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Le Caucase
L'histoire de la Géorgie
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La Géorgie correspond à ce que les anciens dénommaient d'une manière générale Ibérie, mais, en réalité, elle comprend les trois anciens royaumes d'Ibérie, de Colchide et d'Albanie. L'Ibérie (dans la langue du pays, Karthli) est située au centre de l'isthme caucasien; l'Albanie ou Kakheth, à l'Est et contre la mer Caspienne. A l'Ouest, du côté de la mer Noire, se trouve la Colchide qui comprend : la Lazique (pays des Lazes de Justinien), l'Imérétie, le Gouria et la Mingrélie. Au Sud, le Somkheth, «-pays du Midi », le Gougarkh (ancienne Gogarène) et le Meskheth ou Meskes (anciens Moschi). Toutes ces diverses provinces ou petits royaumes jouent un rôle important dans l'histoire de la contrée caucasienne. Le mot de Géorgie est d'origine étrangère et incertaine. Dans les chroniques, les inscriptions, sur les médailles, les Géorgiens désignent leur pays par le mot de Karthli ou celui de Sakarthvélo. L'historien arménien, Moïse de Khoren, désigne l'Ibérie sous le nom de Virk et les Géorgiens appellent l'Arménie Somkhitar (gens du Midi).

La période historique, en laissant de côté les légendes de Targamos, de Karthlos et de Jason, ne commence pour l'Ibérie qu'avec Pharnabaze, un peu après Alexandre le Grand. Ce roi, d'origine perse ainsi que l'indique son nom, établit le culte du feu et devint vassal des premiers souverains parthes. Plus tard (vers 140 av. J.-C.), les rois Mirvan et Achat tentèrent de secouer le joug arsacide, mais ce fut sans succès; l'Ibérie, quoique ravagée à plusieurs reprises par les armées romaines lors des guerres de Mithridate et des conquêtes de Lucullus et de Pompée, n'en resta pas moins soumise aux rois de Perse pendant près de cinq siècles. Une inscription grecque trouvée à Tiflis (ancien nom de Tbilisi)  mentionne une forteresse construite par Vespasien, en 75 de J.-C, « pour Mithridate, roi des Ibères, fils du roi Pharasmane et pour la nation lamasdaïte (moderne Armaz), ami de César et du peuple romain », ce qui donne un renseignement historique avec une date précise.
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Tbilisi (Tiflis).
Tiflis (auj. Tbilisi) et sa forteresse.

Avec Mirian, fils de Sapor ler, commence en 265 ce qu'on appelle la dynastie sassanide de Géorgie, qui occupa le trône presque sans interruption jusqu'à l'avènement des Bagratides. La capitale était Metzkheth, sur le fleuve Koura (Kour ou Cyrus). Ce fut sous Mirian (265-318 de J.-C.), contemporain de Tiridate d'Arménie et de Dioclétien, que le christianisme fut introduit en Géorgie par une esclave chrétienne, Nina ou Nouna (qui est devenue la patronne de la Géorgie et est encore fêtée tous les ans sous le nom de « sainte Mère »), vers l'an 311 (elle fut crucifiée en 330; Voir le récit de Moïse de Khoren, liv. IV, 86); mais le culte du feu et des idoles resta encore la religion du peuple jusqu'à l'arrivée des treize apôtres ou Pères de Syrie qui, vers 550, sous un autre roi Pharasmane, évangélisèrent tout le Caucase et firent disparaître les dernières traces des anciennes religions. Plus tard, les Géorgiens adoptèrent le schisme de Byzance et l'Islam suivant que la politique et les conquêtes musulmanes les y contraignirent.

En 469, le roi Vakhtang Gourgasal fonde Tbilis-Kalaki, « la ville aux eaux chaudes »,qui devient la capitale sous le nom de Tiflis (Tbilissi), en remplacement de Metzkheth. Avec la protection des Perses et de l'empereur Léon, dont il avait épousé la fille Hélène, il agrandit son royaume par la conquête de la Mingrélie et d'une partie de l'Arménie. Sous les empereurs Justin et Justinien, les auteurs byzantins mentionnent les rois d'Ibérie, Gourgenès, Pérane et Zamanarsis, inconnus d'autre part. Vers le même temps, Khosroès ler Anouchirvan s'empare de l'Azerbaïdjan et de la partie orientale de la Géorgie (Albanie); il y installe, en 560, un gouverneur qui devint prince feudataire de la Perse et le fondateur du royaume des Chirvanchahs le long de la mer Caspienne. C'est à la même époque, après la mort de Bakour III, que la famille des Bagratides commence à régner avec le titre de Mthavari « prince », en la personne de Gouram ou Gouaram le Couropalate (575). Sous son fils Stephanos Ier, Héraclius pénétra en Géorgie et s'empara de Tiflis. Les Mthavaris payaient tribut à Khosrou-Parviz; ils furent renversés en 649, et la dynastie sassanide, dite alors khosroène, est rétablie en la personne d'Adarnassé en 619. Sous le règne de son successeur, Stephanos II, les Arabes pénètrent en Ibérie et en Imérétie, et franchissent le Caucase pour faire la guerre aux Khazars (Les Turkmènes) et s'emparer de Derbend (c'est la conquête du Gourdjistân, racontée par Tabari); Stephanos se retire en Mingrélie (644). Ses successeurs ne furent plus rois que de nom pendant cent cinquante ans. Les émirs arabes établirent leur résidence à Tiflis, mais les diverses provinces se révoltèrent et tout le Caucase fut en proie à la guerre civile.

Après la mort de Djouanchir, le dernier des Sassanides, les Bagratides ou Bagratians remontèrent sur le trône avec le titre de mephé, « roi » (787). Le premier de cette nouvelle dynastie est Achat mezd (le Grand), fils de Adarnassé le Couropalate, eristhav des eristhavs (prince des princes) du Kakheth, et d'une fille de Djouanchir. Il chasse les Arabes de Tiflis et se fait reconnaître par Haroun-al-Rachid (800). Pendant l'espace de près de deux siècles, la Géorgie est le théâtre de luttes sanglantes entre les rois du Karthli, représentant en quelque sorte le pouvoir central et les différents souverains du Kakheth, de l'Abazie, de Mingrélie cherchant tour à tour l'alliance des Arabes et de l'Arménie. Enfin Bagrat III, fils de David l'Insensé, réunit sous son sceptre toutes les provinces de la Géorgie et transporte sa capitale à Kouthaïs en Imérétie. Sous son règne apparaît la famille des Orbelians, originaires de la forteresse d'Orbel, qui rendit plus tard de grands services à la Géorgie, mais qui, à cette époque de troubles, tenta à plusieurs reprises de s'emparer du trône. Giorgi IV, par son mariage avec Hélène, fille de l'empereur Romain-Argyre, en 1017, introduisit à la cour les moeurs et les arts byzantins; la cathédrale de Kouthaïs est terminée par des peintres et des sculpteurs grecs. Sous Bagrat IV, les Turcs Seljoukides font irruption en Asie Mineure et dans le Caucase; la Géorgie est dévastée à deux reprises (1064 et 1072), Giorgi II est chassé par Melek-Chah. La Géorgie reprend son indépendance avec Davith III le Réparateur (1090-1125) qui s'empare de Tiflis après un long siège, délivre le pays des hordes turques et porte ses armes victorieuses jusqu'à Derbend au Nord et au mont Ararat au Sud Avec Giorgi III et la reine Thamar, cette période glorieuse continue jusqu'à l'arrivée des Mongols.

Le règne de Thamar a été, pour la Géorgie, l'époque la plus brillante; grâce au concours de Davith Soslan, son mari, elle repoussa à plusieurs reprises les armées musulmanes et elle étendit ses conquêtes ,jusqu'à Trébizonde et Ani. Sa mémoire est restée légendaire et célébrée dans des  chants populaires parmi lesquels un poème de Rousthavéli, son contemporain. Ses successeurs, Giorgi IV Lasha, la reine Rousoudan, Davith V Soslan ne purent résister au torrent des invasions mongoles qui avaient détruit tous les royaumes d'Asie Mineure, du Caucase et du Sud de la Russie. Giorgi VI cependant remporta plusieurs victoires sur les Mongols et les Turcs, et, pendant un règne de cinquante ans, put restaurer les églises et les monastères détruits par les musulmans. En 1386, Tamerlan occupe de nouveau la Géorgie qui est réduite à l'Imérétie , après la mort du conquérant mongol, ce fut le tour des Ottomans contre lesquels les rois Constantiné et Alexandré (1407 à 1442) eurent à défendre leur territoire. Alexandré, après avoir reconstitué la Géorgie, commit la faute de partager ses Etats, le Kakheth, l'Imérétie, le Karthli, entre ses trois fils, ce qui fut la source de révolutions et de guerres civiles. On a la liste des souverains de ces trois royaumes depuis le XVIe siècle, mais leur histoire est longue et difficile à établir, par suite de la confusion qui règne parmi les chroniqueurs eux-mêmes qui, le plus souvent, se perdent dans les détails sans aucune vue d'ensemble ni critique. Nous ne donnerons que les faits principaux avec les noms des souverains.

Avec Louarsab, en 1615, s'éteint la ligne directe de Karthli; les monarques qui le suivirent abandonnèrent le christianisme et se firent musulmans afin de s'attirer la protection des shahs de Perse qui étaient devenus les arbitres de la couronne géorgienne. Vakhtang V, prince de Moukhran, de la branche cadette du Karthli, dut embrasser l'islam avant d'être couronné sous le nom de Shah. Navâz Ier (1659). Ce fut sous son règne que le voyageur Chardin visita la Géorgie en se rendant en Perse en 1673; il nous a laissé un récit fort curieux des moeurs, des cérémonies et des intrigues de cour dont il a été témoin. Shah-Navâz était roi du Karthli, avec Tiflis pour capitale, et Bagrat IV l'Aveugle, roi d'Imérétie et de Mingrélie. En 1688, Eréclé Ier est nommé roi du Karthli sous le nom musulman de Nazar-Ali-Khan par le Séfevi de Perse, Soliman Ier, et ne peut se maintenir qu'avec l'appui de ses armes. Vakhtang VI est célèbre par un recueil de lois qui porte son nom et par la rédaction d'une histoire générale de la Géorgie depuis l'établissement du christianisme jusqu'au XVIIIe siècle. On donne à cette histoire le nom de Chronique de Vakhtang ou Grandes Annales, par opposition à l'abrégé qu'en a fait le prince Vakhoust, son fils. Dans leurs chroniques, comme dans leurs traductions de la Bible, les Géorgiens datent les années soit de l'ère de la création, qui est de 5508 av. J.-C., soit de l'ère géorgienne qui est de 1312 de J.-C. pour les événements postérieurs à cette date, soit enfin du cycle pascal de 532 ans pour les événements antérieurs. Les dates sont loin d'être toujours précises. Vakhtang VI a régné de 1711 à 1737; c'est le premier souverain géorgien qui ait été en Russie, puissance avec laquelle la Géorgie était en relation par des alliances et par des traités depuis les grandes conquêtes d'Ivan le Terrible (1552). Vakhtang fut reçu à Moscou et à Pétersbourg par Pierre le Grand vers 1746, puis par l'impératrice Catherine Ire vers 1725; pendant son voyage, la régence fut confiée successivement à Svimon, puis à Bakar, dit Shah-Navâz III. Mais, par suite de révoltes intérieures et de guerres avec Constantin, prince musulman du Kakheth, qui s'était emparé de son royaume, Vakhtang et Bakar se retirèrent en Russie où ils moururent (Bakar en 1750).

Après un court interrègne, Theïmouraz fut placé sur le trône du Karthli par Shah-Nadir l'Afcharide, qui venait lui-même de s'emparer du trône des Séfevis de Perse (1744), le Kakheth fut donné en même temps à Eréclé II, fils de Theïmouraz, qui, après la mort de ce dernier, réunit les deux couronnes sous un même sceptre (1762), pendant que Salomon était roi d'Imérétie. La fin du XVIIIe siècle est marquée par des guerres contre les tribus lesghiennes et contre les armées persanes qui ravagèrent le Karthli; l'Imérétie elle-même était en proie à la guerre civile entre Salomon Il, le dadian ou roi légitime, et Davith. Le farouche Agha-Mohammed entre en Géorgie à la tête d'une armée de 50000 hommes et met le siège devant Tiflis. Eréclé s'enfuit en Kakheth avec Salomon; la ville fut pillée et incendiée (1796). L'année suivante, les Russes pénétraient à leur tour en Géorgie, Eréclé abdiqua en faveur de son fils, Giorgi XII, lequel céda tous ses droits à la couronne à l'empereur Paul ler en 1799. Une armée russe occupa immédiatement tout le territoire géorgien, les Persans et les Lesghiens furent chassés; Giorgi se retira à Saint-Pétersbourg avec son fils Davith. La Géorgie fut déclarée province russe en 1802. La Mingrélie fut absorbée quelque temps plus tard.

A la suite de la révolution soviétique la Géorgie redevint indépendante pendant trois ans (1918-1921), mais fut contrainte de rejoindre l'URSS, à l'intérieur de laquelle elle eut le statut de république socialiste soviétique. Lors de la dissolution de l'URSS, en 1991, la Géorgie retrouva une nouvelle fois son indépendance. Mais les premières années vont être assez chaotiques. En 1995, Eduard Shevardnadzé, ancien ministre des affaires étrangères soviétique, dans les dernières années de l'URSS, est élu président. Mais le mécontentement croissant de la population face à la corruption endémique et à l'inefficacité des services gouvernementaux, suivi d'une tentative du gouvernement géorgien en place de manipuler les élections législatives en novembre 2003, ont déclenché des protestations généralisées. Shevardnadzé doit démissionner. 

Porté par le mouvement populaire connu sous le nom de "Révolution des roses", Mikheil Saakashvili, chef du  parti le Mouvement national uni (UNM),  remporte les élections présidentielles de 2004. Pendant son mandat, Saakashvili a fait des progrès dans la lutte contre la corruption, sur les réformes économiques, et la bonne gouvernance. Il a également oeuvré à une meilleure intégration des minorités. Cette politique plutôt positive a été entachée par les accusations d'exercice trop personnel du pouvoir qui ont visé Saakashvili. Elles a aussi été entravée, ou du moins compliquée, par l'aide et le soutien russes aux régions séparatistes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud, qui ont conduit à des flambées périodiques de tension et de violence et qui ont abouti à un conflit de cinq jours en août 2008 entre la Russie et la Géorgie. Dans un premier temps, le Kremlin s'est engagé à retirer ses troupes de la plupart des territoires géorgiens occupés. Mais fin août 2008, la Russie a unilatéralement reconnu l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud, et les forces militaires russes restent dans ces régions, qui représentent environ 20% du territoire géorgien.

L'entrée inattendue du milliardaire Bidzina Ivanishvili en politique en octobre 2011 a rassemblé l'opposition divisée sous sa coalition Rêve géorgien, qui a remporté la majorité des sièges aux élections législatives d'octobre 2012 et a chassé l'UNM du pouvoir. Concédant sa défaite, Saakashvili (qui a conservé la présidence) a nommé Ivanishvili Premier ministre et a permis au Rêve géorgien de créer un nouveau gouvernement. Cette cohabitation tendue entre Saakashvili et Ivanishvili a pris fin un an plus tard, avec l'élection à la présidence de Giorgi Margvelashvili en novembre 2013. Saakashvili a ensuite quitté le pays. 

Ivanishvili a volontairement démissionné de ses fonctions après la succession présidentielle, et au cours des années suivantes, le poste de Premier ministre a été fréquemment renouvelé, tandis que le régime, initialement présidentiel évoluait en un régime parlementaire. Au commencement de cette période, on doit notamment à Margvelashvili  un renforcement de la démocratie et de la stabilité du pays. Plus récemment, en février 2021, Irakli Garibashvili  est devenu Premier ministre, remplaçant Giorgi Gakharia, qui plus tard dans l'année a formé son propre parti d'opposition. En octobre 2021, Saakashvili est retourné en Géorgie, où il a été arrêté et condamné à six ans de prison pour abus de pouvoir. 

Le soutien populaire et gouvernemental à l'intégration avec l'Occident est élevé en Géorgie. L'adhésion à l'Union européenne et à l'OTAN fait partie des principaux objectifs de politique étrangère du pays. La volonté de l'adhésion de la Géorgie à l'Union européenne a été réaffirmée avec force par la présidente, Salomé Zourabichvili (née en France, ancienne ambassadrice de France en Géorgie, et  élue à la présidence le 28 novembre 2018) à la suite de de l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022.

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