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Les Goths
Ostrogoths, Wisigoths
Aperçu Les Ostrogoths Les Wisigoths L'Espagne wisigothique*
Les Goths étaient une population germanique, l'une des plus puissantes et celle qui a joué le rôle le plus considérable dans l'invasion des Barbares. On les pense originaire des bords de la Baltique et du Sud de la Suède de actuelle. On peut ainsi admettre  l'identité de ce peuple avec les Gotones, signalés par Tacite au Nord-Est de la Germanie, près des Ligiens et sur les bords de la mer Baltique, descendus au temps de Ptolémée le long de la Vistule, et il est possible aussi que ces Goths soient les mêmes que les Guttons de la presqu'île scandinave. 

Quoi qu'il en soit, leur histoire ne commence à être véritablement connue qu'à partir du  IIIe siècle ap. J.-C., époque à laquelle ils s'étaient établis au Nord de la mer Noire. Les Goths avaient à cette époque fondé un empire qui s'étendit, au IVe siècle, de la Theiss au Don, embrassant une série d'autres peuples germaniques qui recouvrèrent ou acquirent plus tard une existence indépendante, Hérules, Rugiens, Scires, Turcilinges, Vandales, Gépides; les Peucines, dont le nom disparaît ensuite; les Carpes et les Boranes, qui n'étaient pas des Germains, etc.

Les Goths entrèrent en lutte avec l'Empire romain. Caracalla les combattit. En 251, ils dévastèrent la Mésie et la Thrace, vainquirent et tuèrent l'empereur Decius (Dèce). Durant tout le IIIe siècle, leurs expéditions au Sud du Danube se succédèrent pendant trente années (238-269). Les plus célèbres sont celles de 258-259 et de 269, entreprises à la fois par terre et par mer. Dans la première, les Goths franchirent la mer Noire, le Bosphore, l'Hellespont (Dardanelles), promenèrent leurs barques dans la Méditerranée orientale, pillant les côtes d'Asie Mineure, brillant le temple d'Ephèse, saccageant Athènes.

En 269, les Goths équipèrent, dit-on, 2000 bateaux et 320.000 hommes; partis des bouches du Dniestr, ils pillèrent la Crète, Rhodes, revinrent par Thessalonique; l'empereur Claude les écrasa à Naïssus. En 270, Aurélien conclut une paix durable par l'évacuation de la Dacie et l'abandon de la rive gauche du Danube. Les rapports furent dès lors à peu près pacifiques et les Goths subirent l'ascendant de la civilisation romaine. Ils se convertirent même au christianisme, adoptèrent l'hérésie arienne. L'évêque Ulfilas ou Vulfila traduisit la Bible en langue gothique, et cette traduction est le premier document écrit dans une langue germanique (Le Manuscrit d'Argent).

A cette époque, les Goths se divisèrent en deux grands groupes, les Wisigoths ou Goths de l'Ouest, les Ostrogoths ou Goths de l'Est. Ces noms sont ignorés d'Ammien Marcellin et de Zosime, historiens du grand empire gothique; toutefois, ils parlent de Greutungi (Greutunges) et Thervingi (Thervinges) qu'on assimile généralement aux Ostrogoths et Wisigoths. 

Les Ostrogoths étaient établis dans les steppes sablonneuses de l'Est; les Wisigoths habitaient les régions boisées des pentes des Carpates. Le nom d'Ostrogoths fut usité de bonne heure; celui de Wisigoths ne devint usuel qu'après leur installation en Gaule, mais le fait fondamental de la division en groupe oriental et occidental est ancien. Les rois des Ostrogoths appartenaient à la dynastie des Amales, ceux des Wisigoths à celle des Baltes (Balts, Blathes ou Baltis). 

La première dynastie paraît au milieu du IIIe siècle, sous le règne de Gordien. Son premier roi, que les écrivains romains nomment Ostrogotha, eut pour successeur Kniva, vainqueur de Decius. En 321, il est question du roi Rausimuth qui combat Constantin (321) ; celui-ci poursuivit les Goths au Nord du Danube et imposa la paix à leur roi Ariarich en 336. Le successeur de celui-ci, Geberich, vainquit les Vandales et les chassa de la Dacie (340). Son successeur, Ermanarich ou Hermanni (350-376), fut le plus puissant et le dernier des souverains de cet empire gothique. Il commandait à plusieurs peuples vassaux, de langues slaves ou finnoise (Venedes, Sclaveni, Antes), aux Hérules, etc. 

Les Wisigoths étaient subordonnés, mais unis seulement par un lien assez lâche aux Ostrogoths, sujets directs d'Ermanarich. L'empire gothique du IVe siècle était donc en principe celui des Ostrogoths. Lorsqu'il s'écroula devant les Huns, la scission devint complète. Tandis que jusqu'alors les deux fractions du peuple goth avaient vécu côte à côte, elles se séparèrent. Les Ostrogoths se soumirent aux Huns et restèrent au Nord du Danube; les Wisigoths passèrent le fleuve et entrèrent dans l'Empire romain pour n'en plus sortir (376). A partir de ce moment, il faut suivre séparément les destinées des Ostrogoths et des Wisigoths.

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L'Europe vers l'an 500.
L'Europe vers l'an 500.

Les Ostrogoths

La famille royale des Amales les gouvernait. Le grand roi Hermanarich, qui vit la ruine de l'empire gothique, était un Amale. Lorsqu'il eut succombé à l'invasion des Huns (375) et se fut suicidé, sort successeur Withimer ayant été vaincu et tué, les Ostrogoths se soumirent aux Huns, tandis que les Wisigoths se réfugiaient dans l'Empire romain. Les premiers demeurèrent au Nord du Danube et prirent part aux grandes expéditions d'Attila, notamment à celle de Gaule, où ils furent battus avec lui dans les Champs catalauniques (451). Après la mort d'Attila, ils s'insurgèrent sous la conduite de trois frères de la famille des Amales, Valamir, Théodemir, Widemir, et eurent un rôle décisif dans la grande bataille de la Netad qui anéantit l'empire hunnique. Les Ostrogoths s'établirent alors en Pannonie, le long du Danube, de Vienne à Sirmium. De là, Théodoric (454-526), fils de Théodemir, allait les conduire en Illyrie, puis en Italie (490).

Théodoric, détenu comme otage à Constantinople, avait été élevé à la cour de l'empereur Léon Ier, qui, charmé de sa grâce, l'avait traité presque comme un de ses enfants. Devenu tout Romain de goût et d'esprit, il était resté Barbare de caractère, d'où, pendant les règnes de Zénon et de Basiliscos, une suite de brouilles et de réconciliations, de violences contre l'Empire et de sévices comme l'expulsion des Bulgares. 

Les honneurs qu'il avait reçus ne pouvaient contenter ni son ambition ni les besoins de son peuple. Excité par Frédéric, héritier royal des Ruges, il contraignit l'empereur à lui permettre de supplanter Odoacre et de s'établir dans la Péninsule. Malgré une énergique résistance et après avoir tenu trois ans dans Ravenne assiégée, Odoacre dut se résigner à traiter. Fidèle aux procédés barbares, Théodoric l'assassina dans un banquet, et c'est ainsi qu'il devint maître de l'Italie (493).

Il revêtit aussitôt le costume romain et se fit proclamer par les Goths roi des Ostrogoths et des Romains. D'abord impitoyable à l'égard des partisans d'Odoacre, il distribua des terres à son peuple, puis il se mit à gouverner comme un excellent césar. Il maintint l'ancienne hiérarchie et confia le plus souvent les emplois civils à des Romains, les commandements militaires, ainsi que le gouvernement des provinces, à des Goths; il fut économe et rendit une exacte justice. Quoique arien, il laissa en repos les catholiques.

Avec la paix, l'agriculture refleurit enfin. Des manufactures impériales se rouvrirent. Il affecta de protéger les lettres et les arts, fit bâtir à Rome son palais, restaura divers monuments et entreprit de dessécher les marais Pontins. Il n'utilisa pas le talent du rhéteur Cassiodore seulement pour orner sa correspondance; il le prit pour ministre et pour conseiller. Il sut aussi apprécier le sage Boèce, le délicat auteur de la. Consolation philosophique.

Déférent dans la forme, Théodoric garda son indépendance vis-à-vis de l'empereur, dont il avait obtenu la restitution des insignes impériaux. A défaut de sympathie, il imposa le respect à la cour de Constantinople et contraignit Anastase, successeur de Zénon, à le reconnaître. 

Dans ses rapports avec les rois barbares, Théodoric n'employa les armes que là ou la ruse et la diplomatie avaient échoué. Il chassa les Bulgares de la partie de la Pannonie qui lui appartenait; il s'efforça de contenir la puissance des Francs et secourut les Wisigoths contre Clovis, dont il épousa néanmoins une soeur; car il eut l'habileté de fortifier son prestige par des alliances de famille, choisies avec soin. Il obtint par la douceur la cessation des incursions vandales en Sicile, et il exerça, tant qu'il le put, une influence pacificatrice. Il réussit ainsi à protéger l'Italie et à reconstituer une grande partie de l'Empire d'Occident.

Des troubles religieux signalèrent la fin de son règne, lorsque, les ariens ayant été persécutés par les empereurs, il usa de représailles contre les catholiques; il dépêcha à Constantinople le pape Jean ler qui, n'ayant rien obtenu, fut, à son retour, jeté dans une prison où, durement traité, il succomba (526). Il avait, dit-on, préparé un édit prescrivant la fermeture de toutes les églises catholiques d'Italie, quand il mourut à Ravenne, la même année que le pape Jean. Il était devenu, en vieillissant, inquiet, soupçonneux, voyant partout des complots, et il avait été jusqu'à faire périr, entre autres, Boèce et Symmaque.
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Edit de Théodoric.
Page de l'Edit de Théodoric.
(Lois applicables aux Romains et aux Goths en l'an 512).

La fille de Théodoric, Amalasonte (Amalaswinth), lui succéda elle tenta de rétablir la paix publique, mais fut chassée quatre ans plus tard par une révolution de palais, et Justinien profita de cette circonstance pour remettre la main sur l'Italie. Le royaume ostrogothique, tombé en décadence, succomba sous les coups de Bélisaire et de Narsès (534-553). Les Ostrogoths passèrent alors en Norique, mais ils n'existèrent plus comme nation. 

L'oeuvre des Barbares avait donc finalement échoué. C'est sans doute qu'elle était toute personnelle à des rois fort au-dessus de leurs sujets. Les Romains acceptaient par force, sans s'y résigner au fond, leur domination; l'Église, très puissante, s'accommodait mal d'un pouvoir hérétique; enfin, l'empereur d'Orient ne pouvait considérer ni comme un délégué un prince dont l'action lui échappait, ni comme un collègue un Barbare et un Arien.

Les Wisigoths

Après la défaite des Ostrogoths par les Huns, les Wisigoths, conduits par des chefs de la famille royale des Baltes, franchirent le Danube et se réfugièrent dans l'Empire romain, ou l'empereur Valens accepta leurs services et leur assigna des cantonnements (376). Les vexations des fonctionnaires romains provoquèrent une révolte des Wisigoths; l'empereur fut vaincu et tué par eux, et ils ravagèrent la péninsule balkanique jusqu'à ce qu'en 382Théodose conclut avec eux un nouveau traité. Répartis dans les provinces balkaniques, ils furent, les uns, dotés de terres, les autres nourris par les magasins impériaux, en échange des contingents militaires qu'ils fournissaient. Après la mort de Théodose, ils s'unirent sous leur roi Alaric, qui, réclamant une province pour son peuple, dévasta la Macédoine, la Grèce, l'Illyrie, et passa en Italie où il prit Rome (410). Son successeur Ataulf emmena les Wisigoths en Gaule et en Espagne et prépara l'entente avec les Romains réalisée par son frère Wallia (415-419) qui obtint par traité l'Aquitania secunda (Aquitaine IIe) avec Toulouse, où il fixa sa capitale. Ce royaume vassal de l'Empire fut le premier des royaumes germaniques organisés dans l'Empire romain et bénéficiant de la civilisation romaine. Théodoric Ier (419-451), neveu et successeur de WaIlia, observa le pacte et eut grande part à la défaite infligée aux Huns d'Attila. Ses fils, Théodoric II et Euric, conquirent l'Espagne et étendirent leur domination jusqu'à la Loire. A partir de ce moment, l'histoire du royaume des Wisigoths se confond avec celle de l'Espagne. II y furent d'ailleurs refoulés par les Francs, après la défaite d'Alaric II, par Clovis en 507. Leur royaume succomba définitivement en 711 à l'invasion musulmane.
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Fibule wisigothique.
Fibule wisigothique (musée de Nuremberg).

La fusion des Wisigoths avec leurs sujets latinisés avait été préparée au VIe siècle. Retardée par leur adhésion à l'arianisme, elle fut facilitée par leur conversion au catholicisme (586), et vers 650 les anciennes législations distinctes des Wisigoths et des Romains furent remplacées par un code unique commun aux populations de toute origine. Ce droit reposait sur les lois d'Euric (466-485), revisées par Léovigild (569-580) et Récared (Récarède) (586-601). L'édit de Récared (publié sous le nom d'Antigua d'après un palimpseste de Paris), forma le noyau de la Lex Wisigothorumdont nous possédons deux rédactions, celles de Receswinth (Reccesvinte) (649-672), et celle d'Ervich (682). C'est Receswinth (corégent de son père Chindaswinth) qui abolit la loi romaine des Wisigoths, rédigée dans le Bréviaire d'Alaric (506), et qui jusqu'alors régissait les sujets romains des Wisigoths. La loi unique promulguée par lui, revisée par Ervich et en dernier lieu par Egica (687-701), était très imprégnée des conceptions germaniques, de même que l'organisation des communautés locales, de l'armée, de la justice : à tel point que la vieille législation bavaroise lui a beaucoup emprunté. 

Après la ruine du royaume des Wisigoths, leurs institutions demeurèrent en vigueur dans la région pyrénéenne où ils se maintinrent. Au XIIIe siècle, Ferdinand III de Castille faisait traduire en castillan la loi des Wisigoths pour servir de Fuero juzgo (forum judiciale, code de justice). L'absorption du peuple gothique dans ses sujets latins d'Espagne et de Languedoc, presque complète au VIIe siècle, fut consommée en suite des luttes soutenues en commun contre les Arabes. (A.-M. B. / HGP).
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Rois wisigoths.
Rois wisigoths : Chindawinth, Receswinth et Égica. (Codex Vigilanus, 976 ).
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