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Le Tilleul
est un genre de la famille
des Tiliacées, ordre
des Malvales, composé d'arbres élevés, à cime touffue. Les feuilles,
pétiolées, ont un limbe
dentelé, cordiforme, parfois obliquement tronqué. Les fleurs en cyme
trichotome ou en corymbe sont insérées
sur un long pédoncule concrescent, sur environ
la moitié de sa longueur, avec sa bractée axillante,
de consistance membraneuse. Le calice est formé
de 5 sépales pétaloïdes, libres. La corolle
comprend 5 pétales libres en préfloraison
imbriquée. Les étamines, au nombre de 25-80,
sont groupées en 5 faisceaux opposés aux pétales; les anthères
ont une déhiscence extrorse. L'ovaire,
libre, sub-globuleux, velu, est divisé en 4-5 loges
bi-ovulées; le style unique se termine par
5 dents stigmatifères. Dans la suite du développement, les cloisons qui
partagent l'ovaire en loges disparaissent et la plupart des ovules
avortent, de sorte que le fruit mûr est uniloculaire et ne contient qu'une
ou deux graines. On connaît une dizaine d'espèces
de Tilleul disséminées dans l'hémisphère boréal (Eurasie, Amérique)
:
Le Tilleul à grandes feuilles
(T. grandifolia Ehrh. ; T. platyphylla Scop. ou T. platyphyllos Scop.)
et le Tilleul sylvestre (T. silvestris Desf., T, ulmifolia Scop., T. parviflora
Ehrh.) s'observent dans tous les bois de l'Europe jusque dans l'extrême
Nord. En Hongrie et dans l'Europe orientale vit le tilleul argenté (T.
argentea Desf. ou T. petiolaris DC).
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Tilleul.
a.
Coupe de la fleur.
Sylviculture.
Le Tilleul des bois, Tilla parvifolia
Ehrh., est un arbre de haute taille, s'élevant
jusqu'à 25 ou 30 m. La cime, très ramifiée, se couvre d'un abondant
feuillage, et, en été, de nombreuses fleurs jaunâtres, odorantes. Les
feuilles sont petites, cordiformes,
dentées sur les bords, glabres, vertes
en dessus, glauques en dessous, avec de petits bouquets de poils
roux aux aisselles des nervures, sur la
face inférieure. Les fruits sont petits, globuleux,
secs, gris, à côtes peu apparentes. Le Tilleul commence à fructifier
vers sa vingtième année, et sa fructification est abondante chaque année.
Ces fruits, employés à la multiplication du Tilleul, peuvent être semés
à leur maturité, à la fin de l'automne, ou bien au printemps, après
stratification dans le sable. Les graines germent
lentement et le plus souvent au bout d'un an. Le Tilleul vient dans tous
les sols consistants, particulièrement dans ceux qui renferment du calcaire
et qui sont frais on même humides. Le bois de cet arbre est blanc on légèrement
rosé, homogène, fin, léger, tendre. Il se travaille et se coupe facilement
en tous sens.
Les menuisiers et les ébénistes, les
sculpteurs et les tourneurs en font usage; ils l'emploient avantageusement
pour les charpentes de meubles, pour faire des statuettes, de menus ouvrages
de tour. On en fait encore des tables d'harmonie, des articulations pour
touches de pianos, des échelles légères,
des crayons communs, des allumettes, de la pâte à papier. Il a le précieux
avantage de n'être guère exposé à la vermoulure, de ne se gercer et
déformer que très peu en se desséchant. Ce bois est un combustible médiocre,
il flambe assez bien, mais en dégageant relativement peu de chaleur. Le
charbon qu'il fournit est léger et peut servir au dessin comme celui du
fusain. Ce charbon vaut presque celui de la bourdaine pour la fabrication
de la poudre. Le Tilleul intéresse encore par un autre produit : son écorce.
L'écorce, très riche en fibres textiles, sert à de nombreux usages.
Comme producteur d'écorce, le Tilleul est cultivé en taillis qu'on exploite
à quinze on vingt ans. Il se prête fort bien à cette culture, grâce
à l'abondance et à la vigueur de ses rejets de souche. Au printemps,
en temps de sève, on lève l'écorce en longues lanières qui peuvent
être employées directement ou après leur division en lanières plus
étroites. Ces lanières servent de liens pour les gerbes, pour les ballots
de laine ou pour les caisses d'emballage.
Le plus souvent, cependant, on traite l'écorce
pour en extraire le liber textile. Les lanières,
réunies en bottes, subissent dans l'eau une macération de plusieurs mois
; elles abandonnent ensuite facilement leur liber sous forme de rubans
qui constituent la tille. Avec la tille on fait des cordes très
solides, pour les puits et le halage des bateaux. On fait aussi, avec la
tille, mais surtout en Russie, des nattes, des tapis, des paniers. des
chapeaux, des chaussures, etc.
Les fleurs de tilleul
(Tilla sylvestris et platyphylla) sont un menu produit du Tilleul : elles
renferment du sucre, du tanin, de l'acide malique, de l'acide tartrique
et sont parfumées par une huile essentielle. On les emploie munies de
leurs bractées. On en prépare une tisane par
infusion à 10 °/°°, et une eau distillée par distillation à la vapeur;
elle est employée comme calmant et contre les digestions
diflïciles.
Le Tilleul est un arbre
d'ornement, arbre aimé, arbre populaire que l'on trouve partout cultivé.
Sans doute se laisse-t-on séduire surtout par ses utiles fleurs
d'une odeur si douce, car son feuillage a peu de durée, et c'est une grave
imperfection chez un arbre d'ornement. Dans le Midi, il perd ses feuilles
dès juin et juillet. On préfère souvent au Tilleul à petites feuilles
le Tilleul à grandes feuilles ou Tilleul de Hollande, Tilia platyphylla
Scnp., dont les feuilles, de même couleur sur les deux faces, sont mollement
velues en dessous, avec des bouquets de poils blancs aux aisselles
des nervures. Il a le même port que le
Tilleul à petites feuilles; ses fleurs sont encore plus parfumées, mais
il a aussi le défaut de perdre ses feuilles trop tôt. On en cultive une
variété curieuse, à feuilles découpées, connue sous le nom de Tilleul
à feuilles laciniées. Un autre Tilleul, originaire de Hongrie, le Tilleul
argenté, Tilla argentea Desf., se distingue à ses feuilles tomenteuses
et blanches en dessous. C'est une fort belle espèce, très recherchée
; ses fleurs sont plus tardives et ses feuilles sont plus durables que
chez les autres Tilleuls.
Paléontologie.
Le tilleul fait sa première apparition
dans l'oligocène par des feuilles et des
inflorescences.
Son type arctique, Tilia Malmgreni Hr., correspondant au type de nos tilleuls
actuels, était alors répandu au Groenland et au Spitzberg ; il reparaît
en divers points de l'Europe à partir du miocène récent, à côté de
types divergents, Tilia expansa Sap., par exemple, venus d'ailleurs que
de l'arctique ou nés sur place, et qui ont totalement disparu. A l'époque
quaternaire, il atteint des latitudes de plus en plus méridionales. On
a trouvé, entre autres dans les tourbières de l'Allemagne du Nord, du
Danemark et du centre de la Russie, le Tilia platyphylla Scop., toujours
dérivé du type arctique, et cela dans une région où il n'existe plus
de tilleul aujourd'hui; il s'agissait là d'une période interglaciaire,
les glaces ayant déterminé des progrès et des reculs des flores. Le
même T. platyphylla a également existé en Suède et en Norvège après
la dernière époque glaciaire. Depuis, il a reculé peu à peu vers le
Sud. (G. Boyer / W. R.). |
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