| Le mot Colisée, qui est aujourd'hui d'un usage courant pour désigner le monument le plus célèbre de l'antiquité romaine à Rome, dont le nom véritable est amphithéâtre Flavien, se trouve employé pour la première fois par Bède, écrivain du VIIIe siècle, dans cette prophétie : Quandiu stabit Colyseus, stabit et Roma quando cadet Colyseus, cadet et Roma; quando cadet Roma, cadet et mundus. Coliseum, Colosseum ou Colyseus, n'appartient donc pas à la latinité classique; mais l'origine du mot ne paraît pas douteuse. Il veut dire l'édifice « colossal » par excellence, l'adjectif colosseus du latin classique signifiant tout objet de proportions gigantesques et qui, par l'énormité même de ses dimensions, rappelle le fameux colosse de Rhodes, l'une des Sept merveilles du monde. Il se peut aussi que l'endroit même ait reçu ce nom en souvenir de la statue de bronze colossale représentant Néron en Soleil et commandée par cet empereur au sculpteur Zénodore pour l'ornement de sa Maison d'Or qui s'étendait dans la plaine entre le Palatin et l'Esquilin, là même où s'élèvent aujourd'hui les ruines du Colisée. Quoi qu'il en soit (et la première étymologie paraît la plus probable), le Colisée ou l'amphithéâtre Flavien a été commencé sous le règne de Vespasien après la guerre de Judée, à l'endroit où était l'étang des jardins de Néron (stagna Neronis); il a été achevé et consacré par son fils Titus en 80; le nom de Flavien qu'on donne à cet amphithéâtre rappelle le nom de famille de ces deux empereurs, Flavius. Les ruines du Colisée (Amphithéâtre flavien). Comme tous les amphithéâtres, le Colisée servait aux combats de gladiateurs et aux chasses des bêtes féroces ; tout le sous-sol de l'arène, comme l'ont montré les fouilles commencées dès la fin du XIXe siècle, était machiné de manière à faire sortir de terre les bêtes et les hommes, ou de manière encore à transformer l'arène en un vaste bassin, pour offrir aux spectateurs le plaisir des combats nautiques ou naumachies. Plusieurs fois ravagé par l'incendie et toujours restauré avec une grande magnificence, le Colisée servit aux plaisirs barbares des Romains jusqu'au commencement du VIe siècle; mais après les divers pillages dont Rome fut le théâtre à cette époque et l'abandon définitif de la ville par les empereurs retirés à Constantinople, le Colisée partagea le sort malheureux de tous les monuments romains. Du XIe au XIVe siècle, il fut transformé en château fort par les Frangipani et les Annibaldi. Quand ces nobles-brigands en eurent été expulsés, le pauvre colosse de pierres, qui avait déjà subi bien des affronts, fut traité avec le vandalisme dont la Renaissance usa trop souvent pour les monuments antiques : il fut transformé en une gigantesque carrière. Les marbres du Forum étaient calcinés dans les fours à chaux; les blocs de travertin du Colisée étaient débités pour les travaux de Rome. On cite les palais de Venise, de la Chancellerie, Farnèse et le port de Ripetta, comme ayant été construits avec des matériaux pris à l'amphithéâtre Flavien. Ce vandalisme inconscient ne prit fin qu'avec le pontificat de Benoît XIV (XVIIIe siècle), qui sauva le Colisée en le consacrant à la passion de Jésus en souvenir des martyrs chrétiens qui y avaient péri. Les papes Pie VII, Léon XII, Pie VIII, ont fait entreprendre de grands travaux de soutènement, murs de briques, arcs-boutants, etc., pour conserver ce que la pioche des démolisseurs barbares n'avait pas encore entamé. Toute la décoration intérieure de l'édifice a aujourd'hui disparu; mais on aperçoit très nettement encore les gradins, les travées, les escaliers. A l'extérieur, toute la partie qui s'étend vis-à-vis l'arc de Constantin et, au pied du Caelius, c.-à-d. plus d'un tiers de l'édifice, est aux trois quarts ruiné; l'autre partie, plus de la moitié, qui s'étend en face des pentes de l'Esquilin, est conservée à peu près dans son intégrité. Tout a été dit sur l'effet saisissant que produit cette gigantesque carcasse de pierre, si belle avec ses blocs de travertin dorés aux rayons du soleil depuis dix-neuf cents ans. « C'est, dit Lamartine, la trace gigantesque d'un peuple surhumain, qui élevait, pour son orgueil et ses plaisirs féroces, des monuments capables de contenir toute une nation. » Quelques chiffres donneront une idée de ces dimensions qui effraient, si l'on peut dire, l'imagination, mais qui produisent à l'oeil le plus harmonieux effet à cause de la justesse générale des proportions. La circonférence extérieure de l'édifice est de 524 m; le grand axe a 187,77 m; le petit, 155,64 m; l'arène, 85,75 m sur 52,62 m; la hauteur totale des quatre étages extérieurs est de 48,50 m. Il y avait environ 87 000 places assises et 20 000 places debout sur la terrasse qui dominait les gradins. (G. L.-G). - Le Colisée de nuit. Photos : The World Factbook. | |