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Démocrite
est un philosophe grec, né à Abdère,
vers 460 av. J.-C., mort vers 357. Il eut pour maître Leucippe
et paraît avoir connu de bonne heure les doctrines des philosophes grecs,
notamment les théories des pythagoriciens
et les conceptions métaphysiques de Parménide
et de Zénon d'Elée : ces dernières exercèrent
sur le développement de sa pensée une influence incontestable. Animé
du vif désir de s'instruire, il fit de nombreux voyages en Orient et séjourna,
semble-t-il, cinq ans en Egypte![]() Beaucoup d'anecdotes racontées sur lui par des écrivains postérieurs né sont que des fables. On raconte, par exemple, qu'ayant dissipé son patrimoine dans ces voyages, ainsi que dans les expériences qu'il avait faites en étudiant la nature, il avait dû se justifier devant les Abdéritains et que pour ce faire il leur avait lu un traité qu'il avait composé sur le Monde; ses concitoyens en auraient été tellement charmés qu'ils lui lui auraient fait présent de 50 talents. On raconte aussi que la bizarrerie de son genre de vie le fit plus tard passer pour fou, et que les Abdéritains ayant appelé Hippocrate pour le guérir, le sage médecin, après l'avoir entendu, déclara aux Abdéritains qu'ils étaient plus fous que lui. On raconte enfin que Démocrite riait sans cesse des folies humaines; on l'oppose à Héraclite qui, dit-on, pleurait toujours... Démocrite avait composé un assez grand nombre d'ouvrages dont aucun ne nous est parvenu; les quelques fragments que nous en avons ont été réunis par Mullach (Frag. Philos. Graec.; Paris). Démocrite fut un des plus grands philosophes
de l'Antiquité Il résulte de cette définition de l'atome
que tous les atomes sont de même nature : il ne peut y avoir entre eux
aucune différence qualitative. Mais il peut
y avoir et il y a réellement des différences quantitatives:
ils n'ont pas tous la même forme ni la même grandeur. Les formes
sont en nombre infini; les grandeurs peuvent varier, mais l'atome demeure
toujours inaccessible à nos sens, invisible. C'est une question fort débattue
entre les historiens, de savoir si à ces deux propriétés géométriques,
Démocrite a ajouté une propriété physique, la pesanteur.
Divers historiens, entre autres Ed. Zeller, se
prononcent pour l'affirmative. Mais il semble que ce soit là une idée
nouvelle, introduite plus tard par Epicure, et
qui altère le système; l'examen attentif des textes prouve que pour Démocrite
la pesanteur n'est pas naturellement inhérente aux atomes et que, comme
toutes les autres propriétés physiques, elle s'explique par le mouvement.
Descartes reprendra
plus tard la même idée, quand il, se chargera d'expliquer l'univers avec
l'étendue et le mouvement. Il résulte de ces principes une conséquence
importante. c'est que les propriétés des corps n'existent pas réellement
telles qu'elles nous apparaissent. Les atomes n'ont ni couleur, ni chaleur,
ni son. Il faut donc distinguer les propriétés géométriques dont nous
avons parlé, éternelles et immuables comme les atomes eux-mêmes et qu'on
appelle ordinairement qualités primaires, et les autres qualités, appelées
secondaires, qui, résultant d'une combinaison variable, sont sujettes
à disparaître et à changer. Selon Démocrite, ces qualités, loin d'exister
dans les choses, ne sont qu'en nous; elles sont des affections ou manières
d'être de ceux qui les perçoivent. C'est Démocrite et non Protagoras,
comme on le dit habituellement, qui a introduit dans la philosophie l'idée
de la relativité
des qualités sensibles, le point de vue subjectif, comme on dit aujourd'hui,
et cette idée, bannie par la philosophie grecque ultérieure, hormis les
écoles sceptiques, devait reparaître dans
la phiIosophie moderne et la transformer.
![]() Démocrite imaginé par Antoine Coypel (1692). Une autre conséquence, non moins importante, résulte encore de la définition de l'atome : c'est qu'il n'y a place dans le monde pour aucune cause intelligente agissant en vue d'une fin. C'est à tort qu'on a si souvent attribué aux atomistes l'opinion selon laquelle le monde serait produit par le hasard ou la rencontre fortuite des atomes. Il n'y a pas de hasard dans un tel système; tout obéit au contraire aux lois de l'éternelle nécessité. Mais, par là même, il est impossible qu'une cause extérieure vienne modifier ou diriger les mouvements de la matière; le mécanisme suffit à tout expliquer ; il n'y a selon Démocrite ni causes finales, ni Providence. Les atomes étant en nombre infini, de
formes infiniment variées, et l'espace comme
le temps étant sans limites, il y a eu un nombre
infini de mondes divers ou semblables, qui ont tous commencé et doivent
finir. Dans le monde où nous sommes, les atomes, non pas les plus lourds,
mais les plus gros, se sont agglomérés au centre et ont formé la Terre Esquissant à grands traits la science
de l'univers, Démocrite enseignait que les mondes sont chacun entourés
d'une enveloppe (atmosphère "Les uns sont, dit-il, semblables, et les autres tout différents entre eux; il y en a sans aucun soleil, et d'autres avec plusieurs soleils; quelques-uns sont encore près de leur naissance, et d'autres ont atteint tout leur développement; d'autres enfin sont formés d'atomesDémocrite émet le premier l'opinion que la lueur de la Voie lactée ![]() ![]() Le philosophe explique par les mêmes lois la formation des plantes, des animaux, du corps humain. L'âme, d'après lui, est formée d'atomes lisses et ronds, qui sont les plus mobiles, si bien qu'elle est toujours en mouvement. Elle est d'ailleurs présente dans toutes les parties du corps; entre deux atomes corporels s'intercale, partout un atome psychique. Ces atomes se renouvellent sans cesse par la respiration; quand la respiration cesse pour une cause quelconque, la mort s'ensuit. Démocrite enseigna une théorie de la connaissance qui est restée célèbre : la théorie des images. Quoique cette doctrine soit différente de celle qu'Épicure défendit plus tard, le principe en est le même. Les corps émettent des images, composées d'atomes fort subtils, et ces images mettent en mouvement l'air interposé entre les corps et nous. Cet air vient frapper nos yeux et ainsi se produit une sorte d'empreinte qui est la connaissance. Nous voyons par le livre de Théophraste sur les Sens que Démocrite avait étudié de très près les questions relatives aux fonctions des sens. Il rendait compte, d'une manière analogue à celle qui vient d'être indiquée, des sensations de l'ouïe. Pour ce qui est de la valeur de ces connaissances, on a vu plus haut ce que Démocrite en pensait; c'est ici surtout que sa doctrine se distingue de celle d'Epicure qui est, à vrai dire, en complète opposition avec elle. Quoique Aristote fasse dire à Démocrite que toute sensation est vraie, il ne paraît pas possible que le philosophe ait directement soutenu cette proposition. Les sens étaient au contraire à ses yeux trompeurs et incertains, et, comme l'a montré Natorp, à la connaissance sensible, obscure et ténébreuse, il opposait la connaissance rationnelle. C'est sans doute parce qu'il a été vivement frappé du caractère relatif des perceptions sensibles et qu'il avait bien vu les difficultés de la science, que. quelques historiens, entre autres Ritter, ont voulu voir en lui un sceptique. Cette interprétation de sa doctrine est certainement erronée. En morale, Démocrite
ne pense pas encore à poser, comme le fait Socrate
presque au même moment, des principes d'un caractère scientifique. Il
a cependant écrit un grand nombre de traités éthiques, dont la doctrine
ne paraît pas d'ailleurs se rattacher à son système, sans cependant
le contredire, et fout nous prouve que ce grand observateur de la nature
s'était aussi vivement préoccupé de la conduite de la vie humaine. Comme
dans sa théorie de la connaissance il met
la raison au-dessus des sens, de même, en morale,
il préfère les biens de l'esprit à ceux du corps. Si selon lui le but
suprême de la vie est de se réjouir le plus possible et de souffrir le
moins possible, il ajoute tout aussitôt que ce n'est pas le corps et la
richesse qui rendent heureux, mais la droiture et la raison. Le bonheur
et le malheur, dit-il encore, ne résident pas dans les troupeaux et dans
l'or ; c'est l'âme qui est le siège du démon.
Le bonheur est essentiellement la bonne disposition et le calme constant
de l'âme, la bonne santé et la bonne humeur. Et l'art d'être heureux
est à la portée de tous: il consiste à profiter de ce qu'on a et Ã
s'en contenter, Nous trouvons aussi chez Démocrite des idées fort sages
sur le gouvernement et l'Etat. Il veut que les meilleurs
gouvernent, et la loi est à ses yeux la bienfaitrice des humains. S'il
dit que le sage doit pouvoir vivre dans tous les pays et que le monde entier
est la patrie d'une âme forte, il ajoute que rien n'est préférable Ã
un bon gouvernement. Il aime mieux vivre pauvre et libre dans une démocratie
que riche et dépendant dans une oligarchie. Enfin,
si tout le système de Démocrite lui interdit de reconnaître l'action
du divin dans le monde, il respecte cependant les croyances
populaires qui représentent à l'imagination
certaines idées physiques ou morales. Il admet même l'existence dans
l'air de certains êtres bienfaisants ou nuisibles, non pas immortels,
mais vivant plus longtemps que les humains. On peut souhaiter de les éviter
ou de les rencontrer; par là s'expliquent aussi les présages.
Telle est l'oeuvre de ce penseur qui a introduit dans la philosophie quelques-unes de ces idées qui, toujours discutées, reparaissent toujours et s'imposent à l'attention des humains. Contemporain de Platon, qui ne le cite jamais (la critique moderne croit cependant deviner quelques allusions) et animé d'un tout autre esprit, il a accompli une oeuvre à bien des égards semblable à celle de l'illustre Athénien. Les analogies qu'on découvre sont bien plus nombreuses que ne le feraient d'abord soupçonner le matérialisme de l'un et l'idéalisme de l'autre, et il est permis de dire que, dans l'ordre spéculatif, Démocrite a fait preuve d'un génie presque égal. (Victor Brochard). Le Pseudo-Démocrite
et l'alchimie de l'école démocritéenne.
Démocrite, en effet, avait écrit avant
Aristote, qui le cite fréquemment, sur toutes
les branches des connaissances humaines et il avait composé divers ouvrages
relatifs aux sciences naturelles. Il avait voyagé en Egypte Ces faits authentiques changent de physionomie
dans Pline l'Ancien. Pline est le premier auteur
connu qui ait transformé le caractère du philosophe rationaliste, et
qui lui ait attribué cette qualité de magicien, demeurée dès lors attachée
à son nom pendant tout le Moyen âge Ainsi Diogène
Laerce attribue à Démocrite des traités sur le suc des plantes (cités
aussi par Pétrone), sur les pierres, les minéraux,
les couleurs, les métaux, la teinture du verre, etc ( Les sujets que ces livres traitaient, notamment l'étude de la teinture des verres et émaux, nous expliquent comment les premiers alchimistes, empressés à se cacher sous l'égide d'un précurseur autorisé, ont donné le nom de Démocrite à leur ouvrage fondamental, Physica et Mystica. Celui-ci est un assemblage incohérent
de plusieurs morceaux d'origine différente : fragment sur la teinture
en pourpre; évocation magique du maître, mort avant d'avoir eu la temps
d'initier son disciple aux mystères de la science; enfin partie technique
constituée par deux chapitres, l'un sur la chrysopée ou art de faire
de l'or; l'autre sur la fabrication de l'asèm, assimilée à l'art de
faire de l'argent. Ces deux chapitres sont en réalité des collections
de recettes ayant le même caractère pratique, c.-à -d. relatives tant
à la préparation de métaux teints superficiellement, qu'à celle d'alliages
d'or et d'argent. Les recettes mêmes sont comparables de tous points Ã
celles du Papyrus de Leyde Art de faire de l'or.Toutes ces recettes du Pseudo-Démocrite sont réelles, positives, sans, mélange de chimère. Ce sont des recettes d'orfèvres qui avaient pour objet de fabriquer des imita- tions ou falsifications d'or et d'argent. Mais elles représentent la véritable origine des procédés de transmutation et des prétentions alchimiques. Plus tard sont venus les philosophes et les commentateurs, étrangers à la pratique et animés d'espérances mystiques, qui ont cru à la possibilité de transformer ces imitations en réalité, en changeant les alliages en or et argent véritables par des tours de main et avec le concours des puissances surnaturelles. On voit comment le nom de Démocrite se
rencontre à l'origine de ces traditions : non seulement dans les manuscrits
grecs du Moyen âge Il existait en effet en Egypte Aulu-Gelle
dit formellement que des auteurs sans instruction ont mis leurs ouvrages
sous le nom de Démocrite, afin de s'autoriser de son illustration. Cependant
il n'est pas prouvé que Bolus ait commis sciemment cette fraude. Il semble
s'être plutôt déclaré de l'école de Démocrite, suivant un usage très
répandu autrefois. C'est à quelque ouvrage de l'ordre des siens que semblent
devoir être rapportées les recettes agricoles, vétérinaires et autres,
attribuées à Démocrite le Naturaliste dans les Geoponica « d'après Démocrite, aucun serpent n'entrera dans un pigeonnier, si l'on inscrit aux quatre angles le nom d'Adam ».Bolus n'était pas le seul auteur de l'école démocritéene. Nous trouvons aussi dans les manuscrits alchimiques l'indication des Mémoires démocritéens de Pétésis, autre Egyptien. Le livre de Sophé l'Egyptien, c.-à -d. du vieux roi Kheops, est attribué tantôt à Zosime, tantôt à Démocrite. Cette littérature pseudo-démocritéenne, rattachée à tort ou à raison à l'autorité du grand philosophe naturaliste, est fort importante : car c'est l'une des voies par lesquelles les traditions, en partie réelles, en partie chimériques, des sciences occultes et des pratiques industrielles de la vieille Égypte et de Babylone ont été conservées. Sur ces racines équivoques de l'astrologie et de l'alchimie se sont élevées plus tard les sciences positives; la connaissance de leurs origines réelles n'en offre que plus d'intèrêt pour l'histoire du développement de l'esprit humain. (M. Berthelot).
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Démocrite de Sicyone, sculpteur grec, de l'école athénienne de Critios, qui vivait dans le premier tiers du IVe siècle av. J.-C. C'était un faiseur de portraits. On cite de lui plusieurs statues ou bustes de philosophes (Diogène de Laërce, IX, 49 ; Pline, Hist. nat., XXXIV, 87). |
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