|
. |
|
Les habitats des plantes |
![]() |
|
|
|
|
![]() |
Chaque espèce
végétale occupe sur le globe une aire déterminée
plus ou moins grande, mais qui ne s'étend jamais à toute
la surface de la Terre![]() L'immense majorité des plantes occupe
des aires bien plus restreintes. On peut même signaler comme très
faible le nombre des espèces qui s'étendent sur toute l'Europe Dans les régions sèches du
globe, les aires sont généralement petites, mais les espèces
sont nombreuses dans une même aire. Il peut même arriver que
des plantes se trouvent limitées à un point unique du globe;
ainsi le Statice arborescens ne se rencontre à l'état spontané
que sur une seule petite île rocheuse de la côte de Tenerife.
Dans les déserts mêmes, la végétation ne peut
subsister; cependant on trouve en plein désert,
sur le djebel Ahmar (montagne rouge), près du Caire Chaque espèce végétale
doit avoir un berceau (lieu d'origine) unique. Il n'est pas nécessairement
compris dans l'aire actuelle de l'espèce; il suffit, pour s'en convaincre,
de se rappeler que, lors de la dernière ère glacière,
nombre d'espèces ont été refoulées vers le
Sud, loin de leur berceau. D'autre part, pour concevoir la formation des
aires actuelles, on est obligé d'admettre que les individus ont
rayonné de plusieurs points, sinon d'un seul, ce qui paraît
le plus vraisemblable; ce point appelé centre de végétation
par Grisebach Les plantes ne se comportent pas toutes de la même manière sur leur limite de végétation. Souvent la transition est brusque; c'est ce qui arrive pour l'Euphorbia cyparissias si répandu en France et qui atteint sa limite en Allemagne; encore très commun à Neu-Strelitz, il n'existe plus à Neu-Brandenbnrg, un peu plus au nord. D'autres espèces, plus rares ou plus disséminées, se présentent comme des postes avancés; leurs divers habitats sur une carte formeraient une sorte d'archipel dont les îles, très rapprochées vers le centre de l'aire se trouveraient très éloignées les unes des autres près de sa circonférence. Il en est ainsi par exemple, de l'Inula conyza; étendu sur un grand espace dans l'Europe moyenne et dans l'Asie antérieure, sans jamais être commun, il n'occupe que quelques postes avancés près de Krossen, sur l'île de Rügen, et sur les îles danoises, et manque totalement dans les plaines baltiques. D'autres aires, en grand nombre, se composent de groupes d'îlots ou d'îles séparés les uns des autres par de grandes distances. C'est le cas de l'Aldrovanda vesiculosa qui se rencontre en Prusse, puis près du lac de Constance, dans l'ouest et dans le midi de la France, dans la Haute-Italie, en Hongrie, en Lituanie, en Inde (Calcutta), en Australie (Rockhampton) et dans l'Afrique centrale (Bahr el-Ghazal); cette énumération est certainement incomplète, mais il n'en est pas moins vrai que les stations de l'espèce sont très disséminées. Du reste le même fait s'observe même pour des plantes dont l'aspect est beaucoup plus frappant et que leur taille ou d'autres particularités ne permettent pas de ne pas apercevoir, pour certains arbres par exemple; ainsi le Cedrus Libani qui existe dans le Sud de l'Anatolie, au Liban et à Chypre, se retrouve sous une forme légèrement différente (C. atlantica) dans les montagnes du Nord-Ouest de l'Afrique; il en est de même du Rhododendron ponticum des montagnes de l'Anatolie et de la Syrie qui reparaît dans le Sud-Ouest de la Péninsule ibérique sous une forme un peu différente (R. baeticum). Les aires d'une même espèce peuvent être très distantes les unes des autres; c'est ce qui arrive par exemple pour les plantes de montagne qui se retrouvent en plaine à une latitude plus élevée; ainsi l'Empetrum nigrum, qui manque dans les tourbières de la plaine, dans l'Europe moyenne, se trouve dans la plaine et les forêts sablonneuses du Nord de l'Allemagne, puis sur les montagnes relativement peu élevées telles que la Forêt-Noire et dans les Alpes. Citons encore le Pedicularis sudetica des plaines de la région arctique en Europe et en Asie qui fait également partie de la flore alpine, le Polygonum bistorta qui est à la fois circumpolaire, alpin et répandu dans presque toutes les régions tempérées de l'hémisphère boréal, puis le Mélèze (Larix europaea) qui existe dans la région arctique sous la forme très voisine du Larix Sibirica, et le Pinus cambra qui est identique dans les Alpes et dans les plaines arctiques forestières. Citons enfin deux espèces très intéressantes sous le même rapport, le Myricaria germanica et l'Hippophae rhamnoides qui descendent des Alpes en suivant les cours d'eau, puis reparaissent, le dernier sur les dunes du Nord-Ouest de la France, les deux au Tibet, dans le Koukou-Nor, à une altitude de 3600 m, où ils acquièrent des dimensions que nous ne leur voyons jamais en Europe; l'Hippophae atteint jusqu'à 6 m. L'extension d'une même espèce d'une aire à une autre fort éloignée ne s'est certainement pas toujours effectuée pendant la période géologique actuelle; mais des transports éloignés sont possibles par l'intervention des humains, intervention qui est le plus souvent involontaire. Ce fait ressort surtout bien nettement pour le Xanthium spinosum; originaire de la Russie méridionale, cette espèce, essentiellement xérophile, s'est répandue dans l'Europe moyenne et méridionale, où elle est relativement disséminée, et a fini par pulluler d'une manière extraordinaire dans les pâturages secs de l'Amérique méridionale et de l'Australie, au point d'incommoder les troupeaux par ses fruits adhérents par masses énormes à leurs poils. Dans une même zone climatique on trouve souvent, à de grandes distances et sur des continents différents, des représentants d'un même genre ou d'une même famille, distincts, mais en quelque sorte équivalents et similaires. Tels sont par exemple les Magnolia, les Illicium de la Chine et du Japon et ceux de l'Amérique du Nord, les Chênes, les Hêtres, les Conifères d'Europe et d'Asie et ceux de l'Amérique du Nord, les Cunnaera, les Libocedrus, les Hêtres de l'île Auckland et ceux de la Terre de Feu; de même comme représentant des familles, nous trouvons en Australie les Epacridées remplaçant les Ericées des autres continents; les Lobéliacées de l'Amérique correspondant aux Campanulacées de l'ancien continent. Les Asclepias d'Amérique sont remplacés en Europe par les Cynanchum ou les Vincetoxicum, etc. Enfin d'un pôle à l'autre il y a même des formes équivalentes comme l'Empetrum rubrum à fruits rouges de la Terre de Feu qui correspond à notre Empetrum nigrum circumpolaire; de même les Acaena y représentent nos Sanguisorba, les Colobanthus nos Spergula. Ces faits nous font déjà pressentir l'importance du rôle que jouent dans la répartition des végétaux à la surface du globe les aires des groupes naturels, sous-genres, genres, tribus, familles. Aussi bien que les espèces, ces groupes ont des aires plus ou moins nettement circonscrites, mais d'une étendue beaucoup plus considérable. L'étude de ces aires a pour le botaniste une importance bien plus grande que celle des aires des espèces; car elle peut, aidée des observations paléontologiques, jeter quelque jour sur la marche suivie par les Végétaux dans leur distribution et leurs migrations et même sur leurs transformations (évolution). On peut dire que quelques familles ont pour aire le globe entier; ce sont surtout les Graminées et les Composées, représentées depuis les pôles jusqu'à l'équateur; immédiatement après viennent les Légumineuses qui s'avancent moins que les précédentes dans les régions froides. Parmi les familles sensiblement cosmopolites, dont les représentants sont moins nombreux dans les contrées tempérées que dans les régions torrides, se trouvent encore et surtout les Aroïdées, Orchidées, Laurinées, Urticinées, Euphorbiacées, Malvacées, Ménispermées, Ampélidées, Rotacées, Convolvulacées, Bignoniacées, Apocynées, Solanées, Rubiacées, etc. Les Palmiers, Zingibéracées, Musacées, Pipéracées, Mélastomacées sont limitées à peu près exclusivement aux régions les plus chaudes. Sont au contraire bien moins répandues dans les contrées tropicales que dans les zones tempérées et froides, les Polygonées, Ericacées, Gentianées, Violariées. Les Pinus et Abies, les Bétulinées, Salicinées, Cupulifères, Renonculacées, Brassicacées, Papavéracées, Caroyphyllées, Ombellifères, Rosacées, Ribésiacées, Sambucinées, Acérinées, etc., occupent à peu près tout l'hémisphère boréal extratropical; elles ont néanmoins des représentants plus ou moins insolites, soit dans les régions australes extrêmes, soit sur les hautes montagnes des pays tropicaux. L'Amérique seule possède les Loasées, Cactées (un seul Rhipsalis est africain), Broméliacées, Sarracéniacées, Margraviacées, Vochysiacées, Hydrophyllacées, Gessnériacées, Tropaeolées, ainsi que les genres Agave et Yucca, etc. Les Tamariscinées, Frankéniacées, Diptérocarpées, Pittosporées, Cyrtandracées, Népenthacées, Casuarinées n'habitent que l'ancien monde; les Pénéacées, Bruniacées, Restiacées, Sélaginacées, Mésembryanthémées, avec la plupart des Pelargonium, sont confinées à l'Afrique méridionale. Les Protéacées, les Conifères des genres Araucaria, Podocarpus, Libocedrus ont pour aires actuelles les régions subtropicales et tempérées de l'hémisphère austral. L'Australie est le berceau à peu près exclusif des Trémandracées, Epacridées, Myoporinées, Stylidiacées, Goodéniacées, ainsi que des acacias à phylIodes, des Kennedya, Chorizema, Eutaxia et quelques autres Légumineuses, qui, avec, les Eucalyptus, Metrosideros, Melaleuca parmi les Myrtacées, impriment un caractère si spécial à ce continent. Enfin beaucoup de familles ont des genres on des sous-genres confinés à un continent ou à une région encore plus circonscrite; tels sont les Nicotiana, les Petunia parmi les Solanées, tandis que les Jusquiames appartiennent à l'ancien continent. L'Adansonia (Baobab) est africain ou madécasse. De même, dans le grand genre Euphorbe, les espèces charnues (sous-genres Euphorbium et Diacanthos) sont exclusivement propres à l'Afrique entière, à Madagascar et à l'Inde méridionale, tandis que le groupe de nos Euphorbes de la section Tithymalus a une aire qui s'étend en latitude de l'Europe à l'extrême Asie d'une part, à l'Afrique d'autre part. En Amérique, au contraire, nous trouvons les groupes contrastants, Poinsettia, Tricherostigma, etc., qui s'étendent dans les régions tropicales et tempérées. Il serait aisé de trouver des exemples analogues dans d'autres familles, comme celui des Stapelia (Asclépiadées) qui sont exclusifs à l'ancien continent. (Dr L. Hahn et A. Jobin). |
. |
|
|
|||||||||||||||||||||||||||||||
|