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Sir Frederick William
Herschel est un astronome né à Hanovre
(Allemagne )
le 15 novembre 1738, mort à Slough (Angleterre ),
près de Windsor, le 25 août 1822. Son arrière-grand-père,
que sa conversion au protestantisme
avait fait expulser de Moravie, était venu s'établir comme brasseur Ã
Pirna, en Saxe, au commencement du XVIIe
siècle. Son père était chef de musique des gardes à pied du roi de
Hanovre, et lui-même, le quatrième de dix enfants, entra à quatorze
ans, comme hautboïste, dans ce régiment, qu'il accompagna à Londres
en 1755. Deux ans plus tard, il assista à la bataille d'Hastenbeck, tomba
peu après malade, déserta, retourna en Angleterre et, huit années durant,
donna pour vivre des leçons de musique, aux environs de Leeds
d'abord, puis à Durham, à Pontefract, à Doncaster, à Wakefield. En
1765, il fut nommé organiste à Halifax, passa, l'année suivante, en
la même qualité, à l'Octagon Chapel de Bath
et demeura quinze ans dans cette place, dirigeant entre temps des concerts,
composant même, et employant les rares heures de liberté qui lui restaient
à réparer, par l'étude de la philosophie, des langues, de la physique
et des mathématiques, ce qu'il y avait eu de négligé dans son instruction
première.
William Herschel éleva ainsi, graduellement
et sans maîtres, le niveau de ses connaissances jusqu'à pouvoir aborder
l'Harmonics et I'Optics de Smith,
les Fluxions de Mac Laurin, l'Astronomy
de Ferguson, et, subitement épris, à cette
dernière lecture, de recherches célestes, voulut faire venir de Londres
un télescope. Le trouvant trop cher, il se procura des outils d'opticien,
se mit courageusement à l'oeuvre et, après cent essais infructueux, se
trouva enfin en possession d'un excellent réflecteur grégorien de cinq
pieds et demi de focale, qu'il avait fabriqué de toutes pièces et qu'il
braqua avec joie sur la nébuleuse d'Orion (M
42). C'était en 1774. Il avait trente-six ans. Il ne pouvait songer Ã
abandonner tout de suite des occupations qui constituaient son unique gagne-pain.
Mais il prit encore davantage sur son temps de repos afin de se construire
des instruments plus puissants et de satisfaire sa passion chaque jour
grandissante pour l'étude du ciel. En 1780, il communiqua à la Société
royale de Londres un premier mémoire : Astronomical Observations
on the periodical star in Collo Ceti (Philos. Trans., LXX, 338),
puis; en janvier 1781, à la même société, un remarquable travail ayant
pour titre : The Rotation of the planets (Philos. Trans.,
LXXI, 115). En décembre 1781, après sa retentissante découverte de la
planète ,
Uranus
(13 mars 1781), il fut élu membre de la savante compagnie, qui lui décerna
en même temps la médaille Copley. En 1782, Georges III, intéressé par
ses succès et peut-être un peu aussi par son origine hanovrienne, l'appela
auprès de lui, lui pardonna sa désertion et l'installa, ainsi que sa
soeur Caroline ( Les
Herschel), à Datchet, près du château de Windsor, avec le titre
d'astronome de la cour et 200 livres sterling d'appointements.
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La découverte
d'Uranus.
Le
13 mars 1781, Herschel, à l'aide d'un télescope ayant 2,13 m de longueur
et grossissant 227 fois en diamètre, aperçut un astre ayant un diamètre
apparent, en examinant de petites étoiles
au pied des Gémeaux .
Herschel
communiqua cette découverte à la Société Royale
de Londres, en émettant l'hypothèse que le nouvel astre était une comète ;
mais lui-même et Laplace reconnurent ensuite
que cet astre se mouvait dans une orbite
elliptique de petite excentricité ,
et les astronomes le rangèrent au nombre des planètes, avec le nom d'Uranus.
D'après
les calculs relatifs à cette planète, les astronomes trouvèrent qu'elle
avait été signalée comme étoile par Flamsteed
en 1690, par T. Mayer en 1756 et par Le
Monnier en 1765... |
En 1786, William Herschel changea cette
résidence contre celle, peu éloignée et désormais historique, de Slough,
« le lieu du monde, écrivait Arago, où
il a été fait le plus de découvertes ». Il termina ses jours, comblé
d'honneurs, associé à toutes les académies
étrangères et visité par les plus illustres savants de l'Angleterre
et du continent. Son ardeur au travail ne s'était ralentie qu'à partir
de 1807, alors que sa santé était déjà gravement altérée. En 1814,
il avait dirigé pour la dernière fois son télescope vers le ciel et,
comme la première fois, en 1774, c'était la nébuleuse
d'Orion qu'il avait observée. Il avait encore fait, en 1818, une intéressante
communication à la Société royale de Londres : On the Telescopic
Sounding of space-depths (Philos. Trans., CVIII, 429), et une
autre, en 1821, Ã la Royal Astronomical Society, dont il fut le premier
président : On the Places of 145 new double
stars
(Memoirs Astron. Soc., I, 466). Il était, depuis 1802, associé étranger
de l'Académie des sciences de Paris et avait été élevé, en 1816, Ã
la dignité de chevalier de l'ordre hanovrien des Guelfes. Il s'était
marié, en 1788, avec la veuve d'un riche marchand de Londres et en avait
un unique fils, John Herschel, qui devait suivre
brillamment ses traces.
William Herschel ne saurait être comparé
ni à Copernic, ni à Képler,
ni à Newton, ni même aux Tycho
Brahe ou aux Laplace; il n'a pas eu les visées
créatrices des premiers, et ce n'est qu'incidemment qu'il a abordé les
grands problèmes de la mécanique céleste. Il est pourtant une branche
importante de l'astronomie, celle qu'on appelle plus spécialement l'astronomie
sidérale, qui le compte parmi ses plus féconds fondateurs et à laquelle
il a fait faire un pas décisif. Nul avant lui n'avait scruté aussi profondément
les espaces stellaires, nul n'avait autant reculé les limites du monde
connu. Ces résultats, il ne les dut pas seulement à un labeur acharné
et à un rare talent d'observation. Il y avait en lui plus qu'un praticien
de premier ordre son cerveau était organisé pour les grandes luttes et
pour les plus hautes conceptions. Il s'était imposé la double tâche
de pénétrer le mystère de la structure des cieux et d'en dénombrer
les étoiles .
Pour cela, il lui fallait de puissants
instruments. Avec l'aide pécuniaire de Georges III, il en construisit
de plus grands et de meilleurs que tous ceux qu'on avait vus jusqu'alors.
Son télescope géant, commencé en 1785 et terminé en 1789, mesurait
39 pieds 4 pouces (environ 12 mètres) de longueur et 4 pieds 10 pouces
(1, 47 m) de diamètre. Le tube en était cylindrique et en fer; le miroir,
du poids de 1000 kilogrammes, avait la forme de sections coniques, qui
supprimait l'aberration
de sphéricité et qu'il obtenait au moyen de sa machine à polir, amenée
à son dernier perfectionnement en 1788; c'était enfin, suivant sa propre
expression, un front-view telescope, ou télescope à vue de face,
ainsi appelé parce que le petit miroir intermédiaire qui, dans le télescope
newtonien ou grégorien, renvoie l'image à l'oculaire, y était supprimé,
une légère inclinaison du grand miroir permettant à l'observateur, placé
au bord supérieur du tube, de voir de face et directement l'image. C'est
en 1776 qu'il imagina cette disposition, qui évita la déperdition d'un
grand nombre de rayons lumineux. Il ne la réalisa pratiquement que quelques
années plus tard.
Outre ce télescope, que mettait en mouvement
dans tous les sens un mécanisme fort ingénieux, quoique compliqué, et
auquel il appliquait, pour l'examen des astres très brillants, des grossissements
allant, prétendait-il, jusqu'à 6000, il en établit beaucoup de moindres
dimensions, tant pour lui que pour l'université de Goettingen, pour l'observatoire
de Madrid, etc., et il fabriqua en moins de sept ans (1788-95) 80 miroirs
de 20 pieds, 150 de 10, 200 de 7, et une multitude de plus petits. Il perfectionna
aussi le micromètre, qu'il fit à fil fixe et à fil mobile, et plus tard
à lampe. S'étant ainsi supérieurement outillé, il poursuivit avec un
succès prodigieux ce qu'il appelait ses « revues » du ciel. Sa découverte
d'Uranus ,
qu'il baptisa, en l'honneur de son roi, l'Etoile de Georges,
Georgium sidus, est son moindre titre de gloire. Ses travaux sur les
nébuleuses, les étoiles doubles
et les étoiles variables
ont une bien autre importance.
La première nébuleuse
(en fait la galaxie
d'Andromède ,
M 31) avait été signalée par Simon Marius
au commencement du XVIIe siècle et le
catalogue
de Messier, paru en 1783, n'en contenait encore
que 103. William Herschel en découvrit, à lui seul, plus de 2500, qu'il
divisa en nébuleuses résolubles ou amas stellaires ,
de forme généralement circulaire et ramifiées, et en nébuleuses
( Le milieu interstellaire )
non résolubles ou diffuses, qui affectent des contours irréguliers et
qui, croyait-on alors, seraient constituées par de la matière cométaire.
Il en donna, dans les Philosophical Transactions, trois catalogues,
celui du premier mille en 1786, celui du second en 1789, celui des cinq
cents dernières en 1802. Il entreprit en même temps la description de
la voie lactée ,
qu'il reconnut être une nébuleuse résoluble, de forme lenticulaire,
dans laquelle est compris le Système solaire ,
et dont il compta les étoiles par sa célèbre méthode du jaugeage du
ciel : elle lui donna, jusqu'Ã la 15e
grandeur (magnitude )
inclusivement, limite de visibilité du télescope de 0,60 m dont il se
servit pour ce travail, le chiffre respectable de 20 000 000.
William Herschel élucida aussi, le premier,
le problème depuis quelque temps posé des couples
stellaires
et établit qu'ils sont soumis, de même que notre monde, aux lois de la
gravitation ,
la plus petite des deux étoiles tournant, comme un satellite ,
autour de la plus grande : il trouva, de 1776 Ã 1804, plus de huit cents
de cas systèmes binaires, dont il dressa trois catalogues
(Philos. Trans., 1782, 1785 et 1805), et il calcula approximativement
la durée de leurs révolutions .
Les variations d'éclat et de couleur de certaines étoiles lui offraient
un autre champ d'études ( Les étoiles
variables );
outre Mira Ceti (Baleine ),
dont il s'était occupé en 1780, puis en 1791, et dont il avait fixé
la période à 331 jours, il suivit se 1795 à 1796, a
d'Hercule
qu'il reconnut comme une étoile variable, avec une période de 60 jours
environ. Dans ses quatre Catalogues of comparative brightness for ascertaining
the permanence of the lustra of stars (Philos. Trans., 1796
et 1799), il dressa en quelque sorte l'inventaire photométrique du ciel ,
afin de préparer aux astronomes de l'avenir un point de départ sûr pour
leurs constatations. Il suivit lui-même les phases de quelques-unes et
attribua leurs fluctuations à une rotation
périodique qui leur fait présenter tour à tour des faces diversement
lumineuses.
Ces investigations lointaines ne lui firent
pas négliger notre Système solaire .
A la découverte d'Uranus ,
il ajouta bientôt celle de ce qui pensa être six de ses satellites ,
mais dont deux seulement étaient avérés,
Titania
et Obéron
(11 janvier 1787), et il en aperçut deux nouveaux à l'intérieur des
anneaux
de Saturne ,
Mimas
(18 juillet 1789) et Encelade
(29 août 1789). Des uns et des autres, il détermina les orbites
et les durées des révolutions, calcula l'inclinaison
des bandes de Saturne par rapport à son anneau, les temps de rotation
de celui-ci et de la planète
elle-même, l'aplatissement de Jupiter ,
l'inclinaison de son équateur
sur le plan de son orbite, la durée de sa rotation, attribua à des masses
de neige qui fondent en été les taches blanches périodiquement observées
aux pôles de Mars
et à des nuages phosphorescents les lueurs qui éclairent parfois la portion
obscure de Vénus ,
contesta à Cérès ,
à Pallas, à Junon et à Vesta ,
dont il étudia les éléments ,
le caractère de planètes et leur donna le nom d'astéroïdes .
Herschel imagina pour la mesure des diamètres
des planètes une méthode ingénieuse, qui consistait essentiellement
dans la présentation à l'oeil non appliqué à l'oculaire d'un petit
disque de papier blanc éloigné par un aide jusqu'à ce qu'il apparut
de même grandeur que l'astre observé, mais il n'obtint, à cause de sa
connaissance insuffisante du grossissement employé, que des valeurs relatives.
En perfectionnant la méthode d'Hévélius,
il mesure à partir de 1780 les montagnes de la Lune
et donna pour leur hauteur des nombres voisins relativement inexacts. Mais
il a dit le premier que la Lune n'a pas d'atmosphère .
En 1783, Herschel, qui avait remarqué,
comme Halley et Cassini
II, le mouvement de certaines étoiles, fit l'importante découverte
du mouvement de translation de notre Système solaire
vers un point du Ciel qu'il nomma apex;
de ses observations de 1783 et de 1805, il conclut que l'apex est l'étoile
l de la constellation
d'Hercule .
Fontenelle, Bradley,
T. Mayer avaient déjà émis des conjectures Ã
ce sujet, et Lambert, dans ses Cosmologische
Briefe (1761), l'idée que le Soleil se déplace autour d'un centre
qui est dans la contrée d'Orion
ou de Sirius (Grand Chien ).
La constitution même du Soleil
fut l'objet de ses préoccupations. Il en émit une théorie qui rencontra
de nombreux partisans.
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Théorie
physique du Soleil
Herschel,
complétant les idées de Wilson d'après ses
propres observations, a émis en 1795 les hypothèses suivantes :
Le
Soleil
est formé d'un corps solide opaque et d'une couche lumineuse, qui entoure
ce corps et qui est soutenue beaucoup au-dessus du corps solide pur un
milieu élastique transparent; ce milieu porte une couche nébuleuse Ã
un niveau beaucoup plus bas que sa surface supérieure.
Si
une éruption gazeuse déchire les deux couches, la couche nébuleuse,
étant fortement éclairée d'en haut, réfléchit à nos yeux une portion
considérable de lumière et forme une pénombre, tandis que le corps solide,
ombragé par la couche nébuleuse, n'en réfléchit point.
II
résulte de là qu'une tache est l'effet produit par une cavité conique
dont le fond, qui est noir, appartient au corps solide et dont les parois,
qui sont demi-claires, appartiennent à la couche nébuleuse.
La
couche nébuleuse se nomme atmosphère réfléchissante; et la couche lumineuse
a été appelée photosphère
par Schröter.
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La belle comète
de 1811 a été le point de départ de ses recherches sur la nature des
comètes, qu'il continuera jusqu'en 1841. Il conclura à la complète diaphanéité
de leurs noyaux aussi bien que de leurs queues. L'optique aussi lui est
redevable d'importants travaux, auxquels. il fut conduit par la recherche
des meilleures conditions d'exécution des miroirs de ses télescopes.
De Rochon, en 1775, avait remarqué que la chaleur
dans le spectre
solaire croît du violet au rouge; Herschel traça à son tour les courbes
de chaleur et de lumière du spectre solaire et reconnut des maxima, non
seulement dans les rayons jaunes, mais encore dans de nouveaux rayons qu'il
découvrit au delà du rouge et qu'on a désignés depuis sous le nom d'infrarouges.Et,
pour mesurer l'intensité de la chaleur solaire, il imagina un instrument,
l'actinomètre. (Léon Sagnet / E. Lebon).
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Roland
Lessens, William
Herschel, Burillier, 2006.
En
bibliothèque - La liste des 71 mémoires
que William Herschel fit insérer de 1780 à 1818 dans les Philosophical
Transactions offre un vif intérêt en ce qu'elle permet d'embrasser
toute son oeuvre et de la suivre dans son développement. Nous ne pouvons
la donner ici. On la trouvera dans le Biographisch-Literarisches Handwaerterbuch
de Poggendorff (Leipzig, 1863, t. 1) ou dans
le Catalogue of scientific papers de la Société royale (Londres,
1870, t. IV).. Nous avons déjà mentionné quelques-uns de ces écrits.
Nous citerons encore :
Description
of a Lamp-Micrometer (1782); On the Proper Motion of the Sun and
solar system (1783); On the Remarkable Appearences at the polar
régions of Mars (1784); On Some Observations tending to investigate
the construction of the heavens (1784); On the Georgian planet and
its satellites (1788); On the Satellites of Saturn and the rotation of
its ring (1790); On Nebulous Stars (1791); On the Nature
and construction of the sun and fixed stars (1795); Description of a forty-feet
reflecting telescope (1795); Investigation of the powers of the
prismatic colours to heat and illuminate objects (1800); Experiments
on the refrangibility of the invisible rays of the Sun (1800); Account
of the changes that happened during the last 25ears in the relative situation
of double stars (1803); On the Direction and velocity of the motion
of the Sun and solar system (1805); On the Quantity and velocity
of the solar motion (1806); Astronomical Observations relating to
the construction of the heavens (1811); Astronomical Observations
relating to the sidèreal part of the heavens and its connexion with the
nebulous part (1814).
Quant
à ses compositions musicales, une seule, l'Echo, a été imprimée
Elle est d'ailleurs sans grande originalité, et les autres méritent Ã
peine qu'on en parle.
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Annual
Register, 1822, p. 289 - Fourier, Eloge
historique, dans les Mém.de l'Acd. des sciences de Paris, 1823,
p. LXI. - Astron. Jahrbuch de Bode, 1826.
- J.-W. Pfaff, W.Herschel's Entdeckungen; Erlangen,1828; 2e éd.,
Leipzig, 1850. - Bessel, Abhandlungen,
t. III, p. 468. - Arago, Analyse historique
de la vie et des travaux de sir William Herschel, dans l'Annuaire
du Bureau des longitudes, 1842, p. 249. - E.-S.
Holden, Sir W. Herschel, his life and works; New York, 1881,
in-12. - Holden et Hasting, Synopsis of the scientific writings of sir
William Herschel; Washington, 1881. |
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