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Aristote

Aperçu Epistémologie
et métaphysique
Les clés du du monde concret Approches de
l'humain
L'aristotélisme
Aristote, surnommé Stagirite, est un philosophe grec ancien. Fondateur de l'école des péripatéticiens, il est né à Stagire en Macédoine, l'an 384 av. JC (1re année de la 99e olympiade) et est mort à Chalcis en Eubée, en 322, âgé de 62 ans. 

Disciple de Platon, Aristote est l'intelligence la plus vaste de l'Antiquité; il a embrassé toutes les sciences connues de son temps et en a même créé plusieurs. Le mérite d'Aristote en philosophie fut de lui donner une base plus solide que n'avaient fait ses prédécesseurs, et d'accorder davantage à l'expérience, mais sans méconnaître le rôle de la raison. Il rejeta la doctrine de l'idéal, qu'avait professée Platon, et concentra toute réalité dans les objets individuels.

La philosophie est pour lui la science des choses par leurs causes. Selon lui, les points de vue sous lesquels les objets doivent être envisagés, quand on veut les connaître et les expliquer, se réduisent aux suivants : ce dont une chose est composée, sa nature intime ou son essence, sa cause, et le but ou la fin vers laquelle elle tend; d'où la distinction de quatre principes, la matière, la forme, la cause efficiente et la cause finale
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Aristote.
Aristote sur une gravure de 1574.

La vie d'Aristote

Aristote naquit à Stagire, colonie grecque ionienne de la Thrace, située au bord de la mer dans la presqu'île de Chalcidique, en l'an 384 avant J.-C., et mourut à Chalcis, en Eubée, en 322. Son père, Nicomaque, était médecin, ainsi que ses ancêtres. Ils rattachaient leur famille à Machaon, fils d'Asclépios; et, avec beaucoup d'autres, ils s'appelaient Asclépiades. Nicomaque fut médecin du roi de Macédoine, Amyntas III, le père de Philippe. Cette circonstance a pu contribuer à faire appeler Aristote à la cour du roi de Macédoine pour l'éducation d'Alexandre. Il est vraisemblable qu'en sa qualité d'Asclépiade, Aristote fût de bonne heure instruit dans l'anatomie (La médecine grecque avant Hippocrate).

Vers l'âge de dix-sept ans, il perdit ses parents. Il se trouva alors indépendant et en possession d'une grande fortune. L'éclat d'Athènes l'attira dans cette ville. Il y vint en 367 ou 366 avant JC, dans sa dix-huitième année. Platon, qui y avait fondé son école vers 387 ou 386, en était alors absent. Il était, parti pour Syracuse en 368 ou 367. Il devait y retourner en 361 ou 360. Aristote entra dans le cercle des élèves de Platon, et il appartint à cette école pendant vingt ans, jusqu'à la mort du maître. Par là, déjà, se trouve réfutée la fable d'une brouille qui serait survenue, bien avant la mort de Platon, entre le maître et le disciple, et qui aurait été causée par l'ingratitude et le manque d'égards de ce dernier. On dit que Platon, ayant remarqué le zèle et la vivacité d'esprit d'Aristote, l'appelait « le liseur ».  et «  l'intelligence de l'école ». Il est vraisemblable qu'à Athènes même il étudia, non seulement le platonisme, mais les autres systèmes alors en vigueur.

Longtemps avant la mort de Platon, Aristote manifesta son indépendance. Il est très possible que, comme membre de l'école platonicienne, il ait déjà fait des cours pour son compte. Dès cette époque, du moins, il écrivit; et, si ses premiers écrits sont platoniciens de forme et de fond, ils n'en contiennent pas moins déjà des objections contre les théories des idées, et l'affirmation de l'éternité du monde. C'était à regret, nous dit-il, et par zèle pour l'intérêt supérieur de la vérité, qu'il combattait ainsi son maître. Il donnait, d'ailleurs, l'exemple du respect pour le génie de Platon. Dans une poésie qui nous est parvenue, il célèbre son maître comme un homme que le méchant n'a pas le droit de louer, et qui a montré, par sa vie et sa doctrine, comment l'homme bon est en même temps l'homme heureux. 

La mort de Platon (347) ouvre, dans la vie d'Aristote, une nouvelle période. Il quitta Athènes et alla, avec Xénocrate, à Atarné, en Mysie, auprès de son ami et condisciple Hermias, tyran de cette ville, dont il épousa par la suite la nièce ou soeur Pythias. Plus tard, il devait se marier, en secondes noces, avec Herpyllis. Après la chute et la mort d'Hermias, survenue en 345, Aristote alla à Mytilène. De là, il semble être revenu à Athènes, et y avoir ouvert l'école de rhétorique dans laquelle il se posa en adversaire d'Isocrate. En 342, il accéda à l'appel de Philippe, roi de Macédoine, qui lui demandait d'entreprendre l'éducation de son fils Alexandre, alors âgé de quatorze ans environ. Il resta à la cour de Macédoine jusqu'à ce qu'Alexandre entreprit son expédition d'Asie (334). 

Sans s'égarer à la poursuite d'un idéal trop éloigné de la pratique, Aristote paraît avoir cultivé dans l'esprit de son élève les qualités généreuses. Alexandre garda toute la vie respect et amour pour son maître, bien qu'à la fin un certain froid ait régné entre eux. En 335 ou 334, Aristote revint à Athènes; et il y ouvrit, au Lycée, une école qui prit le nom d'école péripatéticienne, vraisemblablement à cause de l'habitude qu'avait le maître de se promener avec ses disciples tout en causant science et philosophie. Le matin, raconte Aulu-Gelle, Aristote donnait, à un auditoire choisi, un enseignement dit acroamatique, qui portait sur les parties les plus difficiles de la philosophie, notamment sur la philosophie de la nature et sur la dialectique. Le soir, il donnait un enseignement exotérique, offert à tous ceux qui se présentaient, et traitant de la rhétorique, de la topique et de la politique. Il enseignait et sous forme de cours, et sous forme de conférences. Son école était, comme celle de Platon, une société d'amis qui se réunissaient, à des jours fixés, pour des repas communs.

Déjà riche par lui-même, et jouissant de l'assistance du roi. Aristote était en mesure de se procurer toutes les ressources scientifiques que comportait la société d'alors. On dit qu'Alexandre lui envoya huit cents talents pour la confection de son Histoire des animaux. On dit même qu'il mit à sa disposition des millions d'hommes chargés de chercher pour lui des animaux de toute sorte, notamment des poissons, d'entretenir des jardins d'animaux et des volières, de l'informer de tous les faits et de toutes les découvertes susceptibles de faire avancer la science. Ce sont là des légendes, mais dont des faits, sans doute, ont été l'occasion. Aristote a certainement rassemblé tous les documents de toute nature qu'il lui a été possible d'obtenir. Le premier, il a formé une grande collection de livres. Après le meurtre de son neveu et disciple Callisthène, Aristote cessa ses relations avec Alexandre. La mort de ce dernier (323) ne le mit pas moins en danger. Lorsque éclata la guerre lamiaque (Le protectorat macédonien), il fut considéré comme un ami des rois Macédoine et d'Antipater, et poursuivi pour crime d'athéisme. Il partit d'Athènes, afin, dit-il, que les Athéniens ne se rendissent pas une seconde fois coupables envers la philosophie. Il s'enfuit à Chalcis, en Eubée; mais il y mourut de maladie dès l'été de 322, peu de mois avant Démosthène, qui était né la même année que lui. Il avait soixante-deux ans.

Son caractère, attaqué de bonne heure par des adversaires politiques et scientifiques, apparaît dans ses écrits comme loyal, humain et noble; et nul fait confirmé ne prouve le contraire. Sa vie est empreinte de dignité morale et philosophique. Aristote est un esprit à la fois universel et créateur, et un travailleur infatigable.

Il n'a pas l'élan de Platon : l'esprit tourné vers la réalité donnée, il tient pour chimérique ce qui serait sans rapport avec elle; mais il n'est pas empirique, et dans le sensible il cherche l'intelligible. En toutes choses, il recommande le juste milieu, la mesure. Une moyenne fortune, le gouvernement de la classe moyenne, telle est la meilleure condition pour l'individu et pour la société.

Il était, nous dit-on, maigre et de petite taille; il avait de petits yeux et une expression d'ironie dans la bouche. De sa première femme, Pythias, il laissa une fille du même nom. De sa seconde, Herpyllis de Stagire, il laissa un fils, Nicomaque, celui-là même dont l'Ethique à Nicomaque porte le nom. Dans son testament il parle en termes affectueux de sa première et de sa seconde femme, de ses deux frères, et de leurs enfants; et il témoigne de la sollicitude à ses amis et à ses parents éloignés.

Les écrits d'Aristote

Les écrits d'Aristote se rapportent à la totalité des sciences connues de son temps et forment une véritable encyclopédie. Ils posèrent pendant un grand nombre de siècles la borne du savoir humain, et jouirent d'une autorité absolue. La plupart nous sont arrivés, mais quelques-uns mutilés ou altérés. 

L'histoire de la conservation des écrits d'Aristote est peu connue. Selon Strabon et Plutarque, les écrits d'Aristote et de Théophraste, après la mort de ce dernier, seraient venus aux mains de Néleus (Nélée de Scepsis), qui, pour les soustraire aux recherches du roi de Pergame, les aurait emportés chez lui à Scepsis, en Mysie et les aurait enfouis dans une cave d'où ils n'auraient été retirés que cent cinquante ans après. A l'époque de Sylla ils auraient été découverts par Apellicon. Puis, Sylla les aurait fait transporter à Rome. Quoi qu'il en soit de ces anecdotes, les textes qui s'étaient conservés furent revus et classés, au Ier siècle av. JC, par Andronicus, de Rhodes, philosophe péripatéticien, qui en donna une édition complète (vers 60-50 av. JC). C'est cet Aristote que nous possédons. 

Cette collection contient vraisemblablement tout ce qui subsistait alors d'authentique; et l'on a sujet de tenir en général pour apocryphes les ouvrages, absents de cette collection, qu'énumère Diogène Laerce. Mais, vraisemblablement aussi, tout ce que contient l'édition d'Andronicus n'est pas d'Aristote; et les oeuvres authentiques elles-mêmes n'y sont pas exemptes d'additions et de changements. De plus, nous connaissons les titres d'ouvrages certainement authentiques qui manquent dans notre collection et qui étaient apparemment perdus dès l'époque d'Andronicus. Mais il paraît bien que les oeuvres les plus importantes pour la connaissance de la philosophie et de la science aristotélique nous aient été conservées. 

Quels sont donc, parmi les ouvrages que nous possédons, ceux qui doivent être écartés comme inauthentiques? La question ne peut, dans bien des cas, être résolue avec précision et certitude. Voici les résultats auxquels arrivait Eduard Zeller, dans sa Philosophie der Griechen, t. III, 3e édition. Est, soit inadmissible, soit très douteuse l'authenticité des ouvrages suivants : De Xenophane, Zenone et Gorgia; De animalium motu; De plantis; De coloribus; De audibilibus; De mirabilibus auditis; Physiognomonica; Mechanica problemata; De indivisibilibus lineis; De mundo; De respiratione; De virtutibus et vitiis; OEconomica; Rhetorica ad Alexandrum. Les fragments de lettres que nous possédons sont très mêlés additions et d'altérations.

Un classement des écrits d'Aristote.
Les écrits laissés par Aristote peuvent vraisemblablement être rangés dans les trois catégories suivantes : 

1° Les livres d'enseignement et de science proprement dite : c'étaient les résumés et traités dont il se servait pour ses cours. Il ne les publia pas, mais les communiqua seulement à ses élèves. 

2° Les écrits publiés : ceux-ci étaient destinés au grand public. Ils étaient écrits, dit-on, avec abondance et avec charme. Une partie avait la forme de dialogues. On a souvent, d'après des expressions empruntées à Aristote lui-même, donné aux écrits non publiés la dénomination d'acroamatiques ou acroatiques, et aux écrits publiés la dénomination d'exotériques. Il est certain que ces expressions répondent à une distinction capitale dans la philosophie d'Aristote. Il y a, selon lui, deux modes d'enseignement, proportionnés aux deux degrés de la connaissance. Ce qui est connaissable comme nécessaire et absolument certain est affaire de démonstration proprement dite; ce qui n'est connaissable que comme vraisemblable est affaire de dialectique. Dans ses cours, Aristote enseignait la science achevée : il démontrait; l'élève n'avait d'autre rôle que celui d'auditeur. Mais, en dehors de ces cours, Aristote dirigeait des entretiens dialectiques où l'on raisonnait d'après les vraisemblances, d'après des considérations plus ou moins extérieures à l'objet en question, et où étaient admis, non seulement les élèves, mais aussi les gens du dehors. Telle est la valeur des mots acroamatique et exotérique selon la pensée d'Aristote. Lui-même ne les applique pas à ses ouvrages, mais ils s'y appliquent assez bien.

3° A ces deux catégories il faut en ajouter une troisième, à savoir : des notes destinées à l'usage personnel d'Aristote. On peut appeler ces derniers écrits hypomnématiques. Enfin, Aristote avait laissé des discours, des lettres et des poésies. De ces trois sortes d'écrits nous ne possédons que les premiers. Des seconds et des troisièmes il ne nous reste que des fragments. 

Parmi les écrits perdus, les plus importants sont : dans la première catégorie : le Traité des plantes, l'Anatomie, les Théorèmes astrologiques; dans la seconde : les Dialogues et l'Histoire de la rhétorique; dans la troisième : des extraits de quelques ouvrages de Platon et des écrits sur les pythagoriciens et sur d'autres philosophes. C'est sans doute dans cette troisième catégorie qu'il faut ranger Institutions (politeiai), où se trouvaient des renseignements de toute sorte sur 158 cités helléniques et barbares, recueil perdu, dont nous possédons beaucoup de citations fort intéressantes.

Ecrits scientifiques et philosophiques.
On peut classer de la manière suivante les écrits scientifiques proprement dits, ou écrits non publiés, que nous possédons, et qui représentent, d'une manière complète quant à l'essentiel, l'oeuvre philosophique d'Aristote : 

Ecrits logiques.
Les écrits logiques ont été réunis à l'époque byzantine seulement sous le titre d'Organon (ainsi nommé parce que la logique est l'organe ou instrument de toute science) les oeuvres de logique. L'Organon comprend :

• Les Catégories (kategoriai), en parties altérées et augmentées;

• De l'interprétation (peri hermeneias). On a dit que cet ouvrage pourrait être l'oeuvre d'un péripatéticien du IIIe siècle av. JC;

•  Les Analytiques : Analytika protera (Premiers analytiques), traitant du syllogisme; Analytika ustera (Derniers analytiques), traitant de la démonstration; 

• Les Topiques (topika), traitant de la dialectique ou raisonnement en matière vraisemblable. Le 9e livre de cet ouvrage est d'ordinaire donné pour un ouvrage spécial intitulé : Des raisonnements sophistiques (Peri sophistikôn elenchôn).

Ecrits de philosophie naturelle.
On range parmi les écrits de philosophie naturelle des ouvrages qui sont autant de traités de philosophie sur des objets particuliers
La Physique (Physikè akroasis), en huit livres, parmi lesquels le 7e, quoique rédigé d'après des notes aristotéliciennes, ne paraît pas être d'Aristote; 

De la génération et de la destruction (Peri geneseôs kai phtoras);

Du Ciel (Peri ouranou); 

• Les Météorologiques (Meteôrologika); 

De l'Âme (Peri psychès), et sept opuscules qui s'y rattachent, appelés parva naturalia

• L'Histoire des animaux (Peri ta zoa historiai), en dix livres, ouvrage très altéré, dont le 10e livre est inauthentique; 

Des parties des animaux (Peri zôôn moriôn); 

Des organes moteurs des animaux (Peri poreias  zôôn); 

De la génération des animaux (Peri zôôn geneseôs), ouvrage gravement altéré.

Le Traité du Monde, autrefois attribué à Aristote, est regardé comme apocryphe.

Ecrits métaphysiques.
Les écrits dits métaphysiques sont ceux dans lesquels traite de ce qu'Aristote appelle la philosophie première (prôtè philosophia) : 

• La Métaphysique, ouvrage en quatorze livres, est une collection faite vraisemblablement peu de temps après la mort d'Aristote, et comprenant tout ce qui se trouvait dans ses papiers de relatif à la philosophie première. Ces écrits doivent leur nom actuel (ta meta ta physika) à leur position après la Physique, dans l'édition d'Andronicus. Ce qui en fait le fond, ce sont les livres I, III, IV, VI à IX, X (numéros de l'édition de Berlin). Le livre II et le livre XI à partir du chapitre VIII, 1065 à 26, sont jugés inauthentiques.
Ecrits relatifs aux sciences pratiques.
Les écrits relatifs aux sciences pratiques sont : 
Ethique à Nicomaque (Ethika Nikomacheia) et Ethique à Eudème (Ethika Eudèmeia); ce dernier titre, dont l'attribution à Aristote, a une dimension moins politique, mais avec un caractère plus psychologique et religieux que le précédent. La Grande Morale (Moralia magna), attribuée sans certitude à Aristote apparaît comme un remaniement de l'Ethique à Nicomaque).

Politique (politika), ouvrage inachevé. Selon Ed. Zeller, les livres VII et VIII de la Politique, doivent vraisemblablement être intercalés entre les livres III et IV; 

Rhétorique (Technè retorikè), sur l'art oratoire.

Poétique (Peri poiètikès), sur les genres poétiques. 

Chronologie des écrits d'Aristote.
La question de chronologie n'a relativement aux ouvrages didactiques, qu'une médiocre importance. Tous ces ouvrages, en effet, ont été composés dans les douze dernières années de la vie du philosophe (335-322) : ils renvoient les uns aux autres, et nous offrent dans leur ensemble le système achevé, sans aucune marque de progrès. 

Autant qu'on en peut juger par les très faibles indications que l'on peut tirer des témoignages historiques et de l'examen des ouvrages en eux-mêmes, Aristote a composé d'abord les écrits logiques (excepté les notes d'après lesquelles a été rédigé le Peri hermeneias, lesquelles paraissent postérieures au peri psychès). Puis ont été composés les écrits de philosophie naturelle; puis les ouvrages physiologiques et psychologiques, puis les ouvrages relatifs aux sciences pratiques; enfin, vraisemblablement, et en tout cas postérieurement à la Physique, la collection dite Métaphysique. Aristote semble donc être allé de l'abstrait au concret, et, dans le domaine du concret, de l'être changeant à l'être immuable.

Autres écrits.
Discours et poésies.
On cite d'Aristote plusieurs discours, entre autres un Logos dikanikos, ou plaidoyer dans lequel il se défend contre l'accusation d'impiété, un éloge de Platon, un panégyrique d'Alexandre; mais l'authenticité de ces ouvrages est très contestée. Il avait composé aussi des poésies, dont il nous reste, parmi des fragments d'un authenticité très douteuse, quelques parties authentiques. Le plus important de ces spécimens est une scolie en l'honneur d'Hermias d'Atarne, sous la forme d'un hymme à la vertu, à laquelle, pareils aux anciens héros de la Grèce, Hermias a sacrifié sa vie. Mentionnons aussi quelques distiques d'une élégie à Eudème, en l'honneur de Platon. Voici la scolie en l'honneur d'Hermias :

« Vertu, objet de labeur pour le genre humain, prix suprême de la vie! pour toi, vierge, pour ta beauté, les Grecs sont prêts à affronter la mort, à supporter des travaux terribles, infinis. Tant est beau le fruit que tu fais naître dans le cour, fruit immortel, qui vaut mieux que l'or, et que la noblesse, et que le sommeil au doux regard! Pour toi, le fils de Zeus, Heraclès et les fils de Léda supportèrent beaucoup d'épreuves, nobles chasseurs poursuivant ta puissance. Par amour pour toi, Achille et Ajax entrèrent dans la demeure d'Hadès. C'est toi, c'est toi toujours qu'aimait, lui aussi, le fils d'Atarné; et c'est pour ta beauté qu'il a privé ses yeux de la lumière du soleil, C'est pourquoi il est chanté pour ses belles actions; et les Muses grandiront son nom et le feront immortel, les Muses, filles de Mnémosyne, qui honorent la majesté de Zeus hospitalier et la gloire d'une amitié fidèle. »
Lettres.
Les lettres d'Aristote sont célébrées par Démétrius et par d'autres auteurs comme des modèles de style épistolaire. Selon Simplicius, le style de ces lettres unissait le clarté à la grâce, à un point que n'atteignait aucun écrivain connu. Diogène mentionne des lettres à Philippe, les lettres des Sélybriens, quatre lettres à Alexandre, neuf à Antipater, et des lettres à Mentor, à Ariston, à Philoxène, à Démocrite, etc. Les fragments qui nous restent étant en général inauthentiques, nous ne pouvons juger par nous-mêmes du contenu et de la forme des lettres d'Aristote.

Aristote écrivain.
Aristote se sert de la langue attique écrite de son temps. Mais la multitude d'idées nouvelles qu'il se propose d'exprimer exerce sur la forme qu'il emploie une influence profonde. La considération des choses dans leur individualité, la distinction précise des domaines scientifiques, l'effort pour arriver à des concepts dégagés de tout élément sensible, se reflètent dans la langue et dans le style d'Aristote. De même que l'analyse logique d'Aristote ne s'arrête dans son travail que lorsqu'il a saisi les dernières différences, les différences spécifiques, de même, dans la langue d'Aristote, les synonymes apparents se distinguent et se définissent rigoureusement. Pour définir les termes, Aristote avait deux moyens : déterminer scientifiquement la signification des mots traditionnels, et créer des termes nouveaux. ll a usé de ces deux méthodes, mais en faisant prédominer la première. Il part le plus souvent d'un terme usuel; et, tantôt restreignant, tantôt étendant la signification de ce terme, il en fait l'expression exacte d'un concept logique. Mais, en bien des points, le langage traditionnel présentait des lacunes. Pour les combler, Aristote a créé des mots, en cherchant toutefois le plus possible un point d'appui dans la tradition elle-même. Grâce à la perfection de la terminologie qu'il a ainsi constituée, il a été le véritable fondateur de la langue scientifique universelle.

Le style d'Aristote n'est pas moins personnel que sa langue. Les anciens vantaient son abondance et son charme; son discours, dit Cicéron, s'écoulait en flots d'or. Ces éloges, évidemment, s'adressent à ses dialogues, à ses ouvrages publiés. Dans ses ouvrages didactiques, les seuls que nous possédions, on remarque l'exactitude avec laquelle sont définis les concepts, une précision et une brièveté inimitables, une rigueur et une fixité dans l'acception des mots qui rappellent le langage mathématique. En un mot, le style d'Aristote se distingue par une exacte appropriation de la forme au contenu. Mais bien souvent, surtout dans ceux de ses ouvrages qui ne sont qu'ébauchés, Aristote écrit avec sécheresse et négligence. Non seulement les phrases ne sont pas ordonnées en périodes, mais les anacoluthes et les parenthèses y abondent, au grand détriment de la clarté. Parfois aussi, au milieu de ces dissertations abstraites se trouvent des passages qui ne manquent pas d'élan et d'éloquence. Telle est la fin du chapitre VII du livre X de l'Ethique à Nicomaque

« Certes, entre les actions vertueuses, celles du politique ou de l'homme de guerre l'emportent sur les autres en beauté et en grandeur; mais elles ne comportent pas le loisir, et elles ont leur fin hors d'elles-mêmes. Au contraire, l'action de la raison, déjà plus sérieuse en ce qu'elle est toute spéculative, n'a d'autre fin qu'elle-même, et porte avec elle un bonheur parfait et spécial qui accroît encore l'énergie de l'intelligence. Cette action se suffit à elle-même, elle admette loisir, et elle est exempte de fatigue, autant que le permet la nature humaine : elle réunit toutes les conditions du bonheur. C'est donc cette action qui constituera pour l'humain le bonheur parfait, si du moins elle remplit une vie d'une durée complète: car rien d'imparfait ne saurait entrer dans le bonheur. Une telle vie serait plus belle que ne le comporte la nature humaine; car si l'humain peut vivre ainsi, ce n'est pas en tant qu'il est un humain, mais en tant qu'il y a en lui quelque chose de divin. Et, autant cette partie divine surpasse en excellence l'être composé d'âme et de corps, autant son action l'emporte sur les autres vertus. Si donc la raison est quelque chose de divin, par rapport à l'humain, la vie remplie par l'action de la raison est divine en comparaison de la vie humaine. Et ainsi nous ne devons pas, comme on nous le conseille, n'avoir que des pensées humaines parce que nous sommes des humains, et n'avoir que des pensées mortelles parce que nous sommes mortels; mais nous devons, autant qu'il est possible, nous faire immortels, et nous efforcer en toutes choses de vivre par la partie de nous-même qui est la plus excellente. Car si ce genre de vie ne peut tenir qu'une petite place dans notre existence terrestre, par sa grandeur et sa dignité il est au-dessus de tout. »

Epistémologie et métaphysique

Disciple et adversaire de Platon, Aristote continue son maître et le combat. Comme celle de Platon, la philosophie d'Aristote est une philosophie du concept. La dialectique de Platon a sa continuation et son développement dans la logique du syllogisme d'Aristote. Pour les deux, la science a le même objet : l'universel. La méthode d'observation, timidement appliquée dans la philosophie platonicienne, est établie sur des bases scientifiques par le Stagirite.

Aristote soutient contre Platon que seul le singulier, l'individu, existe substantiellement. Il est donc un adversaire des idées séparées. L'universel ou le général est immanent à l'individu, il n'est que par lui, qu'en lui. L'idée s'obtient par une abstraction de l'esprit en généralisant les caractères communs à plusieurs individus.

Aristote ne subordonne pas la science, comme son maître, aux besoins de la vie morale. Tous, dit-il, au commencement de la métaphysique, ont le désir naturel de connaître en dehors de tout intérêt. Sa philosophie est une synthèse générale, explicative de la totalité des choses; ses doctrines forment un système philosophique basé sur la méthode analytico-synthétique. Elle évite à la fois les rêveries des idéalistes et l'empirisme des ultra-réalistes. Elle suit la voie moyenne, et, comme la vérité, elle se tient dans un juste milieu.

Classification des sciences.
C'est à Aristote que l'on doit la célèbre classification des sciences philosophiques en théoriques, pratiques et poétiques, selon qu'il s'agit de la pure connaissance spéculative, de la conduite et de la productions extérieure. La philosophie théorique comprend : 1° La Physique, étude approfondie du mouvement, 2° la Mathématique, étude approfondie de la quantité, 3° la Métaphysique ou Philosophie première, étude approfondie de l'être en tant qu'être.

La philosophie pratique comprend la logique (conduite des actes de l'intelligence), l'éthique (actes de la volonté), l'économique et la politique. Très souvent l'économique se confond avec la politique
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Logique d'Aristote.
Aristote est le premier qui ait fixé l'ensemble des lois que doit suivre l'esprit humain pour acquérir la science. Voilà pourquoi il mérite le nom de fondateur de la logique. Il en fait l'instrument du savoir. Savoir une chose, c'est connaître son essence, et nous y arrivons par la démonstration scientifique et le syllogisme qui font l'objet des Analytiques. Encore le premier, il décrit le procédé syllogistique, il en expose les lois, les modes et les figures avec une sûreté que la postérité a maintes et maintes fois confirmée. Et il qualifie de démonstration le syllogisme qui produit la certitude. A la démonstration sont opposés les raisonnements probables et les raisonnements erronés. Ceux-ci sont exposés dans un traité spécial, la Sophistique, ceux-là font l'objet des Topiques

La métaphysique.
La métaphysique a pour objet l'étude de l'être, de ce qu'il est en soi, en dehors des relations de temps et de lieu, et par opposition au contingent et à l'accidentel. Elle est donc étude de ce qu'il y a de plus réel, de ce qui ne disparaît pas avec les choses passagères, et en cela Aristote est d'accord avec Platon, dont il ne fait d'ailleurs le plus souvent que continuer la tradition. Mais il se sépare de son maître en ce qu'il rejette la théorie des Idées, ou d'êtres intelligibles réels, existant en dehors des individus. Selon Aristote, l'universel séparé des individus n'est qu'une abstraction; les individus seuls sont des êtres réels, et c'est par l'observation qu'il faut dégager, parmi les individus et les phénomènes, l'universel qui est l'objet de la science. Il y a quatre causes génératrices de l'être.

Être, c'est agir; l'existence se manifeste par l'action, le mouvement qui est présent à toutes choses et qui représente le passage d'un état à un autre. Mais pour que le changement soit possible, il faut qu'il y ait quelque chose qui soit susceptible de devenir ceci ou cela et qui subsiste à travers les transformations. Ce quelque chose est la matière. Tout produit de l'art ou de la nature a une cause matérielle.

La matière est par elle-même indéterminée; le bloc de marbre peut devenir une Aphrodite ou un Apollon, il n'est l'un ou l'autre que quand l'artiste lui a imposé une forme. La forme est ce qui crée l'être, qui le fait ce qu'il est. Tout être a une
cause formelle.

La matière et la forme sont entre elles dans le rapport de la puissance à l'acte. La matière est l'être en puissance. La forme est la réalisation des puissances de le matière; elle est l'être actuel, achevé. Pour passer de la puissance à l'acte, de la matière. à la forme, il faut une cause de ce mouvement. Il ne suffit pas d'un bloc de marbre et d'une idée dans l'esprit du statuaire pour que la statue existe, il faut encore que le statuaire travaille la matière elle-même. Une cause efficiente ou motrice est donc nécessaire pour expliquer le passage de la matière à la forme.

Enfin, il faut un mobile, un but final qui mette toutes ces causes en action. En art, le mobile, la fin du sculpteur est l'amour de la beauté ou de la gloire. Il existe aussi dans la nature des fins à réaliser. La cause finale achève et explique l'existence de l'être et l'action de la cause formelle et de la cause efficiente. Dans la nature, la fin est présente à la matière, elle la façonne du dedans, elle est le principe du mouvement par lequel elle existe, prend une forme et réalise ses puissances. C'est une perfection, un bien vers lequel tend la matière. La cause matérielle et la cause finale sont les deux causes principales.

Cependant la matière en elle-même n'est rien. Ce qui n'est ni ceci ni cela n'existe pas. La matière nue n'a pas d'existence. Tout dans le monde est plus ou moins organisé, tout a une forme plus ou moins parfaite. Ce qui est forme par rapport à un être inférieur est matière par rapport à un être supérieur. La table est forme par rapport au morceau de bois et le morceau de bois est forme par rapport aux éléments qui le composent. Il n'y a rien de mort dans la nature, tout y est en mouvement; et le passage des formes inférieures aux formes supérieures se fait insensiblement.

L'univers est soumis à une loi de progrès qui l'élève vers une fin supérieure en se servant des formes déjà réalisées comme de moyens pour une perfection plus haute. Le végétal comprend les perfections du minéral sous une forme nouvelle. L'animal, à la vie végétative, ajoute la sensibilité. Enfin, I'humain, qui est le but de la nature, la fin pour laquelle elle réalise ses puissances est doué à la fois des perfections du végétal et de l'animal, et d'une perfection dernière qui lui est propre, la pensée ou la raison. La pensée est donc l'acte le plus parfait; le dernier terme du bien vers lequel tend la nature.

Le monde, selon Aristote, n'a pas eu de commencement et il n'aura pas de fin. Par suite, le mouvement par lequel il manifeste son existence est éternel, le présent enveloppe le passé et l'on peut ainsi remonter la série des causes secondes. Mais les causes secondes ne se suffisent pas à elles-mêmes. Elles ont besoin, pour être expliquées, d'un principe supérieur qui lui-même ne soit pas soumis au mouvement. Ce principe, c'est Dieu, cause première et éternelle, moteur immobile auquel est suspendu l'univers, et qui le dirige. Il n'y a en Dieu aucune puissance qui ne soit réalisée; il est l'être achevé, parfait. Il est pure intelligence, et comme il ne peut penser que ce qu'il a de plus excellent, il est la pensée qui se pense elle-même, la pensée de la pensée. Ce dieu est vivant, actif. Il jouit d'une éternelle félicité. 

Le monde étant éternel, Dieu ne l'a pas créé. Il n'y intervient même pas, car ce serait une imperfection que de penser l'imparfait. La divinité ne saurait, sans déchoir, recevoir du dehors l'objet de sa contemplation. Comment Dieu peut-il être le premier moteur d'un monde qu'il ne connaît pas? Comment peut-il être la cause du progrès de la nature vers le bien? Dieu meut l'univers, comme l'objet aimé attire ce qui l'aime. Il est la perfection suprême qui soulève la nature et l'attire vers elle, le bien souverain, la fin infiniment désirable, dont le puissant attrait suscite dans le monde un lent progrès de perfection en perfection, jusqu'au dernier terme qui est l'humain, capable de pensée pure et dans l'intelligence duquel la divinité se réfléchit.

Les clés du monde concret

L'espace, la matière, le mouvement
La physique d'Aristote est très remarquable pour l'époque, et restera d'ailleurs sera la référence jusqu'au XVIIe siècle. Il débute par une théorie du mouvement. Le mouvement n'est pas encore conçu comme l'état d'un corps (au même titre que le repos), comme il le deviendra à partir de Descartes, Galilée, et de la physique moderne, mais comme la modalité par laquelle quelque chose va à son accomplissement, dans le cheminement qui mène de la puissance à l'acte. 

Aristote il distingue quatre genres de mouvements : le mouvement proprement dit ou la locomotion, l'accroissement, la diminution et l'altération. Le mouvement se produit dans l'espace, qui est quelque chose de substantiel. Le temps n'existe, lui, qu'en vertu du mouvement, dont il est la mesure. A la suite d'Empédocle, il considère que les corps (terrestres) sont constitués de quatre principes, ou éléments : l'air, la terre, l'eau et le feu. Et c'est cette composition qui constitue l'explication du mouvement (et des diverses transformations, que cela comprend) des corps. 

Le mouvement proprement dit, ou mouvement de translation, comprend aussi différentes sortes de mouvements : le mouvement circulaire, le plus parfait, le seul infini, suivant lequel se produit la rotation du ciel suprême ou sphère des étoiles fixes; le mouvement rectiligne de bas en haut, d'où résultent les oppositions du grave et du léger; et la différenciation des éléments, mouvement propre au monde terrestre.

Le feu monte, par exemple, car son lieu naturel est le haut, et au contraire la terre descend, car le bas est son lieu naturel. Les corps célestes, constitués d'un cinquième élément, l'éther, ont un mouvement particulier : circulaire. Ce mouvement est le plus parfait, mais, il n'est pas de ce monde. 

L'univers est divisé ainsi en deux régions distinctes : le monde sublunaire, monde du changement et de la corruption des choses, et le monde supralunaire, celui des astres, lieu de l'incorruptibilité. 

Dans son Traité du Ciel,Aristote s'attache, l'un des premiers, à réfuter la doctrine pythagoricienne du mouvement de rotation de la Terre. Pour lui, l'apparence, c'est la réalité. Et la Terre est nécessairement immobile au centre de l'univers.

La connaissance du vivant.
Aristote est loin d'avoir conçu les sciences du vivant selon l'idée que nous en avons actuellement. Cependant, il ne s'en est pas moins élevé à certaines notions que suggère le spectacle des choses. Les êtres organiques lui paraissent former une série ininterrompue que l'on peut remonter depuis les êtres inférieurs jusqu'à l'humain. 

En physiologie, il a fait la distinction entre les tissus et les organes, et, dans ses essais de classement, il a nettement indiqué qu'il faut, avant de reconnaître les distinctions spécifiques, étudier ce que les êtres ont entre eux de commun.

Approches de l'humain

Psychologie.
Le traité d'Aristote sur l'âme se rattache à ses travaux d'histoire naturelle et à sa métaphysique. Il n'étudie pas l'âme humaine en particulier, mais l'âme en général. 

Chaque chose a son âme c'est la forme qu'elle prend, c'est-à-dire ce qui est sa raison d'être, ce qui explique son existence. Quand un organisme a atteint son dernier degré de développement, il a atteint sa fin et, par cela même, il a une âme. Le fait de couper est la raison, d'être, l'âme de la hache. Ce n'est pas le corps qui produit l'âme; celle-ci est, au contraire, la cause de l'organisation du corps, de l'organisme ou de la forme dans laquelle elle se réalise.

Aristote distingue trois sortes d'âmes : l'âme végétative, l'âme sensible et l'âme pensante ou raisonnable. Les animaux ont à la fois une âme végétative et sensible; l'humain seul a, outre ces deux sortes d'âmes, une âme raisonnable.

L'étude des sens est à la fois psychologique et physiologique. Aristote explique comment, par l'acte commun du sensible et du sentant, nous avons la connaissance des choses concrètes. Il donne de curieux détails sur la mémoire et paraît avoir pressenti le fait de l'association des idées.

Pour ce qui est de la raison, il distingue la raison passive ou réceptrice, et la raison active ou créatrice. C'est grâce à cette dernière que nous entrons dans les voies de l'intelligence qui crée les choses; c'est grâce à elle que les objets de l'univers s'expliquent et deviennent intelligibles. Notre esprit s'associe à ce qu'il y a de pensée ou d'intelligence dans le monde; il prend conscience de la raison universelle de toutes choses, et par là il participe à l'immortalité divine.

Morale. 
Aristote, comme Platon, ne sépare pas la théorie de la vie pratique de la théorie de la vie sociale, mais il fait une part plus grande à l'initiative de l'individu, qu'il dote du libre arbitre, c'est-à-dire du pouvoir de se résoudre pour le bien ou le mal.

L'humain doit user de sa liberté pour réaliser le souverain bien. Pour Aristote, le souverain bien ne se distingue pas du bonheur, forme supérieure du plaisir. Or, le plaisir consiste dans l'activité, et il y a, autant d'espèces de plaisirs que de modes de activité. La valeur du plaisir à l'égard du souverain bien dépendra donc de la valeur de l'activité à laquelle il s'ajoute.

L'humain atteindra le bonheur en accomplissant les actions les plus conformes à sa nature. La raison étant ce qui le distingue des autres animaux, l'activité véritablement  humaine consistera dans la vie conforme à la raison, et comme le plaisir s'ajoute à l'activité, l'achève, quand nous faisons ce qui est conforme à notre nature, le bonheur est notre récompense.

Ce qu'on appelle vertu n'est que la perfection de notre activité naturelle, une habitude de faire le bien, une disposition ferme et constante qui a son principe dans l'intelligence et la liberté. Quant aux actes que la vertu nous commande, ils consistent dans le bon usage de  nos passions naturelles. Il ne faut pas supprimer les passions, mais les contenir dans de justes bornes, philosopher avec elles, les soumettre la raison. Les supprimer, ce serait renoncer à la vie; d'autre part, les laisser maîtresses, c'est se soumettre à l'excès et au dérèglement des désirs. La vertu consiste dans un juste milieu, dans l'application à la vie de l'idée d'ordre, de mesure et d'harmonie.

Les principales vertus sont : la tempérance, qui est un juste milieu entre l'intempérance et l'insensibilité; le courage, qui est un juste milieu entre la lâcheté et la témérité; la libéralité, qui tient le milieu entre la prodigalité et l'avarice; la magnificence, qui tient le milieu entre la mesquinerie et la sotte ostentation.

Toutefois, l'exercice de ces vertus n'épuise pas la destinée humaine. Il faut s'élever de la vie pratique à la vie contemplative. L'acte propre de l'humain étant dans la pensée, son souverain bien consistera dans la contemplation de l'intelligible, dans la pensée de la pensée, c'est-à-dire dans l'intelligence de ce qui est parfait et divin, dans l'union avec la divinité, dernier terme de la félicité humaine.

Telle est la morale individuelle d'Aristote. Il est nécessaire de lui adjoindre une morale sociale, car l'humain est en perpétuel commerce avec ses semblables. A ce titre, la justice sera la vertu sociale par excellence. Aristote distingue la justice commutative, qui préside aux contrats de vente et aux échanges, et la justice distributive, qui préside aux partages des biens et des honneurs. La première a pour règle l'égalité, et la seconde a pour règle la proportionnalité. La loi repose sur la justice qui, dans les cas exceptionnels, est tempérée par l'équité.

La justice est la condition de la vie sociale, mais la vraie société, la plus durable est encore celle que l'amitié crée entre les humains.

Politique.
Aristote, pour construire sa république, procède par expérience et par observation. Il essaie de dégager des faits les lois générales de la politique, et il est amené par là à tenir un plus grand compte de l'individu que ne l'avait fait Platon. Il s'élève contre la théorie de son maître qui absorbe l'individu dans l'Etat et soutient que le bonheur de l'Etat, s'il n'est le bonheur des individus qui le composent, n'est qu'une vaine abstraction.

L'humain est un animal fait pour vivre en société, un animal politique. C'est la nécessité de vivre qui fonde la cité, l'Etat. D'autre part, la vie sociale a pour fin de permettre à l'humain de réaliser la vertu et le bonheur. Aristote ne sépare pas la morale de la politique.

La cité est sortie de la première communauté naturelle, qui est la famille. La famille comprend : le maître, la femme, les enfants et les esclaves. Le maître commande à la femme et aux enfants en faisant appel à leur amitié et à leur respect. Quant aux esclaves, qui n'ont des humains que l'apparence, leur condition est de servir le maître, d'assurer sa subsistance et de faire produire sa propriété. Aristote ne sépare pas, en effet, la propriété de la puissance politique. C'est la propriété qui fait l'homme libre, le citoyen.

Aristote examine ensuite quelle est la meilleure forme de gouvernement, et il écarte successivement les formes monarchique et aristocratique, parce qu'elles n'assurent pas assez le règne de la loi qui émane de la raison et qui, seule, doit régner en maîtresse. Rien ne garantit, en effet, que le roi gouvernera avec sa raison et non avec ses passions. De plus, la monarchie a pour conséquence l'hérédité du pouvoir, et il n'est pas raisonnable d'accepter la volonté d'un être que l'on ne connaît pas encore. Quant au gouvernement aristocratique, il n'est guère meilleur. Les aristocrates ont leurs propres intérêts qui peuvent s'opposer à l'intérêt public. La meilleure des constitutions est celle qui fait de tous les membres de l'Etat des citoyens. La meilleure forme de gouvernement est la république modérée, où la loi, acceptée et votée par tous les citoyens, règne en véritable maîtresse.

Influence d'Aristote

Influence sur la philosophie antique.
L'enseignement d'Aristote donna tout d'abord naissance à l'école péripatéticienne, qui fleurit pendant deux ou trois siècles et dont les principaux représentants sont : Théophraste de Lesbos (372?-287?), Eudème de Rhodes (IVe siècle), Aristoxène de Tarente (né vers 350), surnommé le Musicien, Dicéarque de Messine (fl. 320) et Straton de Lampsaque (fl. 287). Critolaüs, qui fit partie de l'ambassade envoyée à Rome, en 156, par laquelle la philosophie fut introduite dans le monde romain, était un philosophe péripatéticien. 

L'école se distingua par ses recherches minutieuses en Iogique, en morale et dans les sciences de la nature; mais la tendance naturaliste y prévalut de plus en plus sur la tendance métaphysique. Straton alla jusqu'à identifier la divinité avec la physis qui agit inconsciemment dans le monde, et jusqu'à substituer à la téléologie aristotélicienne une explication toute mécanique des choses, fondée sur les propriétés du chaud et du froid. 

Avec la publication des oeuvres d'Aristote par Andronicus de Rhodes, vers 70 av. JC, commença la série des nombreux interprètes et commentateurs du Stagirite, parmi lesquels on remarque Boéthus de Sidon (Iersiècle av. JC), Nicolas de Damas (ler siècle av. JC), Alexandre d'Aphrodisie en Cilicie (IIIe siècle ap. JC), surnommé l'Exégète par excellence, le néoplatonicien Porphyre de Batanée (IIIe siècle), Thémistius de Paphlagonie (IVe siècle), Philopon d'Alexandrie (VIe et VIIe siècles), Simplicius, de Cilicie (VIe siècle). 

Si l'école péripatéticienne ne se compose guère que de disciples peu métaphysiciens ou de commentateurs purement érudits, les doctrines du maître restent du moins très vivantes et fécondes dans des philosophies qui ne procèdent pas de lui, mais qui lui doivent en grande partie leur étendue et leur profondeur. Le principe des stoïciens, intermédiaire entre la puissance et l'acte, caractérisé par la tension, immanent à toutes choses, intelligent et cause finale suprême, parait bien n'être que la physis d'Aristote, dans laquelle on absorberait le noûs

Par sa distinction précise du mécanisme et de la finalité, de l'ordre physique et de l'ordre métaphysique des choses, du hasard et de l'action intelligente, Aristote a rendu possible l'épicurisme, lequel semble s'être constitué en grande partie avec les doctrines qu'Aristote définissait ou créait pour les réfuter. Le néoplatonisme lui-même, dans sa doctrine du noûs, doit beaucoup à Aristote. Les néoplatoniciens s'efforçaient de concilier Platon et Aristote; et Plotin soutenait que sa doctrine de l'un transcendant d'où émane le nous était la conséquence nécessaire de la doctrine aristotélicienne.

Influence sur la philosophie médiévale.
Après avoir soutenu jusqu'à ses derniers moments la philosophie antique, l'aristotélisme, en s'incarnant dans les croyances du Moyen âge, les transforma en doctrines philosophiques. Ce fut principalement sous l'influence d'Aristote que se développa, dans cette période de mysticisme religieux, I'esprit de logique et de spéculation rationnelle. Les écrits d'Aristote ne pénétrèrent que tardivement et indirectement dans le monde occidental. Jusque vers le milieu du XIIe siècle, on ne connut que de faibles parties de l'Organon, à savoir les Catégories et l'Hermeneia, dans la traduction latine de Boèce. C'était, l'Isagoge de Porphyre et le Timée de Platon, à peu près tout ce qu'on possédait de l'antiquité philosophique. 

De 1150 à 1210 environ parurent les autres ouvrages d'Aristote sous forme de version latine de traductions arabes, faites elles-mêmes au IXe siècle par des Syriens chrétiens, d'après des traductions syriaques. Peu après (XIIIe siècle), le texte grec lui-même fut communiqué aux savants de l'Occident, notamment par des Grecs de Constantinople; et la traduction immédiate en latin se substitua aux traductions indirectes. Robert de Lincoln (Greathead), Albert la Grand et saint Thomas travaillèrent particulièrement à cette épuration de la traduction latine. Chose étrange et qui montre combien l'intelligence de l'homme est à la merci de sa volonté, les esprits les plus divers trouvèrent dans Aristote un point d'appui rationnel pour leurs croyances et leurs aspirations. Rien de plus un en apparence que le Moyen âge, puisque tout le monde s'y réclame d'Aristote, mais il y a autant d'Aristotes que de philosophes. Il y a même des Aristotes qui n'ont plus que le nom de commun avec le Stagirite.

C'est de l'Organon aristotélicien qu'est née la fameuse querelle des universaux qui dure du IXe siècle à la fin du XIe. En même temps se développent chez les Arabes et chez les Juifs, en possession de tous les écrits du maître, des systèmes complets de philosophie aristotélicienne. Les Arabes, monothéistes et naturalistes, sont séduits par la doctrine d'Aristote sur Dieu et par ses recherches en histoire naturelle. Averroès, de Cordoue (1126-1198), se croit pur aristotélicien quand il soutient que l'entendement actif est une émanation de Dieu, qu'il est un pour tous les humains et seul immortel. Le juif Moïse Maïmonide, de Cordoue (1135-1204), concilie sans difficulté avec l'aristotélisme la création de la matière et les miracles. 

L'époque la plus brillante de la scolastique chrétienne est en même temps celle de l'apogée de l'autorité d'Aristote. Après s'être défié un moment de ses doctrines physiques, où l'on a cru voir professée l'éternité du monde et du temps, on prend, dès 1230 environ, l'ensemble des écrits d'Aristote pour texte des leçons de philosophie. Aristote est l'expression de la lumière naturelle, comme les vérités de foi sont l'expression de la lumière surnaturelle. La raison n'embrasse pas la foi, mais elle y conduit. Aristote, représentant de la raison, est le précurseur de Jésus dans les choses de la nature comme saint Jean-Baptiste est son précurseur dans les choses de la grâce. Et l'aristotélisme, ainsi défini, circonscrit et subordonné, devient l'origine de ce qu'on a appelé dans la suite la déisme et la religion naturelle. A cette époque, on y trouve tout ce qu'exige la théologie. II ne peut démontrer la vérité des dogmes, mais, à leur égard, il réfute les objections et présente des raisons vraisemblables. Il fournit, en particulier, une théorie de la forme substantielle comme distincte de la matière et des formes accidentelles, qui rend concevable la transsubstantiation sons la permanence des espèces sensibles dans l'eucharistie.

Si l'aristotélisme assure l'orthodoxie, il n'est pas moins propice aux dissidents. Amaury de Chartres et David de Dinant (XIIe et XIIIe siècles) tirent du côté du panthéisme, en identifiant Dieu, l'un avec la forme, l'autre avec le matière universelle. Et les mystiques allemands, comme Théodoric de Fribourg (XIIIe et XIVe siècles) et maître Eckhart (XIIIe et XIVe siècles), présentent leur doctrine de l'union substantielle de l'âme avec la divinité comme le développement de la théorie aristotélicienne du noûs poiètikos. Enfin, Aristote, au Moyen âge, n'est pas seulement le maître des philosophes : sous son patronage se mettent également ceux qui, à l'encontre de l'Eglise et de la philosophie d'alors, prétendent surprendre et enchaîner les forces mystérieuses de la nature. Pour ces réprouvés, Aristote est un magicien. On lui attribue des traités d'alchimie sur la philosophie occulte des Egyptiens. On le met, avec Platon, en tête de la liste des alchimistes oecuméniques. Les alchimistes se nomment les nouveaux commentateurs de Platon et d'Aristote. 

Ainsi, Aristote, au Moyen âge, est partout un excitateur des esprits et une autorité; mais son oeuvre la plus considérable est sans contredit la constitution de cette philosophie chrétienne si complète, si précise, si logique, si fortement établie dans ses moindres détails, qu'elle semblait créée pour l'éternité. Elle a fait loi dans les collèges de l'Université en France jusqu'au XVIIIe siècle. En 1624, la Sorbonne défendait à peine de vie de rien enseigner contre les Anciens. En 1671, les professeurs sont encore invités à respecter le péripatétisme sous peine d'exclusion. Au commencement du XVIIIe siècle, l'aristotélisme scolastique cède la place aux idées nouvelles.

Influence sur la philosophie moderne.
Ce n'est pas de la raison qu'est venue la première attaque vraiment meurtrière, c'est de la foi. Luther non seulement remarqua les différences importantes qui séparaient la philosophie aristotélicienne du christianisme, mais surtout il jugea impie de chercher un accord entre la foi donnée par Dieu et la raison corrompue par le péché. Oeuvre de l'homme, la philosophie aristotélicienne, avec sa prétention à traiter des choses divines, ne pouvait être qu'erreur et sacrilège; à se concilier avec elle, la religion ne pouvait que s'altérer et se dénaturer. Aristote était un maître d'hérésies : le salut de la religion était dans l'absolue extinction de ses doctrines. 

Combattu au nom de la religion, l'aristotélisme, malgré la brillante restauration qu'il dut à des érudits de la Renaissance, tels que Pomponazzi, Scaliger, Vanini, Gennade, Georges de Trébizonde, ne tarda pas à être également battu en brèche au nom de la science et de la philosophie. 

Francis Bacon ne vit dans la méthode aristotélicienne que la déduction prenant son point de départ dans l'opinion et dans le langage; et dans la métaphysique aristotélicienne, il ne vit que la prétention d'expliquer les choses, non par des causes mécaniques, mais par des actions surnaturelles et divines. Il condamna donc la philosophie d'Aristote comme contraire aux conditions de la science, laquelle cherche des explications mécaniques et procède par induction.

Pour Descartes, l'aristotélisme fut la doctrine qui réalisait les qualités sensibles, et qui expliquait les phénomènes par ces entités chimériques. Idées obscures et stériles, ces abstractions ne pouvaient étre les principes des choses. Au rebours d'Aristote, Descartes ramène la qualité à la quantité et non la quantité à la qualité.

Il semblait que la doctrine aristotélicienne eût définitivement vécu, lorsque Leibniz la fit rentrer triomphalement dans la philosophie, en déclarant qu'il y avait dans la théorie des formes substantielles et de l'entéléchie, bien comprise, plus de vérité que dans toute la philosophie des Modernes. Sur les traces d'Aristote, Leibniz plaça la substance dans un principe d'action, fit descendre l'étendue et la matière au rang de phénomène, et concilia les causes finales avec les causes efficientes en faisant dépendre le mécanisme de la finalité. Depuis Leibniz l'aristotélisme a joué notamment un rôle important dans la formation du système hégélien.

La doctrine qui a tenu au XIXe siècle la plus grande place dans le monde philosophique est l'idéalisme kantien. Le système d'Aristote,  mis en face de cette doctrine, apparaît comme clairement opposé au kantisme. Kant rejette précisément la dépendance de l'esprit à l'égard de l'être, la valeur ontologique attribuée aux lois de l'esprit, l'inconditionné théorique, la subordination de la pratique à la théorie, qui sont l'essence de l'aristotélisme. La philosophie de Kant s'est constituée en opposition directe avec la philosophie dogmatique, dont Aristote est le représentant par excellence. Mais si Kant a découvert une conception nouvelle des choses dont l'examen s'impose désormais à quiconque veut philosopher, on ne saurait dire qu'il ait entièrement réussi à faire prévaloir cette conception. S'il a pour lui le témoignage de la conscience morale, qu'il se propose d'ailleurs surtout de satisfaire, il ne peut obtenir l'adhésion franche et complète de l'intelligence. Celle-ci persiste à dire avec Aristote :

« Tout a sa raison, et le premier principe doit être la raison suprême des choses. Or expliquer c'est déterminer, et la suprême raison ne peut être que l'être entièrement déterminé. De l'infini et du fini, c'est le fini, en tant qu'intelligible, qui est le principe; l'infini, en tant qu'inintelligible, ne peut être que phénomène. »
Entre Aristote et Kant, la question est donc de savoir si l'on attribue la suprématie à la volonté ou à l'intelligence. (A19 / A. Robert / Emile Boutroux).


Sources biographiques. - Les auteurs anciens qui traitent de la vie d'Aristote sont les suivants : 1° Diogène Laërce, V,1-35; 2° Denys d'Halicarnasse, lettre à Ammaeus, I,5 3° l'auteur anonyme d'une biographie d'Aristote publiée par Ménage dans le second volume de son édition de Diogène Laërce, biographie composée peut-être d'après Hésychius; 4° le Pseudo-Ammonius; 5° le Pseudo-Hésychius; 6° Suidas, à l'article : Aristoteles. Ces textes se trouvent à peu près tous dans le tome I de l'édition des oeuvres d'Aristote entreprise par Buhle de 1791 à 1800. La valeur de ces différentes sources ne peut être déterminée a priori. Tout ce qu'on peut faire, c'est d'examiner une à une chaque indication au point de vue de sa vraisemblance interne et externe. 

Éditions anciennes. - Les oeuvres d'Aristote ne furent rassemblées et publiées dans l'Antiquité même que fort tard. Enfouies, dit-on, ou cachées pendant près de deux siècles, ce n'est que vers le temps de Sylla qu'elles furent réunies par Apellicon de Téos et révisées par Andronicus de Rhodes. Dans les temps modernes, on ne connut pendant longtemps en occident que l'Organon; c'est aux Arabes et aux Grecs émigrés de Constantinople qu'on dut la connaissance et la propagation en Europe de ses autres ouvrages. La première édition complète des écrits d'Aristote fut publiée à Venise par Alde Manuce (1495-98, in-fol.); parmi les éditions postérieures, les plus estimées sont celles : de Sylburg, Francfort, 1585-86, toute grecque; de Guillaume Duval, Paris 1619 et 1654, in-fol., grec-latin; de Bekker et Brandis, grec-latin, avec un choix de commentaires, publiée au nom de l'Académie de Berlin, Berlin, 1830-1836, 4 vol. in-4, et celle de la Collection Didot, 1848-60. 

On a en outre donné une foule d'éditions spéciales des ouvrages détachés. La plupart ont été traduits en francais les principales de ces traductions sont : celle de l'Ethique et de la Politique, par Thurot, Paris, 1823, 2 vol. in-8°; da la Rhétorique, par Cassandre, Paris, 1675, par Ch. E. Gros, 1822, et par Bonafous, 1856; de la Poétique, par Dacier, Paris, 1692, par Le Batteux (dans les Quatre Poétiques), 1771, et par M. Egger, 1849; de l'Histoire des animaux, par Camus, 1783; du Traité du monde, par Le Batteux (dans son Traité des causes premières); de la Logique, par Ph. Canaye, sieur de Fresnes, 1589, in-fol.; de la Métaphysique, par Pierron et Zévort, 1841, 2 vol. in-8. M. Barth. St-Hilaire a entrepris une trad. complète d'Aristote, dont une grande partie a déjà paru (Politique, 1837 et 1848; Logique, 1839-44; Traité de l'âme, 1846; Opuscules, 1847; Morale, 1856; Poétique, 1858; Physique et Météorologie, 1863; Traité de la production et de la destruction, 1866, etc.).

Parmi les commentateurs d'Aristote, nous nommerons, chez les anciens, Ammonius, Alexandre d'Aphrodisie, Themisthius, Simplicius, Olympiodore, Jean Philopon, Boëce; au moyen âge, Alkindi, Averroës, Avicenne, Avempace, Albert le Grand, S. Thomas. La vie d'Aristote a été écrite chez les anciens par Diogène Laërce et par Ammonius. On a publié sur, pour et contre sa doctrine une foule d'écrits: Launoy a donné un essai De varia Aristotelis fortuna, 1672, A. Jourdain de savantes Recherches sur les trad. latines d'Aristote, 1819, et Ravaisson un Essai sur sa Métaphysique, 1837-46, M. Waddington Kastus De la Psychologie d'Aristote, 1848.

En librairie - Ouvrages d'Aristote : - La Métaphysique, Vrin, (2 vol. sous blister, annotés et commentés). - Ethique à Nicomaque, Pocket Editions, 2002. - Catégories (bilingue, prés. Frédérique Ildefonse et Jean Lallot), Le Seuil, 2002. - Rhétorique à Alexandre, Les Belles Lettres, 2002. - Histoire des animaux, Paléo, 2001, 2 volumes. - Biologie (Traité de l'âme et petits traités d'histoire naturelle), Paléo, 2001. - Physique, Flammarion, 2001. - Les Politiques, Flammarion, 1999. - Rhétorique, Gallimard, 1998. - Poétique, Gallimard, 1997. - Constitution d'Athènes, Constitution de Sparte, Gallimard, 1996. - Ethique à Eudème, Rivages, 1993. - De la génération et de la corruption, Vrin. - Traité du Ciel et Traité pseudo-aristotélicien du Monde, Vrin. - Les météorologiques, Vrin. Voir aussi les ouvrages publiés dans la série grecque par les Belles Lettres.

Parmi les études (ou rééditions) récentes sur Aristote et son oeuvre : - Pierre Destrée, Aristote, Bonheur et vertus, PUF, 2003. - B. Souchard, Aristote de la physique à la métaphysique, Presses universitaires de Dijon, 2003. - Pierre-Marie Morel, Aristote, Flammarion, 2003. - Peter Garnsey, Idées sur l'esclavage, d'Aristote à Saint-Augustin, Les Belles Lettres, 2003. - Xavier Zubiri, Cinq leçons de philosophie (Aristote, Kant, Comte, Bergson, Husserl), Rééd. L'Harmattan, 2003. - Collectif,La philosophie d'Aristote, PUF, 2003.- Pierre Aubenque, Le problème de l'être chez Aristote, rééd. PUF, 2002. -  Jérôme Lejeune, Jean Ladrière et Philippe Caspar, L'individuation des êtres (Aristote, Leibniz et l'immunologie contemporaine), Lethielleux, 2001. - A. Motte et al. Aporia dans la philosophie grecque des origines à Aristote, Vrin, 2001. - Etienne Gilson, D'Aristote à Darwin et retour (essai sur quelques constantes de la biophilosophie), Vrin, 2000. - Guy-François Delaporte, Lecture du commentaire de Thomas d'Aquin sur le Traité de l'âme d'Aristote, L'Harmattan, 1999.  - Annick Jaulin, Eidos et Ousia (de l'unité théorique de la métaphysique d'Aristote), Klincksieck, 1999.  - De la même, Aristote, la Métaphysique, PUF, 1999. - De la même, Aristote, Presses universitaires du Mirail, 1998.

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