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La gymnastique
Le nom  de gymnastique dérive de gumnos  = nu, de ce que les Anciens avaient coutume pour se livrer aux exercices gymnastiques de se dépouiller de tout vêtement. La gymnastique est la science rationnelle des mouvements; elle a pour but, au départ, le développement régulier du corps, l'accroissement et l'équilibration de toutes les forces de l'organisme et elle comprend l'étude des exercices du corps, en soi et en vue d'un but déterminé : but physiologique, esthétique, athlétique ou médical. Vivante image des étapes franchies par nos ancêtres préhistoriques, tous les peuples primitifs, sans exception, s'adonnent sous une forme plus ou moins empirique, à la culture des forces du corps. Dès les temps les plus reculés, en Chine, en Inde, en Egypte, on en codifient les préceptes. Sous l'influence de ce travail d'évolution, la gymnastique revêt trois modalités différentes. Selon les circonstances elle se fait, militaire, thérapique ou rituelle. 

En Grèce, elle occupe, dans les moeurs et les occupations, une place plus que nulle part ailleurs prépondérante. Là, c'est l'esthétique qui est son objectif dominant. A Rome, elle sert presque exclusivement de préparation au métier des armes. Au Moyen âge, les exercices corporels méthodiques tombent en désuétude, mais la féodalité la fait concourir à l'éducation du chevalier. La Renaissance exhumant les traditions de l'Antiquité remet en honneur les errements qui y étaient usuels en vue d'un entraînement systématisé de l'organisme. Avec les temps modernes, embrassant les uns l'ensemble de la question, les autres tel ou tel autre de ses aspects diversifiés, les nombreux travaux qui se succèdent font faire à l'éducation physique un progrès considérable. A partir du XIXe siècle, enfin, des recherches multiples conçues dans un esprit scientifique rigoureux, fécondées par des institutions largement et fortement organisées, font entrer la culture des forces du corps dans une phase nouvelle et en assurent la vitalité.

La naissance de la gymnastique moderne peut être datée de 1815, époque à laquelle Ling créa la gymnastique suédoise (encadré ci-dessous). En France, le colonel espagnol Amoros ouvrit en 1820; dans la plaine de Grenelle, à Paris, un institut de gymnastique, qui devint plus tard l'école militaire de Joinville. L'enseignement amorosien avait pour but de développer la force musculaire; les premiers exercices, consacrés à l'assouplissement, s'accompagnaient de chant. Sa méthode englobait-:  la lutte, la course, la marche, la natation,  l'escrime, le saut, les haltères, le trapèze; les échelles et cordes, l'équilibre sur la poutre; les escalades de murs, la voltige.
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La gymnastique suédoise

La gymnastique suédoise, basée sur la connaissance approfondie de l'anatomie humaine a été créée dans un but tout thérapeutique. Le guerrier et maître d'escrime Ling parvint à se guérir de douleurs opiniâtres, à l'aide de mouvements soigneusement étudiés; lorsqu'il en eut observé sur lui-même l'heureux effet, il généralisa sa méthode et fonda un institut à Stockholm en 1815. Répandue d'abord en Suisse et en Allemagne, la gymnastique suédoise fut enseignée en France à partir de 1900. 

Son but est de perfectionner à un degré égal le corps entier et d'assurer les fonctions primordiales de l'organisme, respiration, circulation, nutrition. Elle y parvient en faisant travailler les muscles dorsaux, latéraux, abdominaux; et par une série de mouvements appropriés ou des exercices à l'espalier ou au «-bomme-», élargit la poitrine, et rectifie les mauvaises attitudes donner ici le détail de ces exercices serait plutôt nuisible au lecteur, parce-que leur efficacité dépend de la perfection avec laquelle ils sont exécutés.

Destinée aux  seuls militaires, la gymnastique mettra plus de cinquante ans à pénétrer dans les lycées et écoles où elle ne rencontre au début que de l'indifférence sinon du mépris; toutefois les sociétés de gymnastique se sont multipliées à partir des années 1880. Elle se divisa dès lors en gymnastique d'assouplissement, gymnastique aux agrès, gymnastique sans agrès (course, saut, boxe, savate, lutte - disciplines sportives que l'on ne range plus aujourd'hui dans la gymnastique proprement dite ). Ainsi, au fil des décennies, grâce à ces efforts répétés, la gymnastique a irrévocablement trouvé la base solide qui lui convient. Deux sciences positives : l'anatomie et la physiologie, constituent cette base; son enseignement désormais est indissolublement lié aux informations que l'anatomie et la physiologie sont aptes à fournir sur les conditions qui régissent le développement rationnel et intégral de l'organisme. 

Les divisions de la gymnastique.
Considérée dans ses grandes lignes, la gymnastique se prête à deux divisions fondamentales : elle est naturelle ou bien elle est artificielle; et les matières qui entrent dans l'un ou l'autre de ces deux cadres sont réciproquement complémentaires. La gymnastique naturelle embrasse la réglementation des exercices auxquels chacun se livre naturellement et spontanément. Elle répond à la palestrique des Grecs et reçoit dans la pratique la dénomination de gymnastique sans appareils. Les matières qui composent la gymnastique artificielle ont trait aux exercices qui s'exécutent à l'aide d'engins appropriés au développement spécial d'une région musculaire, d'une fonction locomotrice, d'un système organique en particulier. Leur ensemble constitue la gymnastique dite avec appareils ou encore d'application.

Les considérations qui ont trait à la gymnastique dite artificielle ou d'application sont de différents ordres. Les unes se rattachent au gymnase, considéré dans ses dispositions architecturales ou dans son agencement pédagogique, les autres concernent soit les divers appareils, engins ou agrès, soit les exercices à l'exécution desquels ils servent. Les exercices qui se pratiquent au gymnase peuvent être divisés en trois groupes. Les exercices élémentaires constituent le premier. Les instruments à l'aide desquels ils s'exécutent sont les haltères, le bâton, les barres à sphères, les massues ou mils, la perche. Ceux du second groupe . exercices essentiels, peuvent se pratiquer au moyen des quelques agrès suivants : perche fixe, mobile, à crochets, échelle de corde, corde à noeuds, cordes lisses verticale, horizontale, inclinée. Complémentaires, les exercices du troisième groupe nécessitent l'emploi d'appareils de deux sortes : des appareils de suspension et des appareils de traction. Les premiers sont fixes ou mobiles. Fixes, ils consistent en échelles de bois horizontale, verticale, inclinée, poutre horizontale ou inclinée, barres parallèles ou à suspension. Mobiles, ce sont les anneaux et le trapèze. Quant aux appareils de traction invariablement fixes, strictement ils ne sont autres que la planche à rainures et la planche à rétablissements.

Que les exercices ressortissent à la gymnastique d'application ou à la gymnastique naturelle, les effets physiologiques de la mise en activité du système locomoteur ne varient pas. Tout muscle en contraction est le siège de combustions intenses. Si le muscle en se contractant ne rencontre pas de résistance, les combustions dont il est le siège se transforment en chaleur. Mais s'il se rencontre une résistance, un certain nombre d'entre les unités de chaleur qui se sont développées se transforment en équivalents mécaniques. La somme de chaleur produite par les combustions que la contraction musculaire a engendrées se traduit dès lors partie en chaleur, partie en travail. 

D'un autre côté, le véritable facteur du développement de l'organe, c'est le travail. A son défaut, il n'y a pour la puissance ou le volume de l'organe que des chances restreintes de développement. Or, travail implique résistance. En vue du développement organique, la résistance est donc une circonstance à rechercher. Point capital, en outre, toute la locomotion animale gravite autour des poumons qui sont à la fois les organes importateurs du grand épurateur de l'organisme, l'oxygène, et exportateurs pour une part importante des résidus et produits excrémentiels, suppléant la peau et les reins et réciproquement. Les exercices du corps, activant la circulation périphérique, augmentent la quantité de sang qui, dans un temps donné, traverse le coeur et les poumons ; ils augmentent les combustions et peuvent élever la température du sang de plusieurs degrés.

Le phénomène d'échange des gaz, l'hématose, s'opère, il est vrai, dans toutes les parties du corps où le sang circule; mais c'est dans les vésicules pulmonaires terminales que l'oxygène est absorbé. Si, à chaque inspiration, la quantité d'air absorbée est considérable, les inspirations seront proportionnellement moins fréquentes et l'essoufflement sera évité. Quand le nombre des inspirations monte de 14 à 50 et même à 60 par minute, le coeur est en plein désordre; les poumons d'une capacité trop faible ne peuvent recevoir le sang des veines pulmonaires, et l'hématose reste incomplète. Qu'avec des engins qui se manient à la surface du sol on fasse de la gymnastique dite de plancher, ou à l'aide d'appareils suspendus au faite, de la gymnastique dite aux agrès, ou bien que, restant dans le domaine de la gymnastique dite naturelle on s'exerce à la marche, à la course, à l'équitation, à la natation ou à tout autre sport, tels sont les principes fondamentaux de physiologie que l'on doit constamment avoir à l'esprit et desquels il convient, dans la pratique, de ne jamais se départir.

Pour assouplir les muscles, on fait exécuter au corps des séries de mouvements; mouvements horizontaux et verticaux des bras et des jambes, avec ou sans flexion; la marche et le pas gymnastique développent spécialement la souplesse des jambes. Les agrès constituent la gymnastique acrobatique; on s'exerce à sauter sur le chevalet; on suspend le corps sur les bras aux barres parallèles, dont l'usage est à recommander, parce qu'elles permettent des mouvements assez nombreux qui exigent autant d'habileté que de force; on fait des tractions ainsi que des rétablissements à la barre fixe et au trapèze; la voltige au trapèze, apprend à bien sauter et demande du sang-froid, de l'agilité; les cordes, échelles et mâts développent les muscles des bras; la pratique des anneaux assouplit les reins ; enfin on s'accoutume à surmonter le vertige en marchant sur le portique. Les agrès permettent une multitude de tours de force, dont plusieurs sont dangereux et qu'il ne faut exécuter, que quand on est bien entraîné et sous la surveillance d'un moniteur.

Mais la gymnastique offre encore d'autres ressources à ses fidèles, et  qui peuvent constituer des sports à part entière : la lutte à la corde, que deux camps tirent chacun de leur côté; les haltères, qu'il vaut mieux choisir assez légers au début, mais qui peuvent peser jusqu'à 15 kilos; les massues ou mils dont le poids varie de 1 kg pour les enfants à 9 kg pour les sportifs adultes, et que l'on apprend à manier dans tous les sens, au-dessus de la tête, devant ou derrière; la barre de fer que l'on enlève, et avec laquelle on exécute les mouvements des bras avec ou sans flexion; enfin le jet du disque, qui exige une grande souplesse; c'est un exercice renouvelé des Anciens et qui a reparu aux modernes jeux olympiques d'Athènes, en 1896; rond, en bois dur cerclé de fer, il mesure 22 centimètres de diamètre, 4 centimètres d'épaisseur au centre et pèse 1923 grammes; dans les concours, l'athlète se place dans un carré de 2,50 m de coté, dont il ne peut franchir les limites, en lançant le disque, sous peine de voir son essai annulé; chaque concurrent a le droit de le lancer trois fois. On pratique un exercice identique avec le boulet, qui pèse 7,25 kg; c'est le lancer du poids. Notons que les gymnastes très exercés se livrent encore aux jeux icariens, d'origine vénitienne : voltige, pyramide humaine, sauts périlleux, etc.

Remarques pratiques.
Terminons en notant que quelles que soient les conditions qui président à l'accomplissement de ces exercices, et de toute pratique sportive en général, il est certaines dispositions préalables à prendre, certaines règles générales à observer. Les principales sont celles-ci : 

1° l'heure propice pour se livrer à la gymnastique est celle qui précède le repas soit du matin, soit du soir; 

2° on doit avant tout se dépouiller de tout vêtement pouvant déterminer des compressions au niveau du ventre, de la poitrine ou du cou; 

3° pour les exercices aux agrès, la ceinture dite de gymnastique est de rigueur; 

4° pour tout exercice en général, pour ceux de la marche en particulier, des chaussures adaptées (sans talons), sont indispensables; 

5° une fois commencés, les exercices doivent être, pour amener un résultat, continués avec fermeté et persévérance; 

6° ils doivent être exécutés avec vigueur dans la plénitude de force de tension des muscles, mais sans hâte, avec lenteur; 

7° si les mouvements respiratoires ou les battements du coeur s'en trouvent notablement accélérés, il faut avant de continuer attendre le retour du calme; 

8° la graduation des exercices doit être toujours progressive, bien pondérée et l'extrême limite des forces respectée de loin;

9° l'inconvénient toujours à éviter, sinon toujours évitable dans les exercices de force, c'est l'essoufflement; 

10° les exercices peuvent être poussés jusqu'à occasionner une fatigue momentanée cédant au repos qui suit. Ils ne doivent pas aller jusqu'à causer des douleurs musculaires vives et persistantes. 

De toute façon, la dépense de force exigée du sujet doit être en rapport avec l'âge, le sexe et la vigueur de la personne. Et il est un signe certain qu'une sage mesure a été observée, c'est la conservation du sommeil, ainsi que celle de l'appétit. Pour l'un, comme pour l'autre sexe, avant l'âge de huit ans, les mouvements réglés et disciplinés manquent d'attrait. Leur répétition périodique a un danger : l'ennui, et, par suite de l'ennui, l'aversion. Des jeux improvisés leur sont substitués avec avantage. Pour accoutumer sans qu'ils s'en doutent les jeunes enfants à la discipline, on ne saurait faire mieux que d'avoir recours à des petits jeux gymnastiques mêlés de chants instructifs et amusants. A partir de huit ans, les enfants peuvent être initiés aux mouvements préliminaires, aux exercices dits élémentaires ou d'assouplissement; puis aux applications directes telles que la course, le saut, etc., qui en découlent. Jusqu'à neuf ans, il est prudent de prohiber encore la gymnastique aux machines et aux agrès. De neuf à onze ans, les manoeuvres d'assouplissement seront reprises avec une ponctualité plus stricte. Il sera donné plus d'ampleur à leurs applications, et l'on pourra, sans inconvénient, autoriser le maniement des appareils les plus simples. L'âge de onze à quinze ans est le plus favorable pour s'initier à la marche, à la course, à la natation, à l'équitation, aux exercices d'équilibre, au maniement des agrès. A partir de quinze ans, on sera invité à la répétition des manoeuvres avec lesquelles il a été familiarisé, afin de se perfectionner. Les exercices de force : lutte de traction, perche, échelle, course en vitesse, natation, etc., pourront commencer à être enseignés. Quant à la gymnastique d'entraînement proprement dite, elle convient seulement aux sujets parvenus à l'âge auquel la musculation est achevée, les soudures osseuses accomplies et la vigueur de l'organisme dans sa plénitude. (C. Meillac / Dr Collineau).
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