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La géographie
zoologique est la science qui s'occupe de la distribution géographique
des animaux à la surface du globe et qui
recherche les causes de cette distribution, afin de comprendre la constitution
des faunes. La faune d'un pays est l'ensemble des
animaux qui l'habitent et lui donnent son caractère zoologique,
de même que la flore, ou l'ensemble des plantes
qui croissent dans son étendue, lui donnent son caractère
botanique. Ces deux éléments, faune et flore, dépendent
étroitement l'un de l'autre, car les animaux phytophages ne se trouvent
que là où poussent les plantes qui leur conviennent, et la
flore à son tour est sous la dépendance de la constitution
géologique du pays : en outre, animaux et végétaux
sont directement ou indirectement influencés par le climat propre
à la région qu'ils habitent. Mais ce n'est pas tout : les
variations séculaires dans la forme des continents et des mers dont
l'étude fait l'objet de la géologie,
les faunes anciennes (animaux fossiles), dont
l'étude fait l'objet de la paléontologie, sont les premiers
facteurs de la constitution des faunes actuelles, car on peut dire que
celles-ci ne sont formées que des lambeaux de celles qui les ont
précédées. Les connaissances les plus étendues
sont donc nécessaires au naturaliste, dès qu'il ne se contente
plus de dresser simplement la liste des animaux qui constituent une faune,
et veut remonter jusqu'aux causes qui ont déterminé la réunion
de ces formes zoologiques sur ce point particulier du globe, et reconstituer
l'histoire de cette faune.
La constitution
des faunes.
La question de nourriture est donc celle qui influe le plus sur la composition de la faune d'un pays, les questions d'origine (géologie et paléontologie) étant mises à part. Si la flore est abondante, comme dans les régions de forêts ou de plaines fertiles, arrosées par de nombreux cours d'eau, la faune sera également très variée parce que l'on y trouvera les animaux qui se nourrissent de ces plantes et de plus les animaux carnassiers qui font leur proie des animaux herbivores. C'est ainsi que le Tigre (Felis tigris) se trouve jusque dans la vallée de l'Amour, au Sud-Est de la Sibérie, malgré la température basse de cette contrée, parce que les Sangliers (Sus scrofa) abondent dans cette vallée. De même, le Lion (Felis Ieo) se montrait à une époque encore récente aux environs de Chiraz, en Iran, parce que les forêts de chênes y font prospérer ce même gibier dont le Lion faisait également sa nourriture. La constitution géologique et géographique d'un pays a sur la composition de sa faune une influence de premier ordre et pour ainsi dire originelle, au point que l'on peut dire que les grandes régions zoologiques du globe sont beaucoup mieux caractérisées par les modifications fauniques que nous révèle leur histoire paléontologique que par la comparaison des chiffres résultant du dénombrement de leur population zoologique actuelle. Sclater et Wallace ont considéré comme faisant partie d'une même région zoologique tous les pays où l'on trouve au moins un tiers de la faune des Vertébrés supérieurs (Mammifères, Oiseaux), représenté par des genres particuliers, propres à cette région. On arrive à un résultat beaucoup plus précis en comparant les faunes actuelles aux faunes fossiles qui les ont précédées, et en tenant compte des ressemblances et des différences qui ressortent de cette comparaison. On est frappé tout d'abord de ce fait que les faunes actuelles de l'hémisphère austral ont un faciès archaïque beaucoup plus marqué que celui des faunes de l'hémisphère boréal. Ainsi la région australe (Australie), avec ses Marsupiaux et ses Monotrèmes, a conservé, presque sans mélange, un faciès crétacé, qui ne se retrouve nulle part ailleurs. La région néotropicale (Amérique du Sud) vient ensuite, avec des Didelphes (Marsupiaux), moins caractéristiques il est vrai, et les Rongeurs subongulés lui lui sont propres : son faciès est éocène. La région éthiopienne, dans son ensemble, présente un faciès tertiaire Madagascar avec ses Lémuriens particuliers est éocène l'Afrique continentale avec ses Girafes, ses Antilopes, ses Zèbres et le genre Hyaemoschus, est miocène. La sous-région orientale (Inde) est pliocène. Enfin, le Nord des deux continents (région holarctique) présente un faciès quaternaire ou moderne par suite de la disparition des grands Mammifères tertiaires (Eléphants, Rhinocéros, etc.). La constitution géologique et les variations plus ou moins considérables que le climat et la flore de ces différentes régions ont éprouvées d'une époque à l'autre, expliquent les modifications que la faune a subies par une conséquence naturelle et inévitable. Dans bien des cas, c'est la geologie qui nous donne à elle seule la véritable solution des problèmes que soulève l'élude de la constitution des faunes. Ces considérations s'appliquent également aux îles, quelle que soit leur dimension, et lors, même qu'il s'agit de régions insulaires d'une étendue telle qu'on peut les considérer comme de véritable continents. Malgré son voisinage de l'Afrique et sa vaste superficie, Madagascar n'a pas de grands Mammifères, et le petit Hippopotame (Chaeropsis), les oiseaux gigantesques (Aepyornis) qu'on y trouve à l'état fossile sont des indices insuffisants pour nous permettre d'affirmer qu'elle s'y soit rattachée d'une façon beaucoup plus complète à une époque antérieure. Le reste de sa faune semble indiquer un centre de dispersion bien distinct qui a pu rayonner d'une part vers l'Afrique australe, de l'autre vers le Sri Lanka et l'Insulinde, avant que cette grande île et les îles Mascareignes qui en dépendent aient été réduites à leurs limites actuelles. De même la Nouvelle-Zélande dont la faune mammalogique est si pauvre et la faune ornithologique si remarquable, doit ces particularités à son isolement, loin de tous les grands continents tertiaires. Les archipels de la Polynésie, à part quelques rats (Mus), sont totalement dépourvus de Mammifères terrestres, mais possèdent des Chauves-Souris et des Oiseaux variés, c.-à-d. des Vertébrés pourvus d'ailes, et qui, grâce à leur vol, ont pu coloniser ces régions lointaines. Au contraire, les grandes îles indonésiennes (Bornéo, Sumatra, Java) qui possèdent l'Eléphant, le Rhinocéros, le Tigre et beaucoup d'autres grands Mammifères, montrent par cela même qu'elles sont détachées depuis peu du continent sud-asiatique, ce que vient confirmer l'étude de leurs formations géologiques. Lorsqu'une faune est formée de types très variés, on peut affirmer qu'elle a subi beaucoup de remaniements par suite de bouleversements géologiques et de migrations successives : telle est, par exemple, la faune du Mexique, région où s'opère d'une façon insensible le mélange des faunes néotropicale et néarctique. Les faunes de l'Australie et de Madagascar, au contraire, ont très peu varié depuis l'époque crétacée ou l'époque éocène. Par contre, une ressemblance très grande entre deux faunes séparées par de larges mers indique une séparation relativement récente telles sont, par exemple, les faunes des régions paléarctique et néarctique (Europe, Sibérie, Amérique du Nord), et plus au Sud la faune du pourtour de la Méditerranée (Europe du Sud, Asie Mineure, Afrique du Nord) ou de la sous-région méditerranéenne, qui presente une grande uniformité. Les transformations géologiques et les changements de climat qui en sont la conséquence nous donnent également la clef des ressemblances que les faunes de toutes les chaînes de montagnes de l'Europe présentent avec la faune arctique et présentent entre elles, tandis qu'elles diffèrent des faunes des plaines qui s'étendent à leur pied. Ce phénomène de disjonction s'explique par l'extension, sur toute l'Europe, du climat de la période glaciaire, extension qui amena jusque dans le Sud de ce pays la faune des régions arctiques. Cette faune vécut alors jusque dans les plaines et les vallées du Sud de la France. Au retour d'un climat plus doux, ces animaux arctiques abandonnèrent les plaines et se retirèrent sur les montagnes à température plus basse, où ils continuèrent à vivre comme dans des îles, tandis que les plaines se peuplaient d'animaux venus des régions méridionales. On sait que la période glaciaire détruisit complètement, dans le centre de l'Europe, la riche végétation de la fin de l'époque tertiaire (Néogène), forçant par suite à émigrer vers l'Afrique ou l'Asie la faune pliocène qui vivait au milieu de cette végétation. La période glaciaire substitua à cette faune la faune des toundras arctiques; puis, lorsque le climat fut redevenu plus doux, mais avant que les forêts aient eu le temps de repousser, cette faune arctique fut remplacée peu à peu par la faune des steppes asiatiques; enfin la réapparition des forêts fit reculer vers l'Est cette faune des steppes et constitua la faune actuelle. On peut donc dire que, depuis la fin du Néogène jusqu'à l'époque actuelle, quatre faunes bien distinctes se sont succédé sur le sol de l'Europe centrale. Des phénomènes du même genre se sont produits dans l'Amérique du Nord et en Asie, sans que le sol même de ces régions ait été profondément bouleversé et recouvert par la mer : cependant la configuration des côtes occidentales de l'Europe devait être au début de l'époque quaternaire (Pléistocène) très sensiblement différente de ce qu'elle est actuellement : les îles Britanniques étaient encore reliées au continent et le Gulf strearn ne réchauffait pas les côtes du Nord de la France et du Sud de la Scandinavie. Le percement du Pas-de-Calais et l'entrée de ce courant tiède dans la mer du Nord a été la principale cause du relèvement du climat et des changements qui se sont produits dans la flore et dans la faune. En résumé, on peut dire que les causes qui déterminent la composition de la faune d'une région zoologique peuvent toutes se ramener à l'un des quatre chefs suivants (A. Milne Edwards) : 1° le mode de locomotion auquel les animaux qui composent cette faune sont appropriés (faunes insulaires, exclusivement formées de types ailés);Cette dernière considération est celle qui domine toutes les autres lorsque l'on se pose la question de savoir « quel est le type zoologique (classe) qui caractérise le mieux la faune d'une région donnée » ? Les types inférieurs (lnvertébrés), tels que les Mollusques et les Insectes, sont d'un faible secours pour caractériser les régions zoologiques, car il faut arriver jusqu'aux genres et aux espèces pour trouver des différences d'une région à l'autre : cela tient à l'ancienneté géologique de ces animaux dont les familles encore vivantes présentaient déjà leurs caractères actuels à l'époque secondaire (Mésozoïque) et n'ont presque pas varié depuis cette époque, malgré les modifications profondes subies par les continents. La plupart des familles d'Invertébrés sont en effet cosmopolites. Il en est tout autrement des Vertébrés et plus particulièrement des Mammifères qui n'ont eu leur entier développement qu'à l'époque tertiaire (Paléogène et Néogène), et se sont même profondément modifiés dans le cours de cette période. Certaines familles et même certains ordres sont seuls restés sans changements appréciables, sans doute parce qu'ils n'ont pas subi de migrations et que les conditions d'existence sont restées les mêmes dans leur berceau primitif. Tels sont les Monotrèmes et les Marsupiaux si caractéristiques de la région australe et qui gardent un faciès secondaire, les Lémuriens, caractéristiques de certaines parties de la région éthiopienne (Madagascar) et qui gardent un faciès éocène, certains Rongeurs et certains Edentés, types de familles bien distinctes, et qui sont presque exclusivement propres à l'hémisphère austral. Les Mammifères terrestres, lorsqu'ils existent, sont donc de tous les animaux d'une faune ceux qui caractérisent le mieux la région zoologique à laquelle cette faune appartient. A défaut de Mammifères, connue cela a lieu dans les îles de la Polynésie, ce sont les Oiseaux et les Vertébrés à sang froid qui doivent caractériser la faune d'un pays. Les Oiseaux et les Chauves-Souris, pourvues d'ailes comme les Oiseaux à ailes bien développées, sont à peu près les seuls représentants de cette faune insulaire. Il est facile de constater que ces animaux sont venus en volant des continents voisins (Australie et Malaisie); par suite, ils caractérisent très incomplètement cette faune. Les Reptiles terrestres, dont les moyens de locomotion sont comparables à ceux des Mammifères, sont de meilleurs indices. C'est ainsi qu'à la Nouvelle-Zélande existe un curieux Lézard, l'Hatteria punctata, type unique, à l'époque actuelle, de la famille des Rhynchocephalidae qui se rattache, par ses caractères internes, à un ordre de Reptiles qui vivaient en Europe à l'époque jurassique (Homoeosaurus, Pleurosaurus, etc.) et forment avec lui les Rhynchocephalia de Gunther. C'est la preuve de l'antique origine de ce petit continent, qui possédait à une époque plus récente toute une faune de grands oiseaux sans ailes (Dinornis) dont le curieux Apteryx est le dernier survivant. Les Batraciens sont également très caractéristiques des faunes auxquelles ils appartiennent. Etroitement attachés aux eaux douces par suite des métamorphoses qu'ils y subissent dans leur jeune âge, ces animaux ne s'écartent jamais volontairement du bassin hydrographique qui est leur territoire d'origine, et comme leurs conditions d'existence ont très peu varié depuis le Mésozoïque, les principales familles de cette classe sont généralement cantonnées dans des régions zoologiques bien délimitées. Cependant, comme la configuration des continents a changé depuis l'époque secondaire, on s'aperçoit que les grandes régions zoologiques qu'on voudrait délimiter en prenant pour base les Batraciens, ne coïncident pas avec les régions zoologiques établies d'après la distribution géographique des Mammifères. Les Poissons d'eau douce sont dans le même cas que les Batraciens, et Gunther a pu dire que « les organismes d'eau douce sont ceux qui ont le moins varié depuis leur origine », bien que cette origine remonte, pour les Poissons, souvent jusqu'à l'époque paléozoïque. C'est ainsi que les Dipnoïques, qui habitent encore les eaux douces de l'Australie (Ceratodus), de l'Afrique (Protopterus) et de l'Amérique du Sud (Lepidosiren) datent du Dévonien; les Ganoïdes, qui sont encore représentés dans les eaux douces de l'Amérique du Nord (Lepidosteus), ont cessé d'exister, partout ailleurs, depuis l'époque crétacée. Ces types ichtyologiques ne se sont conservés que grâce à ce que l'on peut appeler leur « internement dans les eaux douces », car dès la fin du Mésozoïque, ils n'existaient plus dans aucune mer. Les caractères
fauniques.
Influence des
humains sur la faune des continents et des îles.
D'un autre côté, les humains ont transporté avec eux, sur presque tous les points du globe, ses animaux domestiques, et en a peuplé des îles autrefois dépourvues de toute espèce de Mammifères. Les Rats et les Souris, parasites et commensaux de l'humain, l'ont suivi dans toutes ses migrations et se sont partout installés près de lui. Les Chevaux et les Boeufs domestiques vivent aujourd'hui à l'état sauvage dans les prairies de l'Amérique du Nord, les Pampas de La Plata, le désert australien. Les Chèvres et les Cochons ont prospéré sur presque toutes les îles de l'Océanie; les Moutons sont la principale richesse agricole de l'Australie. Le Lapin sauvage (Lepus cuniculus), transporté également en Australie et en Nouvelle-Zélande, a si bien prospéré et s'est multiplié dans des proportions tellement inquiétantes pour la culture, que les gouvernements de ces pays ont dû prendre des mesures exceptionnelles pour restreindre sa fécondité, le fusil du chasseur étant impuissant contre le nombre. Dans ces mêmes contrées, les humains ont transporté, avec un grand nombre de plantes dont ils font fait leur nourriture, les Insectes qui vivent en parasites sur ces végétaux, et qui s'y sont acclimatés comme eux. Ces migrations volontaires ou involontaires, souvent répétées depuis les temps historiques, ont si bien modifié la composition de certaines faunes qu'il est quelquefois difficile de dire si telle on telle espèce est indigène ou introduite, ce que les documents écrits que nous possédons, et qui ne remontent pas au delà de quatre ou cinq siècles, ne suffisent pas toujours à décider. Faunes marines.
La faune d'un océan se subdivise en faune littorale et faune pélagique. A la première appartiennent les animaux sédentaires qui s'éloignent peu du rivage, et sont plutôt comparables, par leur distribution géographique, aux animaux terrestres. La seconde est formée de tous les animaux marins pourvus de moyens de locomotion plus puissants et qui voyagent d'un continent à l'autre : ceux-ci sont comparables aux Oiseaux et aux autres animaux aériens. Mais il ne faut pas oublier que beaucoup de types pélagiques dans leur jeune âge, sont littoraux à l'âge adulte, et la plupart des animaux pélagiques de grande taille (Poissons, Cétacés) se s'approchent des côtes pour se reproduire ou pour trouver une nourriture plus abondante. Beaucoup de poissons marins remontent périodiquement les fleuves, passant ainsi sans difficulté de l'eau salée à l'eau douce et réciproquement, et c'est ce qui explique comment presque tous les organismes d'eau douce ont en des ancêtres marins dont on trouve les débris dans les couches géologiques anciennes. Faune des hauts
sommets et faune des grandes profondeurs.
Il en est de même dans la mer : la faune littorale se subdivise en plusieurs étages sous-marins ou zones (zones entières) dont chacune a sa faune particulière, caractérisée par un certain nombre de types qui se rencontrent rarement en dehors de cette zone. Plus profondément encore on trouve la faune abyssale ou des grandes profondeurs qui s'étend jusqu'à plus de 5000 m, et dont les explorations sous-marines ont montré la richesse en types spéciaux, intéressants et variés. Cette faune abyssale se subdivise elle-même en plusieurs zones, dent chacune a sa faune particulière. (E. Trouessart). |
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