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L'histoire de la Russie
Aperçu-
La Russie médiévale
Les Slaves*-
Le commencement
    de l'histoire russe
La monarchie moscovite
La Horde d'Or*-
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Le XVIe siècle
Le XVIIe siècle
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Le XVIIIe siècle
L'Empire de Pierre Ier
Le printemps des tsarines
Le règne de Catherine II
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Le XIXe siècle
La Guerre de Crimée*
La Russie au XXe siècle
L'histoire de l'URSS
La Fédération de Russie
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Et aussi*...
La Sibérie
La langue et la littérature
Les arts en Russie
L'Eglise russe
NB : l'astérique (*) signale les pages qui appartiennent à d'autres sections de l'encyclopédie.
Les plus anciens habitants de la Russie dont les noms nous aient été transmis par les auteurs de l'Antiquité sont  les Sarmates et les Scythes. Au IIe siècle, les Goths occupèrent les contrées entre le Don et le Danube, qui furent ensuite envahies successivement par les Huns, par les Avars et par les Bulgares (Les Turks). Quant aux Slaves, une population de langue indo-européenne, dont le nom n'apparaît dans l'histoire qu'au VIe siècle, ils habitaient le long du Dniepr. Ils furent en partie soumis par les Khazares (Les Turkmènes) au VIIIe siècle. Les incursions des Varègues (La Scandinavie médiévale) chez les Slaves datent vraisemblablement du commencement du IXe siècle. Appelée par les Slovènes, peuple slave, et conduite par trois chefs, qui étaient trois frères, et dont l'un, Rurik, survécut aux deux autres, une tribu de ce peuple s'établit aux environs des lacs Bielo-Uzero, Ladoga et Ilmen. Rurik régna à Novgorod de 862 à 879, comme premier grand-prince ou grand-duc de Russie. Car les Slaves, dit Nestor, leur plus ancien historien, ont reçu des Varègues, appelés Ross ou Rouss, le nom de Russes.

A l'ombre de Byzance.
Oleg, oncle d'Igor I, fils de Rurik, avait été chargé de la tutelle de son neveu; mais il exerça le pouvoir en son propre nom, 879-913. Il transporta le siège de l'État de Novgorod à Kiev, capitale d'une principauté dont il fit la conquête, assiégea Constantinople et rançonna l'empereur Léon le Philosophe. Igor, son neveu, lui ayant succédé, fit contre Constantinople deux expéditions dont le pillage des côtes grecques fut le seul résultat, et périt en combattant les Drevliens, en 945. Sviatoslav Ier, son fils, 945-972, lui succéda, d'abord sous la tutelle de sa mère Olga, qui se fit chrétienne à Constantinople, sous le non d'Hélène, mais qui ne put convertir son fils. Il avait partagé ses États, avant de mourir, entre ses trois fils, dont l'aîné, laropolk ler, fut grand prince de 972 à 980. Cette division de l'héritage paternel entre tous les fils du grand-prince fut la cause de l'affaiblissement de la Russie naissante. 

Les princes appelés au partage de l'État avec celui qui héritait du titre de grand-prince étaient nommés princes apanagés. Vladimir ler, dit le Grand et le Saint, troisième fils de Sviatoslav Ier, 980-1015, se convertit au christianisme en 988(La Religion slave). Il fut baptisé à Constantinople, alors en communion avec le saint-siège. Le partage qu'il fit de ses États entre ses nombreux enfants, et son neveu, Sviatopolk Ier, grand-prince de 1015 à 1019, amena encore une fois le démembrement. de l'État. laroslav Ier, 1019-1055, l'un des fils de Vladimir Ier, releva la puissance de la Russie, dont il fut le législateur. Mais la division de ses États entre ses 5 fils fut suivie de trois siècles d'anarchie. Isiaslav ler, grand-prince de 1055 à 1078, fut deux fois détrôné. Il fit porter ses hommages par son fils au pape Grégoire VII, en 1075. Vsévolod ler, frère d'Isiaslav Ier, régna de 1078 à 1093, et Sviatopolk II, fils d'Isiaslav ler, de 1093 à 1114.

Les règnes de Vladimir II, dit Monomaque, 1114-1125, et de Mstislav ler, dit le Grand, 1125-1132, arrêtèrent les dissensions intérieures. Mais elles recommencèrent après la mort de ce dernier, et la grande-principauté passa d'une branche à l'autre de la famille de Rurik. André, dit de Bogolioubof, 1157-1175, petit-fils de Vladimir Monomaque par son père George Ier Dolgorouki, c.-à-d. Longue-Main, qui avait fondé Moscou en 1147, fit rentrer la grande-principauté dans la maison de Monomaque , qui était la branche cadette. Elle y resta jusqu'en 1598; mais elle s'était partagée en 1246 en branche de Souzdal, branche de Moscou et branche de Tver. André, ne pouvant se rendre maître de Kiev, où régnait Isiaslav III, fixa sa résidence à Vladimir, sur la Kliazma, qui resta la capitale de la grande-principauté jusqu'en 1205. Kiev, dite la Mère des villes russes, et siège métropolitain de toute la Russie, commença à déchoir. Elle fut saccagée en 1169, lorsque onze princes apanages, rivaux du grand-prince Mstislav Il, s'en rendirent maîtres, et sa ruine fut consommée lorsque Roman Mstislavitch s'en empara en 1204, avec l'aide des barbares Polovtses. 

Roman était prince de la Russie de Halicz ou Galitch, ou Russie-Rouge. Cette principauté, qui éclipsa passagèrement ses deux soeurs de Kiev et de Vladimir, fut fondée par Vladimirko Volodarovitch, issu d'Iaroslav le Grand, qui la gouverna de 1124 à 1155. Elle fut réunie à la Pologne en 1340, et la Russie de Kiev avait été réunie à la Lituanie en 1320. Le fondateur de la Russie de Halicz eut pour successeur son fils Iaroslav, 1153-1188, dont le règne fut très glorieux. Vladimir, fils d'Iaroslav, 1188-1198, étant mort sans postérité, Roman Mstislacitch, descendant de Vladimir Monomaque, grand-prince de Vladimir en Volynie, et dévastateur de Kiev, devint grand-prince de Haliez, en 1198, et mourut en 1206. Son fils, Daniel Romanovitch, posséda son héritage de 1228 à 1264; il reconnut l'autorité du pape Innocent IV, qui le qualifia du titre de roi de Russie en 1255. Mais il, rompit ensuite, avec le saint-siège. La Russie-Rouge, ou Russie occidentale, ne fit plus que déchoir, et fut absorbée par la Pologne, comme il vient d'être dit, avant le milieu du XIVe siècle

L'invasion des Mongols.
Affaiblis par leurs divisions intestines, les Russes étaient incapables de résister à l'invasion des Mongols, contre lesquels les Polovtses implorèrent leur secours. Malgré la bravoure de Mstislav Mstislavitch, prince de Halicz, ils furent exterminés à la bataille de la Kalka, en 1223 (L'empire gengiskhanide). Quelques années après, une nouvelle armée de Mongols prit et brûla Moscou et Vladimir, et battit en 1238 George Il, grand-prince de Vladimir, 1213-1258, qui périt dans ce désastre. Les Mongols détruisirent entièrement Kiev en 1240. et ravagèrent tout le pays. Batou, leur chef, acheva de fonder l'empire du Kaptschak, qu'il avait hérité de son père, fils de Gengis-Khan, établit son camp, appelé la Horde d'Or, à Seraï, dans une île de l'Akhtouba, branche de la Volga, et les Russes demeurèrent tributaires et dépendants des vainqueurs. laroslav II, frère de George II, et grand-prince de la Russie orientale de 1258 à 1246, eut pour successeur Alexandre, surnommé Nevski, 1246-1262, qui, n'étant encore que prince apanagé de Novgorod, défit les Suédois et les chevaliers Porte-Glaives (Les Chevaliers Teutoniques). Les discordes des fils d'Alexandre Nevski permirent aux Mongols d'appesantir leur joug sur toute la nation russe. Daniel, le plus jeune, se déclara indépendant de son frère André, grand-prince de 1294 à 1304, prit le titre de grand-prince et, fixa, en 1295, sa résidence à Moscou, qui devint dès lors le centre national de la puissance russe. 

Pendant que, la Russie était asservie par les Mongols, Novgorod prospérait sous la forme d'une république libre. La maison de Tver disputa la grande-principauté à la descendance d'Alexandre Nevski, dont Ivan Ier, dit Kalita, c.-à-d. la Bourse, grand-prince de 1328 à 1340, assura la prépondérance, avec l'appui des Mongols. Siméon le Superbe, fils d'Ivan, 1340-1353, soumit peu à peu les princes apanagés, et prit le titre de grand-prince de toute la Russie. Son fils Ivan II, 1353-1360, eut pour successeur le prince de Souzdal, Dmitri, 1360-1362, descendant d'un frère d'Alexandre Nevski. Mais la maison de Moscou, protégée par les Mongols, reconquit la grande-principauté, et, Dmitri IV, petit-fils d'Ivan la Bourse, régna de 1362 à 1389. C'était un guerrier courageux qui conquit le surnom de Donskoï, en battant les Mongols sur le Don, en 1380. Mais les Mongols lui dictèrent la paix en 1352 dans Moscou incendié. Il eut pour successeurs son fils Vassili ou Basile l, 1389-1425, et son petit-fils, Vassili II, surnommé l'Aveugle, 1425-1462. Sous le règne de ce dernier, Isidore; métropolitain de Moscou, assista au concile de Florence et fut fait cardinal. Mais à son retour eu Russie, en 1439, il ne put faire accepter la réunion de l'Église grâce à la communion romaine.

Ivan llI, fils de Vassili III, dit le Grand ou le Superbe, 1462-1505, soumit Novgorod, annexa la principauté de Tver et anéantit la domination mongole, en s'alliant avec le khan de Crimée contre le khan de la Horde-d'Or (1450). La Russie, délivrée du joug mongol, allait pouvoir rentrer en rapport avec l'Europe. Mais, à ce moment même, Constantinople venait de tomber aux mains des Ottomans. La principauté moscovite reprit dans ses armoiries l'aigle de Byzance. Ivan épousa la nièce du dernier empereur grec. Ivan III rendit la grande-principauté indivisible, supprima les apanages et fit prévaloir le droit de primogéniture. 

Au total, la domination mongole, si pénible qu'elle ait pu être, avait été pour la Russie moscovite une bonne école d'administration et de gouvernement; par ailleurs, la religion chrétienne s'était propagée chez les Finnois, l'Eglise russe avait pris un caractère autocéphale. Vasili Ivanovitch (1505-1553) complèta l'œuvre de son père : il soumit Riazan, Pskov, Viatka, Tver, Rostov, Iaroslav et enlèva aux Lituaniens une partie des pays russes.

Le premier âge des tsars.
Ivan IV, fils de Vassili III, plus connu sous le nom d'Ivan le Terrible (1533-1584), en échangeant le titre de grand prince contre celui de tsar (un mot dérivé du latin caesar), affirma une fois de plus la suprématie et les ambitions de la Russie moscovite. La première guerre entre les Russes et les Turcs date de son règne. En 1552, il s'empara du khanat tatar de Kazan, et en 1554 de celui d'Astrakhan. La Russie avait désormais un débouché sur la mer Caspienne. En 1584, la Sibérie, conquise par le cosaque' Ermak, agrandit encore le domaine du tsarat moscovite. Mais ce qu'il fallait à cet Etat, c'était un débouché sur la mer Baltique. Ivan essaya vainement de s'en assurer un. Il fut repoussé par les Suédois et les Polonais

Son fils Fédor ou Foedor, 1584-1598, prince faible, fut le dernier souverain de Russie de la dynastie de Rurik. Sous son règne, un patriarcat russe indépendant fut créé à Moscou en 1588, par un patriarche schismatique, fugitif de Constantinople, et la servitude perpétuelle de la glèbe fut établie par des ukases de 1592, 1593 et 1597. Boris Godounov, qui avait gouverné sous le nom de Fédor, son beau-frère, s'empara du pouvoir à sa mort. A la mort de Fédor, en 1598, et jusqu'en  1613, la Russie traversa une période d'anarchie, au milieu de laquelle les Polonais, maîtres de Moscou, et les Suédois de Novgorod, ne cessairent de se disputer la Russie. 

Un aventurier, Dmitri, dit le faux Dmitri, entreprit avec le concours des Polonais de se faire passer pour l'héritier des Rurikovitch, de soumettre la Russie à l'influence catholique et polonaise. Il mourut. Un autre faux Dmitri lui succèda. Les Polonais pénètrèrent jusqu'à Moscou (1612); le fils du roi de Pologne, Sigismond III, se fit proclamer tsar par les boïars. La Russie semblait à la veille de devenir un Etat annexe de la Pologne. Mais les Polonais étaient catholiques, les Russes orthodoxes. Une réaction tout ensemble religieuse et nationale se produisit. Le prince Pojarsky et le boucher Minine soulevèrent le peuple de Nijni-Novgorod et délivrent Moscou. Les Polonais partis, l'assemblée du pays (sobor) élit pour tsar le boïar Michel Fedorovitch Romanov (1613). 

Michel ou Mikhaïl Romanov fut le fondateur d'une dynastie qui a fait définitivement entrer la Russie dans le système européen. Avec lui finit la période dite des troubles. Il réorganisa l'armée et fortifia les frontières. Son fils, Alexis Mikhaïlovitch (1645-1676), donna à la Russie un Code de lois (l'Oulojénie) et réunit à l'empire la Petite-Russie qui en avait été détachée depuis des siècles. Sous son règne, la Russie s'ouvrit définitivement aux influences de l'étranger. Les Anglais par Arkhangel pénétrèrent à Moscou; les Allemands et les Suédois eurent des colonies à Novgorod, à Pskov, à Moscou. Des ingénieurs allemands ou italiens vinrent s'établir à Moscou. Les moeurs étaeint encore tout orientales. La femme ne jouait aucun rôle dans la vie sociale. Les paysans, depuis la fin du XVIe siècle restaient attachés à la terre.

La Russie au XVIIIe siècle.
Pierre le Grand, fils et successeur du tsar Alexis, détruisit la puissance de la Suède au profit de celle de la Russie, qu'il étendit de la Baltique à la mer Caspienne. Il fonda Saint-Pétersbourg et en fit la capitale de son empire, où il implanta par la violence une civilisation improvisée. Il laissa éteindre en 1700 le patriarcat de Moscou et le remplaça en 1721 par un conseil permanent, qu'il appela le Très-Saint-Synode. Il fit ainsi de l'Église russe un instrument du despotisme impérial, et la transformation par laquelle il introduisit la Russie dans le mouvement social européen pèche par la base. Le testament politique qu'on lui attribue n'est vraisemblablement pas authentique; mais il a légué à ses successeurs une pensée ambitieuse dont ils ont poursuivi avec habileté la réalisation menaçante pour la sécurité de l'Europe.

La tsarine Anne rétablit l'autocratie, à laquelle Catherine Ire, et Pierre II avaient renoncé, et accrut l'influence extérieure de l'empire Élisabeth, 1741-1762, favorisa la naissance de la littérature russe, qui date de son règne (Le printemps des tsarines). Avec Pierre III, neveu d'Élisabeth, de la maison de Holstein-Gottorp, une ligne féminine de la branche cadette de la dynastie de Romanov monta sur le trône en 1762 Catherine II, 1762-1796, agrandit la Russie par la part qu'elle obtint dans les trois partages de la Pologne, et par la conquête de la Crimée et de la Nouvelle-Russie. Maîtresse de la mer Noire, la tsarine s'arrogea sur ses coreligionnaires grecs et slaves, soumis à la Turquie, un droit de protection qui devint le chemin tortueux par où la politique du cabinet de Saint-Pétersbourg n'a plus cessé de marcher pour arriver à Istanbul. Son fils, Paul Ier, (1796-1801) fixa la succession au trône par ordre de primogéniture en ligne directe, en attribuant à la ligne masculine la préférence sur la ligne féminine. En matière de politique étrangère, il s'associa à la coalition austro-anglaise. Souvarov alla jusqu'en Italie se mesurer avec les généraux français. Sous le règne très court de ce prince, la Russie acquit au Sud-Est la Géorgie.

Le XIXe siècle.
Alexandre I.
Alexandre Ier(1801-1825) organisa les ministères, créa un conseil de l'empire, fonda les universités de Kharkov, de Saint-Pétersbourg et de Kazan. Il réunit à son empire le royaume de Pologne, formé du duché de Varsovie, créé par Napoléon Ier en 1807. Impressionné par l'empereur, il signe avec lui le traité de Tilsit (1807) et devient son ami. Mais il refuse d'adhérer au blocus continental; Napoléon envahit la Russie, pénètre à Moscou; il en est chassé par l'incendie et par le froid. A la voix du tsar, les Russes firent de leur pays un désert où, comme l'a dit Joseph de Maistre, qui résidait alors à Saint-Pétersbourg,

On ne voyait que de la neige, des corbeaux, des loups et des cadavres, depuis Moscou jusqu'à la frontière.
Les Russes poursuivirent la Grande Armée jusque sous les murs de Paris; le traité de Vienne (1815) donna une sanction européenne aux partages de la Pologne. D'autre part, l'empire acquit la Finlande sur la Suède (1809) et la Bessarabie sur les Turcs (1812). Victorieuse de Napoléon, la Russie fut l'âme de la Sainte-Alliance et soutient dans toute l'Europe la contre-révolution. Mais elle était minée à l'intérieur par ces mêmes doctrines qu'elle prétendait combattre à l'étranger. Des sociétés secrètes se multiplièrent au lendemain de la mort du tsar Alexandre Ier. Une révolution éclata (décembre 1825). 

Nicolas I.
L'empereur Nicolas  Ier  (1825-1855) la réprima durement et se posa en représentant du droit divin et de la légitimité. Il élargit les frontières de la Russie du côté du Caucase, protègea contre la Turquie les Roumains, les Serbes et les Grecs, poussa les troupes russes jusqu'à Andrinople (Edirne), obtint de la Porte des rectifications de frontières et le libre passage des Dardanelles et du Bosphore. Il triompha de l'insurrection polonaise (1830), et forma avec la Prusse et l'Autriche une sorte de triple alliance inspirée par l'esprit réactionnaire. La Russie de Nicolas Ier aida l'Autriche à étouffer la révolution hongroise de 1848 et s'efforça de se faire reconnaître comme la protectrice suprême des chrétiens d'Orient contre les Turcs. Les prétentions russes amènentla France et de l'Angleterre, en 1855,à intervenir pour le maintien de l'empire ottoman(La Guerre de Crimée). La Russie, vaincue devant Sébastopol, dut, par le traité de Paris, restituer une partie de la Bessarabie et sacrifier sa puissance navale dans la mer Noire. 

Alexandre II.
Le tsar Alexandre II (1855-1881) Alexandre II, fils et successeur de Nicolas Ier inaugura son règne par la conclusion d'une paix qui rendit le repos à l'Europe en 1856. Il décréta par un manifeste impérial, en 1861, l'émancipation des serfs, dont le nombre s'élevait à 23 millions dans l'empire en 1859. Il développa en Russie les voies de communication (chemins de fer), améliora les finances, réorganisa les tribunaux, supprima le servage et les peines corporelles (1861).

En revanche, il ne changea pas grand chose à la politique européenne de son prédécesseur. Ainsi, sa première parole aux Polonais fut-elle :

Tout ce que mon père a fait est bien fait, et mon règne sera la continuation du sien. 
Il l'a effectivement été, et a prouvé qu'en détruisant Sébastopol, la France et l'Angleterre n'avaient pas détruit l'ambition de la Russie, qui a persisté dans la pensée d'étendre sa domination, son panslavisme, sur l'Europe entière. La politique russe a déployé ses rigueurs contre la Pologne en 1861 et 1862. En janvier 1863, elle a poussé elle-même les Polonais à un soulèvement armé par la déportation en masse, sous le nom de recrutement, de la partie virile de la population. En exterminant, les Polonais, la Russie protestait par sa diplomatie de ses bonnes intentions à l'égard de la Pologne, et elle répondit, dans cette même année 1863, aux protestations de la France, de l'Autriche et de l'Angleterre, qu'elle ne pouvait pas admettre leur intervention. La Pologne écrasée et la Circassie soumise, en 1862, par le grand-duc Michel, ouvrirent une double voie à la Russie pour s'acheminer vers l'accomplissement de ses vues sur l'Occident comme en Orient. La Russie continua ainsi son expansion en Asie. La conquête du Caucase fut achevée, le territoire de l'Amour annexé à la Sibérie. Les Russes s'établirent à Tachkent, à Samarcande, annexèrent le Khokand, le khanat de Khiva, et réduisent le khan de Boukhara à accepter leur protectorat (Le Kharezm et les khanats ouzbeks). 

A partir de 1865, le tsar revint à la pratique de l'absolutisme et à la politique de russification, sous l'impression de l'insurrection polonaise et l'influence du parti panslaviste; l'écrivain Katkov, dans son journal la Gazette de Moscou, opposait les peuples slaves aux  peuples de l'Europe occidentale, préconisait leur «-rassemblement-» sous la direction des Russes, et affirmait la nécessité d'un pouvoir fort pour la réalisation de ce programme. Une série de mesures de détail restreignirent la partie des réformes précédemment accomplies; il fut interdit aux zemstvos de rendre publiques leurs délibérations; des tribunaux extraordinaires furent institués, les suspects déportés sans jugement, les jeunes gens écartés arbitrairement des Universités.

L'application de la loi qui avait affranchi les serfs leur apparaissait comme une aggravation de leur condition. Ils avaient gagné à la réforme la liberté de leur personne; mais, obligés de racheter les terres laissées aux communautés de village (mir), ils ne se rendaient pas compte que le prix du rachat, payable à long terme par annuités, était très faible. Pour se libérer immédiatement, ils avaient accepté de restituer aux seigneurs les deux tiers de la part attribuée au mir, et les pays « tertiaires -» se trouvaient amoindris. La question agraire était loin d'être résolue; les paysans étaient mécontents et, de son côté, la noblesse se plaignait d'une réforme qui avait réduit ses domaines en même temps que leur produit, car elle n'avait pas su remplacer le système des corvées par un nouveau mode d'exploitation.

Ces embarras ne suffisaient pas à détourner le tsar de ses préoccupations de politique étrangère. En 1871, Alexandre II profita des embarras de la Francepour faire réviser le traité de Paris et s'assurer le droit d'entretenir une marine de guerre dans la mer Noire. La guerre déclarée par la Serbie et le Monténégro à la Turquie en 1876 fournit à Alexandre II l'occasion de venger les échecs de 1855. Les troupes russes franchirent le Danube, poussèrent jusqu'à Istanbul, Le traité de San Stefano, qui termina cette guerre victorieuse, assura l'autonomie de la Bulgarie, l'indépendance de la Roumanie et du Monténégro. II fut modifié dans quelques-unes de ses clauses par le traité de Berlin (1878). L'acquisition de Kars, de Batoum, la restitution de la Bessarabie l'indemnisaient des sacrifices qu'elle s'était imposés pour mener à bonne fin cette grandiose expédition.

Cela étant accomplit, un autre problème surgit. La doctrine de l'individualisme absolu - le nihilisme - avait cessé d'être purement spéculative. Ses adeptes s'efforçaient de la répandre dans les campagnes. Un centre révolutionnaire s'était formé à Zurich, d'où un grand nombre de jeunes filles, revenues en Russie, y devinrent d'actifs agents de propagande. Les attentats se multiplièrent, et le gouvernement essaya de réagir par un régime de dictature politique et de justice expéditive; mais le terrorisme nihiliste brava le terrorisme gouvernemental, au moyen d'une organisation secrète très serrée : le 26 août 1879, un « comité exécutif -» condamna le tsar, qui, ayant échappé à trois tentatives, fut blessé à mort le 1er mars 1881, au moment où, sur les avis du général Loris Melikov, il paraissait disposé à donner quelques satisfactions aux idées libérales, peut-être même allait-il maintenant accorder une constitution, malgré l'opposition du parti « vieux russe-».

Alexandre III.
La mort tragique d'Allexandre II devait provoquer un mouvement de réaction sous le règne de son fils Alexandre III (1881-1894). Celui-ci abandonna tous les projets de réforme pour revenir à la pure tradition nationale : réorganisation de l'administration rurale et des zemstvos; intensité de la politique de russification; ukase obligeant l'héritier présomptif à épouser une princesse de foi orthodoxe. Conseillé par le publiciste Katkov, par le procureur général du Saint-Synode, Pobiédonotsef, par le général Ignatiev, Alexandre III fut, dans toute la force du terme, un souverain national. Les universités et la presse furent étroitement contrôlées; les journaux et les livres venus du dehors, soumis à l'appréciation de la censure, qui faisait « passer au caviar » les passages jugés dangereux; une étroite surveillance mit les terroristes hors d'état d'agir et, s'il y eut des complots contre la vie du tsar, ils furent tous découverts. 

L'antisémitisme se développa. Les Juifs étaient détestés des paysans russes, qui, à plusieurs reprises, les avaient pillés : le gouvernement leur interdit de devenir propriétaires, leur défendit d'envoyer dans les universités ou dans les gymnases un nombre d'étudiants supérieur à une proportion déterminée, et finalement, en 1891, les concentra tous dans les provinces de l'Ouest, où ils étaient particulièrement nombreux. Les mesures de dénationalisation se succédèrent au Caucase, en Pologne et dans les provinces baltiques, où l'on imposa le russe comme langue officielle, où l'on fit la guerre à la religion luthérienne au profit de la religion orthodoxe. L'autonomie du grand-duché de Finlande fut cependant ménagée. A l'extérieur, l'événement capital du règne d'Alexandre III fut la nouvelle orientation de la politique russe en direction des puissances occidentales. Depuis la guerre de 1870, elle avait été inféodée à celle de la Prusse et de l'Autriche. Alexandre III rompit avec les alliances antérieures et se rapprocha nettement de la France

L'avènement de Nicolas II.
Nicolas II, qui succéda à son père Alexandre III en 1894, déclara qu'il maintiendrait le principe autocratique et l'appliquerait avec la même fermeté. Les visites échangées à deux reprises, en 1896 et en 1901, avec les présidents français Faure et Loubet ont attesté de la poursuite des bonnes relations de la France et de la Russie. Forte de cette alliance, la Russie a pu continuer son expansion dans l'extrême Orient. Le chemin de fer transsibérien relia la Baltique au Pacifique. L'intérêt majeur de la Russie était à ce moment de voir la paix maintenue en Europe pour exploiter sans inquiétude son domaine asiatique.

La Russie au XXe siècle.
Le gouvernement de Nicolas II n'a cessé de se durcir au commencement du XXe siècle, en même temps que les tensions sociales n'ont cessé de monter. Des révoltes éclatent chez les paysans et les ouvriers, poussant finalement le tsar à envisager des réformes. La guerre perdue contre le Japon (1904-1905) a accéléré ce mouvement qui a donné lieu à la "Révolution de 1905", à l'issue de laquelle une ébauche de régime parlementaire, au fonctionnement chaotique, se met en place, sans que soit réellement remise en cause l'autorité du tsar.

La Première guerre mondiale et la  Révolution soviétique.
En 1914, la Russie entre en guerre contre l'Allemagne, aux côtés de l'Angleterre et de la France. Le pays subit de lourdes pertes et la population se montre de plus en plus sensible aux idées des partis révolutionnaires. C'est dans ce contexte que deux nouvelles révolutions, la première en février, la seconde en novembre (ou en octobre dans le calendrier julien toujours en vigueur dans le pays). Celle-ci est conduite par les Bolcheviks (communistes radicaux), sous la direction de Lénine. Le régime tsariste s'effondre; le tsar et sa famille sont assassinés en 1918. La paix avec l'Allemagne est signée, mais le pays devient la proie d'une guerre civile, dans laquelle s'opposent les Bolcheviks (ou Rouges) et les Blancs, partisans du tsar et soutenus par les Etats-Unis et les anciens alliés européens.

Les Bolcheviks finissent par l'emporter, et parviennent aussi à étouffer les oppositions existant au sein même du mouvement révolutionnaire. En 1922, un nouvel Etat, dirigé autoritairement par le Parti communiste est fondé : c'est l'URSS (Union des républiques socialistes soviétiques); sa capitale est Moscou; ses dirigeants s'intallent dans l'ancienne forteresse des tsars, le Kremlin. Des réformes reposant sur les théories de Marx et de Lénine sont mises en place. Les villes, priviligiées par le nouveau régime, s'en tirent à peu près, mais les campagnes sont affamées. 

La dictature de Staline et la Seconde guerre mondiale.
Après la mort de Lénine, en 1924, Joseph Staline devient l'homme fort du pays. Il impose une dictature personnelle, qui sera aussi très meutrière. Au moins permet-il une modernisation du pays, en imposant une industrialisation à marches forcées. En 1939, Staline conclut avec l'Allemagnenazie un pacte de non-agression, connu sous le nom de Pacte germano-soviétique, qui ne sera pas respecté par Hitler. En 1941, les troupes allemandes envahissent la Russie

Dans un premier temps, l'Armée Rouge subit de graves revers. Mais au prix de pertes humaines colossales, parvient à renverser la tendance, et à jouer un rôle décisif dans la victoire des Alliés. En 1945, l'URSS est en mesure de parler d'égal à égal avec les Etats-Unis. A Yalta, les deux superpuissances se partagent le monde en zones d'influence. Elles mettent ainsi en place les termes d'un affrontement permanent, qui va durer plus quarante ans, et que l'on appellera la Guerre froide.

La Guerre froide.
La Guerre froide oppose deux alliances : l'Alliance atlantique, ou OTAN, réunit autour des Etats-Unis les pays d'Europe occidentale (à l'exception de quelques neutres); le Pacte de Varsovie, réunit autour de l'URSS, les pays d'Europe de l'Est, auquels Moscou a aussi imposé son système politique et économique. Les deux blocs s'affronteront pour l'essentiel hors du terrain européen, dans le Tiers-Monde, où de nombreuses guerres vont éclater avec des prétextes divers, mais avec toujours en arrière-plan, l'enjeu de la recherche de la suprématie d'un bloc sur l'autre. 

Staline meurt en 1953 et l'on peut croire quelque temps à un assouplissement du régime, avec l'accession au pouvoir de Nikita Krouchtchev. Il n'est que très relatif, et le pays reste sous la coupe d'un régime policier; la Guerre froide connaît même à cette époque (1962) une de ses pires crises, au moment où l'URSS installe à Cuba des missiles menaçant directement les Etats-Unis. Une nouvelle époque s'ouvre en 1964, au moment de l'arrivée au pouvoir de Leonid Brejnev, pendant laquelles les relations Est-Ouest vont connaître encore de nombreuses vicissitudes, mais qui se marque surtout par une érosion accélérée du régime soviétique. La course aux armements dans laquelle se sont lancées les deux super-puissances a fini par épuiser l'Union soviétique, dont le système économique s'essouffle; la corruption mine l'administration; malgré les voix qui s'élèvent de quelques "dissidents" la population sombre dans l'apathie, quand ce n'est pas dans l'alcoolisme.

A la mort de Brejnev, en 1982, la nécessité de réformes est devenue évidente pour les dirigeants du pays. Les successeurs immédiats de Brejnev (Andropov, Tchernenko), trop âgés, n'auront pas le temps de les engager. La tâche reviendra à Mikhaïl Gorbatchev, qui accède au pouvoir en 1985. Il s'efforce de moderniser le pays, en le dynamisant, en le démocratisant quelque peu, mais aussi en essayant de préserver la prééminence du Parti communiste. Il échoue. L'empire soviétique se disloque. Plusieurs des républiques qui le constituent revendiquent leur indépendance; la  principale d'entre elles, la Russie elle-même, sous l'impulsion de Boris Eltsine s'affanchit de la tutelle soviétique. L'URSS cesse d'exister fin 1991.

La Fédération de Russie.

[Résumé en préparation]
 



Egor Gaïdar, La chute de l'empire soviétique : Leçons pour la Russie d'aujourd'hui, Eyrolles,  2010.
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Quelle est la place de la Russie dans la mondialisation économique? Comment expliquer la chute de l'Empire et la montée en puissance d'une oligarchie aujourd'hui contestée à l'international? Ecrit par l'un des principaux artisans de la Perestroïka, cet ouvrage dresse un bilan sévère et précis de la situation économique réelle de l'URSS à la veille de l'éclatement du bloc communiste. Il est l'occasion d'une brillante analyse des causes - imparables selon l'auteur - de la fin de l'Empire, étayée par des données chiffrées extrêmement précises et précieuses - compte tenu de l'opacité des statistiques officielles de l'URSS au moment de l'implosion. L'ouvrage est enfin l'occasion pour son auteur de mettre en garde la Russie d'aujourd'hui contre les démons d'autrefois, à l'heure de la "nostalgie de l'Empire" largement répandue dans les cercles du pouvoir comme dans la population russe. (couv.).
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Maurice Paléologue, Le crépuscule des tsars, Mercure de France, 2007. - 
Fils d'un prince roumain exilé en France, lointain descendant des derniers empereurs byzantins, Maurice Paléologue (1859-1944) débute une brillante carrière au quai d'Orsay dès 1880. Ayant bénéficié très tôt de puissantes protections (Delcassé, Poincaré...), il est nommé ambassadeur de France à Saint-Pétersbourg au printemps 1914. Partisan inconditionnel de l'alliance franco-russe qu'il est chargé de resserrer, il croit en la force du « rouleau compresseur russe » lorsque la guerre éclate. Comme beaucoup de ses contemporains, il est persuadé que le conflit sera bref et se soldera par la victoire des alliés. Il déchante bien vite et devient le spectateur de plus en plus inquiet de la détérioration du tsarisme. Il demeurera en poste auprès du gouvernement provisoire jusqu'à son rappel, au mois de mai 1917. Pendant toute cette période, il tient un journal précis dont la lecture s'apparente à une sorte de feuilleton : il décrit les atmosphères, les scènes, restitue les dialogues et se contente la plupart du temps de commentaires rapides mais percutants.

Très proche de la famille impériale, il se livre cependant à une critique acerbe du régime, dénonçant la bureaucratie, la police, l'impéritie des hommes politiques et des chefs militaires. Il évoque la peur qui s'empare de l'ensemble du pays dans tous les milieux. Il brosse un tableau terrifiant de Saint-Pétersbourg où il décrit aussi bien la misère populaire que l'étrange atmosphère de la cour à l'ombre malfaisante de Raspoutine dont il relate de façon haletante l'assassinat le 31 décembre 1916. Les portraits du couple impérial avec lequel il s'entretient régulièrement et presque familièrement sont saisissants de réalisme.

Lorsque arrive la révolution qu'il avait prévue, son rappel motivé par les liens trop étroits qu'il entretient avec la famille impériale, lui vaut d'être nommé Secrétaire général du quai d'Orsay. Il sera reçu à l'Académie française en 1928.

Un document exceptionnel sur la fin du régime impérial en Russie. (couv.).
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Alexandre Radichtchev, Voyage de Pétersbourg à Moscou, Rivages Poche, 2007. - C'est le premier livre révolutionnaire publié en Russie. Son auteur, grand aristocrate, fit ses études à Leipzig où il lut les auteurs des Lumières. Catherine II, qui soutenait les Encyclopédistes, à commencer par Voltaire, changea radicalement son point de vue après la Révolution de 1789. Radichtchev, lui, avait gardé les idéaux de Rousseau et c'est sous le regard des philosophes français qu'il écrivit ce livre qui est un hymne à la liberté et à la justice sociale. Ce récit de voyage, dans lequel l'auteur décrit simplement ce qu'il voit, de Saint-Pétersbourg à Moscou, est d'une force étonnante. Catherine Il fut outrée, Radichtchev condamné à mort, mais sa peine commuée en exil en Sibérie. Le livre demeura interdit jusqu'à la fin du XIXe siècle, bien que son auteur ait été gracié par Alexandre Ier. (couv.).

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