres de Mignard. On y remarque encore les débris de l'église des Cordeliers, qui contenait le tombeau de Laure, de l'église de Saint-Martial qui contenait un beau cénotaphe d'Urbain V et les tombeaux de Pierre de Cros et du cardinal de La Grange, de l'église des Célestins, qui contenait le tombeau de l'antipape Clément VII et celui de saint Pierre de Luxembourg, etc.

Et aussi...
Parmi les monuments modernes, on peut citer : la Préfecture, successivement palais du cardinal Guy de Malesec, collège du Roure, hôtel de Forbin, acquis par le département le 12 octobre 1822; l'hôtel de ville construit de 1845 à 1851; le théâtre, construit en 1845 sur les plans de l'architecte Feuchère; l'hôpital Sainte-Marthe, fondé en 1354 par Bernard de Rascas, reconstruit au XVIIe siècle.

On voit, à Avignon, les statues de Corneille et de Molière, à l'entrée du théâtre, dues au ciseau des frères Brion; la statue d'Althen, introducteur de la culture de la garance, au Rocher des Doms, oeuvre du sculpteur Brian, inaugurée le 21 novembre 1847; la statue de Crillon, sur la place de l'Horloge, oeuvre de Veray, inaugurée le 3 mai 1858; la statue de Philippe de Girard, au milieu du square de la gare, inaugurée le 6 mai 1882, etc.. 

La ville d'Avignon possède une bibliothèque publique établie en l'an XII, enrichie plus tard par les legs particuliers de Calvet, de Requien, de Moutte, etc., et qui compte un grand nombre d'incunables et une précieuse collection d'ouvrages relatifs à l'histoire de la France méridionale. Elle compte de plus près de 3000 manuscrits parmi lesquels on cite le missel dit de Clément VII, les Heures de saint Pierre de Luxembourg, et le Psautier du maréchal de Boucicault. Dans les mêmes bâtiments que la Bibliothèque et ayant la même origine, se trouve le Musée d'antiquités et de tableaux, l'un des plus riches de province surtout pour la période gallo-romaine. Le médailler renferme 26.000 pièces, la galerie de sculpture et d'architecture antique possède un grand nombre de statues, bustes, bas-reliefs, de débris plus ou moins précieux, une grande quantité d'inscriptions (17 inscriptions grecques, 170 inscriptions latines). 

La galerie de sculpture du Moyen âge et de la Renaissance possède un grand nombre d'objets d'art, parmi lesquels on remarque les tombeaux du pape Urbain V, du cardinal de La Grange, du cardinal de Brancas, du maréchal de La Palisse, etc. Dans la sculpture moderne on trouve : le Christ d'ivoire de Guillermin, le Faune et le Mercure de Brian, la Moissonneuse endormie de Veray. 

Le musée de tableaux (Musée calvet) se compose de plusieurs centaines de toiles de toutes les écoles depuis le XIVe siècle jusqu'à nos jours. On y remarque, outre des Dominiquin, des Carrache, des rétables du XIVe et du XVe siècle, la galerie Vernet composée des oeuvres de ces artistes d'origine avignonnaise, des marines de Claude Joseph, des toiles de Carle et d'Horace parmi lesquelles le fameux Cosaque et le Mazeppa, deux originaux d'une grande valeur; la galerie de portraits des illustrations vauclusiennes qui contient des portraits de Crillon, du connétable de Luynes, de Fléchier, de Manry, des sculpteurs Bernus et Péru, de Parrocel, de Calvet, etc. Une galerie est consacrée aux plus modernes Dufy, Marie Laurencin, Manet, Sisley, Soutine, Utrillo et Vasarely.

Le Musée d'histoire naturelle ou Musée Requien, du nom de son fondateur, possède une belle et riche bibliothèque d'histoire naturelle et un herbier qui est un des plus riches de France.

Les archives départementales et les archives municipales d'Avignon sont fort riches en documents concernant l'histoire du pays. On peut citer, parmi les principaux fonds des archives départementales, celui de la chambre apostolique du Comtat Venaissin, ceux des Etats Provinciaux, de l'Université d'Avignon, de l'Archevêché, des Collégiales, de la Chartreuse de Bompas, qui contiennent des documents remontant au Xe siècle. Les archives municipales d'Avignon sont également fort riches, on y trouve des délibérations remontant au XIVe siècle, une grande quantité de titres concernant les privilèges de la ville, son organisation municipale, ses finances, son commerce, son industrie, ses relations avec les papes et avec les provinces voisines.

La ville d'Avignon, outre ses monuments et ses riches collections scientifiques et artistiques, possède de belles promenades dont les principales sont : le Rocher des Doms d'où l'oeil embrasse un des plus beaux panoramas du midi de la France, la promenade de l'Oulle et les boulevards extérieurs. Ses environs sont également fort pittoresques, qu'on se dirige dans l'île de la Barthelasse formée par les deux bras du Rhône ou qu'on parcoure, en hiver, la promenade des Angles où l'on jouit de la température des stations hivernales de la Méditerranée. (GE).



Jean Favier, Les papes d'Avignon, Fayard, 2006. - De 1309 à 1376, la papauté a résidé à Avignon, cas absolument unique dans l'histoire. Il s'agissait pour le pouvoir pontifical de se soustraire aux luttes d'influence favorisées par le champ clos que constituait l'Italie. Devant se réorganiser, loger la curie, la papauté a réformé, construit, faisant appel à quelques-uns des plus grands architectes et artistes du temps, attirant à Avignon des activités économiques, des écoles et avec celles-ci des intellectuels. C'est un legs considérable pour la France qui, au XXe siècle, a fait de cette ville un lieu touristique et le siège du plus célèbre festival de théâtre du monde. (couv.).
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Dictionnaire Villes et monuments
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