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Histoire de l'art > La peinture
L'histoire de la peinture
La peinture en Angleterre
Le Moyen Âge.
La peinture s'est développée tardivement en Angleterre. Les renseignements sur les débuts de la peinture du Moyen âge se réduisent à fort peu de chose. Au IXe siècle, un abbé de Wiremouth fit venir d'Italie une grande quantité de tableaux pour en orner ses églises; les moines eux-mêmes s'adonnaient à l'enluminure des manuscrits, ainsi que nous le voyons par les miniatures anglo-saxonnes qui nous sont parvenues , mais aucun artiste ne cultiva à cette époque, en Angleterre, les arts proprement dits. Si l'on on excepte les apports des Romains, qui laissèrent sur le sol anglais de magnifiques mosaïques et quelques temples dont les ruines seules subsistent, les premiers encouragements donnés aux beaux-arts ne se produisirent guère avant la conquête des Normands, car ce fut Guillaume le Conquérant qui transporta dans le pays vaincu le luxe et les arts de son pays d'origine. La cathédrale de Canterbury fut ornée de peintures, mais nous ne pouvons juger de leur valeur, car elles ont toutes été détruites par les iconoclastes de la Réforme, ainsi que la plupart de celles qui existaient à la même époque. Ce zèle malheureux fut même la principale cause des entraves apportées au développement des arts en Angleterre, car, en privant la peinture de l'élément religieux, devenu suspect, elle se vit presque exclusivement limitée au portrait

Le temps des Tudor.
Les peintres qui donnèrent quelque éclat aux beaux-arts en Angleterre pendant la période comprise entre les XVe et XVIIe siècles furent presque tous des étrangers : sous Henri VII, le Flamand Mabuse, peintre de grand talent; sous Henri VIII, Jean Holbein. Leur exemple et leurs travaux commençaient cependant à stimuler les artistes du pays, à relever leur style et à former une école nationale, quand le souffle de la Réforme vint renverser ces tendances. Des artistes médiocres seuls survécurent au naufrage et après eux la série des étrangers recommença. Ce sont, sous Henri VIII, le Flamand Gérard Hoorenbout, le Hollandais Lucas Engelbrechtsen, qui deviennent les peintres d'office à la cour et les peintres à la mode dans l'aristocratie. Sous le règne de Marie Tudor, le peintre Antonio Moor est mandé de son pays par la souveraine anglaise, qui veut lui faire peindre son portrait; puis vient le Flamand Lucas de Heere, qui travailla principalement sous le règne d'Elisabeth, ainsi que Cornelis Ketel, dont la réputation fut effacée par celle de l'Italien Federigo Zucchero, et enfin quelques marinistes hollandais, tels que Cornelis Vroom le Vieux, et un Pieter Van de Velde, qui est peut-être l'aïeul des Willem.

Le XVIIe siècle.
A la fin du règne d'Elisabeth, se montrent cependant quelques peintres indigènes, tels que Hilliard et Oliver, qui se sont surtout distingués dans les portraits en miniature. Mais le prince qui exerça sur les arts l'influence la plus efficace fut Charles Ier; protecteur des artistes et passant pour s'exercer lui-même au dessin, ce prince ne se contenta pas de soutenir la fabrique de tapisseries de Mortlake; il avait conçu le plan d'un palais magnifique que son manque de fortune et le peu d'étendue du budget qui lui était octroyé ne lui permirent pas de réaliser complètement. Il en fit du moins exécuter une partie par le célèbre Inigo Jones, son architecte favori; c'est la salle des banquets de White Hall qui, encore aujourd'hui, étonne par sa magnificence et ses grandioses proportions. Rubens fut appelé à décorer cette salle; mais il ne voulut pas demeurer plus d'un an en Angleterre, quelques instances qui lui fussent faites. Van Dyck, son élève, le remplaça; il était destiné à exercer sur l'art anglais une influence plus grande encore que celle d'Holbein, et il semble avoir assuré pour toujours la prééminence des portraitistes anglais sur ceux des autres pays. Il séjourna neuf années en Angleterre et vit se grouper autour de lui un grand nombre d'artistes, tous ses compatriotes, qui suivirent sa manière, et parmi lesquels on peut citer Georges Jameson, élève également de Rubens; Jean Van Reyn, de Dunkerque; David Beck, d'Arnheim; puis des indigènes, l'irlandais James Gaudy et le peintre familier de Cromwell, Robert Walker.

De tous ces peintres, ceux qui surent le mieux s'identifier avec la manière du maître, au point de faire hésiter parfois les amateurs, furent Henri Stone, le vieux Stone et William Dobson, mais ils cherchaient en même temps à se former une manière, qui serait devenue, avec le temps, l'héritage de leurs élèves. Dans un genre plus restreint, Pierre Olivier, en utilisant les collections créées par Charles Ier, et en suivant les traces de Van Dyck, s'éleva beaucoup au-dessus de son père, célèbre sous le règne précédent. 

Ce mouvement dans les talents nationaux, ces progrès dans les arts, allaient s'étendre à tous, mais la hache du bourreau acheva ce qu'avait commencé le marteau des iconoclastes. Les collections royales dispersées, les établissements favorables aux arts entièrement détruits, telle fut l'oeuvre du fanatisme politique et religieux qui s'installa durablement en Angleterre, car le clergé anglican y protestait sans cesse contre la peinture, instrument de papisme. Sous le coup de cet anathème, les arts ne se propagèrent plus en Angleterre que par le côté prosaïque. Ils n'y pénétrèrent plus que par la petite porte des choses utiles. L'aristocratie continua à faire faire son portrait; après Rubens et Van Dyck, elle appela d'autres artistes de talent pour remplir cette tâche. La vogue appartint aux Allemands, Pierre Lely et Kneller.

Le XVIIIe siècle.
Mais au moment où l'on pouvait désespérer de l'avenir de l'art en Angleterre et pendant que le niveau des productions artistiques était abaissé dans l'Europe entière, parut à Londres un esprit singulier, qui fut le premier l'initiateur d'un art vraiment national. Nous voulons parler de William Hogarth. Il est juste de dire que l'on ne peut regarder Hogarth seulement comme un peintre au sens habituel du mot, mais aussi comme un moraliste à la mode de Molière; d'autre part, bien qu'il se soit trouvé des défenseurs de sa peinture, il est certes bien supérieur comme graveur et la plus grande part de sa popularité est due à ses gravures
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Hogarth : Les Serviteurs d'Hogarth.
Les Serviteurs, par William Hogarth (ca. 1755).

Après Hogarth, vinrent Reynolds et Gainsborough. qui furent avec lui les véritables fondateurs de l'école anglaise ou, du moins, de l'ensemble de manifestations artistiques auquel on donne ce nom. Celui-ci était avant tout un peintre moraliste, mais les deux derniers furent des peintres au sens vrai du mot. Leur influence très accusée, leur réel talent, les fait placer au même rang par la postérité. Cependant, il faut reconnaître que si Gainsborough fut le rival de Reynolds dans le portrait, il fut de plus un grand paysagiste.

A cette époque, le portrait était l'unique programme donné au talent de ces éminents artistes; ce qui, entre parenthèses, fut encore une des conséquences de la révocation de l'édit de Nantes, car les réfugiés protestants, fort nombreux en Angleterre, n'admettaient pas d'autre genre que le portrait; mais, à force de chercher la physionomie, la couleur et l'effet, les peintres anglais firent de leurs portraits des tableaux dont l'influence, aidée des habitudes de trois siècles, donna à l'Angleterre un art national, une originalité aussi vraie que puissante. On devine, à la vue des portraits exécutés par ces maîtres, que, s'ils n'avaient pas été retenus dans un genre aussi étroit, ils auraient produit des oeuvres aussi belles et peut-être plus nobles que celles du peintre d'Anvers.

Quoi qu'il en soit, les chefs-d'oeuvre de ces deux peintres ne sont pas tout leur mérite; ils en ont un autre aussi recommandable; comprenant qu'il faut aux arts un centre d'action, une base d'autorité, un corps de doctrine et un enseignement supérieur, ils n'imaginèrent rien de mieux qu'une académie et une école des beau-xarts, et ils en demandèrent la création au souverain, qui accéda à leurs voeux et constitua par charte royale, en académie, la société des artistes anglais, instituant les premières expositions de tableaux dans la Grande-Bretagne
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Gainsborough : M. et Mme Andrews..
M. et Mme Andrews, par Thomas Gainsborough (ca. 1749).

A ces deux grands artistes succédèrent des peintres de valeur bien moindre, George Romney, sir William Beechey, John Russel, John Hoppner, John Oppie et Benjamin West, ce dernier, Américain de naissance. On peut encore citer Henry Fuseli, d'origine suisse, qui s'attacha principalement au genre féerique et fantastique. Un autre, James Northcote, 1744-1831, se flattait d'être à la fois peintre critique et fabuliste. Mais ce ne fut que dans Lawrence que l'on vit revivre Reynolds et la succession d'Hogarth ne fût recueillie que par Wilkie (1769-1830). Sir Thomas Lawrence imita le grand portraitiste, mais en exagérant encore ses défauts et en procédant encore plus que lui par artifice. Il avait le culte de la toilette et se plaisait à re produire les variations de la mode, ne se contentant pas seulement de celle du jour, mais la plupart du temps inventant celle du lendemain. Il faut donc attribuer pour une bonne partie le succès de Lawrence aux jolies figures des femmes dont il fit les portraits.

Le XIXe siècle.
Puis vint David Wilkie, lequel, ainsi que nous l'avons dit, procédait plutôt d'Hogarth (1785-1841). Leslie (1766-1832) lui succéda avec honneur, mais il fut surtout un illustrateur. Mulready (1786-1863) fut encore des adeptes de Wilkie; il produisit un grand nombre de toiles charmantes. Augustus Egg (1816-1863) dut sa réputation à ses qualités de coloriste. Viennent ensuite deux hommes remarquables, chacun dans un genre différent : J. Martin et Landseer. Le premier (1789-1854) est l'auteur de ces tableaux fameux où éclate la magnificence de l'ancienne architecture assyrienne. Landseer, lui, fut un animalier, c. -à-d. un peintre d'animaux, et nul ne les a connus aussi bien que lui, si ce n'est, sur le Continent, le grand sculpteur Barye.

Le paysage : Constable, Turner, etc.
Dans le genre du paysage, le premier peintre dont il est fait mention est Richard Wilson (1714-1782). Georges Morland peignit surtout des scènes représentant la vie d'auberge ou de cabaret. John Crome (17611821), dit « old Crome », est un paysagiste vigoureux et son fils, Bebnay Crome, fut son successeur, mais affaibli. Puis vinrent John Sell Cottman et sir Augustus Wall Calcolt, qui a fait d'excellentes marines. Richard Parkes Bonington (1801-1828), peintre de genre, de paysage et de marine, aquarelliste et lithographe, mériterait par son importance une notice plus détaillée; au Louvre, il a été compris au catalogue dans les artistes de l'école française, car il a passé la plus grande partie de sa vie au milieu des artistes de cette contrée. La révolution que Gainsborough avait commencée, et que le vieux Crome avait continuée, contre les pasticheurs de paysages italiens, ce fut à Constable qu'il revint de la continuer. John Constable (1776-1837) peut être considéré tomme le véritable père du paysage anglais; il n'a produit que des oeuvres saines où la nature se montre dans toute sa vigoureuse réalité. C'est en cela qu'il diffère de Turner; ce dernier, en effet, plus moderner et  novateur, ne semble considérer les différents phénomènes de la nature que comme un prétexte à des excursions dans le domaine du fantastique où donna également plus tard William Blake, le peintre visionnaire. Dans la peinture d'architecture, on peut citer Charles Wild, Samuel Proust et surtout David Robert, qui fit des chefs-d'oeuvre dans ce genre particulier et difficile où la, recherche du détail nuit si souvent à la sincérité et au charme de l'idée exprimée. 
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Un Paysage marin, par John Constable (1827).

Dans l'école moderne, la peinture a pris, en Angleterre, le pas sur les autres genres. L'exposition de 1855, où les artistes anglais furent pour la première fois appelés à franchir le détroit, a été une révélation de cette école nouvelle, dont on soupçonnait à peine l'existence, malgré les preuves de talent données par les peintres de l'ancienne école. Ce qui frappe d'abord, dans les tableaux des maîtres anglais modernes, c'est une exaltation de la couleur ne ressemblant en rien à l'harmonie et au clair-obscur, tels que l'ont compris les Italiens et les Hollandais. Le goût des couleurs voyantes, d'un accord rude et d'une vivacité brusque, a été très répandu en Angleterre où l'on n'a jamais été effrayé mais charmé de ces violences et de ces contrantes. Duranty, à la fin du XIXe siècle, écrivait :

« A l'époque actuelle, à travers toutes les différences d'école, de tendances comme en 1867, à travers les indécisions, comme en 1855, comme en 1820 avec Constable et Turner, comme à la fin du XVIe siècle, l'oeil anglais est resté le même. Une tonalité jaune et rousse, légèrement aigre, qu'avive du rouge et qu'atténue du gris, qu'irisent des nuances vineuses et violacées, tel est le thème principa des colorations anglaises. » 
L'aquarelle dans la peinture anglaise 

Le genre de l'aquarelle mérite une mention à part en raison de l'importance que lui ont donnée les artistes anglais, qui en ont tiré des effets et des tons d'une intensité et d'une puissance extraordinaires. Au début, l'aquarelle anglaise n'était qu'un simple dessin teinté à l'encre de Chine; le premier peintre connu en ce genre est Barlow, né vers 1626. A la fin du XVIIIe siècle, les maîtres de cet art étaient Booker Hearme et Payne, dont les aquarelles étaient de simples lavis bruns ou gris relevés de quelques tons colorés et renforcés de traits de plumes qui en détruisaient malheureusement tout le charme. Seules, les aquarelles de Cozens et de Girtin, les fondateurs de l'école, commencèrent à mériter leur nom. John Sellcotman suivit leurs traces, puis Cristall et Liverscege, qui ont produit une grande quantité d'oeuvres remarquables. Mais. plus qu'aucun de ses prédécesseurs, Turner devait s'attribuer et s'assimiler le procédé rapide et délicat du genre qui nous occupe. Grâce à lui, il a pu interpréter dans toute leur immense variété les phénomènes de la vie et de la nature. Par ce simple procédé, Turner a pu dominer en maître toute espèce de paysage. On peut citer dans son oeuvre immense le voyage pittoresque en Italie, les vues pittoresques d'Angleterre et du pays de Galles, les côtes de France et des illustrations innombrables.

Par une coïncidence heureuse, l'école anglaise de gravuresur bois était alors à son apogée et tous les chefs-d'oeuvre de Turner ont été admirablement reproduits en blanc et en noir sous sa propre direction. A la même époque, on trouve de vrais aquarellistes : Warley, Cose, Fieldin, Barret; Prout, Hunt, Catternole, Lewis, tous doués de l'amour et du sentiment de la nature; Fielding, principalement, fut le digne successeur de Turner. Cose a partagé avec Prout le charme de l'émotion communicative; leur couleur franche et simple rappelle la manière de Constable. Lewis et Hunt peuvent également être cités côte à côte comme brillants coloristes. Les aquarellistes anglais formèrent une société séparée de l'Académie des beaux-arts et fondée en 1805, à la suite de dissentiments avec l'Académie. En 1832, un certain nombre d'artistes se séparèrent de la société mère et en formèrent une seconde sous le titre de The new Society of painters in Water Colours, et organisèrent leur première exposition au printemps de la même année. En 1863, la société changea en nom pour celui de « Institute ».

Le paysage : les Préraphaélites.
Dans la nouvelle école, un groupe particulier attire tout d'abord l'attention : ce sont les Préraphaélites; ces artistes assignent à l'art un but de moralisation; ils prétendent atteindre ce but, les uns dans le genre historique, par la représentation de motifs ayant un caractère de précision et d'exactitude aussi minutieux que possible; les autres, dans le paysage, par la reproduction fidèle des plus menus détails, des moindres particularités spéciales au site choisi. En allant jusqu'aux dernières conséquences du principe qu'ils se sont posé, ces audacieux novateurs en sont arrivés à ne plus considérer Raphaël que comme le premier apostat de l'art religieux, et en même temps comme le premierr apôtre du savoir-faire. De là le nom de Préraphaélites qu'ils prirent. Mais à force de chercher la vérité dans ses moindres détails, le peintre finit par exciter la défiance sur l'exactitude même de ce qu'il a représenté et la question de savoir si tout ce qu'il étale aux yeux est bien conforme à la vérité se présente naturellement à l'esprit. L'origine de ce mouvement est généralement attribuée à Ruskin. Ce vigoureux esprit, cet écrivain passionné et d'une impitoyable logique, a poursuivi et proscrit à outrance le savoir-faire et l'habileté de main qui substituent la convention à la réalité et l'art à la nature.
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La Bergère et le laquais, par William H. Hunt (1851).

Les premiers apôtres de cette école nouvelle furent Fish et Hunt; mais l'artiste le plus illustre parmi ses coréligionnaires, comme du reste parmi tous les autres artistes anglais, est Millais. A partir de 1855, cet artiste à conquis l'admiration générale par ses oeuvres si étrangement caractéristiques et se dérobant à toute tradition antérieure. S'il manque quelquefois de dessin, cet artiste ne manque, jamais d'émotion; nul ne peut se défendre de celles que font naître ses admirables toiles. Dans le même esprit, mais avec moins de science, Jant, Rossetti et Noël Paton ont produit des oeuvres remarquables.

Deux autres artistes tiennent de près  au Préraphaélisme : Madox Brown et Burne Jones. Le premier est celui dont le talent réalisé la plus grande somme d'émotion dramatique, et le second celui qui offre le plus de conception mystique et de poésie passionnée. Les Préraphaélites ne se sont naturellement pas adonnés aux scènes de genre à l'exclusion de toute autre, ils ont porté, sur le paysage les mêmes efforts de sincérité qu'ils déployaient dans d'autres motifs. Nous citerons Hook, qui s'est consacré à la reproduction des scènes de la mer et de la vie des côtes et qui donne dans ses paysages une grande importance aux personnages,  Leinet et  Vicat Cole.

C'est dans le genre du paysage que l'école a semblé le mieux maintenir son activité. Un peintre cependant à essayé de concilier les tendances du paysage préraphaélite et lés traditions de l'école ancienne, c'est Macallum; par des oppositions de tons et de lumière savamment calculées, il indique les masses de son tableau, puis il en choisit la partie principale pour y concentrer tous ses efforts et en traiter les détails avec toute la perfection et l'exactitude possible, de manière à faire illusion et à laisser croire que tout le reste du tableau est traité de la même façon.

Les autres genres de peinture.
La peinture d'histoire a fort peu de représentants dans l'école anglaise; ceux qui en ont essayé ne sortent pas de l'ordinaire. Il y a peu de nu dans l'école anglaise; Watts, qui est aussi un portraitiste distingué, s'essaie cependant à le peindre, mais l'aspect sombre de sa peinture détruit le charme du dessin. Briton Rivière a trouvé une heureuse inspiration dans son tableau bien connu de Daniel dans la fosse aux lions; il manque à tous, comme à leurs devanciers, le souffle héroïque. Seul, David Scott, mort en 1847, mérite une place à part, en raison de l'importance numérique de son oeuvre et de sa variété.

L'école moderne anglaise a bien dépassé le but d'originalité que s'étaient proposé les peintres de l'école ancienne, et l'on ne saurait la rattacher directement à aucun d'eux, pas plus à Hogarth dans le genre, qu'à Turner ou Constable dans le paysage. Aucun d'entre eux, en effet, n'a poussé aussi loin que les peintres modernes la violente crudité du coloris, le défaut d'équilibre dans la composition et la singularité dans le motif. Quoi qu'il en soit, et malgré tous ses défauts, ce genre est assez séduisant pour avoir excité, lors de son apparition, un engouement général.

Les peintres de genre anglais manquent fréquemment à l'une des premières lois de cet art, qui est de ne pas immobiliser les expressions de physionomies qui sont fugitives de leur nature. Le maître en ce domaine de l'expression fut Orchadson  mais tous les peintres de ce groupe n'offrent pas de talents personnels et originaux, ce ne sont guère que des peintres de sujets anecdotiques. On peut citer encore parmi eux, Ph. Calderon, Hayllar, Powel, Frith, Frédéric Walker, mort à trente-cinq ans, et dont le tableau la Vieille Grille est d'un sentiment si profond; Herkomer, dont on retiendra le tableau la Dernière Assemblée, qui a figuré à l'Exposition de 1878; Morris, dont la toile Fils de braves a été popularisée en France par la gravure.

En somme, le trait distinctif de tous ces aimables peintres de sujets familiers est de donner généralement dans leurs compositions la meilleure place à la femme, à la jeune fille, à l'enfant se mouvant, soit aux champs, soit à la ville dans un cercle qui ne dépasse guère celui de la famille et du home. Du reste, en Angleterre, pays de familles nombreuses, quantité de productions sont adressées à l'enfance. Chacun connaît les aimables et gracieuses compositions de Walter Crane et Caldecott et surtout de Kate Greenaway, art naïf et touchant, qui met aux mains des petits Anglais des tableaux en miniature. 

Un genre qu'il ne faut pas oublier non plus dans l'art anglais est celui de la caricature, dans lequel les humoristes peintres de la Grande-Bretagne excellent de longue date, aussi bien que dans l'illustration des journaux périodiques. Le grand maître et l'initiateur de la caricature a été Hogarth, mais ses productions renferment un fond de férocité, tandis que cette arme aiguë, en passant aux mains de John Leech et de Gillray, s'est émoussée au point de devenir plus comique que sévère, sans perdre toutefois le sentiment qui en a été pendant des siècles le caractère et le mobile, c.-à-d. la haine du vice et l'amour du bien.

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