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Le mot porte
désigne à la fois l'ouverture ou la baie pratiquée
de plain-pied dans une muraille pour servir de dégagement et d'issue,
et l'ouvrage mobile de bois ou de métal destiné à
la clore. Celui-ci emprunte sa forme à celle-là. Certains
peuples, comme les Chinois
et les Arabes, ont donné à leurs portes des configurations
singulières, telles que le trèfle ouvert, l'arc
surbaissé ou chargé de dentelures. En Occident, les formes
adoptées en architecture, selon les styles, sont le quadrangle,
le cintre et l'ogive.
La forme quadrangulaire a été employée la première,
en raison de sa simplicité logique, et de l'usage facile des matériaux
les plus grossiers : une porte de ce genre se compose de deux jambages
ou pieds-droits, sur lesquels repose un
linteau. Vitruve a distingué trois espèces
de portes quadrangulaires dans les temples : l'ionique,
la dorique, et la corinthienne.
L'emploi des cintres en maçonnerie
marque dans l'art de construire une période nouvelle, dont la date
chez les Anciens
ne saurait être déterminée d'une manière précise.
Vitruve
n'a pas parlé des portes cintrées, mais les architectes modernes
ont cherché à en fixer les proportions : dans l'ordre
toscan, une porte doit avoir en hauteur deux fois sa largeur; dans
le dorique, deux fois et un sixième;
dans l'ionique, deux fois et un quart;
dans le corinthien, deux fois et
demie. Au Moyen Âge ,
la forme ogivale des arcades, l'élancement
des voûtes, l'usage des frontispices
en pignon triangulaire, la difficulté
de trouver d'assez grands linteaux d'un seul bloc de pierre, firent abandonner
les portes quadrangulaires pour les portes en ogive, qu'on petit construire
avec de petits matériaux.
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La
porte fortifiée de l'ancienne abbaye de Saint-Jean-aux-Bois.
Les portes des grandes façades
d'église sont souvent coupées
en deux par un pilier vertical, sur lequel porte un tympan.
Au temps de la Renaissance ,
on revint à l'arc en plein cintre
ou à l'arc surbaissé,
en anse de panier, mais en lui donnant une ornementation beaucoup plus
riche que dans, l'Antiquité. Au XVIIIe
siècle, on employa, dans la composition des portes de palais, les
colonnes,
les plates-bandes sculptées, les
frontons;
on orna de trophées les pieds-droits,
de bas-reliefs les entablements
: de pareilles entrées ressemblent plutôt à des portiques
qu'à des portes. Telles sont, à Paris,
celles du Palais-Royal ,
du Palais de la Légion d'honneur ,
du Palais Bourbon .
Dans les maisons particulières, les portes se distinguent en portes
cochères et portes bâtardes, selon qu'elles peuvent ou non
laisser passer une voiture
A l'intérieur des édifices,
les portes qui servent d'entrée et de communication aux différentes
pièces présentent, sauf quelques accessoires, les mêmes
formes et la même décoration que celles du dehors. Elles sont
souvent encadrées de chambranles,
avec des moulures en plâtre ou en bois;
quelquefois elles sont surmontées de panneaux ou de tableaux appelés
dessus de porte. Dans les palais, la hauteur des plafonds permet l'emploi
des colonnes ou des pilastres,
des frontons, des plates-bandes supportées
par des consoles, des couronnements en sculpture,
etc.
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Porte
méridionale de la citadelle de Hué (Vietnam). Photo
: © Angel Latorre, 2008.
L'ouvrage servant de clôture dans
une porte se compose d'un ou de deux battants ou vantaux. Les plus simples
portes en bois sont arasées, et présentent une surface lisse.
Quand les portes sont à compartiments, elles comportent des ornements
de tout genre, figures, mascarons, moulures
en ove, en perle,
en feuille d'eau, etc. Dans les riches intérieurs,
on les fait en placages de bois précieux.
Les portes des maisons de l'ancienne Grèce
s'ouvraient en dehors, et ceux qui voulaient sortir de chez eux frappaient
un coup du dedans, pour averti, les passants qu'ils eussent à se
mettre à distance. Les portes des Romains
s'ouvraient comme les nôtres; on les ornait d'inscriptions, de dépouilles
d'ennemis vaincus ou d'animaux tués à la chasse; aux jours
de fête, on les couronnait de guirlandes de fleurs et de feuillages;
aux jours de deuil, on y suspendait des cyprès.
Les Anciens ne mettaient des portes qu'aux
baies extérieures; les baies intérieures étaient fermées
par des voiles ou des tapis. Au Moyen âge
et à la Renaissance
surtout, les portes en bois ont servi de champ aux sculpteurs, qui les
ont couvertes de figures en bas-relief.
On peut citer, parmi les monuments de ce genre : plusieurs portes des Loges
du Vatican, sculptées par Jean Barile
d'après les dessins de Raphaël
ou de quelqu'un de ses élèves; les portes de l'église
St-Maclou, à Rouen, qu'on attribue à Jean
Goujon; dans les galeries du Louvre, plusieurs
battants sculptés sur les dessins de Lebrun; la porte principale
de Notre-Dame
de Paris, faite sous la direction de Soufflot.
La peinture a servi également à
décorer les compartiments des portes. Des battants en bois ont été
aussi recouverts de métal plaqué, comme ceux de la porte
antique du Panthéon d'Agrippa, à
Rome .
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Porte
d'une chapelle, à Rouen.
Quant aux portes de bronze,
elles ne remontent pas au delà du XIe
siècle, époque où.furent fondues à Constantinople,
par Staurachios Tuchitos de Chio ,
celles qui ornèrent la basilique
de Saint-Paul. C'est de Constantinople que furent apportées, au
XIIIe siècle, les portes de l'église
Saint-Marc à Venise. Mais déjà,
en 1180, Bonanno, artiste de Pise, avait fondu les portes de la cathédrale
de cette ville. Celles de la cathédrale de Novogorod
en Russie
sont de la même époque et de fabrication byzantine .
Le chef-d'œuvre en ce genre, ce sont les portes du baptistère
de Florence. Parmi les ouvrages modernes, on peut mentionner, à
Paris, la porte qui sert d'entrée à la cour du Louvre par
le côté de la colonnades,
celles de la galerie d'Apollon dans le même palais, et la porte de
l'église de la Madeleine.
Les portes pratiquées dans les
enceintes des grandes villes ont été généralement
des constructions monumentales, surmontées de bâtiments ou
garnies de tours. On en voit des restes grandioses en Égypte .
Comme modèle romain en France ,
on petit citer la porte d'Arroux, à Autun.
Il ne faut pas, pour les constructions de ce genre, employer indifféremment
les noms de Porte et d'Arc de Triomphe
: dans les portes, il y a deux ouvertures ou arcadeségales;
dans les monuments triomphaux, il n'y a qu'une arcade, ou bien une grande
arcade accompagnée de deux plus petites. Cependant l'usage a souvent
confondu les deux termes, et de véritables portes ont été
bâties par les Modernes dans le style consacré aux arcs de
triomphe : telles sont, à Berlin, la
porte dite de Brandebourg; telles étaient, à Paris,
les portes Saint-Antoine
et Saint-Bernard .
Réciproquement, on a donné le nom de portes aux arcs élevés
en l'honneur de Louis XIV à l'entrée
des rues Saint-Denis
et Saint-Martin .
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Portes
d'hôtels particuliers, dans le Marais, à Paris. Photos
: © Serge Jodra, 2009 - 2010.
Dans les villes de guerre, au temps de
la fortification dominante et avant l'emploi des ouvrages extérieurs,
les portes étaient flanquées de deux tours, et on en défendait
les approches à coups de flèches. Lorsque l'assiégeant
se fut préservé des traits au moyen de la tortue, et qu'il
put, soit battre les portes avec le bélier, soit les attaquer par
le feu, on les fortifia par des garnitures de métal, on les recouvrit
de cuirs saignants, on établit des ouvertures pour pouvoir inonder
les foyers incendiaires. Puis, au lieu de placer les portes entre deux
tours rondes, on les mit au milieu d'une tour carrée, surmontée
de mâchicoulis; la baie fut garnie de doubles portes et de herses.
Quand l'artillerie permit d'attaquer de loin et avec succès ces
défenses, les portes furent protégées par de larges
fossés, des ponts-levis et des barbacanes,
par des palissades, des braies et des bretèches. L'attaque, perfectionnant
aussi ses moyens, se servit de pétards , contre lesquels on a su
se défendre encore, en cachant les portes à la vue du dehors,
en les perçait dans un ravelin ou une demi-lune, en en couvrant
les abords par des éperons, etc. (B.).
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Porte
centrale de la basilique Saint-Denis.
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