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Etiage

Comme les plus basses eaux des rivières ont généralement lieu en été, on nomme étiage d'un lieu la plus basse marque des eaux du cours d'eau en ce lieu. En réalité, l'étiage n'a pas lieu partout dans la même saison; quand un fleuve est alimenté en grande partie par des fontes de glaciers, les plus hautes eaux correspondent aux premières fortes chaleurs, les plus basses aux grands froids. Ceux-ci donnent partout lieu à l'abaissement des eaux courantes; mais, dans les bassins à terrains perméables et par conséquent à sources, le débit peut conserver de l'importance dans le fleuve lorsqu'il est devenu nul dans les parties hautes de la montagne

L'altitude de l'étiage est essentiellement variable; elle diffère beaucoup d'une année à l'autre, ou plutôt les eaux n'y descendent que rarement dans une année. Toutefois, il y a beaucoup d'élasticité dans l'emploi de cette expression; ainsi on dira : l'étiage de 2002 a été beaucoup plus haut dans tel endroit que celui de 2001, phrase dans laquelle le mot étiage prend la signification de l'altitude minima annuelle, tandis que le vrai sens se rapporte au minimum minimorum. On fait observer à la vérité qu'il n'y a pas de pareil minimum, car certaines localités voient le niveau des basses eaux s'abaisser de plus en plus, soit que les sources donnent moins, soit pour tout autre motif généralement difficile à discerner. Les travaux de main d'homme ont aussi une grande influence sur les niveaux de l'étiage ; c'est ainsi que les travaux de Baumgarten (1840 à 1850) ont amené dans le Lot les abaissements suivants de l'étiage, constatés en 1854 : à Agen, 29 cm; à Nicole, 66 cm; à Marmande, 52 cm. De même, dans la Loire, on constate qu'à Nantes l'étiage est maintenant de 0,50 m au-dessous du zéro de l'échelle du pont de la Bourse, échelle qui autrefois avait certainement été réglée conformément à l'étiage réel.

Ces abaissements d'étiage peuvent avoir des résultats très préjudiciables; ainsi, le busc de l'écluse d'embouchure du Canal latéral dans la Garonne, à Castets, était autrefois couvert de 2 m d'eau au moment de l'étiage du fleuve; par la suite cette profondeur n'est plus que de 1,25 m, soit 0,75 m d'abaissement de l'étiage. Dans le Rhône, il avait été reconnu en 1856 que l'étiage réel était à 0,38 m au-dessous du zéro de l'échelle du pont Morand; depuis on est descendu à plus de 0,60, par suite des travaux exécutés dans le fleuve en aval de Lyon.

L'ingénieur russe Janicki, dans une curieuse brochure de 1879, donne les renseignements suivants sur l'influence  de travaux exécutés en Allemagne sur le niveau de l'étiage :

« Les ingénieurs français, avec le sens pratique qui les caractérise, ont été les premiers à reconnaître les imperfeclions, les difficultés et souvent l'impossibilité du moyen qui consiste à rétrécir le lit d'une rivière pour l'améliorer; les premiers, ils ont cherché et découvert le procédé de canalisation des rivières an moyen de barrages éclusés mobiles. Les Allemands, toujours méthodiques, continuent à chercher à régulariser systématiquement leurs rivières en en renforçant les bords et en rétrécissant la section au moyen de digues longitudinales ou d'épis. Les résultats obtenus en Allemagne ne sont pas brillants; jusqu'à présent, il n'existe pas encore dans tout ce pays une seule rivière complètement régularisée. L'inspecteur des constructions fluviales, Schlichting, en convient lui-même clairement, dans un des derniers ouvrages parus sur la matière. Après avoir décrit les travaux de régularisation de l'Elbe, en Saxe, sur un parcours de 113 km, l'ingénieur Schlichting dit que les travaux, achevés déjà sur une longueur de 47 km et demi en 1871, ont donné au chenal navigable presque la profondeur cherchée de 94 cm; mais il ajoute bientôt assez naïvement qu'en 1874 et 1875 sont survenus des abaissements sans précédents du niveau d'étiage, lequel est descendu de 20 cm, et a naturellement diminué d'autant la profondeur du chenal créé pour la navigation. L'honorable auteur me paraît ne pas se rendre compte que cet abaissement des eaux peut et, selon toute probabilité, doit être attribué aux travaux eux-mêmes. »
(M.-C. L.).
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