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L'histoire de la Hongrie
La Hongrie occupe aujourd'hui la partie septentrionale de l'ancienne Pannonie, et s'étendait dans le passé jusqu'à la partie occidentale de l'ancienne Dacie, et la partie Sud-Est de la Germanie.  Parmi les nations qui occupèrent, dans des temps reculés, certaines portions de la Hongrie, nous trouvons : les Daces, les llyriens, les Pannoniens, les Gépides, les Longobards et les Khazars. Les Romains réunirent la partie Sud-Ouest à la Pannonie et la partie Sud-Est à la Dacie. Elle fut ensuite soumise par les Wisigoths et les Huns d'Attila qui avait établi sa capitale sur les bords de la Tisza, et elle avait été envahie par les Slaves et Avars, les Valaques, les Bulgares et les Alamans lorsqu'elle fut conquise par un peuple venu de la région de la Volga, attiré dans cette partie de l'Europe par l'empereur d'Orient -Léon le Philosophe, qui l'opposa aux Bulgares. Ce peuple, dont une composante semble avoir porté le nom de Magyar qu'il se donne, fut appelé par les Slaves Ougri, Oungri et Vengri, d'où les Allemands ont fait Ungarn, et les Français Hongrois. 

Partis des plaines de la Sibérie occidentale,  ces Magyars ou Hongrois envahirent en 895 le bassin moyen du Danube sous la conduite d'Almos (Almus), puis de son fils Arpad, dont la dynastie régna sur la Hongrie jusqu'en 1301. Divisés en sept  tribus et 408 familles, c'était, dit-on, une masse d'un million de personnes, dont plus de 200.000 guerriers. 

L'empereur Arnoul ayant réclamé leur secours contre Svatopluk, roi des Moraves, ils s'emparèrent d'autant plus facilement de la contrée nommée aujourd'hui Hongrie, que la puissance des Avars avait été détruite par Charlemagne. Après avoir épouvanté les pays d'Occident (l' Italie, l'Allemagne et la France) et l'Empire byzantin qu'ils ravagèrent à plusieurs reprises, ils se fixèrent dans le pays qui porte leur nom.  Les résistances qu'ils rencontrèrent et leur conversion au christianisme mirent un terme à leurs courses vers la fin du Xe siècle. Cette conversion commença par l'exemple de leur duc Geysa, descendant d'Arpad (972-997), qui se fit baptiser par saint Adalbert, archevêque de Prague, tout en gardant ses idoles.

« Je suis assez riche, disait-il, pour servir deux divinités.»
Son fils Étienne fut le vrai fondateur, le patron de la Hongrie. Il obtint d'Othon III la fondation d'un siège métropolitain à Gran, et du pape Sylvestre II le titre de Majesté apostolique (1000), qui demeura attaché à celui de roi de Hongrie. Les Magyars ne massacrèrent pas les populations slaves, germaniques ou latines qu'ils trouvèrent établies dans la plaine du Danube. Ils se mêlèrent à elles. Saint Étienne organisa le gouvernement monarchique et donna aux Magyars l'unité nationale. Le Roi fut assisté d'un sénat et de comtes (ispans) qui gouvernaient les provinces. Au-dessous de la haute noblesse des magnats se forma une petite noblesse turbulente et fière, dangereuse parfois pour l'ordre monarchique, mais surtout pour les ennemis de la Hongrie.

Les habitudes des Hongrois, dont un grand nombre étaient encore attachés au paganisme, troublèrent les règnes des premiers successeurs de saint Etienne. Béla Ier rétablit l'ordre. La rivalité de Salomon, son neveu, et de son fils Geysa, vint de nouveau agiter la Hongrie. Mais saint Ladislas rendit la tranquillité au royaume, et en recula les frontières par la conquête de la Croatie et de la Dalmatie

Coloman, neveu de Ladislas, accueillit avec défiance les croisés, dont les passages successifs sur son territoire mirent la Hongrie en relation avec l'Europe occidentale. Il se rendit odieux par ses cruautés, et son fils Étienne II, surnommé le Foudre, marcha d'abord sur ses traces; mais, après avoir porté la guerre en Pologne, en Bulgarie et en Grèce, il remit le sceptre au sage Béla II, pour prendre l'habit monastique. Geysa Il maintint, comme son père Béla Il. le bon ordre dans ses États. Le règne d'Élienne III fut troublé par la concurrence au trône de deux de ses oncles, Ladislas et Etienne. Les efforts de Béla III, frère d'Etienne III, pour pacifier la Hongrie furent contrariés par les prétentions de son frère Emeric Il conserva la ville de Zara, qui s'était donnée à la Hongrie, malgré les tentatives des Vénitiens pour la lui reprendre. Il épousa Marguerite, soeur de Philippe Auguste. Émeric, fils de Béla III, résista aux tentatives que fit son frère André pour le renverser du trône. Mais il perdit en 1202 la ville de Zara, que les Vénitiens lui enlevèrent, avec l'aide des croisés, et mourut en 1203

André Il marcha en Palestine, à la tête des croisés, en 1217. A son retour, il ratifia, dans un décret appelé Bulle d'or, les privilèges de la noblesse; et institua les diètes annuelles. Sous Béla IV, les Mongols envahirent la Hongrie, en 1241, et obligèrent ce prince à se retirer en Dalmatie. Il perdit aussi une bataille contre Frédéric le Belliqueux, duc d'Autriche, et fut défait par Ottokar Ier et par Ottokar II, rois de Bohème. Élienne IV, fils de Béla IV, battit les Bulgares et leur imposa un tribut. Son fils, Ladislas III, adopta les moeurs païennes des Kumans, qui envahirent la Hongrie sous son règne, et fut assassiné par trois de leurs chefs. André III, successeur de Ladislas III, eut un concurrent au trône dans Charles Martel, fils de Charles Il, roi de Naples, et de la soeur de Ladislas III. Charles-Robert, ou Charobert, fils de Charles Martel, réclama la couronne de Hongrie avant la mort d'André III, en qui s'éteignit la dynastie d'Arpad, en 1301, et eut un compétiteur dans Venceslas, fils de Venceslas IV, roi de Bohème, qui fut élu en 1301, mais qui se désista en 1304. Avec la maison d'Arpad finit l'existence de la Hongrie comme nation indépendante. 

Les souverains de la Bohème, de la Pologne et de l'Autriche s'en disputèrent la possession pendant deux siècles et demi. Othon de Bavière, petit-fils par sa mère de Béla IV, fut élu en 1305, et se maintint jusqu'en 1307. Charobert, reconnu roi en 1309, fut le réformateur des abus. Louis le Grand, fils de Charobert, conquit la Transylvanie, la Valachie, la Croatie et la Dalmatie, acheva la conversion des Kumans au christianisme, créa la noblesse du second ordre, protégea le commerce et l'industrie, et devint roi de Pologne en 1370. Marie, sa fille, lui succéda eu 1382, sous la régence de sa mère Elisabeth, qui fit assassiner en 1386-Charles III, roi de Naples, proclamé roi de Hongrie en 1385 par le parti mécontent du gouvernement de cette princesse. Elisabeth fut mise à mort, et Marie enfermée. Mais son fiancé, Sigismond de Luxembourg, plus tard empereur d'Allemagne, la délivra, et se plaça avec elle sur le trône. 
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Budapest : statues de la place des héros.
Statues de la place des Héros, à Budapest.

Les Turcs profitèrent des troubles de la Hongrie pour commencer à l'envahir, et Sigismond perdit contre eux, en 1396, la grande bataille de Nicopolis. La couronne de Hongrie lui fut disputée avec un succès passager en 1403 par Ladislas, roi de Naples, fils de Charles III. Sigismond régla l'ordre des diètes, et y fit siéger les députés des villes. Il eut pour successeur Albert II d'Autriche, empereur d'Allemagne, mari de sa fille Élisabeth. A la mort de ce prince, les Hongrois, menacés d'une nouvelle invasion turque, appelèrent au trône Vladislas VI, roi de Pologne, qui, après avoir défait les Ottomans avec l'aide de Jean Hunyade, fut tué dans une bataille qu'il perdit ensuite contre eux en 1444 à Varna. Jean Hunyade, nommé régent du royaume en 1445, pendant la minorité de Ladislas VI, fils posthume de l'empereur Albert d'Autriche, gouverna l'Etat avec habileté jusqu'à l'avènement du jeune roi en 1453, et le défendit contre les Turcs, sur lesquels il remporta encore une victoire signalée à Belgrade en 1456. Son second fils, Mathias Corvin, fut placé sur le trône après la mort de Ladislas VI, en 1458

La Hongrie, momentanément relevée, brilla d'un éclat passager sous le règne de ce grand roi. Sous ses deux successeurs, Vladislas et Louis, de la maison des Jagellons, rois de Bohème en même temps que de Hongrie, les Turcs profitèrent encore une fois des troubles suscités par les discordes des grands pour fondre sur la Hongrie. Le dernier de ces deux princes, Louis, fut tué en 1520 à la bataille de Mohacz, qu'il perdit contre Soliman. Ferdinand Ier d'Autriche réclama la couronne de Hongrie en vertu d'un traité conclu entre Vladislas Jagellon et l'empereur Maximilien Ier; mais elle lui fut disputée par Jean Zapolya, voïvode de Transylvanie, qui appela Soliman à son secours en 1529. Ces divisions permirent aux Turcs de s'emparer d'une partie de la Hongrie, qu'ils occupèrent pendant 160 ans. Jean Zapolya mourut en 1540, et ses partisans proclamèrent roi son fils Jean Sigismond, encore au berceau. Ferdinand, demeuré possesseur du trône, le céda à son fils Maximilien en 1563

Avec le protestantisme une nouvelle vague de troubles s'introduisit en Hongrie. La maison d'Autriche se maintint en possession de la royauté, malgré les efforts continuels des Turcs et les révoltes successives de Botchkay, prince de Transylvanie, et soutien des protestants, de Béthlen Gabor, de Georges Rakoczy, et enfin d'Emeric Toekély. Fort des succès de ses armes contre les Turcs, l'empereur. Léopold ler fit déclarer par la diète, à Presbourg (auj. Bratislava, en Slovaquie), en 1687, la couronne de Hongrie, héréditaire dans sa maison. Cette hérédité fut étendue en 1722à la descendance féminine de la maison de Habsbourg. Les victoires du prince Eugène amenèrent la paix de Carlovvitz (1699), et celle de Passarowitz (1718), qui affranchirent la Hongrie de la domination turque. 
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Blason du royaume de Hongrie.
Armes de la Hongrie.

Une nouvelle révolte, dont le chef fut François Rakoczy, fut apaisée par le traité de Szathmar, qui rendit à la Hongrie, en 1711, ses anciens privilèges. Au cri de sa noblesse : Moriamur pro rege nostro Maria Theresa! la nation se leva tout entière pour soutenir Marie-Thérèse, en 1741. Elle continua de se montrer dévouée à la maison d'Autriche pendant les guerres contre la France républicaine et contre Napoléon Ier. La Hongrie avait conservé son ancienne constitution, la plus aristocratique de toute l'Europe, qui perpétuait les Magyars dans leur position de conquérants. Tous les droits politiques et sociaux leur étaient exclusivement réservés, quoiqu'ils ne formassent pas la moitié de la population du royaume. Les lois, proposées et sanctionnées par le roi, étaient discutées par la diète, composée de 2 chambres : la table des magnats, où siégeaient les prélats et les grands du royaume sous la présidence du palatin, qui était un archiduc représentant le roi, et la table des états, où siégeaient les députés de la noblesse inférieure, des villes et des districts. La diète se réunissait tous les trois ans à Presbourg.

Un esprit d'opposition au gouvernement autrichien, qui allait toujours croissant depuis 1830, se manifesta ouvertement en 1848. Les Hongrois prétendaient s'affranchir de la domination autrichienne, et maintenir en même temps leur propre domination sur les Croates et les Esclavons. La guerre civile éclata; et l'avocat Kossuth, chef du parti démagogique, s'empara du gouvernement. Il fit décréter, en 1849, par les chambres représentatives, qui avaient remplacé la diète, dissoute par l'empereur, l'exclusion de la maison de Habsbourg-Lorraine du trône de Hongrie. L'insurrection ne put être réprimée .par l'Autriche, et fournit à la Russie l'occasion d'intervenir dans le conflit, et de prêter, cette même année 1849, l'appui de ses armes au rétablissement de l'autorité autrichienne en Hongrie. Une agitation révolutionnaire s'y est manifestée en 1860. L'empereur a décidé que l'ancienne diète serait reconstituée, en même temps qu'il a rétabli l'ancienne division par comitats. Mais il a été forcé, par les répugnances des Hongrois à admettre l'union réelle avec la monarchie autrichienne, de dissoudre la diète en 1861. Les dispositions à trouver une solution qui concilie l'unité de l'empire avec les droits historiques de la Hongrie devinrent meilleures en 1862 et 1863.

Plus fortement constituée que l'Autriche, moins travaillée par les conflits de nationalités, dirigée par une aristocratie riche et puissante qui donnait au gouvernement une réelle stabilité, la Hongrie prima à la politique extérieure de la double monarchie ses directions particulières, et son influence ne contribua pas peu à orienter Habsbourg vers les Balkans.

C'est pour elle surtout que fut avantageux le régime de 1867. Le pouvoir appartint tout d'abord à une coalition des partis Deak et Tisza : unis sous la dénomination de «-parti libéral-», ils s'appliquèrent à organiser le nouvel État de Transleithanie et à le magyariser. Les résistances des Roumains de Transylvanie et celles des Slovaques furent facilement  surmontées, mais il fallut concéder aux Croates une part assez grande d'autonomie.

L'apparition sur la scène politique, aux élections de 1905, du «-parti de l'indépendance-» dirigé par Albert Apponyi, Jules Andrassy. François Kossuth, fils du dictateur de 1848, fut le point de départ d'un mouvement en faveur de la transformation du régime dualiste en une simple «-union personnelle-». Le «-parti de l' indépendance-» demandait la substitution du magyar à l'allemand comme langue de commandement dans la partie de l'armée commune recrutée en Hongrie. C'eût été constituer une armée nationale en Transleithanie et créer un précédent dont auraient pu s'autoriser les autres nationalités : l'empereur s'y refusa. Les -«-indépendants-» critiquaient aussi l'accord spécial fixant la contribution de la Hongrie aux dépenses communes de la monarchie (diplomatie, finances, armée); cependant, malgré les efforts de l'opposition, aux Parlements de Budapest et de Vienne, l'accord fut renouvelé à la fin de décembre 1907, pour dix ans et pour la dernière fois. La Hongrie, entraînée dans la Première Guerre mondiale en 1914, proclama son indépendance le 28 octobre 1918, au moment de l'effondrement de l'empire austro-hongrois.

L'indépendance de la Hongrie lui fut reconnue par les Traités de Versailles et de Saint-Germain, qui, dans leur définition des nouvelles frontières en Europe centrale,  ne laissaient, à la Hongrie qu'un territoire exigu en comparaison de ce qu'il avait été auparavant. Devenue une république, et aspirant, sous la conduite du comte de Carolyi, a devenir une démocratie, le pays se trouva rapidement confrontée à l'agitation communiste, dirigée par Béla Kun. Celui-ci s'empara du pouvoir en 1919 et mit en place un mode de gouvernement analogue à celui des Soviets en Russie. La même année Kun fut renversé à la suite de l'intervention des troupes roumaines à Budapest qui aidèrent à installer à sa place, un aristocrate typique représentant de la vieille Hongrie traditionnaliste et catholique, l'amiral Miklos Horthy. Une forme de monarchie fut rétablie, Horthy  assumant les fonctions de régent. Le parti communiste fut interdit, et une vague de répression (la terreur blanche) déferla sur le pays. Des gouvernements marqués très à droite, se succédèrent : Istvan Bethlen (1921-1931), Gömbös (1932-1936), Daradnyi (1936-1938).

Antisémites et revanchardes, les classes dirigeante se trouvèrent vite des affinités avec les idées prônées par les Nazis en Allemagne. En 1937, un parti nazi, les Croix fléchées, fut même formé. Ce rapprochement avec l'Allemagne permit en 1938 à la Hongrie de retrouver certains des territoires dont elle avait été amputée après la Grande Guerre (Slovaquie du Sud, Transylvanie du Nord, portions de la Ruthénie et de la Voîvodine). En 1939, le pays s'associa à l'Allemagne, au Japon et à l'Italie, au sein du Pacte anti-Komintern. Cependant, quand fut déclenchée la Seconde guerre mondiale, Horthy, un temps écarté du pouvoir, mais de nouveau aux affaires tenta de ne pas entraîner son pays dans le conflit. Il finit par s'y résoudre en 1941. Au moment de l'offensive allemande contre l'URSS, la Hongrie envoya ses troupes (des forçats juifs étant sacrifiés en première ligne) sur le front de l'Est, avant de déclarer la guerre au Royaume-Uni et aux États-Unis. Dans la capitale et les grandes villes, les communistes pour leur part s'efforcèrent d'organiser une résistance. En octobre 1944, les Croix fléchées, dirigées par Szalasi renversèrent Horthy qui avait demandé un armistice à l'Union soviétique et qui freinait la déportation des Juifs de Budapest vers les camps d'extermination (L'Holocauste), et laissèrent l'armée allemande occuper la Hongrie. Mais quelques mois plus tard, en avril 1945, à l'issue de combats violents, qui ravagèrent en particulier Budapest, les troupes soviétiques s'emparèrent de la Hongrie. Les territoires repris par la Hongrie sept ans plus tôt durent être rendus, et un nouveau gouvernement, dit de front national, fut mis en place.

Dans un premier temps, les Soviétiques laissèrent s'installer en Hongrie un gouvernement provisoire d'apparence pluraliste, dirigé par le général Béla Miklos, un ancien sous-fifre du régime de Horthy, mais au sein duquel les communistes étaient supposer jouer un rôle pivot. Le nouveau gouvernement organisa des élections et entreprit une réforme agraire (confiscation de tous les domaines de plus d'une soixantaine d'hectares, redistribution des terres à 642 000 bénéficiaires) et se trouva notamment confronté à l'opposition des de l'Église, avec à sa tête le cardinal Josef Midszenty, et à celle des anciens fascistes. Il eut aussi aussi à se défendre, à l'intérieur même de ses rangs, des agissements des communistes, mécontents de la position minoritaire qui avait résulté des urnes. Dirigés par Màtyàs Ràkosi, secondé par Ernö Gerö, ceux-ci avaient noyauté l'armée et la police et finirent par s'emparer du pouvoir. Ils commencèrent à mettre en place, à partir de 1948,  une démocratie populaire comparable à celles qui existaient déjà dans les autres pays satellites de l'URSS. Sur fond de terreur policière, une nouvelle constitution fut adoptée en 1949, l'Industrie fut nationalisée et l'agriculture collectivisée.

La mort de Staline en 1953 mit fin à la dictature de Ràkosi. La Hongrie, dont l'économie partait à la dérive, fut invitée par son grand frère soviétique à procéder à une ample déstalinisation. Imre Nagy, un communiste non stalinien, qui, comme ministre de l'agriculture, avait été le promoteur de la réforme agraire, se vit confier les rênes du pouvoir. Ses tentatives de réformes furent entravées par la résistance que leur opposait l'aile dure du parti communiste, et ses avancées, bien que favorablement perçues par la population, furent modestes. A peine deux ans plus tard, il fut désavoué par Moscou, et remplacé quelque temps par Andràs Hegedüs, un lieutenant de Màtyàs Ràkosi (celui-ci restant en réalité l'homme fort de la Hongrie). Celui-ci fut  limogé définitivement en mars 1956, et les directions du pays et du Parti communiste furent confiée à un autre stalinien, Ernö Gerö. 

Le 23 octobre 1956, les étudiants de Budapest s'enhardirent à manifester pour demander le retrait des troupes soviétiques du sol hongrois et un retour des libertés fondamentales et aussi celui de Nagy. Le lendemain, le Parti communiste appela l'URSS à l'aide et crut pouvoir apaiser l'effervescence en replaçant Imre Nagy à la tête du Conseil. Nagy espérait pouvoir obtenir le retrait des militaires soviétiques et un statut de neutralité pour son pays, comparable à celui obtenu par l'Autriche l'année précédente. Après une visite éclair à Budapest de deux dirigeants soviétiques, Mikhaïl Souslov et Anastase Mikoyan, Youri Andropov, alors ambassadeur de l'URSS à Budapest (et futur numéro un de l'Union soviétique finissante), laissa penser à Imre Nagy que Moscou laisserait faire. Mais Nagy ne fut pas même en mesure de constituer un gouvernement capable de durer plus de quelques jours. Et de toute façon, dès le 30 octobre, tous ses plans volèrent en éclat, quand les Soviétiques décidèrent d'envahir la Hongrie. Leurs troupes prirent position à partir du 4 novembre. Il y eut quelque 3000 morts (les trois-quarts à Budapest), dont des centaines d'exécutions, et vingt mille arrestations. Beaucoup de Hongrois fuirent le pays, Nagy  crut pouvoir trouver refuge à l'ambassade de Yougoslavie. Croyant aux promesses d'impunité qu'on lui avait faites, il en sortit et fut aussitôt kidnappé par des agents soviétiques, avant d'être jugé et condamné à mort pour haute trahison. Jànos Kàdàr, un ancien dirigeant communiste écarté par Ràkosi, redevenu quelques jours plus tôt numéro un du parti communiste (rebaptisé Parti socialiste ouvrier hongrois), fut placé au pouvoir.
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Statue de Imre Nagy, à Budapest.
Statue de Imre Nagy, à Budapest.
Photos : The World factbook.

Jànos Kàdàr fut le maître d'oeuvre d'une brutale politique de répression, qui se signala notamment par la pendaison de Nagy en juin 1958, et se prolongea jusque vers 1963-1964. Des lois d'amnistie furent alors votées, et le pays, se lança dans une relative libéralisation. Kàdàr réussit à instaurer une pacification intérieure qui rendit le régime plus supportable. En 1968, un nouveau mécanisme économique put même être instauré, introduisant un peu d'économie de marché dans l'économie socialiste. Le pays n'en demeurait pas moins, sur le plan international, rigoureusement aligné sur Moscou. Soldat modèle du Pacte de Varsovie, la Hongrie participa ainsi cette année-là en Tchécoslovaquie, à l'écrasement du Printemps de Prague. Jusqu'aux au début des années 1980, la Hongrie connut une croissance économique, qui contrastait avec la stagnation des autres pays satellites de l'URSS. Puis le régime commença à donner des signes d'ankylose. Jànos Kàdàr, vieillissant, fut démit de ses fonctions en 1988 et remplacé par Karoly Grosz, puis par Gyula Horn. L'opposition commença à s'exprimer plus ouvertement; en mai, on ouvrit  le passage aux Allemands de l'Est qui souhaitaient quitter leur pays pour se réfugier à l'Ouest, via l'Autriche, tandis que le régime se résolvait à s'ouvrir au multipartisme. En 1989, le jour même de la mort de Kàdàr, la Cour suprême réhabilita Imre Nagy.

En 1990, des élections libres eurent lieu. Elles donnèrent la victoire à une coalition de centre-droit (dans laquelle existait aussi un courant d'extrême-droite, antisémite), dont le gouvernement fut dirigé par Jòzsef Antall. En juin, la Hongrie se retira du Pacte de Varsovie. L'ère communiste était terminée, mais tout n'était pas fini pour les ex-communistes (ou néo-communistes, comme on voudra). Le retour des restes de Horthy (mort au Portugal) et inhumé en septembre 1993, qui avait donné lieu à une réhabilitation contestée de son régime, et surtout les incertitudes du passage à l'économie de marché, qui ravivèrent rapidement la nostalgie du kadarisme, ou du moins de celui des années de croissance et de stabilité sociale, firent perdre la droite aux élections suivantes. En 1994, un gouvernement de coalition réunissant communistes et libéraux fut formé. La libéralisation ne s'en poursuivit pas moins. En 1997, les Hongrois se prononcèrent par référendum pour l'adhésion de leur pays à l'Otan (qui aura lieu deux ans plus tard), et des négociations commencèrent avec l'Union européenne en vue de l'admission de la Hongrie. En 1998, une nouvelle coalition de centre-droit revint au pouvoir. Viktor Orban fut nommé premier ministre. Sous son gouvernement, en juin 2001, une loi fut votée donnant un statut protecteur aux ressortissants de langue hongroise (magyarophones) vivant dans les pays voisins (Croatie et  Roumanie, Serbie, Slovaquie, Slovénie et Ukraine). Ce qui souleva une vague de contestation dans les pays concernés, qui y voyaient non seulement une ingérence, mais aussi, s'ajoutant la réhabilitation de Horthy huit ans plus tôt, une résurgence des anciennes prétentions impériales de la Hongrie.

Cela n'empêcha pas la Hongrie de poursuivre paisiblement mais résolument sa vie démocratique. En mai 2002, une coalition de gauche, dirigée par Peter Medgyessy, gagna  les élections le parlement amenda quelques mois plus tard la loi sur les droits des magyarophones de l'étranger. En avril 2003, après l'accord donné par l'Union Européenne à l'entrée de la Hongrie, un référendum entérina le projet, et le pays fit officiellement son entrée dans le club européen le 1er mai 2004. En septembre Ferenc Gyurcsany remplaça Peter Medgyessy, démissionnaire. En décembre, le pays se prononça par référendum contre le projet de donner la nationalité hongroise aux magyarophones de l'étranger, tandis que le parlement ratifiait le traité de constitution européenne. Les élections de 2005 ont ensuite reconduit au pouvoir la coalition dirigée par Gyurcsany.

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