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Le
Mithra iranien
Dans les anciennes inscriptions perses ,
il fait partie, avec Ahura Mazda et Anahita, de la triade
des divinités protectrices des Achéménides. Un grand
nombre de noms théophores de l'époque achéménide
(Cumont, Textes et Monuments relatifs au culte de Mithra, p. 76,
n° 1 et suiv.), quelques passages des historiens grecs (Hérodote,
1, 131, etc.) attestent l'antiquité, l'importance et la continuité
de son culte. Il donnait au roi, prêtre ou acteur, un privilège
singulier (Ctésias et Douris). La fête
des Mithrakana, célébrée le 16e
jour (consacré à Mithra) du 7e
mois, mois de Mithra (17 Septembre - 17 octobre), donnait lieu à
des cérémonies pompeuses (Strabon,
11, 14, 530 c); elle continua à être célébrée
dans la Perse musulmane sous le nom de Mihragân.
Enfin, Mithra est un des dieux de l'Avesta .
Tout un Yasht lui est consacré (Mihir, Y.10); mais il est
relégué, avec les autres divinités de la nature, parmi
les esprits subordonnés, les Yazalas.
Mithra est la lumière distincte
du Soleil, de la Lune
et des étoiles; lumière vivifiante,
créatrice, bonne. Son nom Mihir signifie l'ami - et de là
dériverait le sens que l'on donne généralement aussi
bien au nom qu'à la fonction de Mithra : il serait le dieu de l'engagement
mutuel et, dans une acception plus large, celui de "l'accord entre les
parties du cosmos". C'est le côté moral
de sa nature qui a surtout été développé par
les Zoroastriens ( Les
Religions de l'Iran).
«
La lumière qui voit tout est l'emblème de la vérité,
et c'est surtout comme témoin universel que Mithra est devenu l'incarnation
céleste de la conscience et de la vérité. [...]. Témoin
des contrats, il observe qui les garde et qui les viole, il châtie
ceux qui mentent à Mithra (Mithrô-Druj) »
(Darmsteter, Zend Avesta, II, 141, 142).
L'on fait serment en son nom (Plutarque,
etc.). C'était encore un dieu guerrier et victorieux (invictus
dans les inscriptions latines). C'est par erreur que Hérodote
(1, 131) invente un Mithra femelle.
Propagation
du culte de Mithra
Si Mithra a souffert de la formation de
l'orthodoxie zoroastrienne, il a trouvé des adorateurs dans le monde
sémitique, grec et latin; il y éclipsa Ahura Mazda et les
autres dieux avestiques. Il s'est formé, à l'Ouest
de l'Iran ,
une religion de Mithra qui n'est plus complètement iranienne. Les
mages entrèrent d'abord à la suite des conquérants
perses dans les provinces de l'Asie antérieure. Le culte de Mithra
s'implanta dans la Mésopotamie avec celui d'Anahita, et ils s'y
naturalisèrent si bien que certains auteurs leur ont attribué
une origine assyrienne (Bérose, Nonnos,
Hérodote,
etc.). Mithra avait un temple à Babylone,
et, à l'époque romaine, la Chaldée
était la terre sainte des Mithriastes (Lucien).
Les Achéménides introduisirent le culte de Mithra en Arménie
(Strabon, Dion Cassius,
etc.), en Cappadoce
(Strabon) et dans le Pont (Strabon). Les dynastes d'Asie Mineure, plus
ou moins Perses ou même Achéménides,
les Mithridates, se faisaient des titres de
noblesse de leurs dévotions iraniennes; Antiochus de Commagène
élevait une statue à Mithra-Helios-Hermès
(Inscr. de Nimrud-Dagh).
Enfin les pirates de Cilicie
comptaient des adorateurs de Mithra (Cumont, Roscher's Lexicon,
II, 3032). Les Mithrakana sont mentionnés dans une inscription d'Amorion
en Phrygie, mais c'est assez tard seulement que le culte de Mithra fut
pratiqué dans l'Ouest de l'Asie Mineure, en Syrie et en Égypte;
il y eut, sous l'Empire romain, des mithraeums à Sidon ,
à Alexandrie, à Memphis
(Cumont). Plutarque raconte (Pompée,
24), qu'au Ier siècle avant notre
ère les pirates ciliciens adoraient Mithra sur le mont Olympe;
mais, en somme, le monde hellénique l'ignora (sur la côte
de la mer Egée, une seule inscription au Pirée).
Que les pirates ciliciens, comme le veut
Plutarque, aient été auprès des Romains les apôtres
de Mithra, on peut en douter; mais quand, au Ier
siècle de notre ère, toute la Cilicie ,
la Cappadoce ,
la Commagène et la Petite-Arménie
furent devenues des provinces romaines, on commença à connaître
les mystères de Mithra en Occident (Stace,
Thébaïde ,
I, 717). Les plus anciennes dédicaces romaines à Mithra sont
de la première moitié du IIe
siècle (époque de Trajan, premières
années d'Hadrien). Son culte fut pratiqué
d'abord et surtout dans l'armée, où il fut introduit par
les auxiliaires orientaux (Cohortes Commagenorum et Osrhoenorum).
Le plus grand nombre des monuments mithriaques latins se trouve dans les
cantonnements des légions, sur la frontière, depuis l'embouchure
du Danube jusqu'à celle du Rhin, en Mésie, en Dacie ,
où Trajan appela des colons ex toto orbe Romano, en Pannonie ,
particulièrement à Carnuntun, garnison de la 15e
légion Apollinaris, dans le Norique ,
en Germanie; - sur la côte de la Manche aux escales de la classis
Britannica (Gesoriacum), en Bretagne, dans les forts du vallum d'Hadrien
et dans les garnisons; - en Afrique, dans les campements de la 3e
légion jusqu'à la limite du désert. - Les vétérans
rapportaient dans les provinces du centre les cultes militaires.
D'autres missionnaires, plus nombreux,
furent les esclaves. Les conquêtes de Trajan
jetèrent sur les marchés des foules de mithriastes. Les monuments
consacrés à Mithra devinrent nombreux dans les ports de la
Méditerranée. A Rome, 150 inscriptions et bas-reliefs rappellent
le grand nombre des fidèles et le succès de la propagande.
Les esclaves des latifundia, les employés non libres ou d'origine
servile de l'administration provinciale ou impériale portèrent
le culte dans les campagnes.
Cette religion de petites gens s'enrichit
et s'anoblit avec les affranchis. Elle
compta parmi ses zélateurs des augustales, des décurions.
Un citoyen, dès le temps de Marc-Aurèle,
lui consacra un sanctuaire somptueux à Ostie. Enfin, la fantaisie
d'un empereur la naturalisa romaine. Commode
se fit initier à ses mystères et, à sa suite, des
legati
augusti, des legati legionis, des préfets, des tribuns,
plus tard des perfectissimi et des clarissimi. Au IIIe
siècle, la familia impériale célébrait les
mystères
publiquement et officiellement. Aurélius organisa le culte du Sol
invictus. Sous Dioclétien, Mithra
était un des patrons de l'empire. Il avait une littérature
depuis l'époque des Antonins.
Un certain Pallas lui consacra un livre, un Euboulos écrivit une
Peri toû Mithra historian en polloisbibliois (Porphyre,
De
abst., 4, 16; cf. 2, 56; De antro nymph., 6). Le syncrétisme
philosophico-religieux de la fin du paganisme en fit un dieu suprême
et synthétique. Les derniers païens l'adorèrent. La
noblesse romaine lui resta longtemps fidèle après la conversion
de Constantin (Cumont, R. L., 3037).
Les
formes archaïques du culte de Mithra
Les plus anciens documents qui nous en
restent sont postérieurs aux conquêtes des Perses .
L'Avesta
est une édition sassanide d'un texte
qui n'est peut-être pas antérieur aux Arsacides.
Les mystères de Mithra ne nous sont
connus que par des documents gréco-latins dont les plus anciens
datent du Ier siècle de notre ère.
Peut-être y avait-il une Bible mithriaste ou, tout au moins,
mazdéenne,
un Avesta rudimentaire : Basile, Eznig
l'Arménien, disent formellement que les mages n'avaient pas de livres.
Pausanias
(v, 27, 5) a vu les mages de Hiérocésarée de Lydie
lire dans un livre des hymmes
barbares. Mais il n'y avait pas un ensemble canonique, exclusif de livres
sacrés. Si dans quelques cérémonies
on prononçait des incantations en langue sacrée, il y avait
des hymmes mithriaques en langue vulgaire (Firmicus
Maternus, De errore profanarum religionum, c. 4). L'écrit
mithriaste dont s'est inspiré l'auteur du traité d'Isis
et d'Osiris était d'origine cappadocienne.
Jamais un livre sacré n'a empêché une religion
d'emprunter à ses voisines. Il est naturel que dans la propagation
et dans l'établissement du culte de Mithra en Mésopotamie,
en Asie Mineure, etc., la légende du dieu,
la liturgie et la théologie de ses
prêtres se soient modifiées et enrichies. Pour l'époque
lointaine des empires assyrien et achéménide, il est difficile
d'en avoir la preuve. A l'époque romaine, on voit le culte de Mithra
se transformer en culte du Soleil, se doubler
d'une philosophie-stoïcienne
(Dion Chrysostome, Orat., XXXVI, 39 et suiv.).
Dans les monuments mithriastes, tout ce qui peut dire rapproché
d'une légende ou d'un type de divinité grecque (p. ex. Gigantomachie)
s'hellénise. De même en Asie Mineure, Mithra a revêtu
le costume d'Attis. J'essaierai de signaler en
passant quelques légendes voisines de la sienne.
Les
mythes et leur figuration
La mythologie
de Mithra nous est connue surtout par les monuments figurés. Nous
n'avons, par suite, qu'une idée très insuffisante de la signification
de certaines scènes caractéristiques.
En voici les principaux thèmes :
1° Mithra
naît d'un rocher comme Agdistis (Paus., 7, 17, 9 et suiv.; Arnobius,
Adv. nat., 5, 5) ou comme Erichtonios (Saint
Jérôme, Adv. Jovinianum, I). D'après un mythe
rapporté par le Pseudo-Plutarque (De fluv., 23, 4), il féconde
lui aussi un rocher. Suivant des auteurs arméniens (Eznig, Elisée
Vartabed), il est né du commerce d'Ahura Mazda avec sa mère.
Quelquefois la figure d'un demi-fluvial rappelle que la scène se
passe au bord d'un cours d'eau.
2° Mithra coupe
des feuilles
et des fruits
à un arbre
indéterminé (bas-relief de Neuenheim; bas-relief d'Osterburken).
3° Mithra tire
de l'arc contre un rocher, et sa flèche fait jaillir de l'eau (bas-relief
de Klagenfurt; bas-relief de Neuenheim. ). Un personnage agenouillé
semble recueillir l'eau.
4° Il est debout,
armé d'un couteau, la main sur la tête d'un personnage agenouillé
qu'il semble menacer. Le plus souvent, l'objet que le dieu tient à
la main a une forme indéterminée. Ailleurs, Mithra semble
poser sur la tête de ce personnage une couronne de rayons. C'est
une des scènes les plus fréquemment représentées
sur les monuments mithriaques. Elle représente peut-être une
consécration du Soleil par sacrifice figuré,
consécration ayant pour objet de donner au Soleil sa lumière.
Le sens de cette représentation, évidemment, n'était
plus compris. Elle est toujours accompagnée des scènes suivantes
:
5° Le Soleil
et Mithra se tiennent debout se serrant la main.
6° Mithra et
le Soleil prennent ensemble le repas sacré. En général,
l'un ou l'autre de ces deux thèmes est choisi. Le dernier est le
plus fréquent.
7° Mithra est
debout sur le char du Soleil, à côté de lui (Mithra
= Phaetôn). Dans quelques bas-reliefs,
entre la consécration et le repas sacré, est représenté
un des épisodes de la chasse du taureau
:
8° Mithra chasse
le taureau, il le prend, le saisit par une corne,
monte sur son dos, le porte sur ses épaules, et enfin le sacrifie
dans la grotte sacrée. Ce dernier motif est le thème principal
de l'iconologie mithriaque. Le dieu, flanqué de deux dadophores
qui forment avec lui le triplasios mithras (Ps. Dionys Aréop., Epist.
7), un genou sur le taureau, lui plante un couteau dans la gorge et tourne
les yeux vers un corbeau, messager du Soleil.
Dans la tradition perse ,
le taureau est la première créature d'Ahura Mazda; son sacrifice
est l'origine de la création ( Cosmogonie)
: de quelques parties de son corps naissent les plantes (sur un très
grand nombre de bas-reliefs, sa queue est terminée par un bouquet
d'épis); sa semence, purifiée par la Lune,
donne la vie aux animaux (Porphyre. De antro
nymph., 18).
Tandis que le scorpion, consacré à
Ahriman, essaye de contrarier l'effet du sacrifice et pique les testicules
du taureau, le chien
et le serpent, qui représentent la terre
fécondée, boivent le sang de la blessure. Relevons au passage,
que scorpion ,
taureau ,
chien
et serpent
sont des constellations ,
et notons aussi la ressemblance du mythe de Mithra avec celui d'Aristée,
fils du Soleil. Dans Diodore
(IV, 82, 1), il offre un sacrifice pour éloigner la peste de Céos;
dans Virgile, il tue un taureau pour avoir des
abeilles .
(Pour une interprétation astronomique du mythe d'Aristée Robert
Triomphe, Le Lion, la Vierge et le Miel, Les Belles Lettres, 1989).
Mithra est un dieu créateur (Porphyre,
De
antro nymph., 24); il sera le rédempteur à la fin des
temps, après le sacrifice d'un nouveau taureau; il ressuscitera
les morts; c'est déjà lui qui les passe dans l'autre monde
(Julien, Conviv.). Est-ce à ce rôle de passeur, d'entremetteur,
d'intermédiaire, de Logos qu'il
a dû son épithète de mésitès (Plutarque,
De
Isidle)?
Statue
de Mithra, au Vatican.
Je dois mentionner ici les autres dieux
du cycle mithriaque. C'est d'abord un dieu à tête de lion,
symbole du feu, à quatre ailes,
symbole des vents, autour duquel s'enroule un serpent,
symbole de la terre. Il porte deux clefs (claviger);
à ses pieds est souvent représenté le cratère,
symbole de l'eau. La foudre fait partie de ses nombreux attributs. Il représente
le temps illimité (Zrvan Akarana). Il est le père d'Ahura
Mazda, Zeus Oromasdès (inscr. 1), Zeus ou
le Ciel (Hérodote,
1, 131), que l'on retrouve dans les inscriptions latines sous les noms
de caelus aeternus Jupiter ou Caelus. Il est représenté
quelquefois sur les monuments : il combat les Géants
comme le Zeus grec ou le Marduk babylonien.
On trouve quelquefois Ahriman,
Arimanius,
identifié avec Hadès ou Pluton
(bas-relief d'Osterburken). Son épouse, Drufas, est devenue Perséphone
ou
Hécate. On rencontre Poseidon
ou Oceanus (Apanm-Napat), Héraclès
ou Arès-Verethragna, qui dans le Mihir-Yasht
(18, 70) est représenté comme un sanglier marchant devant
Mithra; Ana hita-Diana (bas-relief d'Osterburken),
identifiée à la Magna Mater dont
les mystères sont liés à
ceux de Mithra en Occident; Fortuna Tyche (Hvareno, la lumière,
ou Ashi-Vañuhi); Nike (Vanaiñti-Uparatât,
nommée dans l'Avesta
avec Verethragua); la triple Hécate (Firmicus
Maternus, De errore profan. relig., 4); Hephaistos
(Atar), etc.
Dans la grotte où Mithra sacrifie
le taureau jaillit une source. La source sacrée
est l'un des objets du culte. Naturelle ou artificielle, il doit y avoir
dans le temple une fontaine; tout au moins, un cratère la remplace
(Porphyre, 1. l,18). Ils représentent
dans le culte l'élément humide. Souvent, à côté
du cratère, on remarque un lion et un serpent
: le lion symbolise le feu (Atar) et le serpent
la terre.
Soit sous l'influence chaldéenne,
soit par un processus naturel, le culte de Mithra était devenu sinon
un culte stellaire, du moins un culte dans lequel intervenait un certain
symbolisme astral. Les planètes![](btimb.gif)
étaient représentées ou rappelées (7 autels ,
p. ex. à Sibiu )
dans les temples. Les 12 signes du Zodiaque
(monument de Heddernheim), les Dioscures,
les Saisons
(mon. de Heddernh.) font également partie de la suite de Mithra.
Les mythes étaient-ils devenus pour une
partie des initiés des allégories astronomiques? Mithra y
aurait figuré le Soleil ,
le taureau, la lune![](roueb.gif) ,
le sacrifice, l'éclipse ;
Cautes et Cautopates, les deux dadophores assistants de Mithra seraient
le soleil levant et le soleil couchant (l'un tient son flambeau levé,
l'autre baissé). La grotte où s'accomplit le sacrifice est
l'image du monde (Porphyre, De antro nymph.,
5). A cette théologie s'était
peut-être superposée une sorte d'astrologie, mais pas nécessairement
à la façon chaldéenne.
Le
culte
Le culte de Mithra est un culte ésotérique,
ce sont les mystères de Mithra. Il y
avait, à l'époque romaine, sept degrés d'initiation.
Les mystes des différentes classes portaient respectivement les
noms suivants (Saint-Jérôme, épit. 107, Ad
Laetam) : Corax, Gryphus (ou Gryphius), Miles, Leo, Perses, Heliodromus,
Pater. Les trois premiers grades ne donnaient pas la participation aux
mystères; on y était admis à partir du grade de Leo;
les patres étaient les plus parfaits; ils guidaient les autres (pater
leonum) ; le chef de la hiérarchie dans la communauté
mithriaque portait le nom de pater patrum ou pater patratus.
Les rites d'initiation nous sont mal connus.
Lucien,
dans le Ménippe (c. 6), décrit des purifications,
ablutions,
incantations nombreuses. Tertullien nous apprend
que l'on présentait au nouveau myste une couronne et une épée;
l'interprétation qu'il donne de ce rite est sujette à caution.
On mentionne également d'autres cérémonies
à l'explication difficile (Ps.-August., Quast. Vet. Test.).
Peut-être l'ascétisme des mithriastes
a-t- il été trop vanté (Grég. Naz, Adv.
Jul., 1. 70, 89, In s. lumina, 5, etc.). La doctrine centrale
des mystères, comme dans les communautés orphiques et gnostiques,
devait être une théorie de l'affranchissement de l'âme
: l'âme de l'initié gravissait le klimax; eptapylos;
(Celse, dans Origène,
Contra
Cels., VI, 21), correspondant à l'échelle des planètes;
elle échappait progressivement à leur influence.
Les cérémonies du rituel
mithriaque étaient des sacramenta. Il y avait un baptême
(Tertull., De praescr. haeret., 40 ;De bapt., 5), des onctions purificatrices
de miel (Porphyre, De antro nymph., 40), une sorte de communion
par le pain et l'eau (Just. Mart, Apol., 1, 66); le vin était
également bu rituellement par les fidèles et avait, comme
le Haoma perse, des effets miraculeux. Quant au taurobole,
il était, selon Cumont (R. L., 3064), particulier au culte de la
Magna
Mater; on peut imaginer toutefois que ce taurobole rituel et le taurobole
mythique de Mithra ont une même origine.
La
représentation la plus commune de Mithra.
Pour les fêtes, on les ignore. On
n'a plus aucune trace des Mithrakana. La fête du Soleil renaissant,
célébrée le 25 décembre ( Noël),
était-elle spécialement mithriaste?
Le culte était célébré
dans des grottes naturelles ou artificielles (De antro nymph., 5),
et l'on, faisait remonter cet usage jusqu'à Zoroastre.
Les sanctuaires du dieu, en Occident, étaient des souterrains :
l'on en connait un certain nombre. Au-dessus du sol était une salle
précédée d'un portique
et nommée apparatorium; un escalier
conduisait dans la crypte
divisée en trois parties : 1° la cella;
2° deux podiade chaque côté, tout le long de la
paroi; 3° l'adyton, un peu plus élevé, portant
sur le mur du fond une représentation du sacrifice du taureau;
deux autels étaient au fond, devant l'image de Mithra; une petite
fosse pour le sang, des récipients pour l'eau lustrale complètent
l'aménagement du sanctuaire. Tous sont de dimensions très
réduites; ils ne pouvaient pas contenir plus d'une centaine de fidèles.
D'ailleurs, une grande partie des adhérents n'y pénétraient
pas. Les femmes ne prenaient part qu'au culte de la Magna
Mater. L'Eglise mithriaque avait des prêtres, ordo sacerdotum,
distincts des patres. Il y avait des antistites et un summus
pontifex (Tertullien, De praescr. haere.,
40). Mais la présence des initiés, et en particulier des
patres,
était nécessaire à l'accomplissement des cérémonies
(Acta Bassae). Un certain nombre de fidèles, hommes et femmes,
faisaient voeu de chasteté (Tertullien, Habet et virgines, habet
et continentes).
Éxtérieurement, les communautés
mithriaques ;étaient organisées en sodalicia
funéraires avec des dignitaires (magistri, decuriones,
defensores,
patroni,
decemprimi).
En somme, au IIIe siècle, l'Église
mithriaque ressemblait fort à l'Église
chrétienne et professait une sorte de monothéisme syncrétique
assez semblable au christianisme. Ils
étaient l'oeuvre de la même société, des mêmes
idées et des mêmes besoins. Même ésotérisme,
mêmes liens entre les mystes (fratres), même morale
(Julien, Conviv., p. 336 c), mêmes prohibitions (abstinence,
continence, etc.), rites et mythologie analogues (déluge,
Dio Chrys., 34, 47; le taureau sur l'arche,
etc.), théologie et eschatologie
similaires, mêmes espoirs, mêmes craintes. Mithra ressemblait
fort au Logos. Il avait une adoration des bergers,
une Cène![](rouer.gif) ,
une Ascension (Mithra sur le char Soleil).
Son sacrifice créateur et rédempteur ressemblait par plus
d'un point à celui du Christ. Les analogies
n'avaient pas échappé aux chrétiens et aux mithriastes
(Saint Augustin, In Joh. ev. tract.,
7, p. 1140); les Pères les expliquaient
par des contrefaçons diaboliques (Tertull., De corona, 15,
etc.).
La perte de la Dacie
porta un coup au mithriacisme. Après avoir été persécuteur
sous Galère et sous Dioclétien
(Acta S. Bassae), il fut à son tour persécuté.
Il refleurit sous Julien; le patriarche d'Alexandrie,
Georgius, qui avait violé un spelaeum, fut mis à mort
par la foule (Socr., Hist. eccl., 3, 2). Dans la suite, les mithriastes
tombèrent sous le coup des lois sur la magie.
On détruisit les spelaea; la découverte d'un squelette
dans le mithraeum de Saarburg prouve que ce ne fut pas sans violences.
Le manichéisme fut l'héritier
du mithriacisme.
Les
Monuments
Je ne consacrerai que quelques mots aux
monuments mithriaques. A part quelques monnaies de Bactriane
et les monuments du Nimrud-dagh , ils sont gréco-romains et d'une
assez basse époque, et leur valeur artistique est mince. On peut
rapporter à sept types les principaux monuments mithriaques :
1° Naissante
de Mithra ( plus haut);
2° Le taurobole;
3° Le taurobole,
flanqué de diverses scènes de la légende de Mithra
(bas-relief de Mauls; bas-relief d'Aquilée ;
bas-relief de Neuenheim, ; bas-relief d'Osterburken; bas-relief de Heddernheim;
bas-relief de Sarrebourg );
4° Mithra debout
sur le taureau;
5° Mithra et
le Soleil devant le corps du taureau (revers du bas-relief de Heddernheim);
6° Les
dadophores;
7° Le dieu léontocéphale.
Cette dernière figure est une création
de la fantaisie orientale, les autres monuments sont d'inspiration hellénique.
Les monuments qui représentent le sacrifice du taureau dérivent
de la Nike, du temple de la Victoire
Aptère. Dans les scènes secondaires, tout ce qui ne se rapporte
pas directement à Mithra, à savoir : la Lune,
le Soleil, le char du Soleil, la Gigantomachie,
est hellénique. (Henri Hubert).
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En
bibliothèque - Le plus ancien
ouvrage qui traite de Mithra est celui de Philippus A Turre, Monumenla
Veteria Antii; Rome , 1700, pp. 150 et suiv. - Lajard,
Recherches
historiques et archéologiques sur le culte de Mithras. Paris,
1837. Du même : Introduction au culte de Mithra, 1847. - Windischmann,
Mithra (Abh. D. M. G.), 1858 (sur le culte de Mihra en Iran ).
- Franz Cumont, Textes et monuments relatifs aux mystères
de Mithra; Bruxelles, 1896. - Du même : The mysteries of Mithra,
1910, réed. : Dover Publications, 1995.
En
librairie - Robert Turcan, Mithra
et le Mithriacisme, Les Belles Lettres, 1993; Collectif, Sous le
soleil de Mithra, Réunion des musées nationaux (beaux-livres),
2001;en espagnol : Casado, El culto de Mithra en Hispania, universidad
de Granada. |
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