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Quantité

Quantité (logique). - Au sens large, une quantité est ce qui ce qui est susceptible de mesure; en logique, cela a d'abord été l'une des catégories d'Aristote; la quantité se  divise en quantité discrète, quand ses parties ne sont point liées, comme le nombre; et quantité concrète ou continue, quand elles sont liées, comme l'étendue et le temps ( le Traité des Catégories d'Aristote, et l'analyse de ce Traité dans le livre De la Logique d'Aristote, par M. Barthélemy Saint-Hilaire).

C'est au commentateur Alexandre d'Aphrodisie qu'on rapporte l'origine de la distinction entre la qualité et la quantité des propositions. Le mot quantité désigne dans ce contexte le degré de généralité d'une proposition, et ce degré n'est autre que celui-là même qui appartient au sujet de cette proposition. Et ainsi la quantification, en logique formelle, est indifférente au prédicat; elle concerne exclusivement le sujet. Ce dernier est-il pris dans toute son extension, la proposition est dite universelle. Par exemple : « La vertu est méritante », proposition qui équivaut à celle-ci : « Toutes les vertus sont méritantes ». Le sujet n'est-il pris que dans une partie de son extension, la proposition est dite particulière. Exemple : « Quelque vertu est méritante », proposition qui équivaut à : « Quelques vertus sont méritantes ».  On appelle encore la proposition singulière, lorsque le sujet en est un être individuel; tel sera le cas pour l'exemple donné par les auteurs de la Logique de Port-Royal : « Louis XIII a pris La Rochelle ». Mais, à vrai dire, ce complément est dénué d'intérêt logique, et les propositions singulières ne constituent nullement une classe nouvelle, à part des deux autres. Que sont-elles, en effet, sinon des cas remarquables de propositions universelles, c.-à-d. de propositions dont le sujet est pris dans la totalité de son extension? 

Si, avec la qualité, laquelle exprime le caractère affirmatif ou négatif de la proposition, on combine la quantité, on obtient la division classique des propositions en quatre classes et le système de leurs oppositions. 

A. Universelle affrmative : « Tout vicieux est es-clave » (Port-Royal). 

E. Universelle négative: « Nul vicieux n'est heureux » . 

I. Particulière affirmative . « Quelque vicieux est riche ». 

O. Particulière négative : « Qelque vicieux n'est pas riche ». 

Telles sont les définitions, déterminations et divisions admises par la logique consacrée.

Le plus éminent des représentants de la philosophie écossaise en notre siècle, William Hamilton, a profondément modifié le point de vue selon lui trop étroit auquel les logiciens de Port-Royal, après tant d'autres, s'étaient tenus. Il lui a paru arbitraire de ne prendre, comme ils faisaient, en considération que la quantité du sujet et de négliger absolument celle du prédicat. Pourtant, cette dernière a bien son intérêt. Soit la proposition : « Tout X est Y ». C'est là une universelle affirmative, ce qui me fixe sur l'extension de X. Fort bien; mais l'extension de Y, quelle est-elle? En un mot, la totalité de X coïncide-t-elle avec la totalité ou seulement avec une partie de Y? Cela, les désignations de la logique courante nous le laissent ignorer et pourtant il y a intérêt à le savoir. Autre exemple : « Les hommes sont des êtres pensants ». Sont-ils la totalité des êtres pensants ou bien seulement une partie de ces êtres ? Reconnaissons que la question n'est nullement indifférente. De là cette réforme logique accomplie par Hamilton et que l'on appelle la quantification du prédicat. 

A vrai dire, l'intérêt de cette réforme est limité. Dans deux cas sur quatre, la quantification du prédicat se trouve être inutile, par la raison qu'elle est déjà virtuelle-ment opérée. C'est le cas de E et de O, c.-à-d. des deux propositions négatives. Une proposition négative, en effet, qu'elle soit universelle ou qu'elle soit particulière, exclut son sujet, en tout ou en partie, de la totalité de son prédicat. On peut donc dire que, dans les deux cas, le prédicat est pris universellement. 
Restent A et I, c -à-d. le cas des deux affirmatives. 

S'il s'agit de A, c.-à-d. de l'universelle affirmative, on distinguera entre deux hypothèses : ou bien du sujet on affirme qu'il est une partie de l'attribut, et c'est la condition de l'immense majorité des universelles affirmatives : les hommes sont mortels, cela veut dire que le sujet hommes est une partie du genre mortels, ou, en d'autres termes, que le sujet coïncide avec une partie du prédicat. Ou bien le sujet est coextensif à la totalité da prédicat. Ce cas est celui des propositions qu'Hamilton appelle toto-totates. Il est tellement rare que l'on peut le considérer comme excep-tionnel, comme en ces exemples : « Le sel commun est du chlorure de sodium », ou bien : « Le mercure est un métal liquide », ou encore : « Tous les triangles équilatéraux sont équiangles », ou, pour emprunter à Hamilton lui-même une de ses applications : « Les êtres raisonnables sont des êtres qui rient ». 

Quant à I, c.-à-d. à la particulière affirmative, pour l'ordinaire, le prédicat est pris particulièrement : quelque X est Y, c.-à-d.: est quelque Y. Il peut cependant arriver que le prédicat soit pris dans la totalité de son extension, comme si l'on dit : « Quelques mortels sont tous les hommes ». On a, dans ce dernier cas, la proposition parti-totale. 

En résumé, ces deux formes, la toto-totale et la parti-totale, sont les deux seules auxquelles, si l'on en croit nombre de logiciens modernes, la réforme d'Hamilton ait eu cette utilité de faire une place à part. D'ailleurs, l'innovation n'a pas obtenu de tous les philosophes une appro-bation sans réserves. Stuart Mill, en particulier, ne montre à son égard aucune faveur (Examen de la philosophie d'Hamilton, ch. XXII). (G. Lyon).

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