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Cavendish
(Henry), chimiste et physicien, second fils de lord Charles Cavendish,
troisième fils luimême du deuxième duc de Devonshire ,
né à Nice, le 10 octobre 1731, mort à Londres le 24 février 1810. Il
fit ses premières études dans une pension de Hackney, près de Londres,
entra en 1749 au Peterhouse College de Cambridge
et en sortit en 1753, sans avoir pris aucun grade. Nous perdons ensuite
sa trace et nous ne le retrouvons qu'en 1760, mathématicien et physicien
de premier ordre, chimiste déjà distingué, membre de la Société
royale de Londres.
Les origines de sa vocation scientifique
ne nous sont pas connues. Peut-être l'exemple de son père, qui s'occupait
d'astronomie et faisait partie de la Société royale, peut-être aussi
sa qualité de cadet de famille, qui ne lui laissait l'espoir d'aucune
fortune, en furent-elles les causes déterminantes. Plus probablement ses
infirmités naturelles, en le tenant éloigné du monde, décidèrent de
sa passion pour l'Ă©tude. Grand, mince, gauche d'allures, timide au delĂ
de toute conception, il était en outre doté d'une voix grêle, extraordinairement
aiguë, qui lui faisait redouter la conversation, et d'une sensibilité
maladive, qui lui inspirait l'horreur de la société. La présence d'une
femme surtout le mettait dans un Ă©tat de gĂŞne vraiment ridicule et les
servantes de sa maison avaient l'ordre de ne pas se laisser voir par lui;
inutile d'ajouter qu'il ne se maria jamais. En 1773, un de ses oncles,
vieux général, qui avait fait aux Indes quelques guerres assez lucratives,
lui légua une rente pour le dédommager de l'indifférence dédaigneuse
que lui avait toujours témoignée sa famille.
Devenu subitement le plus riche de tous
les savants, Cavendish ne changea rien Ă ses habitudes d'Ă©conomie; il
continua de résider dans sa maison de Clapham (banlieue de Londres), où,
pendant plus de cinquante années, les moindres détails de l'existence
restèrent uniformément et mathématiquement réglés, et il ne toucha
guère à ses nouveaux revenus que pour accroître son immense bibliothèque;
il l'avait installée à deux lieues de sa résidence, dans sa maison de
Bedford Square, afin de n'être pas dérangé par les nombreux amis autorisés
Ă y venir travailler; lui-mĂŞme n'y prenait jamais un livre sans en laisser
scrupuleusement un récépissé. Cet illustre original, qui avait pris
pour règle de ne perdre ni une minute, ni une parole, mourut à soixante-dix-neuf
ans, faisant un legs d'un demi-million à son ancien secrétaire, sir Ch.
Blagden, membre de la Société royale, et donnant le reste de sa fortune,
une trentaine de millions, à des parents éloignés. Il était depuis
1803 associé étranger de l'Institut de France.
Cavendish a été, avec Hales,
Scheele,
Priestley, un de ceux qui ont le plus concouru
Ă l'oeuvre de Lavoisier, la fondation de la
chimie moderne. Il a contribué à introduire dans cette science
des habitudes de mĂ©thode et de prĂ©cision Ă
peu près inconnues avant lui et il a puissamment contribué à ses progrès
par de mémorables expériences, bien
qu'il ne se soit jamais prononcé formellement contre la théorie
du phlogistique. Dès 1764, il paraît s'être occupé du dégagement de
chaleur qui accompagne la solidification et la condensation et avoir construit
des tables de chaleurs spécifiques, qui n'ont jamais été imprimées.
En 1766, il envoya à la Société royale
un premier mémoire : On factitious airs (Philosophical transactions,
1766, p. 141); il y Ă©tablit que l'air
n'est pas un élément
et qu'il existe plusieurs sortes d'airs essentiellement différentes, que
l'hydrogène (inflammable air), qu'il
a distingué le premier comme un gaz
spécial, pèse dix fois moins que l'air atmosphérique (common air),
que l'acide carbonique (fixed air) pèse moitié plus, que la présence
de 1/9 de ce dernier dans l'atmosphère
suffit pour empĂŞcher la vie et la combustion, etc. En 1783, il donna un
nouveau mémoire d'un grand intérêt : On a new Eudiometer (Philos.
Trans., 1783, p. 106). Scheele et Lavoisier
avaient annoncé en 1775 que l'air atmosphérique est constitué par un
mélange d'air déphlogistiqué (oxygène) et d'air phlogistiqué (azote);
Cavendish fit connaître avec plus d'exactitude dans le mémoire précité
la proportion volumétrique des deux gaz (20,833 d'oxygène et 79,167 d'azote)
et posa en principe que la quantité
d'air respirable est la mĂŞme partout. Il signala encore, vers la mĂŞme
époque, quelques autres particularités relatives à la composition de
l'atmosphère. Mais ses deux expériences capitales ont été la synthèse
de l'eau et celle de l'acide azotique.
Au commencement de 1781, Priestley
et Warltire avaient remarqué, en répétant une expérience de Macquer,
que la combustion de l'hydrogène dans l'oxygène par le moyen de l'étincelle
électrique produit sur les parois du vase un dépôt de rosée; Cavendish
étudia à son tour le phénomène, en se servant
de vase clos, pesa soigneusement les gaz employés et la rosée recueillie,
et reconnut, en 1783, que le produit de la combinaison de l'oxygène avec
l'hydrogène est de l'eau. Cette découverte fut communiquée à la Société
royale dans un mémoire intitulé Experiments on air (Philos.
Trans., 1784, p. 119) et lu en séance le 15 janvier 1784. Cependant
Cavendish avait remarqué que dans son expérience il se formait, outre
l'eau, de l'acide nitrique, substance dont la composition Ă©tait encore
inconnue. Il soupçonna presque aussitôt la cause
de ce nouveau phénomène, prit de l'oxygène et de l'azote purs, fit passer
dans le mélange une série d'étincelles électriques et obtint de l'acide
nitrique; en répétant l'explosion en présence d'une solution de potasse,
il eut du nitrate de potasse (New experiments on air, dans les Philos.
Trans., 1785, p. 372).
Les sciences physiques
lui doivent Ă©galement d'importantes contributions. Il appliqua l'un des
premiers le calcul à la théorie de l'électricité et écrivit sur ce
sujet deux mémoires (Philos. Trans., 1771, p. 584, et 1776) et
une trentaine de notes manuscrites, qui ont été réunis par J.
Clerk Maxwell sous le titre : The electrical researches of the hon.
H. Cavendish (Cambridge, 1879, in-8).
Il publia aussi quelques remarques sur les effets des mélanges frigorifiques
et sur leurs limites (Philos. Trans., 1783, p. 303, et 1786, p.
241). Enfin il fit un remarquable emploi de ses profondes connaissances
en mathématiques dans l'expérience célèbre
où il mesura la densité
de la Terre
et démontra en même temps l'attraction
des corps les uns pour les autres (Experiments to determine the density
of the Earth, dans les Philos. Trans., 1798, p. 469; trad. franç,
par Chompré dans le Journal de l'École
Polytechnique, t. X). Le résultat qu'il obtint avec sa balance à peser
le monde, 5,48, diffère peu de celui trouvé par la suite par Cornu
et Baille (environ 5,50), et du chiffre admis aujourd'hui (5,515).
(L. Sagnet). |