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Venise

La lagune de Venise
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L'histoire de Venise
Les institutions, les doges
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Les monuments de Venise

Canaux, ponts, rues et places

Le Grand Canal
Le Canal de Cannaregio
La Riva dei Schiavoni
La Place Saint-Marc
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Les monuments civils
Le Palais des Doges
Le Campanile
La Tour de l'Horloge
Les Procuratie
La bibliothèque Marciana
La Zecca (Monnaie)
L'Arsenal
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Les églises de Venise

Basilique Saint-Marc
Santa Maria de la Salute
San Giorgio Maggiore
San Zanipolo
Santa Maria dei Miracoli
San Zaccaria
Santa Maria dei Frari
San Polo
Santa Maria dell'Orto
San Francesco della Vigna
San Sebastiano
Santa Maria del Giglio
San Stefano
San Pietro di Castello
Chiesa dei Gesuati
Chiesa del Redentore
San Giacomo di Rialto
Santa Maria e San Donato (Murano)
Santa Maria Assunta (Torcello)
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Venise (lat. Venetia, ital. Venezia) est une ville maritime de l'Italie septentrionale (Vénétie), à 400 kilomètres de Rome, au milieu de lagunes de son nom, sur les bords de l'Adriatique, sur trois îles élevées au milieu de lagunes et reliées à la terre ferme par un pont de chemin de fer (3603 m), doublé par une route (pont de la Liberté); 270 800 habitants (2010). 

De ces trois îles, divisées elles-mêmes par des canaux en 117 îlots, la Giudecca, au Sud, est assez isolée; les deux autres, au centre, constituent la Venise proprement dite. La ville est sillonnée de canaux, qui y remplacent les rues. D'abord, le canal de la Giudecca, large de 400 mètres; puis le Grand Canal, en forme de S, long de 3700 mètres, large de 45 à 72; puis 177 autres canaux, franchis par 430 ponts reliant 118 îles et îlots; le tout parcouru par des canots à moteur, des petits bateaux pour le transport collectif (appelés vaporetti, parce qu'ils étaient autrefois à vapeur) et par les célèbres gondoles, aujourd'hui dévolues aux touristes (Canaux, ponts, rues et places de Venise). L'aspect est attirant au plus haut point et explique qu'un grand nombre de visiteurs passent dans la ville et aussi qu'une quantité assez considérable d'étrangers s'y fixent.
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Plan de Venise.
Plan de Venise en 1900 (cliquez sur l'image pour l'agrandir).

Le climat, du reste, malgré les préjugés contraires, est excellent. Si l'air y est souvent humide, il est, par contre, absolument pur des poussières qui chargent celui des villes continentales. De plus, le voisinage immédiat de la mer adoucit les écarts atmosphériques et tempère les transitions. La moyenne annuelle de température est de +13 °C, celle du mois le plus chaud est de + 23,9 °C, celle du mois le plus froid est de + 1,8 °C ; l'écart annuel n'est donc que de 22,10 °C. 
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Venise : San Giorgio Maggiore.
Gondoles sur le quai de la Piazzetta. Au fond, l'île de San Giorgio Maggiore, avec sa basilique.
Photo : © Thierry Labat, 2010.

Le port, après avoir été le plus important du monde, était complètement déchu pendant la période autrichienne; après que Venise ait été rendue à I'Italie, il a repris de l'importance, se hissant au niveau de ceux de Gênes et de Trieste. La construction dans les années 1920 d'un deuxième port a encore accru l'activité portuaire de la ville. Outre le tourisme, première activité économique de la ville, il y existe toujours des industries traditionnelles telles que la verrerie. Le trafic portuaire a par ailleurs favorisé sur le continent (à Mestre et Port Marghera) l'implantation de nombreuses usines (produits chimiques, raffineries de pétrole, électrométalurgie, etc.)


Vue de Venise depuis le Campanile. En haut, l'église des Frari; en bas à gauche,
le palais Contarini del Bovolo, avec son escalier en colimaçon.

Les monuments de Venise.
Mais Venise attire surtout le voyageur par sa beauté. Après le gigantesque pont de 3603 mètres avec 222 arches sur lequel passe le chemin de fer, le touriste va d'abord
au centre de la ville, à l'admirable place Saint Marc, entourée de constructions à arcades, les Procuratie Vecchie et Nuove, la basilique de Saint-Marc. On y admire le Campanile dominant le bijou de sculpture qu'on appelait la Loggetta. Ce campanile, haut de 98 m, qui datait des XIIIe et XIVe siècles, s'est écroulé en 1902 et a été reconstruit ensuite à l'identique. La place, dallée de pierres unies et polies qui n'ont jamais été frappées par le pied des chevaux, est animée par le vol d'innombrables pigeons. En retour d'équerre, la Piazzetta, bornée par le palais ducal. Deux colonnes de granit supportent l'une le lion ailé de saint Marc, l'autre un Saint Théodore terrassant un dragon. Le Grand Canal, bordé de plus de cent cinquante palais du style byzantin du XVe siècle, enjambé par le magnifique pont du Rialto, attire aussi les visiteurs.
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Venise : le Grand Canal.
Partie supérieure de la façade Nord de la basilique Saint-Marc.

Les monuments sont dignes de leur renom. Des quatre-vingt-dix églises de Venise, la basilique byzantine de San Marco (Saint-Marc) est la plus intéressante. Parmi les autres églises, citons San Zanipolo (Santi Giovanni e Paolo), panthéon où sont ensevelis la plupart des grands hommes dont s'enorgueillit Venise; Santa Maria della Salute, somptueuse, du XVIIe siècle; Santa Maria dei Miracoli, écrin de marbre, San Salvatore, véritable musée, etc. Parmi les édifices civils, le palais des Doges (palais ducal), reconstruit au XVe siècle, restauré après deux incendies, en 1483 et 1574, est une merveille un peu étonnante au premier abord. Le musée et la bibliothèque de Saint-Marc, riche de plus de 200 000 volumes et de 10 000 manuscrits précieux, s'y trouvent. Le palais communique avec les célèbres prisons, autrefois appelées les Plombs et les Puits, par le pont des Soupirs. L'opéra de la Fenice, construit au XVIIIe siècle, initialement appelé Teatro San Benedetto, doit son nom actuel à ce que, comme l'oiseau mythologique  (le Phénix), il a survécu à plusieurs incendies. Le dernier en janvier 1996 a obligé a le reconstruire entièrement; sa réouverture n'a eu lieu qu'en novembre 2003. 
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Venise, vue par H. Taine

« C'est la perle de l'Italie; je n'ai rien vu d'égal; je ne sais qu'une ville qui en approche, de bien loin, et seulement pour les architectures : c'est Oxford. Dans toute la presqu'île, rien ne peut lui être comparé. Quand on se rappelle les sales rues de Rome et de Naples, quand on pense aux rues sèches, étroites de Florence et de Sienne, quand ensuite on regarde ces palais de marbre, ces ponts de marbre, ces églises de marbre, cette superbe broderie de colonnes, de balcons, de fenêtres, de corniches gothiques, mauresques, byzantines, et l'universelle présence de l'eau mouvante et luisante, on se demande pourquoi on a perdu deux mois dans les autres villes, pourquoi on n'a pas employé tout son temps à Venise. On fait le projet de s'y établir, on se jure qu'on y reviendra; pour la première fois, on admire non pas seulement avec l'esprit, mais avec le coeur, les sens, toute la personne. On se sent prêt à être heureux; on se dit que la vie est belle et bonne. On n'a qu'à ouvrir les yeux, on n'a pas besoin de se remuer; la gondole avance d'un mouvement insensible; on est couché, on se laisse aller tout entier, esprit et corps. Un air moite et doux arrive aux joues. On voit onduler sur la large nappe du canal les formes rosées ou blanchâtres des palais endormis dans la fraîcheur ou le silence de l'aube; on oublie tout, son métier, ses projets, soi-même; on regarde, on cueille, on savoure, comme si tout d'un coup, affranchi de la vie, aérien, on planait au-dessus des choses, dans la lumière et dans l'azur.

Le Grand-Canal développe sa courbe entre deux rangées de palais qui, bâtis chacun à part et pour lui-même, ont sans le vouloir assemblé leurs diversités pur l'embellir. La plupart sont du moyen âge avec des fenêtres ogivales couronnées de trèfles, avec des balcons treillissés de fleurons et de rosaces, et la riche fantaisie gothique s'épanouit dans leur dentelle de marbres sans jamais tomber dans la tristesse ni dans la laideur : d'autres, de la Renaissance, étagent leurs trois rangs superposés de colonnes antiques. Le porphyre et la serpentine incrustent au-dessus des portes leur pierre précieuse et polie. Plusieurs façades sont roses on bariolées de teintes douces, et leurs arabesques ressemblent aux lacis que la vague dessine sur un sable fin. Le temps a mis sa livrée grisâtre et fondue sur toutes ces vieilles formes, et la lumière du matin rit délicieusement dans la grande eau qui s'étale. 

Le canal tourne, et l'on voit s'élever de l'eau, comme une riche végétation marine, comme un splendide et étrange corail blanchâtre, Santa Maria della Salute avec ses dômes, ses entassements de sculptures, sou fronton chargé de statues; plus loin, sur une autre île, San Giorgio Maggiore, tout arrondi et hérissé comme une pompeuse coquille de nacre. On reporte les yeux vers la gauche, et voici Saint-Marc, le campanile, la place, le palais ducal. Il est probable qu'il n'y a pas de joyau égal au monde. Cela ne peut pas se décrire; il faut voir des estampes, et encore qu'est-ce que des estampes sans couleur? Il y a trop de formes, une trop vaste accumulation de chefs-d'oeuvre, une trop grande prodigalité d'invention : on ne peut que démêler quelque pensée générale bien sèche, comme un bâton qu'on rapporterait pour donner l'idée d'un arbre épanoui. Ce qui domine, c'est la fantaisie riche et multiple, le mélange qui fait ensemble, la diversité et le contraste qui aboutissent à l'harmonie. Qu'on imagine finit ou dix écrins suspendus au col, aux bras d'une femme, et qui sont mis d'accord par leur magnificence ou par sa beauté.

L'admirable place, bordée de portiques et de palais, allonge en carré sa forêt de colonnes, ses chapiteaux corinthiens, ses statues, l'ordonnance noble et variée de ses formes classiques. A son extrémité, demi-gothique et demi-byzantine, s'élève la basilique sous ses dômes bulbeux et ses clochetons aigus, avec ses arcades festonnées de figurines, ses porches couturés de colonnettes, ses voûtes lambrissées de mosaïques, ses pavés incrustés de marbres colorés, ses coupoles scintillantes d'or : étrange et mystérieux sanctuaire, sorte de mosquée chrétienne, où des chutes de lumière vacillent dans l'ombre rougeâtre, comme les ailes d'un génie dans son souterrain de pourpre et de métal. Tout cela fourmille et poudroie. A vingt pas, nu et droit comme un mât de navire, le gigantesque campanile porte dans le ciel et annonce de loin aux voyageurs de la mer la vieille royauté de Venise. Sous ses pieds, collée contre lui, la délicate loggetta de Sansovino semble une fleur, tant les statues, les bas-reliefs, les bronzes, les marbres, tout le luxe et l'invention de l'art élégant et vivant, se pressent pour la revêtir. 

Çà et là vingt débris illustres font en plein air un musée et un mémorial : des colonnes quadrangulaires apportées de Saint-Jean-d'Acre, un quadrige de chevaux de bronze enlevé de Constantinople, des piliers de bronze où l'on attachait les étendards de la cité, deux fûts de granit qui portent à leur cime le crocodile et le lion ailé de la république; devant eux un large quai de marbre et des escaliers où s'amarre la flotille noire des gondoles. On reporte les yeux vers la mer et on ne veut plus regarder autre chose; on l'a vue dans les tableaux de Canaletti, mais on ne l'a vue qu'à travers un voile. La lumière peinte n'est point la lumière réelle. Autour des architectures, l'eau, élargie comme un lac, fait serpenter son cadre magique, ses tons verdâtres ou bleuis, son cristal mouvant et glauque. Les mille petits flots jouent et luisent sous la brise, et leurs crêtes pétillent d'étincelles. A l'horizon, vers l'Est, on aperçoit au bout du quai des Esclavons, des mâts de navires, des sommets d'églises, la verdure pointante d'un grand jardin. Tout cela sort des eaux, de toutes parts on voit le flot entrer par les canaux, vaciller le long des quais, s'enfoncer à l'horizon, ruisseler entre les maisons, border les églises. La mer lustrée, lumineuse, enveloppante, pénètre et ceint Venise comme une gloire. »
 

(H. Taine, Voyage en Italie, 1865I).
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Venise : le Grand canal de nuit.
Le Grand canal, à la tombée de la nuit.

Plans de Venise.

Plan de Venise (1764).
1764
Plan de Venise (1886).
1886
Plan de Venise (1900).
1900
Cliquer sur les miniatures ci-dessus pour afficher les cartes.

L'Histoire de Venise.
Venise tire son nom de celui d'une tribu de la Gaule cisalpine, les Vénètes, qui occupait les îles voisines de celle où est bâtie la ville actuelle. Les habitants de ces îles furent en fait indépendants dès la chute de l'empire d'Occident et se donnèrent une première constitution, dès 455. Au VIIIe siècle, le jeune Etat acquit la possession du littoral jusqu'à l'Adige. Dès le Xe siècle, Venise prenait pied sur la côte dalmate, développait ses relations politiques et commerciales avec l'Orient et, en 1117, obtenait droit de souveraineté sur Tyr et Ascalon, en récompense du secours amené aux croisés par le doge Micheli. Au XIIe siècle, après des guerres contre Padoue, Pise et Ravenne, elle entre dans la lutte des ligues véronaise et lombarde contre Frédéric Barberousse, qui se rencontre dans ses murs avec le pape (1177). En 1201, elle se charge du transport des croisés, prend Zara (1202), et son armée, commandée par Dandolo, prend Constantinople (1203). 
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Vue de Venise en 1493.
Venise en 1493 (gravure de Hartmann Schedel).

Dans le partage des dépouilles, Venise obtint plus du quart de l'Empire grec et, notamment  la Crète et la Morée (Péloponnèse). Ayant ainsi développé leur puissance, les Vénitiens commencèrent au siècle suivant à s'étendre sur le territoire italien. En 1336, leur alliance avec Florence contre les della Scala leur valut Trévise et Castelfranco. Deux guerres contre Gênes (1350-1354 et 1378-1381 ou guerre de Chioggia); le procès de Marino Faliero (1355); d'autres luttes contre les Carrare, auxquels elle enleva Vérone et Padoue (1405-1406), les Visconti (1426), les Sforza (14361450); le procès de Carmagnola (1432) marquèrent l'histoire agitée de la république au début du XVe siècle. En 1453, Venise, qui vient, la première des Etats chrétiens, de traiter avec les Turcs, est à l'apogée de sa grandeur. Son territoire, peuplé d'environ 3 600 000 habitants, se composait alors de trois parties distinctes :

1° le Duché (Dogado), qui embrassait la ville de Venise et ses dépendances immédiates dans les lagunes (Chioggia, Malamocco, Burano, Murano, Grado, etc.); 

2° les Etats de terre ferme, comprenant, avec le Frioul, les territoires de Trévise, Padoue, Sienne, Vérone, Brescia, Bergame, Ravenne, etc.; 

3° les Etats maritimes, qui embrassaient l'Istrie, la Dalmatie, partie de l'Albanie (Durazzo, Scutari, etc.), partie de la Morée (Patras, Argos, Napoli de Romania, etc.), partie de la Macédoine avec Thessalonique, Candie (Crète), Nègrepont, d'autres îles de la Mer Egée.

Le développement du luxe et des arts répond à cette prospérité. Les Bellini commencent l'école vénitienne et Alde Manuce établit ses presses à Venise en 1480 (L'invention de l'imprimerie). La découverte de l'Amérique, Ies difficultés intérieures (procès des Foscari, 1456-1457, la lutte contre l'expansion ottomane (guerre de Morée, 1454-1456), la guerre du Frioul (1499-1503) marquent le commencement de la décadence. Venise, entrée dans la ligue contre Charles VIII (1495), voit ses troupes battues par Louis XII à Agnadel (1509) et par Gaston de Foix à Brescia (1511). Après la paix de 1513, Venise, absorbée par la lutte contre les Turcs, amis de la maison d'Autriche, se détourne des affaires italiennes. Elle perd une partie de ses possessions d'Orient en 1540 et profite du répit que lui procure Lépante (1571) pour avoir avec Paul V la fameuse querelle où se signala Fra Paolo Sarpi (1606-1607). En 1626, elle s'unit avec la France pour la guerre de la Valteline et ne s'occupe plus, dès lors, que de sauver les débris de son empire maritime.

Venise perd la Crète en 1669, et, si les victoires de Morosini lui reconquièrent la Morée à la paix de Carlowitz (1699), elle la perd définitivement à Passarowitz (1718). Elle n'est plus, dès lors, qu'une cité de luxe et de plaisir. Sa conduite hésitante sous la Révolution amena sa chute et sa cession à l'Autriche au traité de Campo-Formio. Chef-lieu d'un département du royaume d'Italie en 1805, Venise redevint autrichienne en 1815. Elle s'insurgea le 20 mars 1848 et fit capituler le gouverneur autrichien Zichy le 22, et, après Novare, décida de continuer la lutte, bien que réduite à ses seules forces. Après une défense héroïque, dirigée par Manin, elle succomba le 22 août 1849. La guerre de 1866 la rendit à l'Italie. Cédée à Napoléon III par l'empereur d'Autriche le 5 juillet 1866, elle fut rétrocédée par le premier à l'Italie dès le 29. Le 4 novembre, Victor-Emmanuel promulguait le décret portant réunion de la Vénétie et de Mantoue au royaume d'Italie. (NLI).
 
La Fête de l'Ascension et des Epousailles de la mer

Cette fête, instituée en 997 à l'occasion de la victoire remportée par le doge Pietro Orseolo II contre les pirates Narentais, était parmi les fêtes disparues de Venise la plus importante. Au début la cérémonie consistait dans la visite que le doge faisait au Lido avec la Seigneurie, et dans la bénédiction de la mer, donnée par l'évêque de Castello; mais à la suite de la paix conclue à Venise en 1177, entre Alexandre III et Frédéric Barberousse, le pape voulant témoigner sa propre reconnaissance à la République pour les bons services qu'il en avait reçus, il accorda beaucoup de privilèges et d'indulgences et offrit au doge plusieurs dons, parmi lesquels l'anneau, avec lequel chaque année ce dernier devrait épouser la mer en signe de la suprématie de Venise sur l'Adriatique et de la soumission de la mer à la République.
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Guardi : départ du Bucentaure.
Le départ du Bucentaure pour le Lido le jour de l'Ascension,
par Francesco Guardi.

A partir de cette époque la fête prit une solennité spéciale; l'on construisit alors le grand et somptueux navire appelé Bucintoro (Bucentaure), tout recouvert de velours et de dorures, sur lequel le matin de l'Ascension, au milieu de l'exultation du peuple, le doge prenait place entouré de la Seigneurerie, des Gouverneurs de l'Arsenal, des Magistrats, des Notabilités et des dignitaires de la République. Le Bucintoro, ayant à sa proue la statue de la justice, partait de la Piazzetta de Saint Marc, poussé par 42 avirons, mûs par 168 rameurs choisis entre les plus vaillants ouvriers privilégiés de l'Arsenal et se dirigeait majestueusement vers le Lido, entouré de nombreuses embarcations, qui arboraient des garnitures d'une magnificence indescriptible. A peine avait-on dépassé l'embouchure du port versait qu'on du haut du superbe navire un grand vase d'eau bénite dans l'Adriatique; le doge y jetait la bague en proférant la formule sacramentelle: 

Desponsamus te, mare, in signorum perpetuique veri dominii.
« Nous t'épousons, ô mer, en signe de domination absolue. »
Cette cérémonie était suivie d'une fonction religieuse dans l'église de Saint Nicolas de Lido, ensuite le doge et son imposant cortège des nobles et du peuple, retournait au palais Ducal, où l'on servait un banquet somptueux.

A la même occasion, on tenait sur la place Saint Marc la fameuse grande Foire de l'Ascension, où, dans des boutiques et des comptoirs improvisés, on exposait les plus belles et précieuses marchandises venant de l'Orient. La foire dura d'abord 8 jours, puis elle fut prolongée jusqu'à 15; pendant cette période les amusements les plus variés se succédaient, tels qu'illuminations, jeux de force et d'acrobatie, des bals et tous les autres divertissements publics de l'époque, y compris aussi le fameux Vol, consistant en l'apparition d'un jeune garçon, qui, assuré à une corde, descendait du clocher pour apporter un bouquet de fleurs en hommage au doge; du portique du palais des Doges, celui-ci assistait aux différentes fêtes.

Après la chute de la République, la fête traditionnelle n'eut plus lieu et l'on dit que Napoléon brûla le célèbre Bucintoro pour en récupérer l'or, mais les restes de ce navire sont conservés au musée Correr; un modèle très fidèle en est conservé à l'Arsenal. (A. S.).

Venise : canal de Noale.
Le rio di Noale (quartier de Cannaregio). Au fond, la Scuola Nuova della Misericordia.
 © Photos : Serge Jodra, 2012.


Amable de Fournoux, La Venise des Doges : Mille ans d'Histoire, Pygmalion, 2009. 
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Riccardo Calimani (préf. Elie Wiesel), Histoire du ghetto de Venise, Tallandier, réed. 2008.
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Dictionnaire Villes et monuments
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