| Un amphithéâtre, du grec amphi = autour, et theatron = théâtre, est un grand édifice dans lequel on donnait au peuple romain des combats de gladiateurs, des chasses de bêtes féroces, et quelquefois des naumachies. Les amphithéâtres avaient, comme l'indique leur nom, la forme d'un double théâtre : au centre, une place ovale appelée l'arène, était réservée pour les jeux, et tout autour s'élevaient des gradins montant presque jusqu'au faite du monument. L'intérieur de tout amphithéâtre était divisé en trois parties : l'arène, le podium, et les gradins. Le libre et large espace du milieu de l'amphithéâtre s'appelait arena (sable), parce qu'il était couvert de sable, pour empêcher les gladiateurs de glisser, et pour que le sang qui coulait dans le combat pût être facilement absorbé. Au milieu, on plaçait un autel pour sacrifier au dieu auquel l'amphithéâtre était consacré; mais cet autel était enlevé pour le moment du combat. La grandeur de l'arène n'était pas toujours en proportion avec celle de l'amphithéâtre; mais elle occupait en moyenne un tiers du moindre diamètre de l'édifice. On pense que des souterrains se trouvaient sous l'arène, au moins dans certaines parties; car les animaux de combat sortaient quelquefois de dessous terre à l'aide de divers mécanismes; et d'ailleurs, l'arène était parfois remplie d'eau, soit pour donner des naumachies (?), soit pour amener des crocodiles et autres amphibies qui s'attaquaient mutuellement. Des entrées dans l'arène étaient ménagées à chaque extrémité de ses deux axes; une porte particulière, nommée libitinensis (porte de mort), servait à enlever les gladiateurs mis hors de combat. L'arène était entourée d'un soubassement élevé de 4 ou 5 mètres, appelé podium, formant une plate-forme où l'on établissait quelques rangs de sièges portatifs pour les vestales, les sénateurs et les magistrats, le suggestus ou cubiculum, c.-à-d. la loge de l'empereur, et un siège à part pour la personne qui donnait les jeux, l'éditeur des jeux. Le podium protégeait le public contre les atteintes des bêtes féroces, ainsi qu'un fossé ou canal plein d'eau, nommé euripe, que l'on creusait souvent au pied, tout autour de l'arène. On ornait généralement le podium, à sa partie supérieure, d'une balustrad ou d'un treillis en métal. Les animaux féroces étaient renfermés dans des caveae ou carceres, substructions voûtées de ce soubassement. Derrière le podium commençaient les gradins des spectateurs (gradus) Un palier de circulation (praecinctio), appelé aussi balleus (baudrier, dont il affectait la forme), et auquel aboutissaient de nombreux escaliers, divisait les gradins en deux ou trois sections sur la hauteur. Dans la dernière précinction, au sommet, les sièges étaient de bois; là se plaçaient les pullati ou la plèbe. La portion la plus élevée de l'amphithéâtre était une colonnade ou galerie, sous laquelle les femmes pouvaient assister aux représentations, et dont une partie était encore occupée par des pullati. Enfin, tout à fait au sommet, il y avait une plate-forme étroite pour les ouvriers chargés d'étendre sur l'amphithéâtre un velarium et de le retirer. Chaque précinction était encore coupée verticalement, à de certains intervalles, par des espaces libres (scalae, scalaria, échelles, escaliers), qui servaient de passages aux spectateurs. La section comprise entre deux de ces passages portait le nom de cuneus (coin), parce que, semblable à un coin, elle s'élargissait graduellement du podium au sommet de l'édifice. Des officiers appelées cunearii, locarii, distribuaient les places et maintenaient l'ordre. Les entrées des gradins par les portiques extérieurs s'appelaient vomitoria. La façade extérieure des amphithéâtres était partagée en étages, garnir, chacun d'arcades, de colonnes, de pilastres plus ou moins nombreux, et quelquefois de statues. L'espace vide au-dessous des gradins formait des galeries voûtées (fornices, concamerationes), qui recevaient les promeneurs et étaient garnies de boutiques. Les Romains n'eurent d'abord que des amphithéâtres de charpente, construits temporairement pour le temps des jeux. Le plus ancien paraît avoir été celui de Scribonius Curion, dont Pline (Hist. nat., XXXVI; 24, § 8) a donné la description. II consistait en deux théâtres de charpente, tournant sur des pivots, de sorte qu'au moyen d'un mécanisme ils pouvaient se faire face et ne former qu'un seul bâtiment (De Caylus, Théâtre de Scribonius; dans les Mém. de l'Acad. des inscrip., t. XXIII). Jusqu'au temps de J. César, les combats de gladiateurs avaient eu lieu sur le Forum, et ceux de bêtes féroces du Cirque : pour ces derniers le dictateur fit construire en bois un théâtre cynégétique, qui fut appelé amphithéâtre de Denys d'Halicarnasse (XLIII, 22), parce qu'il était entouré de gradins, sans qu'il y eût de scène. Sous Tibère, sous Néron, on éleva encore des amphithéâtres de charpente, mais comme édifices temporaires et pour des jeux spéciaux. Sur la demande de l'empereur Auguste, Statilius Taurus bâtit le premier amphithéâtre de pierre, l'an 724 de Rome, dans le Champ de Mars, près du Cirque Agonal; mais les gradins n'en étaient que de bois. Cet édifice devint la proie des flammes au temps de Néron. Le second amphithéâtre de maçonnerie fut l'amphithéâtre Castrense, dont les ruines existent encore, et que l'on conjecture être du temps de Néron. On le trouve à l'extrémité orientale du mont Célius, tout près de la basilique de Ste-Croix-de-Jérusalem. Il était autrefois hors de la ville, et l'on croit qu'il servait soit aux exercices des soldats, d'où le nom de castrense (de camp), soit aux combats de gladiateurs par lesquels on habituait les jeunes recrues à la vue des blessures et du sang. Sa forme est une ellipse de 84 m sur 78, jadis entourée d'un cercle de 48 arcades à 2 rangs superposés. Il reste 18 arcades du rez-de-chaussée, et de faibles débris des arcades supérieures. Toute la construction est en briques. Vespasien surpassa ses prédécesseurs par l'érection de l'amphithéâtre Flavien (Colisée). Trajan en éleva un autre dans le Champ de Mars; cet édifice fut détruit par Hadrien. Les Étrusques ont appris aux Romains à faire des amphithéâtres; ils les creusaient dans le sol, afin d'éviter les substructions pour porter les gradins, ou bien ils choisissaient une gorge étroite, un ancien cratère de volcan dont le sol en pente formait des places naturelles pour les spectateurs. On a retrouvé deux amphithéâtres de ce genre, l'un à Paestum, dont l'arène a été établie à 3 m environ plus bas que le sol extérieur; l'autre à Sutrium, auj. Sutri, taillé dans un rocher qui domine le sol, travail contemporain du premier siècle de Rome. Il est représenté, en coupe, dans la fig. ci-dessous, afin qu'on en saisisse mieux la disposition. Le monument est de forme elliptique, et mesure 49,20 m sur 40,15 m. Le Colisée d'el-Jem, en Tunisie. Photos : © Angel Latorre, 2008.
Les amphithéâtres marquent le passage de la domination romaine dans les contrées où on les trouve. Les principales villes où des amphithéâtres furent érigés, sont : Albe ou Albano, Bologne, Canusium (Canosa), Capoue, Cumes, Garigliano, Otricoli, Paestum, Pompéi, Pouzzoles, Rimini, Todi, Vérone, etc., en Italie; Pola, en Dalmatie; en Sicile, Agrigente, Catane, Syracuse; en Espagne, Tarragone; dans les Gaules, Autun, Bordeaux, Fréjus, Lyon, Nîmes, Arles, Vienne, Saintes, Limoges, Périgueux, Poitiers, Béziers, Auxerre, Angers, Langres, Bourges, Cahors, Le Mans, Tours, et autres lieux; dans la partie des Gaules dont s'est formée la France, on en comptait trente-cinq, auj. presque tous détruits. Celui de Cran (Loiret), qu'on voit encore maintenant, n'avait de gradins que d'un côté, parce qu'il ne devait pas contenir un grand nombre de spectateurs. En Afrique, il y en avait sur plusieurs points de l'Algérie entre autres à Lambessa, à Cherchell, et, dans la province de Tunis, à Dimas, et à Tisdra (El-Djem). (Bachelet et Dezobry, 1877). Dans certaines salles de spectacle, chez les modernes, on appelle l'amphithéâtre un lieu élevé vis-à-vis de la scène, au-dessous des loges, et dont les gradins dominent le parterre. Dans quelques antres, c'est la partie la plus élevée, près du plafond, celle qu'occupent Les Monuments du bas peuple, et qu'on appelle quelquefois paradis. On donne encore, par abus du mot, et d'une manière peu exacte, le nom d'amphithéâtre au local garni de gradins élevés sur un plan circulaire, et même horizontal, où un professeur fait ses leçons : tels sont, à Paris, les amphithéâtres de l'École de Médecine, de la Sorbonne, du Muséum d'histoire naturelle, et du Conservatoire des arts et métiers. Enfin, dans les jardins, l'amphithéâtre est une décoration de gazon garnie de gradins, et où l'on place des vases à fleurs.
| En bibliothèque - Serlio, Architectura, Venise, 1663, in-fol.; Fontana, Anfiteatro Flavio, La Haye, 1725, in-fol.; Maffei, Degli Anfiteatri e singolarmente delle Veronese, Vérone, 1738, in-12; Paoli, Antichita di Pozzuali, Naples, 1768; Clérisseau, Antiquités de la France, Paris, 1778, in-fol.; Desgodets, les Édifices antiques de Rome, Paris, 1779, in-fol.; Alex. Delaborde, les Monuments de la France classés chronologiquement, Paris, 1816-26, in-fol.; Durand et Laval, Description des monuments historiques du Gard, Nîmes, 1853, in-4°; Pelet, Description de l'Amphithéâtre de Nîmes, Nîmes, 1853, in-8°, etc. | | |