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L'histoire du Canada
De l'arrivée des Européens à 1900
Les premières reconnaissances des côtes canadiennes par les Européens datent de la fin du XIVe siècle (La découverte de l'Amérique). Jacques Cartier remonta le St-Laurent en 1534, et prit possession de tout le pays au nom de François ler . Le Canada est alors connu sous le nom de Nouvelle-France. La Roque de Roberval, nommé vice-roi en 1542, fonda non loin de l'endroit où depuis fut bâti Québec le fort de Charlebourg. En 1608, Samuel Champlain jeta les fondements de Québec. Une compagnie française se forma en 1617 pour exploiter la colonie. Les Anglais avaient déjà tenté plusieurs fois (1629, 1711), mais inutilement, de s'en emparer, lorsque la guerre éclata avec la France en 1754. Après de nombreux combats, dans l'un desquels succomba Moncalm, les Anglais finirent par conquérir tout le Canada, en 1759 et 1760; il leur fut définitivement cédé en 1763 par le traité de Paris. Au commencement de la guerre de l'indépendance, les (futurs) États-Unis envahirent le Canada (1775), mais sans succès. Le Bas-Canada fut, en 1812, le théâtre de longues hostilités entre les Anglais et les Américains.

Dès 1791, un arrêt du parlement anglais proclama la séparation du Haut et du Bas-Canada. Ce dernier est régi en grande partie par l'ancienne coutume de Paris, et les habitants ont encore conservé les moeurs françaises; le catholicisme y domine. Les habitants du Haut-Canada sont plus Anglais et professent en grande partie la religion de la métropole. Des restrictions apportées au commerce et à la liberté ayant excité de grands mécontentements, surtout dans la population française, il éclata au Canada en 1838 et 1839 de violentes insurrections l'Angleterre est parvenue à les réprimer; néanmoins, il y subsiste encore à cette époque un parti puissant qui aspire à l'indépendance et qui veut l'annexion du pays aux États-Unis. Les deux Canadas ont été réunis en 1840. Le siège du gouvernement commun, établi d'abord à Kingston, puis à Montréal, a été ensuite fixé à Ottawa (1859), après une vive opposition. 

En 1867, le Canada acquiert une première autonomie (elle s'élargira en 1926, pour devenir une indépendance de fait en 1931, et une indépendance complète en 1982), et se dote d'un gouvernement propre (British North-America Act) établi sur des bases fédéralistes. L'opposition entre les deux principales composantes d'origine européenne, la francophone et l'anglophone, continuant de dominer la vie politique au cours de décennies suivantes.

Dates-clés  :
1497 - Jean Cabot reconnaît les côtes occidentales du Canada.

1534 - Jacques Cartier prend possession du pays au nom de la France.

1603 - 1635 - Samuel Champlain lance la colonisation du Canada.

XVIIe siècle - Grande activité d'évangélisation auprès des populations amérindiennes; guerres entre Algonquins, Iroquois, Hurons et Européens.

1754-1759 - Conquête militaire du Canada par la Grande-Bretagne.

1767 - Traité de Paris (reconnaissance par la France de la souveraineté anglaise sur le Canada).

1791 - Constitution destinée à assurer les équilibres entre les communautés anglophones et francophones.

1867 - Acte d'autonomie du Canada. Adoption d'un système fédéraliste.

Les premiers établissements

Les éclaireurs.
On doit la reconnaissance des côtes orientales du Canada à deux navigateurs génois au service de l'Angleterre, Jean et Sébastien Cabot. Le premier atteignit le littoral du Labrador en 1497; le second découvrit Terre-Neuve l'année suivante. Le Portugais Corte-Real suivit bientôt leurs traces (1500-1501). En 1506 les Français apparaissent à leur tour dans ces parages Jean-Denis, de Honfleur, explore l'embouchure du Saint-Laurent et laisse la première carte de cette région. Dès lors, les marins Normands, Bretons et Basques, iront annuellement s'établir sur les côtes de Terre-Neuve et de l'île du cap Breton pour la pêche de la morue. La royauté ne pouvait pas se désintéresser du mouvement spontané qui poussait ainsi les populations de l'Ouest de la France vers l'Amérique. En 1524, François ler, charge le Florentin Jean Verazzano de découvrir le passage d'Europe en Chine. Verazzano, après avoir abordé en Floride, visite de nouveau l'embouchure du Saint-Laurent, Terre-Neuve et les îles voisines; il en prend même possession au nom du roi, son maître : c'est de cette prise de possession que date le nom de Nouvelle-France. Il disparaît dans un troisième voyage, probablement victime des Portugais qui surveillaient avec jalousie les efforts des Français pour conquérir leur part du nouveau monde. 

Mais le Breton Jacques Cartier reprend ses projets. En 1534 il reconnaît que Terre-Neuve est une île; en 1536 il remonte le Saint-Laurent jusqu'à Hochelaga (sur l'emplacement actuel de Montréal), où il hiverne et où il entre en rapport avec les indigènes, avec les sauvages, pour leur donner le nom qui sera dès lors en usage depuis le XVIe siècle parmi les Français d'Amérique. En 1541, il débarque même quelques colons qui devaient s'établir dans le pays sous la direction de Roberval, nommé vice-roi; mais en 1545 il fallut les rapatrier. Quoique peu lettré, Jacques Cartier nous a laissé un Discours sur ses découvertes; c'est lui qui aurait donné au pays le nom de Canada (d'un mot iroquois qui signifierait réunion de cabanes), connu cependant sous l'appellation plus politique de Nouvelle-France. Mais la lutte avec Charles-Quint allait recommencer, bientôt suivie des guerres civiles, et, pour la première fois, les nécessités de la politique européenne de la France allaient entraver l'oeuvre colonisatrice de ce pays en Amérique. Henri Il, François Il et Charles IX ont oublié le Canada; Henri III n'y pense qu'un moment pour accorder un vain titre à un courtisan. II est vrai que les marins français continuent sur le banc de Terre-Neuve leurs fructueuses campagnes de pêche et que même ils commencent la traite des pelleteries avec les Indiens.

Le début de la colonisation.
Aussi bien, à peine Henri IV a-t-il traité avec l'Espagne et proclamé l'édit de tolérance, qui met fin aux guerres religieuses (La Renaissance), qu'il songe à établir d'une manière définitive la domination française en Amérique. Il a cependant à lutter contre le mauvais vouloir de Sully, qui se déclare systématiquement l'adversaire de toute politique coloniale. De La Roche, Chauvin et de Chastes (1598-1602) reçoivent successivement le privilège du commerce des pelleteries; ils échouent. En 1603, Pierre du Gua, sieur de Monts, obtient pour dix années la concession de tous les pays situés au Sud du Saint-Laurent, entre le 40e et le 46e parallèle. Il eut l'heureuse fortune d'emmener avec lui un officier de la marine royale d'une intelligence et d'une énergie incomparables, Samuel de Champlain (né à Brouage, Saintonge). Un avocat de Paris, Marc L'Escarbot, les accompagnait; nous lui devons une relation aussi agréable qu'intéressante de son séjour au delà de l'Atlantique. Champlain fut bientôt laissé en Amérique avec une délégation de De Monts qui lui fut maintenue lorsque celui-ci perdit son privilège. Bien qu'il ne soit en réalité que le représentant d'une compagnie de marchands et ensuite le lieutenant des vice-rois et gouverneurs qui furent nommés par Henri IV et Louis XIII, mais qui demeurèrent en Europe, il a été le véritable fondateur de la colonie française au Canada.

Jusqu'alors on avait conçu en France les plus chimériques espérances à l'égard des terres neuves de l'Amérique. Pour les uns, la Nouvelle-France devait receler dans son sein d'inépuisables mines d'or, comme la Nouvelle-Espagne; pour les autres, elle n'était qu'une étape sur la route la plus rapide et la plus commode vers la Chine et les Indes. Champlain comprit quel parti l'on devait tirer de cet immense pays si fertile et si salubre, situé presque tout entier dans la zone tempérée; il rêva d'en faire une grande colonie de laboureurs. Pendant trente années son activité tient véritablement du prodige. Tantôt il est à Paris, réchauffant l'ardeur du roi, des marchands et des ordres, religieux et recrutant des colons, tantôt il est au Canada, surveillant de près l'établissement des premières familles françaises (fondation de Québec, 1608), explorant la région du Saint-Laurent dans tous les sens (à l'Ouest jusqu'au lac Ontario, au Sud jusqu'au lac qui porte son nom). Il gagne, dit sa légende, le coeur des Amérindiens par sa franchise et sa générosité. Et cependant, malgré tous ses efforts, la colonie végète : les compagnies qui se succèdent ne sont guère préoccupées que du succès financier de leurs entreprises et ne cherchent pas à déterminer en France un courant d'émigration vers l'Amérique; enfin il y a peu de chose à obtenir du gouvernement royal. 

Tout change lorsque Richelieu parvient au ministère. Il favorise la formation d'une nouvelle compagnie, dite des cent associés; en échange du monopole du commerce, elle s'engageait à transporter au Canada 4000 colons en quinze années. Les articles qui lui furent accordés en 1627 nous révèlent quelles étaient les intentions du ministre à l'égard des Indiens. Il y a là le programme d'une politique sinon désintéressée, du moins qui contraste singulièrement avec les odieux traitements infligés aux indigènes américains par les Anglais et les Espagnols. Louis XIII déclare dans le préambule qu'il s'agit « d'amener les peuples qui habitent la Nouvelle-France à la cognoissance de Dieu et les faire policer », et que le seul moyen d'obtenir un tel résultat « était de peupler ledit pays de Français catholiques, pour, par leur exemple, disposer ces naturels à la religion chrétienne et à la vie civile ». L'année suivante, le roi publiait des instructions encore plus explicites :

« Ordonnons que les descendants des Français qui s'habituent audit pays, ensemble les sauvages qui seront amenés à la cognoissance de la foy et en feront profession, soient désormais censés et réputés pour naturels français... »
Jusqu'alors les protestants avaient pris part à la colonisation du Canada; ils allaient en être exclus à l'avenir. On peut expliquer, sinon tout à fait justifier, une mesure si rigoureuse, en considérant que la charte de la nouvelle compagnie fut rédigée au camp, devant la Rochelle. Du reste, les protestants français n'allaient pas tarder à fournir la preuve de leur entente avec nos ennemis, aussi bien en Amérique qu'en Europe. Jacques Ier avait octroyé à une compagnie anglaise les territoires que nous avons déjà vu concéder par Henri IV au sieur de Monts. Établis dans la baie de Chesapeake, les Anglais voulurent profiter de la guerre qui éclatait entre les deux couronnes pour s'emparer de la vallée du Saint-Laurent. Une première tentative échoua en 1628, grâce à l'attitude résolue de Champlain; mais l'année suivante, une flotte commandée par David Kertk débarqua devant Québec une petite armée composée par moitié d'Anglais et de protestants français. Cette fois, Champlain dut capituler. A la paix de Saint-Germain (1632), la Grande-Bretagne fut contrainte de restituer tout ce qu'elle avait conquis à aux dépens de la France en Amérique. Champlain retourna à Québec et reconstitua tant bien que mal la petite colonie qui avait été dispersée par la conquête anglaise, mais il mourut bientôt (1635), ayant beaucoup fait par lui-même, ayant surtout indiqué la marche à suivre.

Le temps de « Robes noires  ».
Le successeur de Champlain fut Montmagny. Les Indiens essayèrent de traduire son nom et l'appelèrent Ononthio. c.-à-d. la grande montagne. Par la suite, ils imposèrent ce nom à tous les gouverneurs français, et leur souverain lointain, le roi de France, devint pour eux le grand Ononthio. Cependant la colonie faisait quelques progrès. Québec s'épanouissait et se fortifiait (château Saint-Louis), et deux autres cités naissaient sur le grand fleuve, en amont de la petite capitale, Trois-Rivières (1640) et Montréal (primitivement Ville-Marie), qui fut peuplé par des familles champenoises que conduisait Maisonneuve. A l'appel de Champlain, les ordres religieux avaient dès les premiers temps fait leur apparition au Canada : les récollets d'abord, puis les jésuites, qui les supplantèrent en 1633, enfin les sulpiciens, qui se cantonnèrent dans l'île de Montréal qu'ils obtinrent en fief et où ils fondèrent un séminaire bientôt florissant. De leur côté, les jésuites dirigeaient depuis 1636 le collège de Québec, le plus ancien collège de l'Amérique du Nord, puisque celui de Harvard, fondé par les puritains près de Boston, ne date que de 1638. Mais leur oeuvre principale fut la conversion des indigènes. Ils s'attaquèrent aux Algonquins et aux Montagnais, dont les tribus de chasseurs s'éparpillaient depuis la rivière des Outaouais (Ottawa) jusqu'au labrador, et aux Hurons, nation à demi sédentaire qui habitait dans la province actuelle de l'Ontario. Ils couvrirent le pays de missions, le plus souvent allant chercher les Indiens jusque dans leurs bourgades, parfois aussi réunissant les nouveaux convertis dans des villages créés à la portée des forts français, où ils échappaient à l'influence de leurs compatriotes restés rebelles à la prédication (établissement de Sillery, 1638, et plus tard du Sault Saint-Louis et de la prairie de la Magdeleine).

Le succès des Robes noires (tel était le nom donné aux missionnaires par les Indiens) fut d'abord rapide. Malheureusement, la petite vérole, importée d'Europe, décima les Amérindiens, et ceux-ci attribuèrent les ravages de l'épidémie aux maléfices des prêtres, dont la tâche devint dès lors plus pénible et plus périlleuse. La France catholique était tenue au courant des victoires et des revers des ouvriers apostoliques dans le nouveau monde par des relations qui furent annuellement publiées (sans interruption de 1611 à 1672), et qui, composées primitivement pour l'édification des fidèles, demeurent aujourd'hui de précieux documents pour l'histoire du Canada du XVIIe siècle. Les circonstances devenaient de plus en plus défavorables. 

Les Guerres indiennes

Une guerre d'extermination engagée entre les Indiens faillit à la fois compromettre les résultats acquis par les jésuites et même mettre en péril la domination française encore établie sur des bases bien fragiles. Une haine séculaire armait les Iroquois contre les Algonquins et les Hurons. Dispersés depuis les Alleghanys jusqu'au lac Ontario, les Iroquois formaient une confédération de cinq tribus (en allant de l'Est à l'Ouest : les Agniers, les Omeyouts, les Onontaguès, les Goiogouins et les Tsounoutorians). Ils avaient adopté une politique qui témoigne d'un esprit de suite véritablement remarquable. Ils réparaient les pertes qu'une guerre continuelle faisait dans leurs rangs, en adoptant ceux de leurs prisonniers qu'ils ne livraient pas à d'épouvantables supplices. Champlain les avait un peu imprudemment provoqués en prenant tout de suite parti pour leurs ennemis; aussi furent-ils presque toujours les alliés des Hollandais et des Anglais contre les Français. Il ne semble pourtant pas qu'ils aient désiré la chute définitive de la domination française; ils estimaient non sans quelque raison que la rivalité des deux colonies sauvegardait leur indépendance, et qu'elle serait perdue sans remède le jour où une seule nation européenne parviendrait à s'emparer de toute l'Amérique du Nord. En quelques années les Iroquois firent de tels massacres de Hurons, que ce peuple fut pour ainsi dire détruit. Quelques missionnaires, qui tombèrent entre les mains des belligérants, périrent dans d'affreux supplices (le père Jogues, le père de Brébent et le père Lallemant). Quant aux Français, bloqués dans les villes et dans les forts, ils osaient à peine se livrer aux travaux agricoles; la traite avec le pays d'En-Haut (bassin de l'Outaouais et région des Lacs) était souvent interrompue pendant plusieurs mois, et il fallait donner des escortes militaires aux flottilles commerciales qui descendaient ou remontaient le Saint-Laurent. Les successeurs de Montmagny, d'Ailleboust (1648-1651), Lauzon, père et fils (1651-1657), d'Argenson (1658-1661), d'Avaugour (1661-1663), Mezy (1663-1665), furent obligés, faute de ressources suffisantes, de se maintenir sur la défensive, et même de subir, en plus d'une circonstance, de cruelles humiliations.

Les coureurs des bois.
Une autre cause de faiblesse pour la colonie française était l'humeur vagabonde de ses habitants. Il semblait impossible de les attacher à la terre. Entraînés autant par l'amour des aventures que par l'espoir d'une fortune rapide, ils allaient dans la profondeur des bois échanger les peaux de castor et d'orignaux contre de l'eau-de-vie. Les gouverneurs et les missionnaires s'élevaient à la fois avec véhémence contre les coureurs des bois. Les premiers eussent voulu les astreindre à la culture du sol et les avoir toujours sous la main pour la défense contre les Iroquois, les autres s'indignaient de voir l'oeuvre de la conversion compromise par les progrès effrayants de l'ivrognerie chez les sauvages. On résolut de sévir contre les coureurs des bois; mais toutes les ordonnances portées contre eux, si rigoureuses qu'elles fussent, demeurèrent sans effet. Ces enfants perdus ont constitué pour la colonie française une avant-garde; c'est eux qui ont pris possession, au nom de la France, de l'immense plaine comprise entre la baie d'Hudson et le Mississippi, les grand Lacs et le pied des montagnes Rocheuses; ils sont les aïeux de cinquante mille métis qui maintiendront durablement la langue française dans les territoires du Nord-Ouest. Aussi bien la lutte continuelle contre les Iroquois et le pénible labeur des premiers défrichements allaient donner, même à la partie la plus sédentaire de la population canadienne, une force de résistance physique et morale vraiment extraordinaire.

Le retour des politiques.
Cependant les Iroquois ne désarmaient pas. Il y avait péril à laisser prolonger une pareille situation. Tracy débarqua à Québec une petite armée (1665) et les châtia rudement; il pénétra jusqu'au coeur de leur pays et réduisit en cendres leurs bourgades. A son départ, il laissa à Courcelles, successeur de Mezy, le régiment de Carignan-Salières. Licenciés un peu plus tard, après avoir assuré la sécurité de la Nouvelle-France, les vétérans de Carignan lui fournirent d'excellents laboureurs. Colbert commençait à s'occuper du Canada, et faisait partager à Louis XIV l'intérêt qu'il porta toujours à la colonie. La Compagnie des cent associés avait abandonné ses droits à la couronne (1663); Talon fut adjoint à Courcelles, en qualité d'intendant, pour organiser l'administration royale en Amérique. Il y resta jusqu'en 1672.

«  Depuis que M. Talon est ici, écrivait la mère de l'Incarnation, le pays s'est plus fait et les affaires ont plus avancé qu'elles n'avaient fait depuis que les Français y habitent. »
Talon s'était toujours efforcé d'activer l'immigration. En deux années, le chiffre de la population s'était accru de plus de deux mille âmes (3618 en 1666, 5870 en 1668). C'est à cette époque que fut créé l'évêché de Québec (1671) : Montmorency-Laval en fut le premier titulaire. Cependant, par le traité de Bréda (1667), la Hollande avait cédé à la Grande-Bretagne la Nouvelle-Belgique, qui prit le nom de Nouvelle-York; les Canadiens devenaient immédiatement les voisins des Anglais sur toutes les frontières de la Nouvelle-France, et la lutte séculaire, qui ne devait se terminer que par la chute de la domination française en Amérique, allait commencer.
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Québec.
Ancienne vue de Québec. 
(La ville basse et le château Frontenac, hôtel construit en 1892).

Pour remplacer Courcelles, la métropole avait fait un heureux choix en la personne de Frontenac, administrateur habile et intrépide général. Il punit des fonctionnaires convaincus de concussion et se fit craindre des Iroquois. Il favorisa aussi toutes les tentatives d'exploration. Ce fut sous son gouvernement que le père Marquette et Joliet pénétrèrent jusqu'au confluent du Missouri et du Mississippi, le premier alla même mourir sur les bords du lac Supérieur. Cavelier de la Salle consacra vingt années (depuis 1668 jusqu'à son assassinat, 1688) à reconnaître le cours du Mississippi, depuis le pays des Illinois jusqu'au golfe du Mexique. Cet immense territoire fut ajouté aux domaines du roi sous le nom de Louisiane; elle devait former une colonie distincte du Canada. Frontenac, toujours en lutte, soit avec l'intendant Du Chesneau, soit avec l'évêque de Québec et les jésuites, qu'il accusait de faire la traite des pelleteries pour leur propre compte et d'empêcher la francisation des Indiens, fut disgracié en 1682. De la Dasse le fit singulièrement regretter : il consentit à négocier avec les Iroquois une paix défavorable. Le marquis de Denonville ne fut pas plus heureux. Les Iroquois, enhardis par son inaction, firent une descente dans l'île de Montréal et y massacrèrent plus de deux cent personnes (1689). La révolution anglaise de 1688 aggravait encore la situation; les Anglais et les Hollandais, réconciliés sous le gouvernement de Guillaume d'Orange, n'allaient plus laisser de repos au Canada. 

La rivalité franco-anglaise

Pour faire face à tant de dangers, le roi se décida à renvoyer Frontenac à Québec (1689). Celui-ci prit l'offensive et lança sur la Nouvelle-Angleterre des bandes de partisans composées par moitié de Français et d'Amérindiens. Les Anglais firent un grand effort pour se venger; Winthrop envahit le Canada par la route du lac Champlain, et l'amiral Philipps, après avoir fait capituler Port-Royal, la capitale de l'Acadie française, se présenta devant Québec. Mais bientôt l'armée de Winthrop, décimée par la maladie, battait en retraite, et toutes les attaques de Philipps échouaient devant l'énergique résistance de Frontenac. Les Anglais durent se résigner à la défensive, et la Nouvelle-Angleterre fut ravagée par les fidèles de la France, les Acadiens Abénakis. Du reste, les Français triomphaient partout : à Terre-Neuve, où ils emportaient Saint-Jean, et dans la baie d'Hudson, où d'Iberville détruisait les forts de la compagnie anglaise. La paix de Ryswick mit un terme à ces succès. Elle marque l'apogée de la domination française en Amérique. Les Français gardaient la baie d'Hudson, et la limite entre l'Acadie et le Massachusetts était fixée à la rivière Saint-Georges. On laissait les frontières indécises du côté des Iroquois, qui avaient su maintenir leur indépendance.

Frontenac mourut en 1698. Callières, qui avait été son meilleur lieutenant en qualité de gouverneur de Montréal, continua son oeuvre, et il eut l'honneur de réconcilier définitivement les Français et les Iroquois. Toutes les tribus de l'Amérique du Nord adhérèrent à cette pacification, et on enterra solennellement la hache à Montréal (4 août 1701).

Tous ces résultats furent compromis par la reprise des hostilités. La guerre de la succession d'Espagne fut particulièrement funeste à la Nouvelle-France et devint l'occasion de son premier démembrement. Les Anglais, après deux échecs (1704-1707), forcèrent Subercase à leur livrer, en 1710, Port-Royal (qui prit le nom d'Annapolis); mais la tempête les arrêta à l'embouchure du Saint-Laurent. Sur terre, Vaudreuil avait soutenu la lutte sans désavantage. Mais la France n'avait pas été aussi heureuse en Europe, et la nécessité où elle en était de conclure une prompte paix et surtout de faire les plus grandes concessions au cabinet de Londres, qui s'était offert comme médiateur à Utrecht, obligea Louis XIV à abandonner la baie d'Hudson, l'île de Terre-Neuve et l'Acadie. Les plénipotentiaires français n'eurent même pas l'idée de faire déterminer les limites de ce dernier pays, ce qui fut par la suite l'occasion de perpétuels conflits. Les Anglais prétendaient que l'Acadie devait comprendre toute la région située entre l'Océan, la rivière Saint-Georges et le bassin du Saint-Laurent, et d'autre part les Français voulaient ne leur avoir cédé que l'étroite péninsule qui se développe entre la baie française (baie de Fundy) et l'Atlantique. C'était livrer à leur ennemi le golfe du Saint-Laurent, c. -à-d. la porte de la maison. Les Français essayèrent de pallier les effets désastreux du traité d'Utrecht en colonisant et en fortifiant l'île du Cap-Breton (capitale Louisbourg).

Le Canada fit de grands progrès pendant les trente années de paix qui marquèrent la première partie du règne de Louis XV. Vaudreuil (1703-1725) et Beauharnais (1725-1748) laissèrent la réputation de gouverneurs habiles et bien intentionnés. Ils achevèrent le réseau de postes fortifiés qui devaient mettre en communication les diverses parties de l'immense empire colonial français et qui servaient à la fois de places de sûreté et de magasins : dans la région des grands Lacs, fort Cataroconi ou Frontenac, à la sortie du Saint-Laurent de l'Ontario; fort Niagara, entre l'Ontario et l'Érié; fort Détroit ou Pontchartrain, près du lac Saint-Clair, entre le lac Érié et le lac Huron ; fort Michillimakinac, au confluent  du lac Huron et du lac Michigan; fort Beauséjour, dans l'isthme de Shédiac, aux portes de l'Acadie; fort Frédéric, sur le lac Champlain. Beauharnais favorisa de tout son pouvoir les explorations de Varenne de la Vérendrye, qui reconnut le pays entre le Missouri, le lac Supérieur et les montagnes Rocheuses.

Menaces sur la domination française.
Pendant la guerre de la succession d'Autriche, les Anglais s'emparèrent de Louisbourg; mais le futur vainqueur de Minorque, La Galissionnière, sauva la colonie, et, à la paix d'Aix-la-Chapelle, Louisbourg fut rendue à la France en échange de Madras. A la question des frontières de l'Acadie s'ajoutait maintenant la question de la vallée de l'Ohio qu'on réclamait des deux côtés. Pour assurer les communications entre le Canada et la Louisiane, qui commençait à se coloniser, les Français avaient pris les devants et construit sur cette rivière le fort Duquesne (actuellement Pittsburgh). Les Anglo-Américains l'attaquent sans déclaration de guerre. L'assassinat d'un parlementaire, Jumonville, par les miliciens de la Virginie que commandait Georges Washington, et le traitement odieux infligé aux Acadiens demeurés Français de coeur, préludèrent à la guerre qui devait mettre fin à la domination française en Amérique. Cependant, la marine française avait été complètement détruite pendant la dernière guerre, et il devenait presque impossible de ravitailler le Canada; de plus, la disproportion des forces s'était encore accentués entre la colonie française et les colonies anglaises. Tandis que soixante-dix mille Français à peine étaient éparpillés depuis le confluent du Mississippi et du Missouri jusqu'au golfe du Saint-Laurent, plus d'un million de sujets anglais étaient concentrés entre les Alleghanys et l'Atlantique. Enfin le Canada était aux mains d'un gouverneur incapable, Vaudreuil (successeur de La Jonquière et du Quesne), et d'un intendant prévaricateur, Bigot; mais le marquis de Montcalm fut envoyé pour commander les troupes.

Grâce à son génie militaire et à la valeur personnelle de ses lieutenants (Lévis, Bourlamaque, Bougainville), grâce surtout à l'héroïque dévouement de la population qui se leva tout entière pour défendre son indépendance, Montcalm put résister pendant trois années aux efforts désespérés des ennemis, quatre ou cinq fois supérieurs en nombre. Toutes les tentatives qu'ils firent pour envahir le Canada par la voie la plus courte (route de l'Hudson et du lac Champlain), aboutirent à de véritables désastres (prise du fort William-Henry, 1757, bataille de Carillon, 1758). Cependant les Anglo-Américains occupèrent la ligne de l'Ohio et s'emparèrent de Niagara, la clef de la région des grands lacs; bientôt, en faisant tomber Louisbourg, ils conquéraient l'entrée du Saint-Laurent. Il aurait suffi pour sauver la colonie de quelques secours envoyés à propos de la métropole; mais le gouvernement de Louis XV s'était maladroitement engagé en Allemagne contre Frédéric Il, alors qu'il aurait fallu lutter contre l'Angleterre, avec toutes les ressources de la France. Les hommes d'État français n'avaient jamais bien compris l'admirable avenir réservé à la Nouvelle-France, et l'opinion publique, ignorante et abusée, se désintéressait de plus en plus du sort des Canadiens. Voltaire s'étonnait, s'indignait presque qu'un disputât avec tant d'acharnement quelques arpents de neige.

La victoire anglaise.
En 1759, le général Wolfe remonta le Saint-Laurent et parut devant Québec. Il tournait ainsi les positions défensives de Montcalm sur le lac Champlain. Les Français furent écrasés à la journée d'Abraham, où tombèrent à la fois les généraux en chef des deux armées (septembre 1759). L'année suivante, une poignée de braves, commandée par le chevalier de Lévis, faillit reprendre Québec; mais les derniers défenseurs du Canada durent bientôt capituler à Montréal. Le 10 février 1763, le traité de Paris abandonnait définitivement le Canada et toutes ses dépendances à la Grande-Bretagne. Cependant les Canadiens ne pouvaient se résigner à la domination étrangère et surtout ne pouvaient pas croire à l'abandon de la métropole. Les Indiens, eux-mêmes, attachés à la France par deux siècles d'une administration bienveillante, attendaient avec impatience le moment de chasser leurs nouveaux maîtres (prise d'armes de Pontiac, chef des Outaouais). Il fallut pourtant se rendre à l'évidence : les Canadiens comprirent qu'ils ne devaient plus compter que sur eux-mêmes, et, selon la belle expression d'un de leurs poètes (L. Frechette), ils voulurent rester Français malgré la France. Abandonné par les nobles et les riches, qui avaient presque tous émigré aux Antilles, le peuple canadien s'organisa pour la résistance, sous la direction habile et persévérante du clergé catholique.
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Québec.
Vue de Québec, d'après un cartouche ornant une carte de l'Amérique 
septentrionale en 1688, par J.-B.-L. Franquelin.

La nécessaire coexistence

L'histoire politique des Canadiens français depuis 1763 jusqu'au début du XXe siècle pourrait se résumer en quelques lignes : ils conservent opiniâtrement leur langue, leur religion et leurs traditions nationales, et ils profitent du régime parlementaire que leur octroie l'Angleterre pour conquérir l'égalité de droits avec leurs compatriotes d'origine anglaise. Ils furent d'abord soumis à un régime militaire oppressif (gouvernement de Murray), mais il fallut bientôt les mieux traiter, car l'Angleterre avait besoin de leur dévouement contre les Américains après l'insurrection des treize colonies. Ce dévouement, ils ne le marchandèrent pas à la couronne britannique, préférant, à tout prendre, la domination des Anglais d'Europe à celle des Anglais d'Amérique, de ces Bostoniens qui avaient été leurs ennemis les plus implacables. Ils repoussèrent, non sans quelques hésitations, du reste, les offres séduisantes du congrès de Philadelphie, et forcèrent une armée américaine, qui avait investi Québec, à lever le siège (1775-1776). La paix de Versailles acheva de désespérer les Canadiens; la France victorieuse ne stipulait pas la moindre restitution territoriale sur les rives du Saint-Laurent. La guerre d'Amérique eut du reste pour le Canada des conséquences fâcheuses de toute sorte; la colonie fut démembrée au profit des États-Unis et la frontière se trouva reculée à quelques lieues de Québec et de Montréal; enfin le pays fut envahi après la paix par une nombreuse immigration de loyalistes (25 000 environ).

A partir cette époque, l'arrivée continuelle de nouveaux colons d'origine anglo-saxonne a constamment menacé l'existence nationale des Canadiens français. Par l'acte de Québec (1774), ils avaient obtenu le rétablissement des lois civiles françaises, et avaient été dispensés du serment du test; en 1791, la Grande-Bretagne leur accorda le régime représentatif. Le Canada fut divisé en deux provinces (Haut et Bas-Canada). La première où commençaient à s'établir les loyalistes, la seconde peuplée uniquement de Français. Les deux provinces avaient chacune un parlement provincial. On voit que les auteurs de cette constitution avaient surtout en vue de protéger les vainqueurs contre la supériorité numérique des vaincus. Le gouvernement de lord Dorchester fut une période d'apaisement; mais sous ses successeurs (Prescott, Milne, Dunn et Craigh), la lutte commença entre l'administration anglaise et les Canadiens. Il s'agissait pour eux de maintenir l'usage de leur langue dans les délibérations de la Chambre du Bas-Canada, et dans tous les actes de la vie publique. Ils fondèrent alors leur premier journal politique, le Canadien, qui prit pour devise et pour programme : 

Nos institutions, notre langue et nos lois. 
Les haines s'envenimaient, l'administration redevenait oppressive, quand les Anglais eurent encore une fois à lutter avec la confédération américaine. Il fallut, en 1811, demander aux Canadiens français le même concours qu'en 1775. Ils prirent une part importante aux opérations militaires (combat de Chateauguai, où quelques centaines de miliciens, commandés par Salaberry, décident de la victoire). Néanmoins, le traité de Gand (1814), qui mit fin aux hostilités, ne fut pas favorable aux intérêts du Canada; la question des frontières du Maine fut résolue à l'avantage des États-Unis. (Convention de Londres1818, arbitrage du roi de Hollande, règlement définitif par le compromis d'Ashburton, 1846).

Vers un nouveau modus vivendi.
Malgré tant de preuves de fidélité données par les Canadiens français à la couronne britannique, le parti anglais n'entendait pas désarmer. L'augmentation continue de la population anglo-saxonne, due surtout à l'immigration, encourageait ses espérances et exaltait ses prétentions. La constitution de 1791 n'avait plus de raison d'être puisque la supériorité numérique allait bientôt cesser d'appartenir aux Français. On réussit, en 1826, à faire présenter à la Chambre des communes un projet de loi pour la réunion des deux Canadas en un seule gouvernement. 
« Ce bill donnait au Haut-Canada une représentation beaucoup plus nombreuse qu'au Bas-Canada, proscrivait la langue française, restreignait la liberté du culte catholique et les droits des représentants sur les deniers publics, réduisait, en un mot le Canada français à la condition de l'Irlande. » (Laverdière, Histoire abrégée du Canada.) 
Les Canadiens français, dirigés par des activistes énergiques, dont le plus illustre fut Papineau, engagèrent la lutte qui resta longtemps toute légale et toute pacifique; mais en 1837 et 1838, il y eut des soulèvements; ils furent cruellement réprimés (massacre de Saint-Eustache), et le bill d'Union fut promulgué (1840). La langue anglaise était imposée dans les débats parlementaire, et la Chambre se voyait enlever le droit de refuser ou de restreindre les appointements des fonctionnaires et des juges. Le siège du gouvernement fut établi à Kingston (1841), transféré à Montréal (1844); puis on décida que Toronto et Québec auraient alternativement par périodes de quatre années l'honneur d'être la capitale de la colonie; enfin, en 1856, on délaissa Québec et Toronto pour la petite ville d'Ottawa, heureusement située sur la frontière des deux Canadas.

Les Canadiens français songèrent à tirer le meilleur parti possible de la situation qui leur était faite. Tour à tour alliés des conservateurs ou des libéraux du Haut-Canada selon l'intérêt du moment, et mettant à profit les dispositions bienveillantes de lord Elgin, ils finirent par conquérir une part égale dans le ministère (rôle de Lafontaine, Morin, Taché et Cartier). Aussi cette période fut-elle marquée par d'heureuses mesures législatives et par des progrès de toute sorte (organisation du régime municipal et de l'instruction publique; fondation de l'Université de Laval, université française et libre, dirigée par le haut clergé catholique, en 1854); abolition de la tenure seigneuriale, remplacée par une rente foncière peu onéreuse et rachetable. L'avènement d'un régime de justice et de concorde était proche. L'accroissement prodigieux de la population française interdisait à ses adversaires l'espérance d'une victoire définitive. Puisque les vaincus ne pouvaient pas être absorbés par les vainqueurs, il fallait trouver un moyen pour les faire vivre pacifiquement côte à côte. Du reste, les deux nationalités s'étaient naturellement taillé leur part dans le vaste empire britannique, les Français sur le Saint-Laurent inférieur, entre son embouchure et le confluent de l'Outaouais, les Anglais sur le haut fleuve jusqu'aux grands Lacs; partout ailleurs l'élément anglo-saxon n'avait devant lui que des minorités françaises encore faibles. Enfin, les uns et les autres réclamaient pour la colonie une administration autonome, et il y avait lieu de craindre, en cas de résistance prolongée de la métropole, que l'annexion aux États-Unis n'en fut la dernière conséquence.
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Montréal au début du XXe siècle.
Montréal : la rue Sainte Catherine au début du XXe siècle.

L'autonomie.
La couronne britannique, heureusement inspirée, octroya à ses sujets de l'Amérique du Nord le mode de gouvernement qui semblait le plus approprié aux colonies lointaines devenues puissantes et prospères, et surtout habitées par des populations rivales, c.-à-d le gouvernement fédératif. Par un acte du 1er juillet 1867, les possessions anglaises de l'Amérique du Nord formèrent un État autonome, qui prit le nom de Dominion ou Puissance du Canada (un statut qui restera pratiquement inchangé jusqu'en 1982, date de la pleine indépendance du pays vis-à-vis de Londres). Le Haut-Canada, sous le nom de province d'Ontario, le Bas-Canada sous le nom de province de Québec, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, entrèrent immédiatement dans la confédération. L'île du Prince-Édouard et la Colombie Britannique ne donnèrent leur adhésion qu'un peu plus tard, cette dernière sur la promesse (réalisée en 1885) d'être reliée au littoral de l'Amérique par un chemin de fer transcontinental. Terre-Neuve seule a persisté à rester en dehors de la confédération jusqu'au XXe siècle.

A partir de 1867, la concorde entre les deux grandes populations européennes qui habitent le Dominion n'a pas été véritablement troublée, du moins dans le bassin du Saint-Laurent, mais il en fut autrement dans les immenses territoires de l'Ouest enlevés depuis peu à l'administration de la compagnie de la baie d'Hudson. Au Manitoba, les métis français, dépossédés violemment de terres dont ils n'étaient pas légalement propriétaires, mais qu'ils avaient les premiers occupées et mises en valeur, se sont insurgés en 1870 sous le commandement de Louis Riel. Le gouvernement d'Ottawa calma cette effervescence en accordant au Manitoba, qui devint une nouvelle province de la confédération, une constitution calquée sur celle de la province de Québec, et qui assurait des garanties suffisantes à l'élément français. Il est vrai qu'une nouvelle prise d'armes de Riel, dans la région de Saskatchewan, à la tête des métis et des tribus indigènes, fut réprimée sévèrement et coûta la vie au célèbre agitateur. Ensuite, la lutte entre les canadiens anglais et les canadiens français pour le peuplement du pays se poursuivit pacifiquement. Elle sera, à la charnière des XIXe et XXe siècle, le fait le plus marquant de l'histoire canadienne. (A19).



Paul-André Linteau, Histoire du Canada, PUF (QSJ), 2010.
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De l'époque des premiers habitants jusqu'à nos jours, cet ouvrage retrace l'histoire du deuxième plus grand pays du monde. Il donne un éclairage essentiel pour comprendre le Canada d'aujourd'hui sur le caractère distinct du Québec et les débats constitutionnels associés, les revendications autonomistes des Amérindiens et l'intégration économique du Canada dans l'ensemble nord-américain. (couv.) 
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