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Le Paradis

Dans beaucoup de religions, le paradis est le lieu où l'on croit que les âmes justes jouiront à près leur mort d'un parfait repos, qui sera la récompense de leurs vertus. Le mot paradis se retrouve dans la plupart des langues de l'Asie occidentale (en sanscrit' paradésa, région admirable; en zend' pardas; en arménien' pardez, en hébreu et en persan' pardes, en arabe' firdaus, en syriaque phardaisa, en grec' paradeisos); il signifie proprement jardin planté d'arbres et arrosé d'eaux vives, ou encore parc, lieu ou jardin de délices. Dans beaucoup de sociétés, le paradis est réservé à un groupe social restreint ou a une caste (possédants, guerriers, héros, etc.); la plupart du temps cela ne concerne que les hommes; quand les femmes sont admises, c'est souvent pour y retrouver un statut subalterne ou humiliant.

Le paradis dans le Judaïsme

Les Hébreux étaient surtout frappés par la promesse des biens terrestres, par la menace des malheurs de ce monde, et, si l'Ancien Testament leur parle de la vie future, il n'en décrit pas la nature : c'est seulement dans le Talmud qu'on trouve la peinture du Paradis, plutôt encore que celle des félicités que l'on y goûte. Et si ce paradis-là n'est plus le paradis terrestre, un véritable lieu dont on pourrait prendre au mot la géographie ou la topographie, il est encore un jardin d'Éden pour les âmes. 

Les Juifs talmudistes disent que le paradis ou jardin d'Eden est soixante fois plus grand que l'Egypte, et qu'il est placé dans la septième sphère du firmament. II a deux portes, où entrent soixante myriades d'anges dont les figures brillent comme le firmament. Au moment où le juste arrive devant eux, ils le dépouillent de ses vêtements, placent sur sa tête deux couronnes, l'une d'or et l'autre de pierres précieuses, lui donnent huit bâtons de myrte, et dansent devant lui, en lui disant : Mange ton pain en te réjouissant

Alors ils le font entrer dans un lieu entouré d'eau; quatre fleuves y coulent : un de miel, un de lait, un de vin et un d'encens. Il y a aussi des tables de pierres précieuses. Quatre-vingts myriades d'arbres s'élèvent de chacun des angles; dans chacun de ces angles sont placées soixante myriades d'anges qui chantent continuellement, d'une voix agréable, des louanges à Dieu; au milieu du jardin est planté l'arbre de la vie; son feuillage ombrage tout le jardin. Les anges sont des êtres qui tiennent le milieu entre Dieu et les humains; leur substance est moitié eau et moitié feu.

Le paradis dans le Christianisme

Le mot, du grec' paradéisos, est employé trois fois dans le Nouveau Testament (Evangile de Luc, XXIII, 43 ; Il Corinthiens XII, 4; Apocalypse, II, 7) sans qu'il soit défini. Mais il désigne, comme le mot ciel ou cieux, la séjour de Dieu, le lieu où le Christ mort et ressuscité s'est rendu, où vont les justes. Plusieurs cieux sont distingués, sans explication, dans la 1re épître aux Corinthiens, XII, 2 (Ephésiens, IV, 10). 

Dans le christianisme, la vie future a été longtemps conçue avec tout un cortège d'idées et d'images terrestres : le Paradis était comme une forteresse située à l'Orient, avec trois portes que défendaient les anges et dont Saint Pierre gardait l'entrée; les élus, placés sur des trônes d'or et de pierreries, revêtus de robes d'une éclatante blancheur, mêlaient leur voix à celle des Chérubins et des Séraphins pour chanter les louanges de Dieu, s'accompagnaient de divers instruments, étaient admis à la table divine, etc. Toutes ces figures de langage prenaient un corps dans les bas-reliefs et dans les peintures des églises.

Avec le temps le paradis attendu par les chrétiens n'a plus été déterminé à une localité particulière : c'est devenu un état de bonheur et de délices sans mélange, dans lequel on jouira de la plénitude de la majesté divine. Les anges et les bienheureux, qui partagent cette félicité suprême, ne connaissent ni les plaintes, ni la terreur, ni les souffrances, ni la mort. Les âmes de ceux qui sont morts dans la grâce de Dieu sont admises dans le paradis, soit immédiatement, si elles sont pures; soit après qu'elles ont achevé de se purifier dans le purgatoire; mais, après la résurrection générale, les justes jouiront en corps et en âme de ces délices ineffables; les corps seront alors doués de quatre qualités qui les assimileront en quelque sorte aux esprits, à savoir : la clarté ou la splendeur, l'agilité, la subtilité et l'impassibilité ou l'immortalité. Plusieurs auteurs ou orateurs sacrés ont cherché à faire la peinture des délices du paradis: ce sont autant de tentatives malheureuses, car ce bonheur est ineffable; saint Paul en dit beaucoup plus que ce que l'imagination la plus vive pourrait supposer ou inventer, par ces simples paroles :

L'oeil de l'homme n'a point vu; son oreille n'a point entendu, et son esprit ne saurait concevoir ce que Dieu prépare à ceux qui l'aiment.

Le paradis dans l'Islam

Selon les Musulmans, le paradis embrasse dans sa grandeur les cieux et la terre; c'est le lieu de l'éternelle félicité; il est partagé en huit degrés de béatitudes, et arrosé, comme le paradis du Talmud, de quatre grands fleuves, « dont l'un roule du lait, le second du miel, le troisième du vin,  et le quatrième une eau pure et délicieuse. Les dix premiers Arabes convertis par Mohammed (Mahomet), et surtout les quatre premiers califes, ainsi que Fatima, fille du prophète, ont pour partage les régions les plus élevées et les plus enchantées du ciel; la félicité dont ils jouissent dans ce séjour ravissant est au- -dessus de l'intelligence humaine; Dieu a destiné à chacun d'eux soixante-dix pavillons superbes tout éclatants d'or et de pierreries; chacun de ces pavillons immenses est garni de 700 lits éblouissants; et chaque lit est entouré de 700 houris ou vierges célestes.

Les Musulmans croient qu'il y a eu sept animaux auxquels l'entrée du paradis a été ouverte : ce sont : le chameau du prophète Élie, le bélier d'Abraham, le poisson qui engloutit Jonas, la jument Borac, la fourmi et la huppe de Salomon, et Kitmir le chien des Sept-Dormants.

Cependant, beaucoup des Musulmans ne croient pas du tout à cette béatitude sensuelle :  les passages du Coran où il en est question peuvent être pris dans un sens métaphorique. Garcin de Tassy a recueilli, dans ses Doctrines et Devoirs de la religion musulmane, tous les passages du Coran relatifs au paradis; or, la plupart pourraient être énoncés par les deux autres religions monothéistes, par exemple  :

« Le paradis est le séjour préparé aux justes, à ceux qui font l'aumône dans la prospérité et dans l'adversité, et qui, maîtres des mouvements de leur colère, savent pardonner à leurs semblables. III, 127. Dieu appelle les humains au séjour de la paix, et conduit ceux qu'il veut dans les voies du salut. Une récompense magnifique sera le partage des bienfaisants. La noirceur et la honte ne voileront jamais leur front; ils habiteront éternellement le séjour des éternelles voluptés. X, 36, 37. Ceux qui ont eu la crainte du Seigneur seront sauvés. Ils posséderont le séjour du bonheur. Le mal et la peine n'approcheront point d'eux. XXXIX, 62. Annonce à ceux qui croient et qui font le bien, qu'ils habiteront des jardins ou coulent des fleuves. Là, ils trouveront des femmes purifiées (houris). Ce séjour sera leur demeure éternelle [...]. Dieu ne rougit pas de te déclarer ceci en parabole. Les croyants savent que la parole est la vérité; mais les infidèles disent : Pourquoi le Seigneur propose-t-il de semblables allégories? II, 23, 24.»
Le législateur évoque des d'objets sensibles, mais il a aussi bien soin de déclarer qu'il parle en parabole et sous le voile de l'allégorie, et que par conséquent ces paroles ne doivent pas être prises à la lettre. Si du Coran nous passons aux commentateurs et aux théologiens, nous verrons le bonheur des élus encore plus spiritualisé. Ils font consister la félicité du paradis à voir la beauté et la majesté de Dieu, à se confondre et à s'absorber pour ainsi dire en lui, à vivre de sa vie, à être inondé de sa lumière ineffable, et à jouir d'une paix profonde et inaltérable. Les objets sensibles dont il est fait mention dans le Coran, sont pour eux autant de métaphores auxquelles le législateur avait recours pour être mieux compris. Le paradis des Musulmans, comme celui des Juifs et des Musulmans, n'est donc pas lui non plus compris par eux comme un lieu, mais plutôt comme un état des âmes. 

Paradis Africains

Egypte antique.
Champollion le Jeune décrit ainsi le bonheur du paradis, selon la mythologie égyptienne, d'après les figures gravées dans le temple de Ramsès à Thèbes :

Le dieu Soleil visite à la cinquième heure les Champs Élysées, habités par les âmes bienheureuses se reposant des peines de leurs transmigrations sur la terre; elles portent sur la tête la plume d'autruche, emblème de leur conduite juste et vertueuse. On les voit présenter des offrandes aux dieux; ou bien, sous l'inspection du Seigneur de la joie du coeur, elles cueillent les fruits des arbres célestes de ce paradis,
Plus loin, d'autres tiennent en main des faucilles : ce sont les âmes qui cultivent le champs de la vérité; leur légende porte :

« Elles font des libations de l'eau et des offrandes des grains des campagnes de gloire; elles tiennent une faucille et moissonnent les champs qui sont leur partage le dieu Soleil leur dit : Prenez vos faucilles, moissonnez vos grains; emportez-les dans vos demeures, jouissez-en, et les présentez au dieux en offrandes pures. » 
Ailleurs enfin on les voit se baigner, nager, sauter et folâtrer dans un grand bassin que remplit l'eau céleste et primordiale, le tout sous l'inspection du dieu Nil céleste.

Afrique subsaharienne.
Dans l'Afrique subsaharienne, on connaît des populations qui admettent un paradis pour les âmes qui ont bien vécu sur la terre; les uns le placent sous la mer, ou sur les bords d'un fleuve, ou dans l'intérieur des terres; la plupart supposent qu'on aura dans cette autre vie les mêmes besoins et les mêmes plaisirs que dans celle-ci; c'est pourquoi, à la mort d'un chef, ils enterrent avec lui tous les objets qu'ils croient pouvoir lui être utiles dans l'autre monde; autrefois et ils tuaient même, à cet effet, ses femmes et ses esclaves. D'autres supposent que l'âme passe dans une autre région, pour y recevoir un nouveau corps dans le sein d'une femme, et que les âmes de cette région passent de même dans la leur; de sorte qu'il se fait un échange continuel d'habitants entre les deux mondes.

Paradis de l'Inde

Hindouisme.
Les Hindouistes  admettent plusieurs cieux ou paradis pour les justes; ce sont le paradis d'Indra, appelé lndra-loka ou Swarga; celui de Shiva, dont le nom est Kailasa; celui de Vishnou, Vaikountha; celui de Brahma, Brahma-loka ou Satya-loka; et, enfin, le Déva-loka. Tous ces paradis sont supposés environner les hauts sommets du mont Mérou.

L'Indra-Loka.
L'Indra-Loka ou Indraloka,  c'est-à-dire, monde d'lndra, ou Swarga, c'est-à-dire le ciel; nom du premier paradis des Hindouistes. Il est destiné aux âmes qui ont mérité d'être délivrées d'un long séjour sur la terre; c'est celui qui est le plus voisin du globe terrestre. Les routes qui y conduisent sont belles et spacieuses. De toutes parts on ne rencontre que des choeurs de gandharvas, et des groupes d'apsaras; les premiers font entendre une harmonie ravissante, et les autres se livrent à des danses voluptueuses. On y voit des palais magnifiques où tout est servi avec profusion; des étangs où flottent des lotus sacrés; des arbres touffus procurant un délicieux ombrage. Le sol est jonché de fleurs qui y tombent perpétuellement en pluies abondantes. Les dieux s'y promènent à cheval ou sur des éléphants, dans de riches palanquins ou sur des chars superbes. De nombreux serviteurs les abritent sous de blanches ombrelles, et les rafraîchissent en agitant autour d'eux de larges éventails. Tout ce qui peut flatter les sens et satisfaire les désirs, tout ce que l'imagination la plus brillante peut concevoir de richesses, de plaisirs sans mélange, de repos sans ennui et de bonheur sans fin, se trouve réuni dans ces lieux enchantés. On peut juger par cette peinture des avenues de l'lndraloka, de ce que doit être ce paradis lui-même. Les jouissances les plus ineffables y sont réservées aux bienheureux qui l'habitent, et, comme dans le paradis de Mahomet, de magnifiques jardins les couvrent de leur ombre; des fleurs d'une innombrable variété de formes et de couleurs récréent leur vue et les embaument des plus suaves parfums; d'exquises liqueurs, versées à grands flots dans des coupes d'or, délectent leur palais et leur procurent une douce ivresse, qui, loin d'amortir leurs sensations, en développe au contraire toute l'énergie. Toutefois les élus ne demeurent pas éternellement dans ce fortuné séjour; et, à l'expiration d'une longue période d'années, ils reviennent sur la terre pour y recommencer une nouvelle vie. 

Le Kailasa.
Le Kailasa,  situé juste au-dessus du précédent, et est le paradis de Shiva. On l'identifié au mont Kailash Parbat, au Tibet, destination de pélerinages, et qui est parfois confondu avec le mont Mérou lui-même. Shiva y vit en compagnie, notamment, de Kouvéra, dieu des richesses. Seuls sont admis dans ce paradis ceux qui au cours de leur vie se sont infligé de dures pénitences  ou sont morts en défendant de grandes causes.

Le Vaikountha.
Le Vaikountha est le, paradis de Vishnou; il est situé sur le versant méridional du mont Mérou, au-dessus du Kailasa, paradis de Shiva, dans un site charmant, qui lui a fait donner le nom de Vaikountha, c'est-à-dire agréable. L'or et les objets précieux y brillent de tous côtés. Au milieu de ce séjour enchanteur, s'élève, un superbe palais habité par Vishnou et Lakshmi, son épouse. Près d'eux on voit Pradyoumna, leur fils aîné, et une multitude d'autres enfants; leur petit-fils Anirouddha, fils de Pradyoumna, Oucha, son épouse, et Bana, leur fille. On trouve dans ce lieu, ainsi que dans les autres demeures célestes, des fleurs, des arbres, des quadrupèdes, des oiseaux, et surtout des paons en quantité. Au pied de la résidence royale coule le fleuve Karouna. Beaucoup de pénitents habitent sur ses bords, et y coulent des jours heureux et paisibles; des fruits et quelques légumes qui croissent spontanément, font toute leur nourriture; leur loisir est partagé entre la lecture des Védas et la contemplation. Les sectateurs de Vishnou sont admis dans cet heureux séjour, et pour prix de leurs bonnes oeuvres, ils sont unis à la propre substance du dieu.

Le Satya-loka
Le Satyaloka, c'est-à-dire monde de la vérité ou séjour de la vertu, aussi appelé Brahmâ-loka, est le quatrième paradis, celui où réside le dieu Brahmâ avec sa femme Sarasvati. Le Gange arrose cet asile divin, et c'est de là qu'une partie de ses eaux purifiantes sont descendues sur la terre. Là goûtent d'inexprimables voluptés les pénitents qui se sont distingués par des vertus éminentes, dont la bouche n'a jamais été souillée par le mensonge, et les femmes qui se sont volontairement brûlées sur le corps de leur mari. Cependant il faut être brahmane pour pouvoir être admis dans ce paradis; Ies personnes d'une autre caste, quelque édifiante et pure qu'ait été leur vie, en sont irrévocablement exclues. Au-desssus est le Déva-loka, ciel suprême.

Le Déva-loka.
Le Déva-loka ou Dévaloka, ou monde des dieux, est le paradis suprême, résidence du Créateur, situé bien au-dessus des cieux de Brahma, de Vishnou, de Shiva et d'Indra. C'est là que vont se réunir, après leur mort, les âmes des saints personnages qui ont traversé sans faillir les divers mondes d'épreuves et de purification. A l'entrée de ce paradis est un large fossé plein des eaux de la volupté périssable, de la colère, de la luxure, de l'orgueil et de l'envie. Sur les bords se tiennent les Asouras, occupés à tenter les bienheureux. Plus loin se trouve une mer qui rend aux vieillards qui s'y baignent les forces et l'éclat de la jeunesse; puis Kalpavrikcha, l'arbre du devoir; ensuite la sainte ville de Sabha (assemblée), cité d'une vaste circonférence, au milieu de laquelle est l'Edifice invincible, qui a pour portiers Indra et Brahma. Dans le centre de cet édifice est une estrade qu'on appelle Intelligence universelle, et qui supporte un trône nommé Abondance de lumière. Une femme d'une éclatante beauté y est assise. A travers les vêtements qu'elle porte, on découvre tous les mondes sous l'apparence de femmes parées de voiles transparents, et parmi lesquelles on remarque des figures charmantes, comme celles de mères pleines de tendresse, tenant à leurs enfants un langage doux et gracieux. Dans cette partie centrale de la sainte cité réside aussi la Science qui purifie le coeur.

Lorsqu'un nouveau bienheureux se présente au bord du fossé, les Asouras qui en défendent l'accès, prévoyant l'inutilité de leurs efforts, se hâtent de s'éloigner pour lui livrer passage. Pour traverser ce fossé, ainsi que la mer où l'on se dépouille de ses années, il faut que le saint pénitent soit exempt de passions, telles que la colère, l'avarice, la luxure, l'orgueil et l'envie, et que son coeur soit purifié de tout mauvais penchant, de toute perlée vicieuse. Alors il est affranchi de toutes les oeuvres méritoires ou blâmables. Quand il passe sous l'arbre Kalpavrikcha, il sent tous les délicieux parfums dont jouit le Créateur. En entrant dans la ville, il participe à la science de Dieu dans ce qu'elle a de plus excellent. 

Parvenu au milieu de l'Edifice invincible , il est pénétré de toute la lumière divine, de telle sorte qu'Indra et Brahma ne peuvent pas plus supporter l'éclat dont il rayonne que la splendeur dont brille le Créateur lui-même, et il s'aperçoit qu'il est grand comme Dieu. Lorsqu'il monte sur l'estrade, il reçoit l'intelligence universelle, il connaît tous les mondes; et lorsqu'il s'assied sur le trône, il semble qu'il s'asseye sur le Créateur. Ce trône resplendit de la plus vive clarté; ses deux pieds de derrière sont le passé et l'avenir ; les deux autres sont les vrais biens de la terre; ses deux bras sont deux versets du Sama-Véda lus avec mélodie; les deux côtes qui font la largeur du trône sont aussi deux versets du même livre; les autres versets du Sama et tous ceux du Rig-Véda sont comme la trame du tissu du trône; les versets du Yadjour-Véda en sont comme la chaîne; la lumière de la lune en est le siège; l'harmonie du Sama-Véda en est le tapis; et les mesures des Védas en sont le coussin.

C'est là que le Créateur est assis. Le saint pénitent s'avance et s'assied aussi sur ce trône. Le Créateur lui demande : 

« Qui es-tu? »
Il répond :
« Je suis le temps; je suis le passé, le présent et l'avenir. Je suis émané de celui qui est la lumière par lui-même; tout ce qui fut, est et sera, émane de moi. Vous êtes l'âme de toute chose; et tout ce que vous êtes je le suis. »


Jaïnisme.
L'Ourdwa-Loka, ou monde supérieur est le le ciel ou paradis des Jaïnistes. Devendra en est le souverain. On y compte seize demeures différentes, dans chacune desquelles la mesure de bonheur est graduée en proportion des mérites des âmes vertueuses qui y sont admises. La première et la plus élevée de ces demeures est le Sâdhou-dhârma; il n'y a que les âmes éminemment pures qui y aient accès; elles y jouissent d'un bonheur non interrompu pendant 33,000 ans. L'Asouddha-karpa, qui est la dernière et la plus belle de ces seize demeures, est destinée aux âmes qui n'ont ni plus ni moins de vertu qu'il en faut pour entrer dans l'Ourdwa-Loka; elles y jouissent pendant mille ans de la quantité de bonheur qui leur est départie. Dans les autres demeures intermédiaires, l'étendue et la durée du bonheur sont fixées dans une progression relative.

Des femmes de la plus rare beauté embellissent ces séjours délicieux. Cependant les bienheureux n'ont avec elles aucune accointance; la vue seule de ces objets enchanteurs suffit pour enivrer leurs sens et les plonger dans une extase continuelle bien supérieure à tous les plaisirs mondains. A cela près, le Swarga des Jaïnistes ne diffère guère de celui des Hindouistes.

Au sortir de l'Ourdwa-Loka, après l'expiration du temps assigné, les âmes des bienheureux renaissent sur la terre et y recommencent le travail des transmigrations.

Bouddhisme.
Les Bouddhistes reconnaissent vingt-huit cieux ou paradis; ils sont la conséquence de leur système cosmogonique; on y arrive nécessairement en vertu de ses mérites, mais après un laps de temps incommensurable, passé successivement dans quelques-uns ou dans la totalité des trente-deux enfers, si au lieu d'acquérir des mérites dans une vie précédente, on avait au contraire démérité.

Le monde des désirs.
Le mont Mérou ou Soumerou est également l'Olympe des Bouddhistes; ses flancs sont de cristal, de saphir, d'or et d'argent ; il est partagé en plusieurs étages habités par des dévas, on êtres divins de plusieurs degrés. Il donne naissance à un arbre mystérieux dont l'ombrage est favorable aux dieux, et dont les fruits leur servent de nourriture. A son quatrième étage, commence la série des six cieux superposés, qui constituent ce qu'on nomme le monde des désirs, parce que tous les êtres qui l'habitent sont soumis également, quoique sous des formes diverses, aux effets de la concupiscence :
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Au premier de ces six cieux en commençant par le bas, habitent quatre dieux qui président aux quatre points cardinaux.

Le deuxième ciel est nommé le ciel des trente-trois, parce que Indra y fait son séjour, avec trente-deux personnages parvenus comme lui, par leur vertu, de la condition humaine à celle de dévas ou divinités.

Le troisième ciel est appelé ciel de Yama, parce que le dieu de ce nom y réside avec d'autres êtres semblables à lui.

Dans le quatrième ciel, appelé séjour de la joie,

les cinq sens cessent d'exercer leur  influence; c'est là  que les êtres purifiés, parvenus au degré qui précède immédiatement la perfection absplue, c'est-à-dire au grade de bodhisatva, viennent habiter en attendant le moment de descendre sur la terre en qualité de bouddhas.

Au cinquième ciel, appelé ciel de le conversion, les désirs nés des cinq atomes, ou principes des sensations, sont convertis en plaisirs purement intellectuels.

Au sixième, habite Isvara, le Seigneur, qui aide à la conversion d'autrui, aussi nommé le roi des génies de la mort.

Tous les êtres des cieux supérieurs dont nous venons de parler, résident non plus sur le mont Soumérou, mais au sein même de la matière éthérée. Dans la description de ces étages célestes, on a remarqué des différences entre les livres des Hindous, des Tibétains, des Chinois, des Mongols; mais il est inutile de les signaler ici. 

Le monde des formes et des couleurs.
Au-dessus des six cieux du monde des désirs, commence une seconde série de cieux superposés qui constituent le monde des formes ou des couleurs, ainsi nommé parce que les êtres qui y habitent; bien que supérieurs en pureté à ceux dont nous venons de parler, sont encore soumis à l'une des conditions de l'existence matérielle, la forme ou la couleur. On compte, dans ce monde des formes, dix-huit degrés d'étages superposés : et les êtres qui les habitent se distinguent par des degrés correspondants de perfection morale et intellectuelle. Ces dix-huit cieux sont partagés en quatre contemplations : 
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La première contemplation correspond aux trois cieux des Brahmas : celui qui est la demeure de l'armée de Brahmâ; celui qui abrite ses ministres; la résidence de Brahmâ lui-même. 

La deuxième contemplation compte  également trois cieux : le ciel de le lumière faible, le ciel de la lumière immense et le ciel de la lumière qui sert de voix. 

Au-dessus encore est la troisième contemplation, divisée, comme les précédentes, en trois étages ceux-ci n'ont point de nom, déterminé; ils sont affectés à la demeure d'êtres de différents degrés de perfection, qui jouissent 

d'une pureté de pensée toute spéciale, et nagent dans les délices d'une joie ineffable. 

Neuf étages partagent la quatrième contemplation : le premier en montant est le ciel sans nuages, auquel succèdent le ciel de la vie heureuse, le ciel des grandes récompenses, le ciel où' il n'y a pas de réflexion, le ciel sans fatigue, le ciel du terme de la pensée, le ciel où l'on voit tous les mondes, le ciel où tout est manifeste, et enfin l'AIganitcha, ou le ciel des dieux qui ont atteint la dernière limite de la ténuité de la matière; quelques-uns placent au-dessus de l'Aganitcha le ciel du suprême seigneur Mahesvaravasana.

Le monde sans forme.
Quand on a dépassé le monde des formes, on trouve le monde sans forme, ou les cieux immatériels, composé de quatre cieux superposés, dont les habitants se distinguent par des attributs encore plus relevés. Ceux du premier habitent l'éther; ceux, du deuxième résident dans la connaissance; ceux du troisième vivent dans l'anéantissement ou la non-localité; et ceux du quatrième, au dessus duquel il n'y a rien, également exempts des conditions de la connaissance localisée et de l'anéantissement, qui n'admet pas de localité, sont désignés par une expression sanscrite qui signifie littéralement ni-pensants ni non-pensants. Plusieurs avancent qu'au-dessus de ces vingt-huit cieux ou paradis, il y a encore les demeures séparées des bodhisatvas, et enfin des bouddhas.

Tels sont les lieux de félicité réservés aux êtres qui sont parvenus à se détacher des liens de la matière, et à acquérir par leurs bonnes oeuvres et par la contemplation, des degrés de pureté plus ou moins avancés.

Le Bouddhisme n'admettant pas dans cette vie la distinction des castes, ouvre à tous les humains, quelles que soient leur naissance et leur condition, l'accès de la béatitude finale. 

D'autres paradis d'Eurasie

Religion nordique.
Les scandinaves n'admettaient guère dans le paradis que les âmes de quelques privilégiés. Ce paradis c'est le Valhalla ou Paradis d'Odin. L'entrée n'en est permise qu'aux héros morts en combattant; ils s'y livrent chaque jour, pendant l'éternité, de terribles combats après lesquels ils reviennent sains et saufs pour boire dans un crâne l'hydromel et la bière qui leur sont versés par les Valkyries.

Religions grecque et romaine.
Les âmes des héros vont aux Champs Elysées ou dans l'île des Bienheureux.

Iran.
Les anciens Perses (Mazdéisme), commé les Parsis modernes, appellent le paradis Behescht, le très excellent. L'âme juste, après avoir ob tenu un jugement favorable d'Ormazd et de Bahman, son assesseur, traverse le pont Tchinevad, et à son extrémité est accueillie par les transports de joie des Amschaspands, qui lui ouvrent les trésors de la béatitude céleste. Les bienheureux y jouissent dès à présent d'une béatitude ineffable, qui sera parfaitement consolidée, lorsqu'à la fin des temps, l'empire d'Ahriman sera complètement détruit.

Taiwan.
Selon les conceptions traditionnelles de Taiwan, les âmes des méchants sont précipitées et tourmentées dans une fosse pleine d'ordures. Celles des gens de bien passent gaiement par-dessus la fosse, sur un pont de bambous fort étroit, et prennent la route d'un paradis sensuel, où l'on trouve tous les agréments de cette vie; mais quand les âmes des méchants passent sur le pont, il tourne tout à coup, et les`âmes tombent dans la fosse. Ce pont se retrouve chez les Parsis et les Musulmans.

Shintoisme.
Les Shintoïstes du Japon placent le Takama-no wara, leur paradis, immédiatement au-dessous du trente-troisième ciel c'est là que sont reçues les âmes qui ont bien vécu dans le monde.

Ostiaks.
Les Ostiaks ne font les honneurs du paradis qu'aux âmes de ceux qui meurent d'une mort violente, ou dans la chasse contre les ours; mais les âmes de ceux qui meurent dans leur lit, ou d'une mort ordinaire, sont obligées de servir longtemps auprès d'un dieu sévère, qui réside sous la terre.

Lapons.
Les Lapons disaient que ceux qui avaient vécu sur la terre sans qu'on pût leur reprocher aucun vol, aucun parjure, aucun démêlé avec leurs compatriotes, allaient après leur mort dans le Jabmé-Aimo, reprendre de nouveaux corps, pour vivre éternellement avec les Saiwo-Olmak et les Saiwo-Nieidès, et partager avec eux leur félicité; que cette nouvelle vie se passait à exercer l'art runique, à aller à la chasse, à avoir la compagnie des femmes, à être toujours dans les festins, à boire de l'eau de vie, à fumer du tabac; et que tous ces exercices et ces plaisirs qui l'emportaient de beaucoup sur les plaisirs du même genre qu'on goûte sur la terre, formaient la félicité des habitants du Jabmé-Aimo; qu'au reste les ours et les oiseaux jouiraient du même sort; qu'après avoir passé quelque temps dans le Jabmé-Aimo, ceux qui y avaient été admis seraient transportés dans le Radien-Aimo, ou dans le ciel que Radien habite.

Paradis groenlandais

Comme les Inuit du Groenland tirent de Ia mer la meilleure partie de leur subsistance; ils placent leur séjour de bonheur après cette vie, au fond de l'Océan, ou dans les entrailles de la terre, sous ces voûtes et ces rochers qui servent de digue et de soutien aux eaux. Là, disent-ils, règne un été perpétuel, car ils ne connaissent pas le printemps; le soleil n'y laisse pas entrer la nuit; les eaux y sont toujours claires; tous les biens y abondent; c'est-à-dire les rennes, les poules d'eau, les poissons, mais surtout les chiens; les veaux marins s'y pêchent sans peine, et tombent tout vivants dans des chaudières toujours bouillantes. Mais pour arriver à ces demeures fortunées, il faut l'avoir mérité par l'adresse et la constance au travail; il faut s'être signalé par des exploits à la pêche, avoir dompté les baleines et les monstres marins, avoir souffert de grands maux, avoir péri dans la mer, ou en travail d'enfant. Les âmes n'abordent pas en dansant à ce séjour, mais doivent y glisser pendant cinq jours le long d'un rocher escarpé, tout hérissé de pointes et couvert de sang.

D'autres placent le séjour de félicité dans les cieux, au-dessus des nuages. Il est si facile à l'âme de voler aux astres, que, dès le premier soir de son voyage, elle arrive à la lune, où elle danse et joue à la boule avec les autres âmes; car les aurores boréales ne sont, dans l'imagination des Inuit, que la danse des âmes. Elles ont leurs tentes autour d'un grand lac où foisonnent les poissons et les poules d'eau. Quand ce lac déborde, la terre a des pluies, et, s'il rompait ses digues, elle éprouverait un déluge universel.

Ceux qui placent sous terre le séjour du bonheur, disent que celui qui est dans les cieux est fait pour les méchants, dont les âmes maigriront et mourront de faim dans les espaces vides de l'air, ou qu'elles y seront perpétuellement infestées et harcelées par les corbeaux, ou qu'elles n'y auront ni paix, ni trêve, emportées dans les cieux comme par les ailes d'un moulin. Enfin il y en a qui se contentent de dire qu'ils ne sa vent pas quelle sera la nourriture, ni l'occupation des âmes après cette vie, mais qu'elles habiteront certainement une demeure de paix.

Paradis américains

La plupart des Indiens de l'Amérique septentrionale placent le paradis du côté de l'ouest; ils le regardent comme un séjour agréable où l'on a la liberté de chasser et de pêcher. Au reste, la plupart de ces tribus croyaient  à la palingénésie et à la métempsycose; ils s'imaginaient voir l'âme de leurs parents, soit dans certains animaux, soit dans les étrangers qui passent dans leur pays, soit dans les fleurs, les étoiles, etc.

Sioux.
Les Mandans (Sioux) croient que chaque humain a plusieurs âmes : une noire, une brune, et une d'une couleur claire; que cette dernière seule retourne vers le seigneur de la vie. Ils disent qu'après la mort on va habiter plusieurs villages situés vers le midi, et qui sont souvent visités par les dieux. Les hommes vaillants et distingués vont au village des bons, et les méchants vont dans un autre. Ils y vivent comme ils vivaient auparavant; ils y ont des aliments et des femmes; ils chassent et font la guerre. Ceux qui ont bon coeur et font beaucoup de présents aux autres, retrouvent là de tout en abondance; leur existence est conforme à la conduite qu'ils ont tenue sur la terre. D'autres veulent qu'après la mort on aille habiter le soleil ou l'une des étoiles.

Natchez.
Les caciques des Natchez prétendaient que; comme ils sont descendus du soleil, ils y retourneront après leur mort. 

Virginiens.
Les Virginiens n'accordaient qu'à leurs prêtres et à leurs chefs les honneurs du paradis situé derrière les montagnes, vers le soleil couchant; c'est là que, couronnés de plumes, et le visage peint de diverses couleurs, ces bienheureux passaient leur temps à fumer du tabac, à danser et à chanter avec leurs ancêtres. 

Cherokees.
Les Cherokees prétendaient que les âmes de ceux qui avaient bien vécu étaient transportées au ciel et placées entre les étoiles. 

Aztèques.
Les Aztèques disaient que les âmes des hommes morts en combattant, et des femmes mortes en couches allaient à la maison du soleil où elles menaient une vie de délices. Chaque matin elles le saluaient à son lever par des chants, des danses et des cris d'allégresse. Celles des hommes qui habitaient l'orient accompagnaient cet astre jusqu'au point culminant de sa course, où il était reçu par celles des femmes, qui venaient au devant de lui de l'occident qu'elles habitaient, et l'accompagnaient jusqu'à son coucher. Au bout de quatre ans, ces âmes entraient dans le corps des plus beaux oiseaux, et pouvaient, à leur volonté, remonter vers le ciel ou descendre vers la terre, pour puiser leur subsistance dans le calice des fleurs.

Les âmes de ceux qui mouraient noyés, frappés de la foudre, d'hydropisie, de tumeurs, de blessures et d'autres maladies, ainsi que celles des enfants qui étaient sacrifiés à Tlaloc, dieu des eaux, allaient dans un endroit frais et agréable, nommé Tlalocan, où ce dieu résidait; et où ils trouvaient des festins et toutes sortes de plaisirs; ils passaient ensuite dans le corps d'animaux moins nobles; tandis que ceux qui étaient envoyés dans le Mictlan, enfer, animaient ensuite des insectes et des reptiles.

Incas.
Les Incas partageaient l'univers en trois mondes: le Hanan-pacha ou le haut monde ; le Hurin-pacha ou le bas monde; et le Veu-pacha ou, le monde souterrain. Les gens de bien allaient dans le ciel ou Hanan-pacha.

Les Incas faisaient consister le bonheur que l'on goûtait dans ce haut monde, à mener une vie paisible et libre des inquiétudes de celle-ci; mais ils ne comptaient pas parmi les plaisirs de ce séjour, les voluptés charnelles et tout ce qui flatte les sens. Ils réduisaient toute la félicité de ce paradis à la tranquillité de l'âme et à celle du corps.

Puelches.
Les Puelches du Chili immolaient des chevaux sur la tombe des chefs, afin que ceux-ci puissent les monter pour se rendre à l'Athuemapou (pays de la mort).

Les paradis océaniens

Mariannes.
Le paradis, pour les habitants des Îles Mariannes, était un lieu sous terre, rempli de délices, qui consistaient dans la beauté des cocotiers, des cannes à sucre et des fruits d'un goût merveilleux. Au reste, ce n'était pas la vertu qui conduisait dans ce séjour fortuné; les bonnes et les mauvaises actions n'y servaient à rien. Si on a le malheur de mourir de mort violente, on est renfermé dans le Zazarroguan, l'enfer; si au contraire on meurt de mort naturelle, on a le plaisir d'aller en paradis, pour y jouir des arbres et des fruits qui y sont en abondance. 

Carolines.
Les habitants des Carolines croient qu'il y a un lieu où les gens de bien sont récompensés, et un autre où les méchants sont punis; ils disent que les âmes qui vont au ciel retournent le quatrième jour sur la terre, et demeurent invisibles au milieu de leurs parents. Il y a parmi eux des prêtresses qui prétendent avoir des communications régulières avec les âmes des morts; ce sont elles qui, de leur propre autorité, déclarent si elles sont allées au ciel ou en enfer. On honore les premières comme des esprits bienfaisants à qui on donne le nom de tahoutoup, c'est-à-dire patron; chaque famille a le sien, qu'elle invoque dans toutes ses entreprises, avant de se mettre en voyage, de partir pour la pêche, de faire la guerre, etc.

Tonga.
Le Bolotou est le paradis des îles Tonga; mais il n'y a que les âmes, des eguis et celles des mataboulés, c'est-à-dire des nobles, qui y parviennent; elles y servent de ministres aux dieux : quant aux gens de la classe inférieure, ils sont censés n'avoir pas d'âme.

Tahiti.
Les Tahitiens pensaient que les âmes des bons devenaient après la mort du corps des esprits célestes, qui participaient à la divinité (les Eatouas). 

Marquises.
Quant au paradis des îles Marquises, il se nomme Nouka-Hiva. Les Marquisiens croient que les âmes de tous ceux qui meurent dans l'archipel vont se réunir sur la cime d'une haute montagne appelée Kioukiou. Quand il y en a un grand nombre de rassemblées en ce lieu, la mer s'entrouvre, et elles tombent sur une terre de délices, plantée de toutes sortes de fruits excellents, et embellie par les eaux toujours calmes d'un lac azuré. La déesse Oupou, souveraine de ce paradis, ne permet de l'habiter , de manger ces fruits délicieux, et de se baigner dans ce beau lac, qu'à ceux qui, pendant leur vie, ont eu beaucoup d'hommes à leur service, ont possédé beaucoup de cochons et n'ont pas été méchants. Il semble en outre que, pour y être admis, il est d'étiquette de ne porter aucune trace de tatouage; car un missionnaire raconte que, le roi de Tahuata étant mort, la reine le garda pendant trente jours dans sa cabane, et qu'elle s'occupait à enlever avec ses doigts la peau du défunt, à mesure qu'elle se détachait. Et comme le prêtre lui demandait la raison d'une cérémonie aussi étrange, elle répondit que c'était pour effacer le tatouage, parce qu'il fallait que le corps de son mari fût sans tache pour que la grande déesse Oupou lui permît de vivre sur sa terre et de se baigner dans son lac.

Ce paradis n'est que pour les riches; les esclaves et les pauvres vont dans une terre sombre, qui n'est jamais éclairée par le soleil, et où iIs ne trouvent que des eaux bourbeuses. Toutes ces âmes, après avoir demeuré très longtemps dans l'un ou l'autre lieu, reviennent sur la terre pour animer d'autres corps. (B. / E.-H. V.)

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Dictionnaire Religions, mythes, symboles
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