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L'histoire du Royaume-Uni
L'Angleterre antique
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L'Angleterre antique

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Le XVIe siècle : les Tudor, la Réforme

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L'histoire de l'Ecosse
L'histoire de l'Irlande
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La grande île qui porte aujourd'hui le nom de Grande-Bretagne fut primitivement appelée la contrée aux vertes collines, puis  l'île du miel, enfin l'île de Bryt ou Prydain (d'un mot celtique, qui signifie couleur produite par le tatouage. Les habitants se teignaient en effet le corps en bleu, et traçaient sur leurs membres diverses figures d'animaux), dénomination dont les Latins ont fait Britannia, Bretagne. La partie du nord, au delà du Forth et de la Clyde, se nommait Al-ben (duquel dérive le nom d'Albany donné à un comté écossais), c'est-à-dire région des montagnes. L'ouest, portait le nom de Cambrie; l'est et le sud, celui de Lloëgr (Logrie), d'après les  Cambriens et les Lloëgrys ou Logriens, deux peuples distincts l'un de l'autre.

A l'arrivée des Cambriens, population celtique sortie des extrémités orientales de l'Europe, une partie des habitants gagna l'île que ses habitants appelaient Erin (Irlande; en latin, Ierne, Iuverna, Iernia, Hibernia); les autres se réfugièrent dans l'Al-ben et s'y maintinrent sous le nom de Gaëls ou Galls (Gadhels, Gwyddils) qu'ils portent encore, et de Calédoniens, qu'ils tirèrent du mot Calyddon, pays des forêts. L'époque où s'opérèrent ces mouvements de population est incertaine (Ve s. av. J.-C?); et ce fut dans un temps postérieur, mais aussi difficile à fixer, que les Logriens, partis des Gaules, mais parlant une langue celte comme les Cambriens, vinrent débarquer au sud de l'île. Enfin, un troisième ban d'émigrés du même pays et issus du même peuple, se fixa, sous le nom de Brythons ou Bretons, au nord des Cambriens et des Logriens, sur la frontière de la population gallique, entre les golfes du Forth et de Solway. C'est le nom de ces derniers venus qui, dans les langues étrangères, servait à désigner d'une manière générale tous les habitants de l'île.
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Objets pré-celtiques découverts à Hannam-Hill, près de Salisbury.

Tout ce qu'on peut découvrir en fouillant les archives de ces temps reculés, c'est que ces peuples, farouches et sauvages, logeaient dans des cabanes couvertes de chaume, et vivaient, dans une indépendance absolue, du produit de leur chasse et de leurs troupeaux. Leur religion était animée par ces druides qu'on retrouvait encore dans les forêts des Gaules. Comme les Gaulois leurs voisins, les Bretons sacrifiaient des victimes humaines. Enfin les druides, en Bretagne comme en Gaule, étaient, en même temps les chefs religieux et des chefs politiques. 

La période romaine.
Les multiples nations celtes de Grande-Bretagne furent visitées à diverses époques, soit pacifiquement, soit d'une manière hostile, par beaucoup de populations étrangères, entre autres les Coraniens ou Coritains, d'origine germanique, qui, chassés de la Flandre par une inondation, s'établirent le long de l'Humber et sur la côte de l'Est, au milieu de la population logrienne. Enfin, vers l'an 55 avant J.-C., des légions romaines, conduites par Jules César, descendirent à la pointe orientale du territoire qui porte aujourd'hui le nom de Kent. Elles furent accueillies, au débarquement, avec une résistance opiniâtre, par les Bretons-Logriens, retranchés derrière leurs chariots de guerre, sous la conduite de Cassi-belan (Cassivellaunus), chef des tribus alliées; mais bientôt, grâce à la trahison des peuplades d'origine étrangère, et surtout des Coraniens; les Romains, pénétrant dans l'intérieur de l'île achevèrent peu à peu la conquête des deux pays de Logrie et de Cambrie.

Cette conquête, interrompue depuis la mort de César jusqu'au règne de Claude (43 ap. J.-C.); reprit sous cet empereur. Encouragé par les succès du préteur Aulus Plautius que secondait Vespasien, l'empereur voulut paraître à la tête d'une armée, prit quelques forteresses par ses lieutenants, et triompha, sous le nom de Britannicus, pour cette apparition belliqueuse qui ne dura que seize jours. Plautius et son successeur Ostorius Scapula (51) poursuivirent la guerre avec succès. Caractacus, roi des Silures, fait prisonnier, orna le triomphe de son vainqueur. Quand on lui fit parcourir les rues de Rome, à la vue de cette ville splendide, il se serait écrié  :

Comment est-il possible  qu'un peuple qui possède tant de richesses ait envie de l'humble cabane de Caractacus!
Conduit devant l'empereur Claude, il refusa d'implorer sa pitié, comme les autres captifs : 
Si je n'avais fait aucune résistance, lui font dire les historiens romains; on n'aurait parlé ni de ma fortune ni de ma gloire; vous n'auriez point été victorieux et je serais 'oublié. Maintenant, si vous épargnez mes jours,  j'attesterai partout votre clémence.
De telles paroles méritaient un pardon généreux; il l'obtint.
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Carte de l'Angleterre romaine.
Carte de l'Angleterre romaine.

La guerre continua contre d'autres chefs sous les ordres d'Aulus Didius et de Véranius. Les rivalités intestines dans l'île favorisèrent la conquête romaine qui fut néanmoins très pénible. Quand Suetonius Paulus, sous Néron, en 59 conquit Mona, l'île sacrée des druides (Anglesey), Boadicée (Bodicca), veuve de Prasutagus, roi des Icènes, pour se venger d'outrages humiliants, excita dans l'île un soulèvement qui coûta la vie à des dizaines de milliers de Romains : les Bretons emportèrent Londres et massacrèrent  70 000 marchands et colons venus à la suite des légions (61). Paulinus, avec dix mille hommes, vainquit deux cent mille Barbares, et Boadicée s'empoisonna pour ne pas tomber entre les mains des vainqueurs.

Sous le règne de Vespasien (70), Pétilius Céréalis, qui venait de pacifier la Gaule, passa dans la Grande-Bretagne, où son bonheur le suivit; il soumit la puissante tribu des Brigantes. Julius Frontin, auteur des Stratagèmes, subjugua les Silures, laissant pour successeur Julius Agricola, beau-père de l'historien Tacite, qui vainquit le célèbre Gallawg (Galgacus), le grand chef des  forêts du nord (Calyddon), et réduisit l'île presque entière (78-86). La Calédonie resta indépendante. 

Durant un séjour de quatre siècles, les Romains étendirent leur conquête et leur domination jusqu'au pied des montagnes septentrionales qui jadis avaient servi de rempart à la population aborigène contre l'invasion des Cambriens. L'invasion romaine s'arrêta aux mêmes limites que l'invasion bretonne, et le peuple des Galls resta libre, pendant que la domination étrangère pesait sur ses anciens conquérants. Plus d'une fois même, il fit reculer les aigles impériales, et son antique aversion pour les habitants du sud de la Bretagne s'accrut au milieu des guerres qu'il eut à soutenir contre les gouverneurs romains. Le pillage des colonies et des villes municipales, ornées de palais et de temples somptueux, redoubla, par un attrait nouveau, cette hostilité nationale. 

Chaque printemps, des hommes d'Al-ben ou de Calédonie passaient  la Clyde dans des bateaux d'osier recouverts de cuir. Ces irruptions, de plus en plus fréquentes, acquirent aux habitants de l'Al-ben une célébrité terrible sous le nom de Pictes ou voleurs (pictioch). Devenus redoutables aux Romains, ils les forcèrent de bâtir, d'une mer à l'autre, des murs flanqués de tours carrées et précédés de fossés énormes. Trois empereurs ont attaché leur nom à ces défenses monumentales. Le mur d'Hadrien, le premier en date, s'étendait de la Tyne au golfe de Solway, le mur d'Antonin bouchait l'isthme entre le golfe de Forth et la Clyde, le mur de Septime Sévère entre la Tweed et l'Esk. La conquête romaine a cependant laissé moins de traces en Angleterre qu'en Gaule et en Espagne.

Dans le grand empire, cette île reculée était restée pays conquis, tout porte à croire que ce n'était pas un pays latin. L'apparence était romaine, l'âme restait celte et farouche. Nulle province aux époques de crise n'eut plus de tyrans et ne sembla plus souvent à la veille de se séparer du reste de l'empire. L'église chrétienne elle-même avait en Grande-Bretagne un esprit porté à l'indépendance. C'était la mère des hérésies. Celle de Pélage fut si pleine de vitalité qu'elle faillit tuer net le catholicisme en Occident. Néanmoins, malgré les incursions des pirates, venus par mer d'Irlande, d'Albanie (Écosse) et du nord, la Bretagne avait atteint, grâce à la paix romaine, une haute prospérité matérielle. Londresétait déjà un des marchés du monde. Lincoln, Gloucester, Chester, Lancaster, Worcester, n'étaient pas seulement des stations militaires, mais aussi des villes florissantes. York, Saint Albans (Verulamium), avaient des villas, des temples, des églises, dont les traces existent encore sinon à la surface du sol, du moins à une faible profondeur. La déesse Sulis Minerve guérissait aux eaux de Bath des pèlerins reconnaissants, dont nous avons encore les ex-voto. On y venait jusque de Trèves
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Mur d'Hadrien.
Restes du mur d'Hadrien, aux environs de Chester (fouilles du début du XXe siècle).

Après Agricola, la Bretagne resta dans la paix profonde de l'oppression romaine; mais au IIIe siècle, divers usurpateurs la choisirent pour le théâtre de leur puissance ou de leur lutte. Carausius y prit, en 286, le titre d'Auguste, qu'il conserva pendant huit ans. Allectus, son ministre, le tua par trahison (293), et se mit à sa place. A sa mort (296), Constance Chlore rétablit dans l'île l'autorité impériale. Il en fit sa résidence favorite; les insulaires jouirent, sous son règne, d'une équitable administration. Sous Julien (361) et Valentinien (364-375), Lupicin et Théodose repoussèrent les incursions des Galls, et rétablirent la province de Valentia depuis longtemps abandonnée. Vers 383, Maxime prit la pourpre en Bretagne; mais Théodose le Grand le défit dans les Gaules, et la fleur de la nation britannique, qui l'avait suivi sous les ordres de Conan, s'établit avec son chef dans l'Armorique. En 407, un simple soldat, nommé Constantin, pour soutenir son usurpation, épuisa de nouveau la Bretagne d'hommes propres à porter les armes; comme Maxime, il les mena dans les Gaules; mais son empire d'Arles dura peu. Sous Honorius (410), Stilicon rétablit l'autorité romaine dans l'île; ce fut pour la dernière fois et pour peu de temps. 

La civilisation romaine n'eut ainsi jamais le temps de s'acclimater sous les brumes du Nord. Les indigènes, que les Cambriens avaient forcés à fuir en Irlande, s'étaient, maintenus dans cette île sous le nom de Scots, c'est-à-dire étrangers. Mais lorsque l'empereur Honorius rappela les légions et que la Valeria Victrix et les autres eurent évacué leur camp, les Pictes et les Scots franchirent les murs dégarnis de Sévère et d'Antonin et se répandirent en Bretagne. La mollesse de la défense prouve que les habitants de la partie méridionale avaient perdu tout instinct militaire.

Sur la demande des Logriens, à l'époque d'Aétius, Honorius dut renvoyer dans l'île quelques troupes qui repoussèrent les agresseurs au delà du mur de Sévère.

Mais « les Césariens, disent les annales bretonnes, repartirent bientôt pour la terre de Rome, afin de repousser l'invasion de la horde noire (les Goths), ne laissant à leur départ que des femmes et des enfants en bas âge, qui tous devinrent Cambriens. »
Pictes et Scots sont parmi les ancêtres des deux éléments les plus dissemblables du peuple britannique d'aujourd'hui : les Ecossais qui ont gardé leur nom et qui ont le plus gagné à l'union avec l'Angleterre, les Irlandais qui en ont été les victimes. Mais ces peuples ne devaient pas faire la conquête de la Grande-Bretagne. Abandonnée à elle-même par cette concentration des forces militaires sur le continent, l'île n'eut pas le temps de s'organiser pour sauvegarder l'indépendance qu'on lui rendait malgré elle. Néanmoins, autant qu'on peut démêler quelque chose dans le récit confus et déclamatoire, le seul que nous ayons sur ces événements, la Lamentatio de Gildas, un essai d'union fut fait. Les Bretons se donnèrent un chef suprême que l'historien appelle Vortigern. On se demande si ce mot est un titre ou un nom propre. Quoi qu'il en soit, l'empire celte qu'ils auraient pu fonder ou qu'ils auraient pu laisser vivre allait aussitôt être ruiné par l'invasion anglo-saxonne. (Emmanuel Lefranc / Louis Bougier).


Patrick Galiou, Britannia. Histoire et civilisation de la Grande-Bretagne romaine, Ier-Ve siècles apr. J.-C., Errance, 2004. - Enveloppées de brume et de mystère, les îles du Septentrion ont exercé, sur les peuples méditerranéens, une attraction forte et durable, qui trouva son premier aboutissement dans les deux expéditions de César vers la Bretagne insulaire. Ce ne fut pourtant que près d'un siècle plus tard que Rome s'empara définitivement des basses terres de Bretagne, renonçant, au terme de tentatives répétées, à s'approprier les collines désolées du Nord et des Highlands écossais. Le Mur d'Hadrien, ensemble fortifié érigé des côtes de la mer d'Irlande à celles de la mer du Nord, vint ainsi contenir les populations insoumises des hautes terres, alors que se développait, sur le territoire qui allait devenir des siècles plus tard l'Angleterre, une province romaine où se mêlèrent, pendant près de quatre siècles, les traits d'une riche culture indigène et ceux de la civilisation du conquérant. De ces fructueuses tensions entre domaines civil et militaire, mondes méditerranéen et britannique, naquit la Bretagne romaine, riche et complexe univers dont Patrick Galliou retrace les contours et l'histoire, des explorations césariennes jusqu'aux migrations germaniques qui, au cinquième siècle, en changèrent radicalement le visage.
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