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On donne le nom
de littérature byzantine à l'ensemble des ouvrages
composés en langue grecque,
depuis la translation du siège de l'Empire romain à Byzance ,
au commencement du IVe siècle, jusqu'à
la prise de cette ville par les Turcs
en 1453. Cette période d'environ 1100 années n'est qu'une
longue décadence, une agonie prolongée de la littérature
grecque, qui, durant les 15 siècles antérieurs, n'avait presque
jamais cessé de jeter de l'éclat. Le IVe
siècle ap. J.-C. est encore fécond en écrivains illustres,
dont les plus remarquables appartiennent au christianisme ;
mais, dès le Ve siècle, il
y a un affaiblissement général des esprits, quoique l'enseignement
philosophique soit encore brillant. La décadence est précipitée,
au VIe siècle, par la désastreuse
mesure de l'empereur Justinien contre les professeurs
pensionnés, et par la suppression, prononcée sous le même
règne, des écoles de rhétorique
et de philosophie
à Athènes, et bientôt
après dans les autres villes littéraires de l'Empire d'Orient.
L'enseignement de la jurisprudence, introduit
et inauguré dans cette partie du monde romain
par Constantin le Grand, s'affaiblit
en même temps que celui des arts libéraux; et le bon goût
disparut pour jamais des pays grecs, malgré les efforts isolés
de quelques grammairiens de Constantinople,
d'Athènes, d'Antioche,
d'Édesse, de Béryte
et d'Alexandrie, pour en conserver les
traditions. Les disputes déplorables des Iconoclastes et des Iconolâtres,
dans les siècles suivants, amenèrent la destruction d'un
grand nombre d'ouvrages artistiques et littéraires, et la décadence
alla toujours croissant. Cependant, au IXe,
et au Xe siècle, il y eut une sorte
de renaissance, que les empereurs Michel, Basile
Ier, Léon
VI, Constantin Porphyrogénète,
et le patriarche Photius, encouragèrent
de tout leur pouvoir; mais la vigueur et la fécondité des
esprits semblaient éteintes; et cette période ne produisit
guère que des chroniqueurs, des érudits, des scoliastes,
tous nourris de la substance des grands modèles de l'Antiquité
païenne, mais qui ne créèrent aucune oeuvre caractéristique
et capable de régénérer la littérature : on
lisait, on interprétait, on commentait, on compilait, on abrégeait;
on venait au secours de la faiblesse des esprits énervés,
mais il ne naissait point de modèles.
Les Commènes,
au XIIe siècle, les Paléologues,
au XIVe, se distinguèrent par la
variété et l'étendue de leur instruction; ils s'efforcèrent
de communiquer aux esprits quelque activité, et de réveiller
la torpeur générale; leur influence resta impuissante, et
n'obtint, même dans Constantinople,
que des résultats décourageants; l'occupation de cette ville
par les Turcs Ottomans en 1453 vint rendre
le déclin complet et irrémédiable. Le petit nombre
de savants qui purent échapper avec quelques textes de l'antique
civilisation littéraire, portèrent dans l'Occident ces précieux
débris, et leurs leçons produisirent des fruits plus abondants.
Depuis un siècle environ, le sol y était préparé
pour une véritable renaissance des arts, des sciences et des lettres
( La Renaissance );
dès la fin du XIVe siècle,
quelques Grecs avaient enseigné
les principes de leur langue et interprété
plusieurs auteurs classiques dans diverses villes d'Italie ;
des Italiens même, comme le Calabrais Barlaam, contemporain de Pétrarque,
avaient ardemment secondé ces efforts; et l'imprimerie ,
récemment inventée, allait être le plus puissant auxiliaire
de cette révolution intellectuelle.
Poésie,
romans; épîtres fictives.
Le déclin éclata surtout,
et d'abord, dans la poésie et dans
les oeuvres d'imagination; ses premiers symptômes remontaient déjà
à plusieurs siècles. Sur une quinzaine de versificateurs
que l'on compte pendant onze siècles, à peine deux ou trois
nous retracent-ils quelque ombre de l'ancienne élégance;
ce sont : Quintus de Smyrne, antérieur,
suivant quelques-uns, au IVe siècle;
Nonnus
de Panople, et Coluthus, très inférieurs
au premier. Parmi les autres, les moins médiocres sont : Grégoire
de Nazianze, Synésius, Proclus,
Tryphiodore, Paul Silentiaire,
Agathias, Georges
Pisidès; J. Tzetzès. Constantin Céphalas et Planude
ont compilé une Anthologie.
Parmi les récits d'aventures érotiques
ou romans, dont le goût commençait
depuis quelque temps à se répandre, quelques-uns offrent
plus d'intérêt, même au point de vue littéraire,
que les oeuvres purement poétiques. Les plus remarquables sont :
Daphnis
et Chloé ,
attribué à un certain Longus, dont on ne sait rien; Théagène
et Chariclée, peut-être le plus ancien texte complet du
genre romanesque, par Héliodore; Leucippe
et Clitophon, d'Achille Tatius, peut-être
antérieur au IVe siècle;
Abrocome
et Anthia, de Xénophon d'Éphèse.
Chariton,
auteur des Amours de Chéréas et de Callirhoé
: Eustathe ou Eumathe, auteur du roman intitulé
Drame
sur Isménias et Ismène; Nicétas Eugénien,
auteur des Amours de Drosille et de Chariclès (en héxam.);
Théodore Prodrome, auteur de Rhodante et Dosiclès
(en ïambes politiques), sont au-dessous du médiocre; les trois
derniers surtout ne méritent pas d'être lus.
Les épistolographes qui nous restent
de cette période ont quelques rapports avec les romanciers; car
leurs épîtres ne sont que des
fictions, et roulent presque toutes sur des sujets érotiques. Alciphron
et Aristénète sont les plus
distingués.
Eloquence, rhétorique,
sophistique, philosophie, scolastique.
L'éloquence religieuse brilla d'un
vif éclat au IVe siècle ap.
J.-C. Athanase, Grégoire
de Nazianze, Grégoire de Nysse,
Basile,
Jean
Chrysostome en sont les plus brillants représentants; et, pour
la langue et le style, Basile et Chrysostome retrouvent souvent la beauté
et le goût pur des anciens attiques; mais souvent aussi ils laissent
trop voir les traces des procédés de la rhétorique
: aucune de leurs plus belles oeuvres n'est exempte de cette tache. Au
reste, ils avaient été formés à l'école
des plus illustres rhéteurs et sophistes
de ce siècle; et ils ne l'emportent sur eux que par la vive chaleur
que communique la plupart du temps à leur parole et à leurs
écrits l'ardeur de leurs convictions morales et religieuses, et
par la grandeur et l'élévation des sentiments qu'inspirait
la doctrine évangélique. Comme écrivains proprement
dits, ils ne sont guère supérieurs à Thémistius
et à Libanius leurs maîtres, ni à Julien
leur condisciple. Ils avaient également suivi les leçons
d'Himérius, habile professeur, mais écrivain
médiocre, et de Proeresius, philosophe et rhéteur arménien,
dont la réputation fut universelle dans les deux Empires, et à
qui Grégoire de Nazianze a dédié une épigramme:
Au Ve siècle, l'éloquence
dégénère : l'évêque Syésius est
le seul orateur digne d'être mentionné : il se distinguait
surtout par la force et l'élévation des pensées et
des sentiments, et par une noble franchise de langage, bien rare à
cette époque.
L'enseignement da la rhétorique;
si brillant au siècle précédent, n'offre aucun nom
qui mérite d'être cité; les écoles de philosophie
attirent seules l'attention. Les évêques Némésius
et Synésius, qui tentèrent la conciliation de la philosophie
grecque avec les dogmes chrétiens, Syrien d'Alexandrie,
Proclus,
son disciple et son successeur, Marin,
Hiéroclès,
Énée
de Gaza, sont les noms les plus illustres de cette période,
où celui de Proclus brille entre tous.
Le VIe
siècle, marqué par la persécution de Justinien
contre la philosophie païenne, a produit Hésychius
de Milet, les deux Olympiodore (l'un platonicien,
l'autre péripatéticien),
Ammonius
(fils d'Hermias), Simplicius, son disciple,
et Damascius, le dernier philosophe
néoplatonicien.
Au VIIe, on remarque Jean
Philopon et Saint Maxime; au VIIIe,
Antoine Mélissa, moraliste, et surtout Jean
Damascène, surnommé
Chrysorhoas ( = qui coule
à flots d'or), le dernier Père de l'Église
grecque, un des grands esprits du Moyen âge
: il a fixé la dogmatique orientale, et doit être regardé
comme le véritable fondateur de la scolastique,
c.-à-d. de cette théologie qui s'emploie à démontrer
les dogmes chrétiens à l'aide de la dialectique d'Aristote.
Les siècles suivants deviennent de plus en plus pauvres : il suffit
de citer l'empereur Basile Ier
pour son manuel de préceptes sur l'art de gouverner (IXe
siècle), Michel Constantin Psellus (XIe
siècle), Georges Pachymère (XIIIe
siècle), et, au XVe, George et Bessarion
de Trébizonde, Gémiste Pléthon
de Constantinople.
Histoire, chroniques,
biographie, antiquités et statistique.
Les historiens, chroniqueurs, biographes
etc., sont très nombreux pendant toute la période byzantine;
mais l'art historique est en pleine décadence, et, chez presque
tous, le style est diffus. Plusieurs cependant sont loin de manquer de
talent; mais ils n'ont pas eu la force de s'affranchir du faux goût
dominant.
Les principaux historiens proprement dits
sont : Zosime (Ve siècle); Procope
(VIe s.), le meilleur de tous pour le style;
Jean Zonaras (XIe et XIIes.);
Nicétas Acominat (XIIIe s.); Nicéphore
Grégoras (XIVe s.), très
mauvais écrivain; Nicolas Chalcondyle
(XVe s.); ce dernier et Nichas ne sont
pas sans mérite. Citons parmi les chroniqueurs ou chronographes:
Jules Pollux (Ve siècle?), Jean
Malalas (VIe s.), Théophane
le Martyr et Nicéphore le Patriarche (VIIIe
s.), Georges le Syncelle (IXe
s.), Siméon Métaphraste (Xe
s.), Jean Skylitza, Léon Grammatic, Georges Le Moine, Georges
Cédrène (XIe s.); Jean
le Sicilien, Michel Glycas, Constantin Manassès
(XIIe s.), ce dernier, auteur d'un abrégé
en vers. La plupart de ces chronographes sont de piètres ecrivains.
Parmi les auteurs de biographies, on peut citer : Eunape,
l'un des plus intéressants (Ve siècle);
Agathias
(VIe s.); Ménandre le Protecteur,
Théophane de Byzance, Théophylacte
Simocatta, Georges Pisidès
(VIIe s.); Constantin
VI, Joseph Génésius, Léon
le Diacre (Xe); Nicéphore
Bryenne, Jean Cinname, l'impératrice
Anne
Comnène (XIIe s.), qui doit
être mise au premier rang des historiens byzantins;
Georges
Acropolite et Pachymère (XIIIe
s.); Jean Cantacuzène (XIVe
s.); Jean Ducas, Démétrios de Sidon,
Jean Anagnoste, Jean Caname, Georges Phrantzès, et Théodore
Gaza (XVe s.).
Procope, Silentiaire,
J. Laurence le Lydien, Hiéroclès Grammatic, Hésychius
de Milet, Matthieu, Constantin VI, George Codin, ont laissé des
recherches sur les antiquités des villes, des renseignements sur
les Constitutions impériales, qui, à défaut de mérite
littéraire, ont pour nous un grand intérêt historique.
Nous terminerons cette énumération en citant quelques-uns
des historiens de l'Église
les plus importants; ils sont généralement supérieurs,
comme écrivains, à la plupart des historiens mentionnés
précédemment; ce sont : Philostorge, au IVe
siècle; Socrate le Scolastique (c.-à-d. l'avocat), Sozomène,
Théodoret,
au Ve s.; Théodore Anagnoste et
Evagrius, au VIe.
Géographie.
La science géographique
ne fit pas, durant la période byzantine, de remarquables progrès;
on ne s'occupa même pas de chercher à rectifier certaines
erreurs qui avaient cours. Les deux ouvrages les plus importants sont ceux
d'Étienne de Byzance et de Cosmas
(VIe s.) : le premier avait fait un grand
Dictionnaire
géographique rempli de détails de toutes sortes, dont
nous n'avons plus qu'un abrégé fait peu de temps après
par le grammairien Hermolaüs. L'ouvrage de Cosmas est une réfutation
bizarre du système de Ptolémée;
mais les détails qu'il donne sur l'Inde ,
où il avait voyagé, sont souvent intéressants ( La
cosmographie médiévale ).
Au Ve siècle, Marcien d'Héraclée
dans le Pont
avait publié un Périple
de la mer extérieure. Les deux ouvrages de Nicéphore
Blemmydas (XIIIe siècle), intitulés
Histoire
synoptique de la Terre et Géographie synoptique, ne sont
que des abrégés d'anciens ouvrages grecs. On cite de plus
un Jean Phocas, un Épiphane, un Perdiccas, qui ont encore moins
d'importance.
Grammaire, scolies,
lexiques, traductions, extraits, compilations, recueils.
Les grammairiens, les scoliastes, les
lexicographes n'ont pas plus d'originalité que les autres écrivains;
ils manquent souvent de goût et de jugement, même dans les
emprunts qu'ils font aux anciens grammairiens. Mais ils sont très
précieux pour nous, car ils nous ont conservé de nombreux
fragments des critiques alexandrins; et leurs notes sont pleines de renseignements
historiques, de détails anecdotiques, et d'observations philologiques
parfois très fines. Aphthonius et Théon,
au IVe siècle, ont commenté
la Rhétorique d'Hermogène,
et ont accompagné leur commentaire de Progymnasmata, c.-à-d.
de modèles d'exercice. Parmi les scoliastes proprement dits, le
plus précieux est Eustathe, évêque de Thessalonique
(XIIe siècle), auteur d'un immense
commentaire sur Homère, écrit avec
une prolixité fatigante et hérissé de subtilités
de toutes sortes mais qui nous a éclairci une foule de passages
des poésies homériques, et nous a même facilité
l'intelligence de plusieurs passages d'autres écrivains. Il a fait
aussi des scolies sur Denys le Périégète.
On a des Éclaircissements sur Hésiode
et sur d'autres poètes, par J. Tzetzès, qui a aussi commenté,
de concert avec son frère Isaac, le poème de Lycophron.
Son Exégèse sur l'Iliade
est faible. Homère et Hésiode ont été commentés
au XIVe siècle par Emmanuel Moschopule.
Au XVe, Démétrius Triclinius
rassembla des scolies sur Hésiode, Sophocle,
Pindare
et Aristophane. Beaucoup de scolies anonymes
qui nous sont parvenues sont des compilations du Moyen âge
: par exemple, les scolies sur Thucydide, Euripide,
Théocrite,
Apollonius
de Rhodes ,
etc., les scolies découvertes à Venise
par Villoison, et qui ont jeté un nouveau jour sur les poésies
homériques.
Nous avons un extrait d'une Grammaire
de Théodose d'Alexandrie,
contemporain de Constantin le Grand;
cette Grammaire n'était autre chose que la rédaction
des leçons de ce grammairien sur Denys
le Thrace : elle fut classique pendant tout le Moyen âge; l'extrait
qui nous est parvenu est d'un certain Théodosiaste. Au siècle
suivant, on remarqua l'enseignement du grammairien Georges Chaeroboseus,
qui commenta lui-même Théodose d'Alexandrie. Pendant tout
le Moyen âge on composa toutes sortes d'ouvrages sur la prononciation
selon les accents, dont nous avons quelques lambeaux épars dans
les scoliastes, mais qui ne nous sont pas parvenus. A partir du XIVe
siècle, les pertes sont moins nombreuses : on a de Planude-:
Entretiens
sur la Grammaire et la Syntaxe;
Traité
sur les Verbes; Traité sur les atticismes;
d'Emmanuel Chrysoloras, des Questions grammaticales, qui servirent
de base aux leçons de Reuchlin et d'Erasme
en Occident; de Théodore Gaza, des Éléments
de Grammaire, en 4 livres; de Manuel Moschopule de Byzance, des Exercices
sur a Syntaxe des Noms et des Verbes,
sur la Prosodie et l'accentuation, sur l'orthographe, sur la Grammaire;
de Constantin Lascaris, des Questions grammaticales; de Démétrius
Chalcondyle, des Questions synoptiques sur les 8 parties
du discours; de Georges Lécapène, un Traité
sur la Syntaxe des Verbes. J. Philopon,
Thomas Magister, Michel le Syncelle et Grégoire de Corinthe
écrivirent sur les Dialectes; l'ouvrage du dernier, malgré
ses défauts et son insuffisance, est le plus utile : il a servi
de base aux travaux plus exacts des modernes.
La lexicographie byzantine est représentée
principalement par Valérius Harpocration
(Lexique des termes de Droit
employés par les orateurs attiques); Ammonius
(Lexique des synonymes); Théodose
(Glossaire pour la grammaire de Denys le Thrace); Photius
(Glossaire); Suidas (Lexique accompagné
de documents de toutes sortes et d'extraits); Philémon (Dictionnaire
technologique, XIIe s. ); l'auteur
ou les auteurs de l'Etymologicum magnum, ouvrage plein de renseignements
précieux pour nous; J. Zonaras, auteur d'un dictionnaire rempli
de remarques grammaticales et étymologiques; Eudoxie
Macrembolitissa, fille de l'empemur ConstantinVIIl
(XIe s.), qui a laissé un Dictionnaire
mythologique intitulé
Iwnia,
c'est-à-dire plate-bande de violettes.
Les abréviateurs et compilateurs
sont nombreux à Byzance pendant tout le Moyen âge ;
les plus importants sont : Photius, dont la
Bibliothèque
renferme les extraits de 280 auteurs lus par lui, extraits accompagnés
de jugements mêlés eux-mêmes de fragments cités
à l'appui; et Jean Xiphilin le jeune, dont on a un abrégé
de Dion Cassius, à l'aide duquel on a comblé
en partie les lacunes nombreuses de cet historien. Georges de Chypre
et Michel Apostole ont recueilli des Locutions proverbiales. De
tout temps la langue latine obtint peu de
faveur en Grèce ;
et lorsque Constantin eut fait de Byzance
le siège du pouvoir central, le latin fut obligé de céder
peu à peu au grec : aussi faut-il
noter comme un fait remarquable les traductions en grec des Métamorphoses
d'Ovide, des Commentaires sur la Guerre des
Gaules de César, des traités
de Cicéron sur la Vieillesse et
de l'Amitié. Ces traductions, qui sont de Théodore
Gaza, sont généralement assez fidèles, et elles
ont été utiles pour l'étude critique des textes latins
originaux. On remarqua également en Italie
une science approfondie du latin chez Marc Musurrus,
contemporain de Théodore Gaza, et qui enseigna avec succès
la littérature grecque.
Si l'on joint à tous ces noms de
littérateurs : 1° cinq auteurs de Traités sur la Tactique,
dont 4 sont empereurs (Maurice, Héron le jeune, Léon VI,
Constantin
VI, Nicéphore II, Phocas); 2° une trentaine de jurisconsultes,
dont les principaux sont Théophile, collaborateur de Tribonien,
les empereurs Basile Ier
et Léon VI, Sabathius Protospatharius, Constantin VI, Michel Psellos
le jeune et Hérménopule; 3° une vingtaine de médecins,
dont aucun n'a d'originalité comme savant ou comme écrivain
(les principaux sont Oribase et Némésius,
au IVe siècle, Aétius,
Alexandre
de Tralles, Palladius Iatrosophiste, au
VIe s; Théophile Protospathaire,
Paul
d'Égine, au VIIe s; Nonnus,
au Xe s.; Jean
Actuaire, au XIIIe, etc.); 4° quelques
naturalistes et alchimistes sans importance
(l'inventeur du feu grégeois est resté inconnu); 5° une
vingtaine de mathématiciens ,
parmi lesquels il faut citer Pappus, auteur d'une
précieuse Collection mathématique; Théon,
commentateur utile d'Euclide, d'Aratus
et de Ptolémée; Entoce d'Ascalon
(VIe s.), commentateur d'Archimède
et d'Apollonius de Perge; et peut-être
Diophante,
l'inventeur de l'analyse algébrique (il a pu vivre au VIe
siècle, mais ce n'est qu'une conjecture); on aura un tableau à
peu près complet de ce qu'a produit l'esprit humain dans le Moyen
âge grec. Sans doute, à la même époque, l'Occident
a produit un plus grand nombre d'esprits vigoureux et originaux; mais on
n'y a pas eu aussi constamment ce goût de la belle Antiquité;
et, sans les nombreux et incessants travaux d'érudition des Byzantins,
beaucoup plus de chefs-d'oeuvre auraient assurément péri;
si, depuis le VIe siècle, ils ont
peu enrichi le domaine des lettres, du moins ils l'ont conservé
autant qu'il a été en eux; et, aux XIVe
et XVe siècles, ils ont eu la gloire
de contribuer au mouvement de renaissance qui a fait revivre en Occident
l'antique civilisation intellectuelle. (Passerat). |
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