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Littérature anglaise
La littérature anglaise au XVIIe siècle
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Le Moyen Âge
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La fin de l'âge d'or.
Shakespeare, mort en 1616, était parut au milieu de la période la plus féconde du théâtre anglais : il avait eu des prédécesseurs, de son vivant il eut des rivaux, et le mouvement dramatique du siècle, qui n'avait pas commencé avec lui, ne finit pas à sa mort. Le public anglais applaudit en même temps que lui et après lui : Ben Jonson, le plus savant et le plus classique des auteurs dramatiques de cette époque, qui a composé des tragédies romaines et des comédies régulières; Beaumont et Fletcher, dont les tragédies approchent quelquefois de celles des maîtres; Chapman, qui a traduit Homère et écrit pour le théâtre; Webster, auteur de la Duchesse d'Amalfi et du Diable blanc; Middleton, Marston, Massinger, dont les pièces appartiennent au répertoire classique anglais; Ford, Thomas Heywood, qui avaient le don du pathétique, et Shirley, dont l'élégance était renommée. Ce théâtre si florissant fut brutalement fermé par la révolution d'Angleterre, en 1642, et ne se rouvrira qu'à la Restauration des Stuarts.

Le roi Jacques Ier, ne se borna pas à encourager les écrivains; il prit lui-même la plume, et publia plusieurs traités, dont le plus important roule sur la démonologie, qui était encore en grand honneur chez les Anglais. Un des prosateurs les plus originaux et les plus ignorés en France porte le nom de Robert Burton. Il a écrit, avec une immense érudition et beaucoup d'esprit, un traité intitulé l'Anatomie de la Mélancolie, dans lequel Sterne et d'autres écrivains plus récents ont puisé sans le dire. Les préoccupations religieuses et politiques du temps se révèlent dans les ouvrages d'Owen Felltham, de Heylin, de Selden et de Hales. Parmi les théologiens, le premier rang appartient sans contestation à Jérémie Taylor, qu'on a appelé le Spenser et même le Shakespeare de la théologie anglicane. Ce grand écrivain a composé, pour les besoins de la polémique du jour, un grand nombre d'ouvrages de controverse. C'est la portion la moins importante et la moins durable de son oeuvre. Ses écrits dogmatiques respirent au contraire la plus haute élévation morale et le mépris des petites passions qui agitent les humains.

Si l'on voulait résumer les caractères généraux des prosateurs de cet âge, on reconnaîtrait que ce qui y domine, c'est la liberté de la composition et l'amour de l'Antiquité. II n'y a alors ni écoles, ni genres déterminés. Beaucoup de poètes écrivent en prose, et beaucoup de prosateurs font des vers. Les mêmes esprits s'exercent sur les sujets les plus variés et en apparence les plus opposés. C'est le siècle des esprits originaux. Mais cette originalité éclate à une époque de renaissance, au moment où la nation anglaise découvre les richesses de la Grèce et de Rome, et elle se concilie avec l'imitation des chefs-d'oeuvre des Anciens. Bacon et Burton transportent dans leurs oeuvres des passages entiers d'auteurs latins. Ben Jonson, suivant l'expression de Dryden, latinisa la langue anglaise, en faisant passer dans ses traductions des mots entiers de Virgile ou d'Horace. Le français et l'italien, que tous les esprits cultivés possèdent, apportent aussi leur contingent d'expressions étrangères au vocabulaire de la Grande-Bretagne. Au milieu de ces tentatives, la langue varie avec les écrivains, et n'a pas encore atteint l'unité que lui donneront les poètes et les prosateurs du siècle de la reine Anne.

De 1640 a 1689.
On pourrait appeler ces quarante années une période de transition entre le siècle d'Élisabeth et celui de la reine Anne. Les grands esprits qui s'y élèvent ne se rattachent encore à aucune école; ils ont l'originalité et la spontanéité de l'âge précédent, et cependant, entre les mains des derniers d'entre eux, la langue se polit et touche à la perfection classique.

Parmi les poètes, on distingue : Cowley, que sa facilite et son naturel avaient rendu populaire, et qui réussit surtout dans l'ode anacréontique; Waller, poète de cour, élégant et aimable, flatteur de la République et de la Restauration, sans dignité morale, mais non sans grâce; et Denham, auteur d'un poème descriptif écrit avec naturel et avec goût. Le plus grand nom poétique de cette période est celui de Milton, dont nous ne lisons que le Paradis perdu, mais qui, avant son épopée, avait écrit des poèmes charmants dans le genre descriptif : Comus, Lycidas, l'Allegro et le Penseroso. Le style de Milton est à la fois classique et pittoresque, modelé sur celui des poètes tragiques de la Grèce, et plein d'images et de vie. Sa prose nerveuse et ample, employée surtout à des ouvrages de polémique et de controversé, porte l'empreinte des ouvrages latins sur lesquels elle est calquée, et dont elle conserve en anglais les inversions et les tournures. Samuel Butler a acquis, à côté de Milton, une célébrité qui dure encore par la publication du poème burlesque d'Hudibras, où il se moque des Puritains.

La Restauration apporta de France une poésie élégante et classique qui, sans descendre dans les populaires inférieures de la nation, réussit surtout à la cour. Deux courtisans, Roscommon et Rochester, firent des vers dans le goût français. Cette poésie d'importation étrangère eut pour principal interprète Dryden, dont il sera, plus tard, de bon ton de rabaisser le mérite, mais que les critiques du XVIIIe siècle plaçaient encore au premier rang parmi les poètes anglais. C'est un écrivain réfléchi et critique, très différent de ceux du siècle d'Élisabeth, qui n'improvise pas comme eux et qui ne cède pas à l'inspiration du moment, mais qui soigne son style, et qui attache le plus grand prix à la pureté et à la délicatesse de l'expression. Il est le fondateur d'une école nouvelle dans laquelle domine l'élégance, mais où se perd un peu de cette force originale et déréglée qui avait été Ie caractère des anciens poètes. Dryden écrivit beaucoup et dans des genres très divers; il traduisit Virgile, Perse et Juvénal; il composa des tragédies, des fables, des odes, dans lesquelles il s'éleva quelquefois jusqu'au sublime, comme dans l'Ode à sainte Cécile, et surtout des satires religieuses et politiques. Ses tragédies sont les plus médiocres de ses oeuvres, et ses satires en sont les meilleures : il a, dans celles-ci, un style vigoureux, nourri de souvenirs antiques, mais animé par la passion et coloré de l'éclat de la poésie. C'est après Dryden et à son exemple que s'introduit en Angleterre la versification régulière et classique de la France. Il paraît sur le seuil du siècle de la reine Anne, comme pour annoncer un esprit nouveau.

Le théâtre, fermé par les Puritains, fut rouvert par Charles II. Mais on ne reprit qu'un petit nombre des pièces qui avaient été jouées avant la République, et l'on remania presque toutes celles qu'on emprunta à l'ancien répertoire. Le roi et les courtisans, qui revenaient de France, mirent à la mode, à la place des oeuvres dramatiques de Shakespeare, des tragédies héroïques, en vers rimés, incitées du français, mais écrites avec une liberté de langage que notre théâtre n'a jamais supportée, et qui répondait aux moeurs dépravées de la cour d'Angleterre. La licence de la comédie, qui devint une pure comédie d'intrigue, imitée de l'Espagne, alla plus loin encore. On ne peut lire aujourd'hui presque aucune des pièces que Dryden a composées pour l'amusement des fils de Charles Ier. Les premières oeuvres dramatiques qu'on représenta, au retour de la monarchie, furent celles de Davenant, oeuvres froides et prétentieuses, bien inférieures aux productions imparfaites, mais puissantes, des successeurs de Shakespeare. Cette période serait un âge de complète décadence pour le théâtre anglais, si nous n'y trouvions les deux pièces les plus pathétiques qui aient été représentées sur la scène de la Grande-Bretagne, l'Orpheline et Venise sauvée d'Otway, dont un critique a dit qu'elles avaient fait verser plus de larmes que Roméo et Juliette et Othello.

A la tête des prosateurs de la même époque se placent naturellement Milton et Dryden. Dans la philosophie et dans la politique, après Milton, viennent Cowley, dont la prose est aussi simple que sa poésie est emphatique; Algernon Sidney, qui a fait un ouvrage intitulé : Discours sur le gouvernement, en faveur des idées républicaines; Thomas Burnet, auteur d'une Théorie sacrée de la Terre, sir William Temple, un des écrivains qui ont le plus contribué aux progrès de la langue anglaise, qui a laissé des Mémoires, des Notes officielles, une vaste Correspondance diplomatique, et surtout des Mélanges pleins de grâce et de naturel; et enfin Locke, dont la philosophie, qui explique toutes nos idées par l'expérience et les fait dériver de la sensation et de la réflexion, après avoir été introduite en France par Voltaire, fut développée par Condillac

L'histoire est dignement représentée dans ce siècle par lord Clarendon, qui a raconté, dans un style naturel, rapproché du ton de la conversation, la lutte des royalistes et des républicains, à laquelle il avait pris part dans les rangs des royalistes, L'Église anglicane nous offre alors les noms de quelques-uns de ses plus éloquents prédicateurs et de ses plus profonds théologiens: Stillingfleet Sherlock, South, et surtout Barrow et Tillotson. Barrow a laissé des sermons dont on admire encore la profondeur et la force, quoique l'éloquence en soit plus nerveuse que polie. Les sermons de Tillotson, écrits trop souvent sans art et dans un langage inculte, nous charment cependant par le feu de la pensée, par le naturel du sentiment, et par l'élévation morale qui y règne. A la littérature proprement dite se rattachent les oeuvres de Fuller, de Walton, de l'Estrange et de Tom Brown. La liste des écrivains de cette période peut se terminer par le nom d'un auteur qui, de la plus humble condition sociale, s'est élevé jusqu'au génie : c'est Bunyan, l'auteur du Voyage du Pèlerin, le plus populaire des ouvrages qui aient été écrits en langue anglaise, sans même en excepter Robinson Crusoé; on en avait fait, au commencement du XIXe siècle, plus de cinquante éditions. (AM)

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