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Histoire de l'art occidental
L'art dans l'Antiquité
Aperçu Antiquité Moyen âge De la Renaissance à 1900 L'art au XXe siècle
L'art de l'Antiquité est étroitement uni à la religion, dont il dérive. 

Egypte.
Nulle part la reltion entre l'art et la religion n'est aussi frappante qu'en Egypte, qui offre un art façonné dès l'Ancien empire sous la dictée impérieuse de ses croyances. La pyramide n'est que la maison d'un mort auguste qu'il faut soustraire à toutes les chances de destruction ou de profanation pour lui garantir la paisible possession de la seconde vie; les tombeaux des premières dynasties sont « la maison éternelle », c'est « la bonne demeure » où le mort est chez lui, entouré d'images gaies, de représentations familières, société vivante, dont les actes figurés lui garantissent l'accomplissement de toutes les cérémonies prescrites, comme de tous les travaux reproduits sur les parois de la chambre mortuaire, la « jouissance des moissons, des raisins et du domaine du tombeau ». 

Comme les idées religieuses sur l'autre vie sont une des parties les plus originales des croyances de l'Egypte, la tombe est d'abord sa création la plus caractéristique, et sa sculpture ne doit pas à une autre cause ces qualités merveilleuses de réalité et de vie qu'elle présente, à une époque « où la conscience nationale de la Grèce et de la Judée n'existait pas encore ». Si le sculpteur égyptien de la Ve dynastie a placé dans le serdab des effigies aussi parlantes que celle du scribe accroupi du Louvre ou du nain Khnoumhotpou du musée du Caire, c'est qu'elles étaient  « le support indispensable du double, le corps sans lequel l'âme du mort ne pouvait pas subsister dans l'autre monde  » (V. les articles de Maspero dans les Monuments de l'art antique de Rayet). Comme la première condition qui s'imposait à l'individu pour rester identique à lui-même, au delà de la mort comme en deçà, était de conserver sans y rien changer la forme qu'il avait en ce monde, le tailleur de pierre se préoccupait par-dessus tout, avec un scrupule et une gravité imperturbables, de reproduire la ressemblance jusque dans ses difformités. 

Et, si cette sculpture réaliste ne s'est pas développée comme on s'y attendrait à voir ses débuts étonnants, si, a partir de la XIIe dynastie, les clichés s'y multiplient, c'est peut-être qu'il lui a manqué le principe fécond qui a fait la souplesse et la beauté de la sculpture grecque, l'anthropomorphisme. Les Egyptiensse sont fait de leurs divinités des représentations composites, en suivant une logique qui est aussi celle de leur écriture; ils les ont peints ou sculptés comme ils ont élaboré leurs hiéroglyphes : l'addition de têtes d'animaux sur des corps humains ressemble plus à une manière d'écrire qu'à une manière de représenter. Cela a produit un art qui, dès le départ, se revendiquait comme conventionnel, c'est-à-dire qui n'est jamais tombé dans les illusions (fécondes, au demeurant) dont s'est nourri l'art occidental depuis les Grecs jusqu'au XXe siècle. Cela n'a pas empêché la force d'invention des artistes égyptiens : mais on la trouve surtout dans la recherche de l'expression de la majesté royale. C'est elle qui remplit la décoration des temples en face de la divinité qu'elle sert et qui la protège; c'est à rappeler ses exploits et sa piété que sont consacrés sur les parois des salles les peintures et les bas-reliefs.

Mésopotamie, Perse, Levant.
En Babylonie, le sanctuaire se dresse au sommet de tours étagées, au revêtement de briques émaillées de couleurs symboliques. La religion de l'Assyrie ne présente que des différences de nuances, mais la société assyrienne est plus active et plus violente; l'idée de la royauté conquérante et cruelle s'y exprime avec une force singulièrement persuasive; sur les vastes surfaces qu'offrent les murailles de briques des palais, dont l'entrée est gardée par des génies ailés au corps de taureau et à figure humaine, le sculpteur doit tailler rapidement des bas-reliefs de conquête et de chasse. Dans leurs figures lourdes et trapues, partout où le corps apparaît sous les longs vêtements qui le couvrent, ils accentuent les saillies des muscles, et affirment le modelé; mais dans la monotonie puissante de leurs représentations habituelles, ils multiplient surtout, avec une vigueur et une vérité surprenantes, les effigies d'animaux en mouvement; comme animaliers, ils sont incomparables.

Tandis qu'à l'Est du bassin du Tigre et de l'Euphrate, la civilisation puissante des Mèdes, des Perses s'appropriait , en les modifiant selon ses conceptions propres, les formes de l'art égyptien et surtout assyrien et de l'Asie Mineure (c'est l'influence égyptienne qui dominerait à Suse, l'influence assyrienne à Ecbatane, celle de l'Asie antérieure avec d'importantes réminiscences égyptiennes à Persépolis), un peuple se rencontra, à l'époque où l'Egypte et la Mésopotamie achevaient de développer leur activité créatrice, qui joua, dans le bassin méditerranéen, le rôle d'agent de transmission, de courtier maritime. 

Plus portés vers le commerce que vers l'art , établis sur une ligne étroite de plages, les Phéniciens propagèrent sur les côtes occidentales, où ni les Egyptiens ni les Assyriens n'avaient pénétré, les formes de l'art des bords du Nil et de la vallée de l'Euphrate. Les objets d'art n'étaient pour eux qu'un article de commerce; ils empruntèrent tour à tour ou simultanément leurs modèles à l'Egypte ou à l'Assyrie, sans y mettrre jamais rien de bien personnel; mais c'est par eux que l'Occident entra en rapport avec l'Orient. Les images religieuses qu'ils exportaient avec les autres produits de l'industrie et de l'art, céramique, orfèvrerie, étoffes, devinrent entre leurs mains, sous le souffle de la culture grecque, les dieux immortels de l'Olympe hellénique. En Syrie, en Judée, on retrouve aussi leur influence; ils fournissent à Salomon des artistes, des ouvriers et des matériaux pour le temple de Jérusalem; ils fondent à Chypre, en Crète, à Rhodes, dans les Cyclades, en Argolide, sur les côtes du Péloponnèse, à Cythère, sur la côte d'Afrique, à Utique, à Carthage, sur les côtes de l'Italie méridionale, en Sicile et en Sardaigne, des comptoirs et des établissements qui deviennent des foyers de civilisation. Les services qu'ils rendirent à l'art furent donc fort supérieurs à leur propre mérite. 

« Par l'exemple des Sardes, on devine où se serait arrêté le monde ancien, si Tyr et Carthage étaient restées seules maîtresses de la Méditerranée, si les Grecs n'étaient pas entrés en scène vers le VIIIe siècle avant notre ère, s'ils n'étaient pas venus prendre la suite des affaires de la Phénicie et proposer aux riverains de la Méditerranée les fictions merveilleuses de leur poésie, les nobles types de leurs dieux, les modèles d'un art qui s'émancipait rapidement et, d'années en années, devenait plus capable de traduire ses idées en belles formes expressives et heureusement choisies. » (Perrot).
Grèce.
L'idéal humain et héroïque, centre de la conception artistique en Grèce, a, en effet, lentement et profondément modifié las conditions générales des arts enseignés par l'orient. A l'idéal oriental, « la Grèce oppose son libre et vivant génie, agissant, joyeux, familier, couronné de grâce légère et de paisible harmonie » (Boutmy, Philosophie de l'architecture en Grèce). On n'a pas à raconter ici l'histoire de l'art en Grèce, ni à marquer toutes les étapes de son développement depuis les Xoana primitifs, taillés dans le bois, jusqu'aux marbres du Parthénon et d'Olympie, en passant par les frontons d'Egine. Ce sont les poètes qui les premiers fixèrent le type des dieux grecs; ils furent les premiers interprètes de la conscience et de l'imagination nationales et dégagèrent d'abord les attributs moraux et physiques de chaque divinité. Les dieux ne sont plus dès lors des forces naturelles, supérieures et terribles; ils deviennent peu à peu des êtres concrets, « semblables aux humains dont ils partagent les passions, mais plus beaux et plus forts ». L'art n'a plus qu'à les revêtir de cette forme humaine, et le radieux anthropomorphisme hellénique donne naissance à tout un peuple divinisé. L'étude de la nature dans les statues d'athlète fournit aux sculpteurs les éléments de ces créations : la sculpture se transforme avec une rapidité merveilleuse; les frontons d'Egine révèlent déjà un art maître de tous ses moyens et qui annonce les splendeurs du Parthénon. Dès que les types des dieux sont fixés, l'art les développe avec une infinie variété; il trouve, avec une fécondité intarissable, les nuances et les expressions les plus subtiles à la fois et les plus précises et, sans jamais rien emprunter qu'à la figure humaine, il caractérise si bien chacune de ces créations qu'un oeil un peu exercé n'hésite pas aujourd'hui encore à distinguer dans les fragments mutilés des chefs-d'oeuvre antiques le torse d'un Apollon d'un torse de Zeus. Toute la souplesse de l'art grec et de sa dialectique, tous ses efforts, jusqu'à l'époque de la perfection, ont eu pour objet de créer le type idéal de chaque dieu.
« Le Zeus de Phidias, la Héra de Polyclète ne sont pas des chefs-d'oeuvre isolés; ils résument le travail de plusieurs générations. Si dans la suite l'art ne s'asservit pas à des formules, s'il conserva même après les créations des maîtres toute sa liberté, il respecta néanmoins une sorte de type canonique, qui reste fixé pour chacune des divinités. » (Maxime Collignon, la Mythologie figurée de la Grèce). 
Le temple en Grèce n'est que l'enveloppe de la statue divine qui en est l'âme; il se dresse sur les promontoires ou au-dessus de la cité, découpant dans la splendeur de la lumière les lignes harmonieuses et mesurées de ses profils, montrant de loin aux voyageurs le sanctuaire où s'abrite la divinité protectrice, aux citoyens la demeure de la déesse poliade. Chaque cité, en effet, dans ce pays où le réseau serré des montagnes avait ménagé à chaque groupe humain des compartiments séparés, chaque cité a ses dieux particuliers, ses institutions, ses moeurs, et aussi son école d'art et ses artistes.  Le néo-classicisme l'a singulièrement méconnu et trahi en le figeant en formules stéréotypées et en modèles immuables. Jusque dans la décadence, il garde dans les écoles de Pergame, de Rhodes et de Tralles une grande vitalité : Alexandre étendit jusqu'au désert africain, et au delà de l'Iaxarte et de l'Indus, la civilisation des Grecs, et fonda, sur les ruines de l'empire des Perses, de nouvelles formes de gouvernement et des nationalités nouvelles. 

Rome.
Quand les Romains pénètrent à leur tour en Grèce et dirigent sur Rome de longs convois de statues enlevées aux acropoles et aux hippodromes des villes helléniques, ils subissent docilement son intluence :

Graecia capta forum victurem cepit, et artes 
Intulit agresti Latio.
jusque-là, en effet, Rome avait compté plus d'ingénieurs que d'architectes et d'agriculteurs soldats que d'artistes. La cuture étrusque, sensuelle et cruelle, ne lui avait guère légué que des formules, des rites et des superstitions; elle avait porté son principal effort sur les travaux d'utilité publique, la politique, le droit et la conquête :
Excudent alli spirantia mollius aera,
Tu regere imperio populos, Romane, memento.
Une fois en contact avec l'art de la Grèce, Rome l'imita lourdement et le dénatura pour se l'assimiler. Elle ne fit guère de création originale que dans l'architecture : sa statuaire, où le portrait tient la première place, mais qui eut aussi, sous l'empire, des fabriques do portraits, ne fut le plus souvent qu'une médiocre imitation de la sculpture grecque. Ses monuments publics, ses amphithéâtres et ses bains « étonnèrent longtemps par leurs grandes ruines les imaginations des hommes », qui vécurent sur le sol italien après le renversement définitif de la civilisation et de la religion antique. La puissante organisation de l'empire fit pénétrer jusqu'aux limites du monde connu les formes de l'art gréco-romain, de plus en plus dégénéré, il est vrai, mais d'où sortit l'art du Moyen âge, lentement transformé sous l'action de principes et d'éléments nouveaux. (André Michel).
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