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Histoire de la Serbie
La Serbie a reçu son nom des Serbes, Serbi ou Sorabes, dont la première mention se trouve dans Pline. Ce peuple de langue slave est, suivant une des opinions sur l'origine des Slaves, la souche de tous les Slaves. Appelé, vers l'an 636, par l'empereur Héraclius au secours de l'empire d'Orient contre les Avars, il les chassa du pays où il s'établit sous la suzeraineté des empereurs de Constantinople.

La Serbie, gouvernée par des princes appelés zupans, fut subjuguée par les Bulgares en 924, et passa avec eux sous la domination grecque en 1018. Elle acheva alors de se convertir au christianisme. Elle s'affranchit du ,joug grec en 1043, et Michel, qui la gouverna de 1050 à 1080, prit le titre de roi. Étienne (Stéphane) Nemanja consolida l'indépendance de son pays, et fonda en 1165 une dynastie et un royaume qui, de sa capitale, Nassa (plus tard Novi-Bazar ou Novi Pazar), s'appela Grande-Zupanie de Nassa; et ensuite royaume des Serbes, ou des Rasciens. 

Ce royaume, ramené à l'unité catholique par saint Sabas, deuxième fils du roi Étienne ler mort archevêque de Serbie en 1237, fut reconnu par le Saint-siège en 1222 sous Étienne II, fils aîné d'Étienne Ier et s'agrandit, progressivement sous ses successeurs. Étienne Douchan, celui d'entre eux qui éleva la Serbie à sa plus haute puissance, y ajouta la Macédoine, l'Albanie, la Thessalie, le Nord de la Grèce, et prit le titre d'empereur. Il fut le législateur de son pays et le protecteur des sciences et des lettres. Mais il prépara la ruine du royaume. en le divisant en plusieurs gouvernements.

Après l'extinction de la famille d'Étienne Nemanja, une nouvelle dynastie commença avec Lazare Ier vers 1374. Mais les Serbes, vaincus en 1389 par le sultan ottoman- Amurat Ier à la bataille dite de Cassovie ou Kosovo, parce qu'elle fut livrée dans une plaine appelée Kossovopolje, c. à d. Champ des Merles, perdirent leur indépendance et devinrent tributaires de l'Empire Ottoman. Leurs efforts, à partir de cette époque, pour briser le joug turc, furent été infructueux. Conquis par Mehemet Il en 1459, leur pays fut traité avec une rigueur tyrannique. La paix de Passarovitz fit passer Belgrade et la partie septentrionale la Serbie, en 1718, sous l'autorité de l'Autriche; mais le traité de Belgrade rendit le pays tout entier à la Turquie. Il se souleva contre ses oppresseurs en 1801, et Czerni George ou Kara-George, c.-à- d. George le Noir, chef du mouvement, fut reconnu en 1808 par la Porte prince de Serbie, sous le protectorat de la Russie

Restituée à la Turquie par le traité de Bucarest en 1812, la Serbie se révolta encore une fois en 1813, et fut traitée avec une impitoyable sévérité par les Turcs. Après une nouvelle lutte, conduite par Milosch Obrenovich, elle obtint enfin en 1815 une sorte d'indépendance, dans laquelle elle s'affermit en 1816, à la suite d'une autre rébellion. Milosch fut élu en 1817 prince de Serbie. Les droits du pays, comme État tributaire de l'Empire ottoman, furent sanctionnés en 1829 par le traité d'Andrinople (Edirne) entre la Russie et la Porte, qui reconnut l'élection de Milosch. Le sénat força ce prince d'abdiquer en 1839, et lui donna pour successeur d'abord son fils aîné Milan, qui mourut cette même année, puis son deuxième fils Michel, qu'une conspiration renversa en 1842. 

Alexandre Karageorgevitch, fils de Czerni George, qui avait péri en 1817 dans une entreprise pour rentrer en Serbie, fut élu prince, sous le nom de vaïvode, en 1842, puis en 1843, et confirmé dans ce titre par la Porte. Mais sa déchéance fut proclamée en 1858 par la Skuptschina, et le vieux prince Milosch Obrenovitch fut élu à sa place. La Porte fut obligée de confirmer la nomination de ce dernier comme prince souverain de Serbie. Lorsqu'il mourut, en 1860, il eut pour successeur son fils Michel III, qui reçut de la Turquie l'investiture de la dignité princière

 La petite partie de la Serbie restée à l'Autriche depuis le traité de Passarovitz en 1718, fut comprise dans le gouvernement de la vaïvodie (Voïvodine) de Serbie et banat de Temèsvar et dans le gouvernement militaire du banal de Serbie. Un conflit éclata à Belgrade en 1862 entre les Turcs et les Serbes qui voulaient s'affranchir de la suzeraineté de la Porte, et le commandant turc de ta forteresse bombarda la ville. Le prince Michel  demanda, sans pouvoir l'obtenir du gouvernement turc, la démolition de la forteresse de Belgrade. Par un traité conclu à Constantinople en 1862. la Porte renonça à occuper deux des six forteresses où elle avait eu jusque-là droit de mettre garnison.
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Milan Ier, roi de Serbie
(1882 -1889).

Après l'assassinat du prince Michel, en 1869, son petit-neveu Milan Obrenovitch (1869-1889) fut élu par la Skouptchina. Il fut presque constamment dominé par l'influence autrichienne. En 1878, malgré les défaites subies dans la lutte contre la Turquie, la Serbie avait obtenu, avec son indépendance, un agrandissement territorial. Le prince prit, en 1882, le titre de roi et suivit, avec le parti progressiste, une politique austrophile. Mais il se forma bientôt un parti radical opposé à cette politique et qui protesta contre l'occupation de la Bosnie-Herzégovine, peuplée de Serbes.

Un ministère radical fut imposé au roi par la majorité de la Skouptchina; il dut démissionner à la suite d'une note autrichienne. Le roi suspendit la Constitution, mit le pays en état de siège, après une insurrection durement réprimée, et établit le pouvoir absolu (1883). Mais, en 1885, l'invasion du pays par les Bulgares rendit le roi et le gouvernement impopulaires; Milan dut rappeler les radicaux, et, comme ils voulaient lui imposer une Constitution diminuant et limitant ses pouvoirs, il abdiqua (1889) en faveur de son fils Alexandre. Sur ses conseils, le jeune roi fit un coup d'État (1893); il se proclama majeur, remit en vigueur la Constitution de 1869, rendit le pouvoir au parti austrophile et gouverna en monarque absolu.

Après la mort de son père (1901) et à la suite de son mariage avec Draga Maschin, Alexandre se rapprocha des radicaux et fit des avances à la Russie. Éconduit par Nicolas II et blessé dans sa vanité (l'impératrice avait refusé le recevoir sa femme), il revint au parti progressiste et suspendit les garanties constitutionnelles. Il provoqua ainsi la formation d'un complot militaire : dans la nuit du 10 au 11 juin 1903, le couple  royal fut massacré et l'armée acclama l'ancienne dynastie en la personne de Pierre Karageorgevitch. Avec lui, les radicaux revinrent au pouvoir.

Des difficultés économiques et surtout politiques troublèrent à plusieurs reprises les relations de Vienne et de Belgrade. Les victoires de la Serbie en 1913, l'agrandissement de son territoire dans la Macédoine du Nord, le développement de son prestige dans les pays sous domination autrichienne où vivaient  de nombreux Serbes, inquiétèrent le gouvernement de François-Joseph : c'est aux Serbes qu'il chercha querelle pour provoquer le conflit d'où sortit la guerre de 1914.

Le Royaume des Serbes, Croates et Slovènes a été formé au lendemain de cette guerre, en 1918; son nom a été changé en Yougoslavie en 1929. Les partisans communistes ont résisté à l'occupation et à la division de la Yougoslavie par l'Axe de 1941 à 1945 et ont également combattu des opposants et des collaborateurs nationalistes. Le mouvement militaire et politique dirigé par Josip Broz « Tito » a pris le contrôle total de la Yougoslavie lorsque leurs rivaux nationaux et les occupants ont été vaincus en 1945. Bien que communistes, Tito (mort en 1980) et ses successeurs ont réussi à maintenir leur propre voie entre pays du Pacte de Varsovie et Occident pendant quatre décennies et demie. 

En 1989, Slobodan Milosevic est devenu président de la République de Serbie et ses appels ultranationalistes à la domination serbe ont conduit à l'éclatement violent de la Yougoslavie selon des critères ethniques. En 1991, la Croatie, la Slovénie et la Macédoine ont déclaré leur indépendance, suivies de la Bosnie en 1992. Les républiques restantes de Serbie et du Monténégro ont déclaré une nouvelle République fédérale de Yougoslavie (RFY) en avril 1992 et sous la direction de Milosevic, la Serbie a mené diverses campagnes militaires pour unir les Serbes de souche des républiques voisines en une « Grande Serbie ». Ces actions ont finalement échoué et, après une intervention internationale, ont conduit à la signature des accords de paix de Dayton en 1995.

Milosevic a conservé le contrôle de la Serbie et est finalement devenu président de la RFY en 1997. En 1998, une insurrection d'Albanais de souche dans l'ancienne province serbe autonome du Kosovo a provoqué une campagne de contre-insurrection serbe qui a entraîné des massacres et des expulsions massives d'Albanais de souche vivant au Kosovo. Le rejet par le gouvernement Milosevic d'un projet de règlement international a conduit au bombardement de la Serbie par l'OTAN au printemps 1999. Les forces militaires et policières serbes se sont retirées du Kosovo en juin 1999 et le Conseil de sécurité de l'ONU a autorisé une administration intérimaire de l'ONU et une force de sécurité dirigée par l'OTAN. au Kosovo. 

Les élections de la RFY à la fin de 2000 ont conduit à l'éviction de Milosevic et à l'installation d'un gouvernement démocratique. En 2003, la RFY est devenue l'Union de Serbie-et-Monténégro, une fédération lâche des deux républiques. La violence généralisée ciblant principalement les Serbes de souche au Kosovo en mars 2004 a conduit à des appels plus intenses pour aborder le statut du Kosovo. L'ONU a commencé à faciliter les pourparlers sur le statut en 2006. En juin 2006, le Monténégro a fait sécession de la fédération et s'est déclaré indépendant. La Serbie a par la suite annoncé qu'elle était l'État successeur de l'union de la Serbie et du Monténégro.

En février 2008, après près de deux ans de négociations infructueuses, le Kosovo s'est déclaré indépendant de la Serbie - une action que la Serbie refuse de reconnaître. À la demande de la Serbie, l'Assemblée générale des Nations Unies a demandé en octobre 2008 un avis consultatif à la Cour internationale de justice (CIJ) sur la conformité de la déclaration unilatérale d'indépendance du Kosovo au droit international. Dans un arrêt jugé défavorable à la Serbie, la CIJ a rendu un avis consultatif en juillet 2010 déclarant que le droit international n'interdisait pas les déclarations d'indépendance. Fin 2010, la Serbie a accepté une résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies rédigée par l'Union Européenne reconnaissant la décision de la CIJ et appelant à un nouveau cycle de pourparlers entre la Serbie et le Kosovo, cette fois sur des questions pratiques plutôt que sur le statut du Kosovo. 

La Serbie et le Kosovo ont signé le premier accord sur les principes devant régir la normalisation des relations entre les deux pays en avril 2013 et sont en train d'en mettre en oeuvre les dispositions. En 2015, la Serbie et le Kosovo ont conclu quatre accords supplémentaires dans le cadre du dialogue de Bruxelles dirigé par l'Union Européenn. Il s'agissait notamment d'accords sur la Communauté des municipalités à majorité serbe, sur les télécommunications, sur la production et distribution d'énergie, et sur la liberté de mouvement. Le président Aleksandar Vucic a promu un objectif ambitieux d'adhésion de la Serbie à l'Union Européenne d'ici 2025. Sous sa direction en tant que premier ministre, la Serbie a ouvert en 2014 des négociations formelles d'adhésion. 



Gilles Troude, Géopolitique du peuple serbe, Ellipses-Marketing, 2006.
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