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Ambrogio di Bondone, surnommé Giotto est un peintre, sculpteur et architecte, né à Vespignano, près de Florence, en 1276, selon Vasari, ou plutôt, selon la chronique de Villani rimée par Antonio Pucci, en 1266, mort à Florence le 8 janvier 1336. D'après une légende fort douteuse, recueillie par Ghiberti et Vasari, Giotto enfant aurait commencé par garder les chèvres de son père Bondone, et le peintre Cimabue, le surprenant à dessiner sur une pierre avec un charbon, émerveillé de son génie précoce, l'aurait emmené dans son atelier. Un ancien commentateur de Dante raconte différemment la légende : Giotto aurait été placé par son père chez un marchand de laine, et, passant tous les jours devant l'atelier de Cimabue, il aurait fini par s'y introduire. Quoi qu'il en soit, le futur rénovateur de l'art italien ne tarda pas à devenir célèbre. Ghiberti et Vasari lui attribuent, comme oeuvres de jeunesse, des peintures, aujourd'hui disparues, qui ornaient le choeur de la Badia de Florence. Peut-être eût-il été plus juste de les attribuer à don Lorenzo Monaco. Mais le premier ouvrage authentique où nous pouvons apprécier la force et la liberté d'inspiration de ce grand maître, ce sont les fresques exécutées à Assise, dans la basilique supérieure de San Francisco. Déjà Giunta de Pise et ses élèves, déjà aussi Cimabue et ses élèves florentins, Gaddo Gaddi, Filippo Rusuti, avaient travaillé à couvrir de fresques le choeur, les voûtes et les parties hautes de la nef. Selon Vasari, ce fut Fra Giovanni di Muro, général des franciscains de 1296 à 1304, qui appela Giotto à Assise, pour y peindre la vie de saint François. Mais il est bien probable qu'il avait dû y venir quelques années plus tôt, avec les élèves de Cimabue, pour terminer la série des compositions de l'Ancien et du Nouveau Testament; la Madone dans un médaillon qui domine la porte d'entrée, ainsi que les deux fresques de l'Ascension et de la Pentecôte, peuvent aisément lui être attribuées. On s'accorde généralement aujourd'hui à reconnaître que les vingt-huit fresques de la Vie de saint François, peintes aux deux murs de la nef et au revers de la façade, sont toutes de la main de Giotto. En voici l'énumération, en commençant par le mur de droite et du côté du choeur : 1 ° un Habitant d'Assise étend son manteau sous les pas de François; Saint François prêche devant les oiseaux. Ces fresques, qui inauguraient une manière de peindre neuve et vivante, tout appuyée sur l'observation de la nature, la précision expressive des attitudes et des traits, durent exciter l'enthousiasme des contemporains. C'était la première fois que l'on rompait aussi ouvertement avec la tradition byzantine, avec les thèmes de convention éternellement reproduits selon les mêmes règles, pour s'inspirer des récits populaires et des usages du temps. Les compositions de Giotto sont le parfait commentaire de la ravissante légende narrée par saint Bonaventure, où tout ce qui vit et tout ce qui aime se pénètre du charme de François. La simplicité des gestes, le naturel des attitudes, la fidèle imitation des types et des costumes de l'époque, un sentiment nouveau du décor et du paysage, toutes ces qualités inattendues éclatent merveilleusement dans l'oeuvre du ,jeune maître. Il n'est que juste cependant de reconnaître qu'un précurseur anonyme, encore rude et barbare, mais épris déjà de nature et de vérité, lui avait frayé la voie, quelque vingt ans plus tôt, en peignant, dans la sombre nef de la basilique inférieure, cinq histoires, aujourd'hui bien ruinées, de la vie du saint. Les fresques d'Assise étaient certainement terminées en 1298, lorsque le cardinal Jacopo Gaetani dei Stefaneschi, neveu du pape Boniface VIII, appela Giotto à Rome. Il y exécuta un certain nombre d'ouvrages dont plusieurs sont perdus ou ruinés, entre autres un Crucifix peint à la détrempe pour l'église de Santa Maria sopra Minerva, et les fresques de San Giorgio in Velabro, dont Stefaneschi avait été créé cardinal-diacre en 1295. Plus importantes sont les oeuvres laissées par Giotto dans la basilique de Saint-Pierre, la célèbre mosaïque de la Navicella, qui orne maintenant le vestibule de l'immense église (primitivement elle en décorait la façade), et le retable du maître-autel, conservé, depuis le XVIe siècle, dans la sacristie des chanoines. Ce retable, qui a la finesse d'une miniature, est peint à la détrempe sur fond d'or. Il se compose de trois panneaux gothiques, terminés par des pinacles, et d'un gradin, également en trois parties. Les grands panneaux sont peints sur les deux faces. Au centre de la face principale, le Christ bénissant trône au milieu de huit anges; sur les panneaux latéraux sont représentés le Crucifiement de saint Pierre et la Décollation de saint Paul. Au revers du panneau central on voit saint Pierre en costume pontifical, trônant entre deux anges; au pied du trône, le cardinal Stefaneschi, en vêtement de diacre, assisté de ses deux patrons, saint Jacques et saint Gaëtan, est conduit par saint Georges devant le prince des apôtres, auquel il offre à genoux un triptyque, figure abrégée du retable de Giotto; sur les panneaux latéraux sont figurés en pied les apôtres saint André et saint Jean Évangéliste, saint Jacques et saint Paul. Enfin, sur le gradin, la Madone, trônant entre deux anges, a pour cortège les douze apôtres, debout en des attitudes variées. D'après Baldinucci, le retable aurait été payé 800 florins d'or (et la mosaïque de la Navicella 2200), somme tellement énorme que nous sommes induits à douter de la véracité d'un pareil témoignage. Quoi qu'il en soit, il faut reconnaître que cette oeuvre considérable marque une date dans l'histoire de la peinture italienne, et dans le développement du génie de Giotto. Habitué de plus en plus aux conceptions de la fresque, il en transportera malgré lui les amples formes dans ses retables à venir; jamais plus il ne retrouvera cette délicatesse et cette minutie du détail unies à l'acuité du sentiment, qui seront l'apanage de l'école siennoise; ici seulement, et dans la Sainte Cécile du musée des Offices, il a su joindre à la finesse du miniaturiste l'austère et forte simplicité dont ses fresques offriront l'inimitable exemple. Il est à croire que Giotto et Dante se rencontrèrent à Parme au moment du jubilé. Leur amitié sans doute était déjà ancienne. Moins de deux ans après, à Florence, Giotto en perpétuait le souvenir, en traçant le portrait du grand poète aux murs de la petite chapelle du palais du podestat (aujourd'hui musée National). Les fresques de cette chapelle, couvertes de badigeon et tristement mutilées, n'ont été remises en lumière qu'au milieu du XIXe siècle; leurs débris ont encore un charme indicible. Au-dessus de la porte d'entrée, Giotto avait peint les Supplices infernaux, autour de la figure énorme d'un Satan velu et caricatural. Au mur de fond, autour d'une haute fenêtre, il avait distribué les Joies du Paradis, introduisant parmi les élus plusieurs de ses contemporains, parmi lesquels Charles de Valois, Corso Donati, Brunelto Latini, Dante enfin, dont le profil jeune et grave sous les plis de son capuchon frappe d'abord les regards; il tient un livre de la main gauche, et, de la droite, un rameau de grenade en fleur. Enfin, sur la paroi opposée aux fenêtres, il avait décrit harmonieusement l'Histoire de sainte Marie-Madeleine. Dante fut exilé de Florence en 1302 et Giotto ne dut le revoir qu'à de lointains intervalles. Une tradition fort sérieuse les réunit à Padoue en 1306 et attribue à l'influence de Dante le choix d'une partie des compositions dont Giotto décora la chapelle de Santa Maria dell' Arena. Avant de décrire cette admirable série de fresques, mentionnons, sans nous y arrêter, la légende d'un séjour de Giotto à Avignon, entre les années 1305 et 1316, légende invraisemblable, fabriquée de toutes pièces par Vasari. C'est en 1303 qu'Enrico Scrovegno, créé patricien de Venise, fit ériger à Padoue une chapelle consacrée à la Vierge sous le titre de la Nunziata. La décoration intérieure de la chapelle de l'Arena. (Source : SRCS). Peut-être Giotto fut-il l'architecte de la chapelle avant d'en être le décorateur; en l'absence de tout document, cette conjecture ne peut s'appuyer que sur l'harmonie parfaite de la forme de l'édifice avec sa décoration intérieure. C'est une simple nef à voûte cintrée, terminée par un grand arc ouvrant sur l'abside. La paroi de droite est percée de six fenêtres, et une triple baie ogivale s'ouvre sur le mur de façade ; toute une large surface, où le regard n'est détourné par aucun motif de sculpture, s'offre librement aux inventions de la fresque. Giotto, se conformant aux antiques usages, divisa les murs de la nef en larges quadrilatères étagés sur trois rangs, où il peignit les Histoires de la Vierge et du Christ. Il enveloppa ses compositions de bordures à feuillages variés, d'où se détachent symétriquement des médaillons avec des bustes de personnages évangéliques. Au-dessous, sur un soubassement feint, coupé de pilastres, il distribua quatorze figures allégoriques de Vertus et de Vices, peintes en camaïeu. Au sommet de l'arc triomphal qui ouvre sur le choeur trône le Sauveur adoré par les anges; sur la paroi d'entrée se déploie le Jugement dernier. La voûte à fond d'azur semé d'étoiles d'or est divisée en deux champs, d'où ressortent dix médaillons circulaires représentant d'un côté la demi-figure du Christ bénissant, de l'autre celle de la Vierge tenant son fils, parmi des bustes de prophètes. La série des scènes évangéliques commence à droite de l'arc triomphal, se continue sur la paroi qui fait face, recommence et se continue de même par deux fois, pour se terminer à gauche du choeur. Voici l'indication de ces scènes : 1 ° Joachim chassé du Temple;L'influence de Dante se trahit dans la vaste composition du Jugement dernier et mieux encore dans les figures allégoriques en camaïeu, qui simulent à la base des fresques évangéliques deux rangées de bas-reliefs. Ces quatorze figures de Vertus et de Vices qui se font face, les Vertus à droite et les Vices à gauche, comptent parmi les créations les plus parfaites du génie de Giotto. On pourrait leur chercher quelques modèles, soit parmi les miniatures antiques (illustrations de la Psychomachie de Prudence), soit parmi les sculptures du Moyen âge (statues et bas-reliefs de Nicolas et de Jean de Pise); mais il y a un abîme entre l'oeuvre du maître et celles de ses devanciers. La simplicité, la dignité merveilleuses de ces figures aux draperies flottantes révèlent en leur auteur non seulement un esprit subtil, habitué aux spéculations morales et philosophiques, mais un oeil de peintre et de sculpteur, instruit par la contemplation des chefs-d'oeuvre de l'art antique. Des inscriptions latines, aujourd'hui presque entièrement détruites, éclairaient le symbolisme de ces figures, dont voici l'énumération (chiffre impair sur une face, chiffre pair suivant, en vis-à-vis) : 1° l'Espérance;Après avoir terminé, à Padoue, les peintures de l'Arena, Giotto fut chargé de décorer la salle capitulaire du couvent de Saint-Antoine. Il y peignit debout, en des niches feintes, des figures de prophètes et de saints franciscains et la Mort sous forme de squelette animé, puis trois compositions cintrées, les Stigmates de saint François, le Martyre de cinq moines franciscains au Maroc et l'Annonciation; ces fresques sont à demi ruinées aujourd'hui. Selon Vasari, il aurait travaillé ensuite à Vérone, mais rien n'y subsiste de sa main. Peut-être se rendit-il aussi à Ferrare pour gagner Ravenne où Dante l'attendait; il y peignit une voûte de chapelle dans l'église de Saint-Jean Évangéliste : les quatre docteurs de l'Église, avec les quatre animaux évangéliques, y font cortège à l'Agneau mystique. Enfin, après de longues années de séjour dans le Nord de l'Italie, il retourne à Florence et va de nouveau s'établir à Assise. C'est pendant ce second séjour à Assise, qu'il est impossible de dater exactement, que Giotto, pour glorifier saint François, peignit quatre fresques allégoriques qui sont une des plus pures inspirations de l'art chrétien. Ces fresques, de forme triangulaire, couvrent, dans la basilique inférieure, la voûte à ogive très basse qui domine le maître-autel et le tombeau du saint. Elles représentent le Mariage de François avec la Pauvreté, le Triomphe de la Chasteté, le triomphe de l'Obéissance et la Gloire de saint François. Elles sont subtiles, mais elles se comprennent sans qu'il soit bien nécessaire de recourir aux strophes latines, d'ailleurs trop effacées, inscrites dans leur bordure (Thode les a publiées le premier). Toute l'oeuvre franciscaine y est résumée avec une grâce naturelle, une réalité où le symbole et la vie se confondent; c'est la parfaite exaltation du plus sublime idéal religieux que le Moyen âge ait connu. Giotto continua de peindre dans la basilique d'Assise. Il décora tout le bras droit du transept de neuf scènes charmantes de l'Enfance du Christ, où il reprenait avec une délicatesse nouvelle ses immortelles compositions de Padoue. A l'extrémité du transept, il peignit en trois fresques deux miracles opérés par saint François : la Résurrection d'une jeune fille et d'un jeune garçon; puis une figure de Saint François touchant de la main un squelette couronné, allégorie franciscaine du Triomphe de la mort. Enfin, dans une chapelle voisine, il recommença l'Histoire de sainte Madeleine, telle qu'il l'avait peinte à Florence au palais du Podestat. Quand Giotto revint-il à Florence? Nous l'ignorons, et ce que nous pouvons dire seulement, c'est qu'il peignit, dans cette période de sa vie antérieure à l'an 1330, la série des fresques de Santa Croce. La construction de l'église franciscaine de Santa Croce avait été commencée en 1294, et, parmi les familles nobles qui y contribuèrent de leurs deniers, il faut citer les Peruzzi, les Bardi, les Giugni et les Spinelli, qui firent décorer par Giotto leurs quatre chapelles. De ces chapelles, deux seulement ont conservé leurs fresques, mais dans un état lamentable; d'abord recouvertes de chaux, puis nettoyées et cruellement restaurées de 1841 à 1863, ces compositions d'un dessin superbe ont été repeintes et même par endroits complétées. Dans la chapelle Peruzzi, Giotto peignit l'Histoire de saint Jean-Baptiste et de saint Jean Évangéliste. Il représenta d'un côté : 1 ° Zacharie recevant de l'ange la promesse d'un fils;de l'autre : 1° Saint Jean à Pathmos;A la voûte sont les Symboles des Évangélistes. Dans la chapelle Bardi, il résuma en six peintures l'Histoire de saint François. Ce sont : 1° Saint François repoussé par son père;Aux cotés de la fenêtre sont les figures de sainte Claire et de sainte Élisabeth, de saint Louis de Toulouse et du roi de France saint Louis; à la voûte les images symboliques des vertus franciscaines, Pauvreté, Chasteté, Obéissance et Humilité. Malgré les dégâts de toute sorte dont ces fresques ont eu à souffrir, on y retrouve au plus haut point les qualités maîtresses de Giotto, la simplicité majestueuse des groupes, l'expression profonde et concentrée du sentiment. La Résurrection de Drusiane et l'Ascension de saint Jean montrent, près d'un siècle et demi par avance, la belle et austère noblesse des figures de Masaccio. Les compositions de la vie de saint François sont, on peut le dire, des oeuvres classiques, que Ghirlandajo et Benedetto da Majano ont imitées sans pouvoir les surpasser. Giotto, en revenant ainsi sur les oeuvres de sa jeunesse, a su ajouter à la fraîcheur et à la sincérité de ses compositions d'Assise une sérénité, une émotion religieuse qu'on ne peut décrire; il les a enveloppées de lumière et de grandeur. Ce sont les dernières grandes fresques qui nous restent de sa main; les fragments provenant du Carmine (qu'on lui attribue à Londres, à Liverpool et à Pise) paraissent d'un de ses élèves. Il semble inutile, en l'absence de tout document, de mentionner les nombreux voyages que Vasari fait entreprendre à Giotto; un seul de ces voyages est confirmé par les archives : le 20 janvier 1330, le roi Robert l'appelait à Naples, où il demeurait jusqu'en 1333. Parmi toutes les fresques de style giottesque conservées à Naples, il paraît difficile de lui en attribuer quelqu'une de façon précise, sauf peut-être une Multiplication des pains et des poissons, dans une salle ayant fait partie du couvent de Santa Chiara. - Saint Jean l'Évangéliste (source : Web gallery of art). De retour à Florence en 1333, Giotto fut presque entièrement absorbé par ses travaux d'architecture et de sculpteur. C'est cependant dans cette dernière période de son activité qu'il dut peindre la grande fresque du palais du Podestat, mentionnée par Ghiberti et par Vasari, où l'on voyait l'image symbolique du Gouvernement siégeant, le sceptre en main, entre les quatre vertus, Force, Prudence, Justice et Tempérance, création originale qui donna naissance aux admirables peintures d'Ambrogio Lorenzetti à Sienne. Mais, entre tant d'années de voyages et de travaux, il faudrait pouvoir distribuer de nombreuses peintures à la détrempe, dont plusieurs subsistent encore dans les églises et dans les musées. A défaut d'un classement chronologique impossible, on peut tenter de les cataloguer par ordre de sujets. En première ligne viennent les Crucifix, ouvrages de grande dimension où Giotto le premier s'efforça de ramener à des formes justes et vraiment humaines le corps douloureux et tordu des Christs byzantins. Le plus ancien de ces Crucifix est à Padoue, dans la chapelle de l'Arena; d'autres sont à San Marco, à Ognissanti et à San Felice de Florence. Ensuite il faut citer les Madones. Celle de l'Académie des beaux-arts de Florence, assise sur un trône avec l'Enfant sur ses genoux, au milieu d'anges et de saints, est de formes épaisses et lourdes, bien différente des figures suaves que, vers la même époque, Duccio peignait à Sienne; mais les anges agenouillés à ses pieds et lui présentant des vases de fleurs sont charmants. La Vierge du musée Brera de Milan, plus souriante, semble un portrait de petite bourgeoise florentine jouant avec son poupon. C'est le panneau central (signé Opus magistri Jocti de Florentia) d'un retable gothique dont les quatre volets, avec les figures des saints Pierre et Paul, des archanges Gabriel et Michel, et le gradin, avec les bustes du Christ mort, de la Vierge et de saint Jean, du Précurseur et de la Madeleine, sont à la Galerie communale de Bologne. Le retable de Santa Croce, également signé de Giotto, est une oeuvre plus importante, dont Fra Angelico s'est inspiré. Il représente en cinq panneaux le Couronnement de la Vierge, parmi les choeurs des anges, des patriarches et des saints. Un panneau très précieux, la Mort de la Vierge, ayant appartenu à l'église d'Ognissanti, fait aujourd'hui partie de la collection Martin à Londres. Parmi les compositions prises à l'Évangile, il y a une Cène du Christ avec les apôtres. Enfin, parmi les tableaux ayant trait à l'histoire des saints, le plus ancien, le retable de Saint-Pierre de Rome, a été décrit dans cet article; un autre, une image de sainte Cécile entourée de huit petites histoires de sa vie et de son martyre, est faussement attribuée à Cimabue dans la galerie des Offices de Florence; et le Louvre possède le beau retable du couvent de San Francesca de Pise, représentant les Stigmates de saint François. Les petits tableaux de la vie du Christ et de la vie de saint François, exposés à l'Académie de Florence sous le nom de Giotto, sont l'oeuvre de Taddeo Gaddi. 1 ° la Création de l'homme;Ensuite viennent : Sur la troisième paroi : Enfin, sur la paroi qui fait face à la cathédrale : 20° la Sculpture;(Les cinq derniers reliefs sont l'oeuvre de Luca dalla Robbia). L'expression, d'une profondeur et d'un clarté saisissantes, la simple vérité des mouvements et des proportions, tout dans ces bas-reliefs si sobres et si nobles rappelle les meilleures qualités des fresques de Giotto. Certaines figures, telles que le pasteur assis au seuil de sa tente dont il entrouvre le rideau, ou que la jeune femme qui s'approche du métier à tisser, semblent appartenir à l'art grec du Ve siècle, ou à l'art français du XIIIe, par leur pure gravité et leur étonnante intensité de vie. Les bas-reliefs de l'étage supérieur, qui représentent les Vertus et les Sciences, par leur facture plus sèche et plus étroite, décèlent une autre main. Giotto mourut à Florence et fut enseveli avec pompe dans la cathédrale dont il avait été l'architecte. De sa femme, Ciuta di Lapo di Pela, il avait eu huit enfants, dont l'aîné, Francesco, fut inscrit en 1351 dans la compagnie des peintres de Florence. D'après le témoignage des anciens auteurs, le grand artiste fut d'humeur joyeuse, vrai fils de Florence, volontiers enclin aux paroles un peu libres, aux réparties bouffonnes. Sa laideur était célèbre, et il la raillait tout le premier. Cet esprit si clair et sensé n'allait pas naturellement aux rêves mystiques. Il nous reste même de lui un poème sur la pauvreté, de très petite inspiration d'ailleurs, qui plaisante l'épouse de saint François, si purement célébrée par Dante. Aussi bien est-ce à l'amitié de Dante et à la profonde influence exercée par le génie du poète sur celui du peintre que l'on peut attribuer une part des plus hautes conceptions du rénovateur de l'art florentin. L'âme de Dante vit dans les allégories d'Assise. Génie créateur dans toute la force du terme, Giotto a inauguré l'ère de la Renaissance par l'observation sincère de la nature, par la recherche constante de la vie. Comme les maîtres de cette antiquité qu'il n'a pu qu'entrevoir, et dont il devina parfois les oeuvres harmonieuses, il est d'autant plus grand qu'il est plus simple. Il trouve le geste vrai, qui exprime la passion profonde; il enveloppe ses figures de draperies d'une ampleur sculpturale. Mais il faut bien dire que ces figures si expressives, aux profils parfois admirables, sont souvent trop massives et trop trapues; Giotto sacrifie volontiers l'élégance pour arriver à la force. Critiques insignifiantes, si l'on songe à l'oeuvre énorme laissée par le maître, et à son influence extraordinaire. Il serait inexact de dire; comme on l'a fait parfois, qu'il a tiré la peinture italienne du néant; on apprécie mieux aujourd'hui le travail des précurseurs du XIIIe siècle; mais de cet art encore froid et incertain Giotto a fait un être vivant et passionné; il a créé une tradition nouvelle, qui, pendant près de deux siècles, a pénétré toute l'Italie. La postérité de Giotto est immense; toutes les écoles de peinture qui se sont développées dans les centres de la civilisation italienne relèvent de lui, de Florence à Venise, en passant par Bologne, Modène, Ferrare, Vérone, et de Florence à Naples, en passant par l'Ombrie et par Rome. Enumérer les élèves de Giotto serait en quelque sorte dresser un catalogue de la peinture italienne jusqu'au milieu du XVe siècle; Masaccio et Fra Angelico se souviennent fidèlement de ses fresques; Ghirlandajo et Raphaël ne dédaignent pas de s'en inspirer. Nul artiste, peut-être, à l'exception de Raphaël, n'a exercé une royauté plus durable, et aujourd'hui encore c'est à l'oeuvre du vieux maître de Florence qu'il nous faut recourir pour comprendre toute la hauteur de philosophie mystique et toute l'ardeur de vie du Moyen âge italien. (A. Pératé). |
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