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L'Algérie
avant l'Islam
On ne possède
que peu de renseignements précis sur l'histoire de l'Algérie
antérieurement à sa conquête par les Romains. Des traditions
rapportent seulement que la population autochtone fut subjuguée
à diverses reprises par des peuplades venues de l'Orient : c'est
du mélange de ces populations que seraient issus les Numides
dont les Berbères actuels sont les descendants. Dès le IXe
siècle avant notre ère,
les Carthaginois s'établirent dans le nord de l'Afrique et fondèrent
sur les côtes de l'Algérie des comptoirs qui entretinrent
des relations commerciales avec les chefs indigènes, mais sans chercher
à exercer leur autorité sur le pays environnant. Durant les
guerres puniques
les indigènes, après avoir servi d'abord comme mercenaires
dans les armées des deux peuples, prirent parti, les uns pour Rome,
les autres pour Carthage .
Les Carthaginois ayant succombé dans la lutte, Syphax, roi Numide,
qui les avait soutenus fut dépossédé de ses États
au profit de Massinissa, l'allié des Romains, et il se fonda un
grand empire numide dont la capitale fut Cirta
(Constantine )
.
Sous les successeurs
de Massinissa, Rome occupa un certain nombre de points de l'Algérie
et prit une influence de plus en plus prépondérante sur les
destinées du royaume qu'elle avait aidé à créer.
Jugurtha,
petit-fils de Massinissa, essaya vainement d'arrêter les empiétements
des Romains et de rendre l'indépendance à son pays. Vaincu
par Marius après
une lutte héroïque, Jugurtha fut livré à ses
ennemis par le roi Bocchus (106
av. J.-C.) et périt à Rome,
dans un cachot. Dès cette époque, Rome fut véritablement
maîtresse du sort de l'Algérie : les princes numides qui continuèrent
à la gouverner ne furent plus, pour ainsi dire, que des fonctionnaires
romains. Quelques indigènes, entre autres Tacfarinas (17
av. J.-C. tentèrent en vain
de reprendre le rôle de Jugurtha et de chasser l'étranger
de leur pays; toutes ces tentatives de révolte furent étouffées
et, en l'an 43,
l'Algérie fut réduite en province romaine. En 429,
les Vandales
appelés en Afrique par le comte Boniface
n'eurent pas de peine à s'emparer du pays, favorisés qu'ils
furent, à la fois par la haine sourde que les Numides
portaient aux Romains et par les querelles religieuses qui divisaient les
nouveaux chrétiens. Conduits par Genséric,
les Vandales s'établirent sur tout le littoral qui renfermait les
plus riches possessions des Romains et ne se répandirent que très
peu sur les territoires occupés par les indigènes. Les quatre
successeurs de Genséric ne surent pas organiser le pays qu'ils avaient
conquis et, quand Hilderik eut été renversé du trône
par Gélimer, l'empereur Justinien
put profiter de cette circonstance pour s'emparer de l'Afrique (533)
avec une simple armée de 30 000 hommes conduite par Bélisaire.
Les Byzantins
eurent facilement raison des Vandales, mais ils ne réussirent pas
à dompter les populations indigènes et les victoires de Salomon
dans
l'Aurès et dans les montagnes qui avoisinent Sétif ne produisirent
pas de résultats durables. La domination byzantine resta confinée
sur un territoire restreint aux environs des grandes villes et il ne fallut
pas de bien grands efforts aux Arabes pour chasser du continent africain
pour de longues années les conquérants européens.
Les
Arabes et les Turcs
L'invasion musulmane
qui, pour la première fois, pénétra dans le Maghreb
en 646
eut à soutenir une lutte sanglante contre les indigènes;
une femme berbère, la Kâhina, organisa et dirigea la résistance
contre les Arabes; mais ceux-ci triomphèrent de tous les obstacles
et, en 711,
les Berbères convertis à l'islam
combattirent côte à côte avec les Arabes sur les bords
du Guadalete et contribuèrent à la victoire qui fit de l'Espagne
une province de l'empire des Califes.
Aux dynasties arabes des Aghlabiteset
des Fatimides succédèrent bientôt les dynasties berbères
des Zirites et des Hammadites, car, malgré l'invasion hilalienne
qui vint au XIe
siècle amener dans le Maghreb un
fort contingent de tribus arabes, la prépondérance fut définitivement
acquise aux Berbères qui avaient, il est vrai, adopté la
religion et en partie la langue et les moeurs des Arabes. Les Almoravides
ne possédèrent que la partie orientale de l'Algérie;
toute la contrée fut ensuite soumise à l'autorité
des Almohades, puis elle se trouva de nouveau partiellement occupée
par les Mérinides, les Beni Zian ou Abdelouadites et les Hafsides.
Jusqu'en 1515,
l'Algérie n'avait pas formé une unité politique :
c'est seulement à cette époque que deux corsaires, Baba-Aroudj
et son frère Kheir-ed-Din (les frères
Barberousse), fondèrent un véritable royaume dont les
limites (abstraction faite des confins sahariens) furent sensiblement les
mêmes que celles de l'Algérie actuelle. Dès
1518,
Kheir-ed-Din plaça le nouvel État sous le protectorat
du sultan de Constantinople,
Sélim
Ier
( Le Siècle de Soliman )
et jusqu'en 1711
le pacha d'Alger fut nommé par le sultan.
Déjà en
1658
l'autorité du pacha n'avait été acceptée qu'à
la condition qu'il la partagerait avec un agha élu par la milice
d'Alger; plus tard l'agha fut remplacé par un dey, mais, en 1711,
celui-ci refusa de partager le pouvoir avec un pacha et réunit les
deux fonctions. Depuis cette époque le dey ou pacha-dey eut seul
l'autorité, et l'investiture de la Porte devint une simple formalité,
Tandis que les beys de Titeri, de Constantine
et de Mascara administraient les tribus indigènes, le pacha, à
l'aide de colonnes mobiles chargées du recouvrement des impôts,
se contentait d'assurer la tranquillité générale du
pays, et de faciliter l'exercice de la piraterie à de nombreux corsaires.
Les déprédations commises par ces audacieux forbans s'élevèrent
parfois jusqu'à 20 000 000 de livres en une seule année.
Aucune nation n'échappa à leurs brigandages et ni les redevances
annuelles, ni les bombardements ne ralentirent les courses de ces écumeurs
de mer.
La
conquête française
En 1827,
une insulte publique, faite au consul français par le dey Hossein,
fut le prétexte choisi par la France pour intervenir militairement
en Algérie. Outre l'occasion de venger l'offense qu'elle venait
de recevoir, elle y voyait aussi celle de détruire la bande de pirates
qui infestaient la mer Méditerranée, et surtout celle de
détourner l'opinion de la crise de régime dans laquelle
le pays se débattait par une guerre extérieure. Le 14 juin
1830,
une flotte française sous les ordres de l'amiral Duperré
débarqua à Sidi-Ferruch une armée de 30 000 hommes.
Le général de Bourmont qui commandait l'expédition
culbuta les Turcs
et les Arabes dans la plaine de Staouéli, s'empara du fort de l'Empereur
qui dominait la ville d'Alger et obligea le
dey à capituler. L'armée française entra dans Alger
le 5 juillet. L'occupation fut d'abord restreinte à quelques points
du littoral et à une petite zone entourant Alger; bientôt
on comprit qu'il serait impossible de se maintenir dans ces positions si
l'on ne se décidait à entreprendre la conquête de tout
le pays et la résistance des tribus n'aurait probablement pas donné
lieu à une lutte bien longue si l'on n'avait fait la faute de considérer
l'émir Abd-el-Kâder comme une sorte de souverain de certaines
provinces de l'Ouest. De 1834
à 1847
tous les efforts de l'armée furent consacrés à combattre
l'émir que les deux traités signés, le premier par
le général Desmichels (1834),
le second par le général Bugeaud (1837,
traité de la Tafna), avaient, aux yeux des tribus, élevé
au rang de chef de la guerre sainte contre les infidèles. La reddition
d'Abd-et-Kâder mit fin à la résistance générale
des indigènes; depuis ce moment il n'y eut plus guère à
compter qu'avec quelques groupes isolés qui furent définitivement
soumis en 1857,
époque de la conquête de la grande Kabylie .
Les insurrections qui depuis 1857
ont répondu à l'expansion de la colonisation n'ont jamais
créé un danger sérieux pour l'occupation française.
La révolte des Kabyles en 1871
eût été sans gravité si les troupes habituées
à la guerre contre les indigènes n'eussent été
à ce moment employées en Europe. La création d'un
réseau de chemin de fer rendit à partir de cette époque
ces insurrections plus difficiles et presque inoffensives.
Voici par ordre chronologique
les principaux faits qui ont marqué la conquête de l'Algérie
par la France :
1830.
Prise d Alger; tentative d'occupation des villes
de Blida, Médéa, Mers-el-Kébir, Oran et Bône
(Annaba).
1831.
Occupation définitive d'Oran qui avait été d'abord
cédé au frère du bey de Tunis;
première occupation de Bône
1832.
Occupation définitive de Bône et du Sahel d'Alger. Reconnaissance
de l'émir Abd-el-Kâder par les tribus de la pleine d'Eghris
1833.
Attaque d'Oran par Abd-el-Kâder. Prise d'Arzew ,
de Mostaganem et de Bougie
(Béjaia)
1834.
Traité du général Desmichels avec Abd-el-Kâder.
1835.
Expédition dans la plaine de la Métidja. Combats de Mostaganem.
Occupation de Rachgoun; expédition de Mascara.
1836.
Première occupation de Tlemcen; expédition dans la province
de Titeri; combat de la Sikkak; occupation de la Galle. Première
expédition de Constantine .
1837.
Traité de la Tafna; deuxième expédition de Constantine,
prise de cette ville.
1838.
Établissement de camps près de Koléa, Blida et El-Harrouch.
Création de Philippeville (Skikda).
1839.
Occupation de Blida; prise de Djidjelli. Expédition des Portes de
fer. Défaite des lieutenants d'Abd el-Kâder à la Chifa.
1840.
Défense héroïque de Mazagran. Prise de Cherchell ,
de Médéa, de Miliana
1841.
Combat du Sig. Destruction des villes de l'émir, Boghar et Taza.
Expéditions de Takdemt et de Mascara. Occupation de Mila.
1842.
Destruction de Sebdou. Occupation de Tlemcen. Expédition de Kabylie
et entre le Chélif et la Mina. Reconnaissance sur Tébessa.
1843.
Expédition chez les Beni-Menasser et les Beni-Monad. Fondation de
Téniet-el-Had, de Tiaret, d'Orléansville et de Ténès.
Expédition dans l'Ouarsenis. Prise de la smala d'Abd-el-Kader. Nombreux
combats contre l'émir dans la province d'Oran. Expéditions
dans le Sud, au djebel Amour et chez les Oulad-Sidi-Cheikh.
1844.
Prise de Biskra et de Dellys. Création de Batna, soumission des
Flitta et des Amraoua. Expédition de Laghouat. Bataille d'Isly gagnée
sur les troupes marocaines.
1845.
Insurrection du Dahra réprimée par le colonel Pélissier.
Soumission de l'Ouarsenis. Expédition dans l'Aurès. Massacre
de la colonne Montagnac à Sidi Brahim. Soumission des Hachem-Gharaba
et du Hodna. Expédition chez les Trara.
1846.
Soumission des Flitta. Défaite de Bou-Maza près de Ténès.
Abd-el-Kâder est repoussé de la Kabylie. Fondation d'Aumale.
1847.
Défaite des Oulad-Dlellal, soumission des Nemencha. Reddition de
Bou-Maza. Expédition entre Mila et Collo .
Reddition d'Abd eI-Kâder (23 décembre).
1848.
Soumission de Moulay-Mohammed et de Ahmed, ex-bey de Constantine. Expédition
chez les Beni-Senous.
1849.
Siège et prise de Zaatcha. Soumission de Bou-Saâda. - 1850.
Expédition en Kabylie et dans l'Aurès
1851.
Bou-Baghla se soulève en Kabylie. Expédition entre Béjaia
et Collo.
1852.
Création de Djelfa. Prise de Laghouat.
1833.
Expédition en Kabylie et à Ouargla. Bou-Baghla est tué
chez les Beni-Mellikech.
1854.
Expédition en Kabylie.
1856.
Expédition à Dra-el-Mizan
1857.
Soumission de la grande Kabylie
1857.
Expédition sur la frontière du Maroc.
1860.
Insurrection du Hodna. Pacification de la Kabylie orientale.
1862.
Prise du Chérif Mohammed ben Abdallah à Ouargla.
1864.
Insurrection des Oulad-Sidi-Cheïkh de Si-Lazreg, dans la province
d'Oran, et de Si-Lala dans le Sud de la province d'Alger. Insurrection
dans la Kabylie orientale.
1865.
Soumission des Oulad-Sidi-Cheikh.
1868.
Insurrection dans le Sud de la province de Constantine
1871.
Grande insurrection des Kabyles de la province d'Alger et de celle de Constantine
1876.
Insurrection d'EI Amri.
1881.
Insurrection de Bou-Amama dans le Sud-Ouest de la province d'Oran.
L'époque
coloniale
Après la reddition d'Abd el-Kader,
et l'étouffement des derniers points de résistance en Grande
Kabylie ,
la résistance s'était essoufflée. Cela ne signifie
pas que la position de la France ait été très claire.
Les motifs qui avaient conduit à la prise d'Alger
ne relevaient que de considérations à très court terme.
La question de savoir quoi faire de l'Algérie se posa assez rapidement.
On songea d'abord à remettre le pays entre les mains du Pacha d'Égypte,
allié de la France, puis il fut question de le restituer directement
à la Porte ottomane, en échange de certains bénéfices
qui auraient été acquis au détriment de l'Angleterre.
L'option de la colonisation ne vint qu'ensuite, mais pour devenir alors
la carte maîtresse de la politique de colonisation de l'Afrique qu'allait
mener la France dans la seconde moitié du XIXe
siècle.
Jusqu'en 1870,
l'Algérie n'était restée essentiellement qu'un territoire
militaire, dont l'administration chaotiques reflétait l'indécision
qui régnait en France sur le statut du pays. Elle fut régie
d'abord par des généraux en chef : Bourmont, Clauzel,
Berthezène, Savary, Voirol (1830-34);
puis par des gouverneurs : d'Erlon, Clauzel, Damrémont, Valée,
Bugeaud, Cavaignac, Changarnier, Charon, d'Hautpoul, le maréchal
Randon; ensuite par un ministre de l'Algérie et des colonies, Pierre-Napoléon
(1858), Prosper
de Chasseloup-Laubat (1859); enfin,
après
1861, par un gouvernement
général : le maréchal Pelissier, le maréchal
Mac-Mahon, le général Chanzy.
La colonisation.
Les principales mesures de colonisation
ont été la création de centres européens et
la concession gratuite de terres. Un arrêté du gouverneur
général du 18 avril 1841
des ordonnances des 21 juillet et 9 décembre 1845,
avaient établi le système des concessions sous condition
suspensive, le concessionnaire ne pouvant, à peine de déchéance,
hypothéquer les biens concédés provisoirement et les
transmettre à des tiers qu'avec l'autorisation de l'administration.
Un décret du 26 avril 1851 modifia
ce système et y substitua celui des concessions sous condition résolutoire.
Cette modification n'ayant pas produit les résultats attendus, un
décret du 25 juillet 1860 décida
que la vente à prix fixe ou aux enchères publiques, ou même
de gré à gré dans certains cas, serait dorénavant
la règle pour l'aliénation des terres domaniales. Les concessions
furent supprimées par le décret du 31 décembre 1864.
Le nouveau régime de colonisation rendait nécessaire I'allotissement
préalable des terres à vendre et le décret de 1860
avait déjà ordonné que la fixation de périmètres
de colonisation précéderait la distribution des terres domaniales.
Après l'insurrection de 1871,
plus de six cent mille hectares de terres étant entrés dans
le domaine de l'État par suite d'appositions de séquestre,
des mesures nouvelles furent prises pour la création de centres
et la distribution des terres (Décrets des 10 octobre 1872
et 15 juillet 1874). Les lois des 21
juin 1871, 15 septembre 1871
et le décret du 16 octobre 1871
ont concédé des terres aux AIsaciens-Lorrains et leur ont
fourni des ressources pécuniaires pour l'installation.
De 1871
à 1881, la superficie des terres
concédées aux immigrants et aux colons a été
de 457 120 hectares; la valeur de ces terres s'élève à
41 589 923 F. Les dépenses d'installation des colons sont évaluées
à 14 939 135 F. 7339 familles, comprenant 27981 personnes, résidaient,
au 31 décembre 1881, sur ces concessions. Il y a 7764 concessions
de lots de villages; 1241 de lots de fermes et 1175 de lots industriels
(terres impropres à la culture). A cette époque, la population
européenne de l'Algérie comprend des Français, plus
nombreux à eux seuls que le reste de la population d'origine européenne.
Ils sont colons pour la plupart, ont émigré surtout de la
France méridionale, du bassin de la Garonne, de l'Alsace et de la
Lorraine. Les Espagnols (Andalous ,
Murciens, Valenciens, Catalans ,
Baléares )
sont maraîchers, alfatiers, bûcherons, défricheurs,
et sont très répandus dans le département d'Oran.
Les Italiens se sont fixés de préférence, ainsi que
les Maltais ,
dans le département de Constantine .
On compte en Algérie quelques milliers de Suisses et d'Allemands
dispersés dans tout le Tell.
Voici le mode de groupement des
Arabes : une réunion de tentes abritant plus ou moins de familles
est un douar, sorte de grande commune; l'ensemble de plusieurs douars constitue
une ferka, administrée par un cheikh. Un certain nombre de ferkas
composent la tribu, à la tête de laquelle est un caïd.
Les tribus se groupent en aghaliks, ayant pour chef un agha. A partir de
1881,
un code de l'indigénat, très défavorable aux musulmans
est promulgué. Il réduit notamment le droit de circulation,
et définit un statut fiscal alourdi.
Le territoire algérien se partage
à l'époque en trois départements, à savoir
:
1° Le département d'Oran,
chef-lieu Oran. Sous-préfectures : Mascara, Mostaganem. Sidi-bel-Abbes
et Tlemcen.
2° Le département d'Alger,
chef-lieu Alger, capitale de toute la colonie. Sous-préfectures
: Mécléa, Miliana, Orléansville (el-Asnam) et Tizi-0uzou.
3°Le département de Constantine ,
chef-lieu Constantine. Sous-préfectures Bône, Bougie, Gulema,
Philippeville (Skikda), Sétif.
Chaque département se partage en un
territoire civil, dont l'administration est absolument la même que
celle qui existe pour les départements de la France, et en un territoire
militaire, administré par un commandant, et par les bureaux arabes.
On distingue en Algérie, trois sortes de communes :
1° les communes de plein exercice,
qui n'existent qu'en territoire civil et sont administrées par un
maire assisté d'un conseil municipal;
2° les communes mixtes, dont les unes
sont en territoire civil et les autres en territoire militaire; elles comprennent
une faible population européenne et une population indigène
prédominante. Elles sont administrées par I'autorité
militaire;
3° les communes indigènes, formées
de tribus dans lesquelles l'élément européen n'a pas
encore pénétré. Elles sont administrées par
des commissions mi-partie indigènes et mi-partie européennes
fonctionnant sous la surveillance de généraux de brigade.
Ces communes indigènes sont toutes en territoire militaire.
Vers l'indépendance.
La situation des colons et des musulmans
est sans doute différente, mais aussi celle entre les villes et
les campagnes. Dans ces dernières, ce sont assurément les
Européens qui confisquent tous les privilèges. Dans les villes
la situation est plus contrastée. Beaucoup d'Européens se
prolétarisent, en même temps qu'une fraction de la population
musulmane accède à l'éducation et s'enrichit. C'est
au sein de cette bourgeoisie arabe urbaine que naissent les premières
velléités d'indépendance entre les deux guerres mondiales,
notamment avec le parti de Ferhat Abbas et Ben Djelloul. Une ordonnance
signée en 1944 accorde enfin
aux musulmans les mêmes droits qu'aux Européens, mais trop
tard. Le mouvement indépendantiste gagne en puissance. La guerre
d'indépendance, conduite, côté algérie, sous
la direction du Front de libération nationale (FLN) commence en
1954.
Elle se terminera par la signature le 18 mars 1962
des accords d'Evian, par lesquels la France reconnaît à l'Algérie
sa souveraineté.
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Karim
Rahem, Le
sillage de la tribu, Riveneuve, 2008.
La
crise que traverse l'Algérie ne peut se réduire à
l'antagonisme entre deux projets de société, l'un incarné
par des démocrates nationalistes et
l'autre par des islamistes, par l'opposition d'un modèle occidental
ou "moderniste" à un autre, oriental et réactionnaire. En
filigrane, transparaît le fantôme de valeurs segmentaires,
lesquelles structurent l'imaginaire collectif et les inconscients individuels.
En ce sens, l'origine de la crise est d'ordre culturel, car elle ne peut
se réduire à des conflits mécaniquement corrélatifs
à la structure sociale contemporaine.
C'est
en interrogeant le passé qu'il faut tenter de dévoiler les
dynamiques en oeuvre et leur impact sur le présent. C'est dans une
histoire contemporaine douloureuse, qui vit le démantèlement
des solidarités lignagères et l'atomisation des groupes sociaux,
processus commencé lors de la conquête et poursuivi par l'Etat
indépendant, dans le différentiel entre ethos et réalité
sociale, entre culture et structure de la société, entre
valeurs du passé et nouvelles formes d'échange, que se trouve
la clef de l'explication de l'anomie et de l'aliénation de la société
algérienne. C'est le passage de la tribu, oubliée un peu
vite par des historiographes, pour des raisons liées en partie au
passé colonial, à l'Etat qu'il faut décrire pour tenter
d'éclairer le présent.
Le
postulat de l'ouvrage est que l'Algérie actuelle est le fruit de
confrontations culturelles issues de son histoire contemporaine, c'est-à-dire
depuis les débuts de la période coloniale, se déployant
dans le temps et qui ont imposé leurs marques, non pas de manière
contingente, mais comme contraintes dans la formation des imaginaires politiques.
(couv).
-
Jean-Pierre
Vittori , On
a torturé en Algérie, Ramsay, 2007.- "Cent
fois, j'ai eu la tentation de me dédouaner totalement en prenant
mes distances avec cet ancien tortionnaire, de clamer ma haine de la torture,
de multiplier les précautions de langage (...). Mais je préfère
finalement laisser brut ce document qui dénonce moins les hommes
de main que ceux qui les utilisèrent pour parvenir à leurs
fins."
Jean-Pierre
Vittori, journaliste, écrivain, s'était fait connaître
par un premier ouvrage, Nous, les appelés d'Algérie,
dont un chapitre était consacré à la torture. Après
sa parution, il reçoit une lettre dont l'auteur lui confie : "C'est
vrai, j'ai moi-même torturé." Le journaliste rencontre l'homme,
un ancien militaire. Celui-ci, pendant cinq ans, a servi dans un des centres
d'interrogatoire qui quadrillaient le territoire algérien. Dix cassettes
d'entretiens seront enregistrées. (couv.).
Franck
Laurent, Le
voyage en Algérie (anthologie de voyageurs français dans
l'Algérie coloniale - 1830-1930), Robert laffont, 2008.-
De 1830, date du débarquement français
à Sidi-Ferruch, jusqu'aux grandes fêtes
du centenaire de l'Algérie en France
en 1930. Le principe chronologique permet de rendre sensible la profondeur
des mutations dont l'Algérie coloniale est le cadre en un siècle,
ainsi que les variations des représentations de la colonie en Métropole.
Ainsi suivra-t-on d'abord la conquête et les descriptions, l'Algérie
vue comme "objet littéraire", puis comme destination touristique,
l'appel du désert mais aussi les récits réalistes,
et, au début du XXe, l'apogée de cette Algérie coloniale
qui commence à se rêver éternelle... (couv.).
Jeannine
Verdès-Leroux, L'Algérie
et la France, Robert Laffont, 2009.
9782221109465
Plus
de trente-cinq ans après la signature des accords d'Évian,
ce dictionnaire s'attache à faire
revivre les relations - toujours passionnelles - entre la France
et l'Algérie. Des royaumes berbères à l'indépendance
du pays (juillet 1962) et à l'exode des "Pieds noirs", cet ouvrage
met au jour des moments et des terrains restés jusqu'ici inexplorés.
Il montre ce qui rapproche ces mémoires entrelacées depuis
cent trente ans. Ont été réunis cent soixante collaborateurs
(historiens, littéraires, écrivains, anthropologues, juristes,
linguistes, médecins, physiciens, urbanistes, économistes)
dont les opinions, les regards et les langages multiples forment une mosaïque,
afin de faire revivre un passé qui n'est pas "éteint" : celui
de l'Algérie. (couv.).
René
Gallissot, La
République française et les indigènes,
L'Atelier, 2007.- Les Français redécouvrent
le sort qui fut réservé aux indigènes de leur ancien
empire colonial.
L'indignation
rétrospective ne suffit pas à comprendre les raisons pour
lesquelles des hommes et des femmes ont pu être ravalés, pendant
des décennies, au rang de sous citoyens par une République
qui se proclamait patrie des droits de l'homme.
Dans
une fresque consacrée à l'histoire sociale de l'Algérie
de 1870 à 1962, René Gallissot raconte comment le socialisme
républicain, d'abord marqué par l'antisémitisme, s'avère
incapable de reconnaître la citoyenneté des autochtones colonisés.
Cantonnés dans un statut musulman, ces
derniers sont mobilisés en masse sur les champs de bataille de la
Première
Guerre mondiale.
Dès
la fin du conflit, en métropole et en Algérie, des indigènes
trouvent dans le syndicalisme et le communisme
des lieux d'apprentissages du militantisme.
Revendications
sociales et aspiration à l'indépendance se croisent, convergent
un moment avant de diverger. Dès lors, après 1945, l'affrontement
armé pour une Algérie indépendante devient inévitable.
Le
parti socialiste, arcbouté dans la défense de l'empire républicain,
et le parti communiste qui, dominé par des préséances
internationales, ne sait pas reconnaître la nation algérienne,
sont tragiquement absents d'un combat qui aboutira à l'autodétermination
de l'Algérie en 1962.
L'engagement
courageux de militants contrevenants aux consignes et le combat syndical
commun ne suffiront pas à sauver le rêve d'une Algérie
algérienne qui aurait pu rassembler, à égalité
de droits et de devoirs, descendants de colonisés et de colons dans
une république démocratique, sociale et laïque. (couv.).
Pierre
Montagnon, Histoire
de l'Algérie, Pygmalion, 2006.
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