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Histoire du département de l'Ain
jusqu'en 1900
[Géographie de l'Ain].
Le département de l'Ain, comme la plupart des autres départements français, a été formé à la Révolution.  Il a été constitué par le décret du 25 janvier 1790 avec les anciennes provinces de Bresse, du Bugey, de Dombes, de Valromey, une partie du pays de Gex et du Franc-Lyonnais. 

Comme de petits ruisseaux forment de grandes rivières, de petits pays, Bresse, Bugey, Valromey, Gex, ont formé le beau département de l'Ain. C'est en partie la nature qui a suggéré ces divisions assez marquées pour donner à chacun de ces pays une physionomie distincte. L'extrémité sud du Jura s'avançant comme une péninsule entre le Rhône et l'Ain, c'est le Bugey; la vallée de l'Ain, le plateau qui de l'Ain s'étend jusqu'aux bords de la Saône, c'est la Bresse, pays fertile, et (au sud) la Dombes, le pays des étangs. Ces pays ont eu de tout temps des rapports nécessaires; mais la Bresse et le Bugey présentent une grande dissemblance de moeurs et d'usages.

A l'époque gauloise, le Bugey était habité par les Séquanes, ce peuple si puissant qui occupait toute la chaîne du Jura; les Ambares habitaient la vallée de l'Ain. C'est dans ce pays que Jules César arrêta l'émigration des Helvètes. Il avait massé ses troupes sur les hauteurs de Sathonay, et atteignit les Tigurins au moment où ils s'apprêtaient à franchir la Saône : le point où s'engagea l'action a été déterminé entre Trévoux et Riottier. Les Helvètes repoussés, le libérateur du pays ne tarde pas à en devenir le maître, et la colonisation romaine fit de rapides progrès surtout dans le Bugey, dont une riante vallée, la vallée du Seran, ouverte au midi, a conservé le nom de Valromey (Val-Romain).

Des voies romaines sillonnèrent le pays dans tous les sens. L'une allait de Lyon à Mâcon par la rive gauche de la Saône; une autre, à Genève et à Besançon en suivant la rive droite du Rhône. Cette dernière se bifurquait à Montluel : une branche traversait l'Ain à la hauteur de Chazey, passait à Belley et à Seyssel, où elle traversait le Rhône, et continuait jusqu'à Genève. Les archéologues ont reconnu et étudié beaucoup de vestiges antiques, — cippes, autels, tombeaux, vases, — à Seyssel, à Brou, à Montmerle, à Gex, et surtout à Belley, Briord, Vieu, qui avaient des temples et des édifices remarquables. Deux aqueducs sont assez bien conservés, l'un à Vieu, l'autre à Groslée. A Izernore subsistent trois piliers d'un temple, décorés de colonnes d'ordre toscan : ce temple a donné lieu à de nombreuses et savantes discussions. On a en outre découvert dans la même localité des bains publics dont les substructions, connues depuis 1784, ont été de nouveau explorées en 1863. Izernore fut, tout l'indique, une cité importante à l'époque gallo-romaine.

Après la chute de l'Empire romain, le territoire du département actuel de l'Ain fut occupé par les Burgondes et fit partie du grand royaume qu'ils fondèrent. C'est à Ambérieu qu'aurait été faite, paraît-il, la rédaction de deux titres de la loi Gombette (ou loi de Gondebaud), promulguée à Lyon en 507 par Sigismond. Deux fils de Clovis, Clotaire et Childebert, soumirent la Bourgogne (534), et le pays entra ainsi dans le vaste royaume des Francs. Par leur situation, la Bresse, le Bugey, la Dombes, qui commençaient à porter ces noms d'origine germanique, échappaient aux grands mouvements de peuples. Mais ils étaient sur la limite des grandes vallées, et les Sarrasins, les Magyars même arrivèrent jusqu'à eux pour y exercer leurs ravages.

Dans le démembrement de l'empire de Charlemagne, ces pays échurent au fils aîné de Louis le Débonnaire, l'empereur Lothaire, puis, après sa mort, à Charles le Chauve. Celui-ci en forma un duché qui, avec Lyon, fut donné à Boson et devint l'origine du deuxième royaume de Bourgogne, possédé par les descendants de Boson jusqu'à Rodolphe III le Fainéant. Ce dernier laissa ses états, désignés dès lors sous le nom de royaume d'Arles, à l'empereur Conrad le Salique (1033); de là, l'origine des droits que les Césars allemands revendiquèrent sans cesse sur ces pays. Mais la puissance des empereurs d'Allemagne tomba avec Frédéric II; tout lien avec le Saint-Empire fut rompu, et l'on ne vit plus dans la Bresse, la Dombes et le Bugey, que des grands fiefs formés déjà depuis longtemps : seigneuries de Baugé, de Villars, de Coligny. 

Les sires de Thoire principalement jouissaient de prérogatives souveraines et du droit de battre monnaie; ils construisirent des châteaux sous les murs desquels vinrent s'abriter des populations, Montréal, Arbent, Brion, Blye, Villars dans la Dombes, Poncin, la plus belle des résidences seigneuriales du Bugey, le siège de leur chambre des comptes. Les Thoire s'allièrent aux Villars, et alors commença la famille des Thoire-Villars. Les sires de Coligny comptaient parmi les plus puissants, et leur famille devait plus tard s'illustrer par d'éclatants services rendus à la France (Jacques de Coligny, prévôt de Paris; Gaspard de Coligny, maréchal de France; l'amiral de Coligny, son frère, qui l'a fait oublier). 

Il faudrait citer encore, pour avoir un tableau exact de la féodalité en ces provinces, les seigneurs de Gex, les évêques de Belley, princes du Saint-Empire, les abbés de Saint-Rambert, d'Ambronay, de Nantua. Peu de pays d'ailleurs possédèrent plus de prieurés et d'abbayes : la chartreuse de Portes attira par sa renommée saint Bernard et Louis le Jeune, qui gravirent les sentiers escarpés de ses hautes montagnes. Un certain nombre de villages de la Dombes qui, des seigneurs de Villars, puis des sires de Beaujeu, passèrent à l'Église de Lyon, obtinrent de conserver leurs anciennes franchises et formèrent une petite enclave qui subsista jusqu'à la Révolution sous le nom de Franc-Lyonnais. Les communes actuelles de Genay et de Saint-Didier-de-Formans, dans le département de l'Ain, en faisaient partie.

En 1292, la seigneurie de Baugé ayant passé dans la maison de Savoie, les princes de cette maison étendirent peu à peu leur domination sur la Bresse et le Bugey. La Dombes resta en dehors et, des seigneurs de Beaujeu, des seigneurs de Thoire-Villars, passa au connétable de Bourbon. Confisquée après la trahison du connétable et donnée à Louise de Savoie, mère de François Ier, elle fut rendue à Louis de Bourbon-Montpensier et passa par mariage dans la famille d'Orléans : la grande Mademoiselle donna la Dombes au duc du Maine, et le second fils du duc du Maine la céda à Louis XV en échange d'autres terres.

Ainsi la Dombes n'avait pas cessé d'appartenir à des seigneurs et à des princes français. La Bresse et le Bugey, le pays de Gex après être resté près de trois siècles sous la domination de la maison quasi-française de Savoie, furent cédés à la France par le traité de Lyon du 17 janvier 1601, obtenu par la fermeté et l'habileté de Henri IV.

Les rois respectèrent les privilèges de ces petits pays qui ne pouvaient leur porter ombrage. Ainsi la principauté de Dombes conserva jusqu'en 1771 son parlement, qui datait de 1523; les privilèges du Franc-Lyonnais furent encore confirmés par Louis XV en 1716. Trévoux avec son parlement possédait un hôtel des monnaies et s'était fait une réputation dans le monde des lettres par l'imprimerie qui fit paraître le fameux Dictionnaire de Trévoux, puis par le Journal de publications des jésuites. La première édition du Dictionnaire est de l'année 1704. Les traditions de science et de travail ne sont pas d'ailleurs oubliées à Trévoux, où il se trouve encore de dignes continuateurs des savants du XIXe siècle.

A la veille de la Révolution, au point de vue civil, le territoire qui allait former de département de l'Ain se partageait entre la généralité de la Dombes ou de Trévoux, pays d'élection, c.-à-d. où les impôts étaient répartis par les officiers royaux, et les élections de la Bresse, du Bugey, du Val Romey et de Gex, enclavées dans les bailliages de la Bourgogne (L'Organisation financière sous l'Ancien Régime),. La Bourgogne était pays d'état, c.-à-d. que la répartition des impôts était faite par les états de la province; mais la Bresse et le Bugey avaient leurs états particuliers indépendants des états de Bourgogne, et le Val Horney et le Gex étaient soumis au régime des pays d'élection. 

Au point de vue judiciaire, les divers pays formaient le grand bailliage de la Bresse, ressortissant au parlement de Dijon. Le parlement de Trévoux avait été supprimé en 1771. 

Au point de vue ecclésiastique, ils n'appartenaient pas entièrement à l'Eglise de France. La Dombes, la Bresse, une partie du Bugey faisaient partie de l'archevêché de Lyon et de l'évêché suffragant de Mâcon; mais ni l'évêché de Sainte-Claude, qui s'étendait sur le Bugey septentrional, ni celui de Belley, qui comprenait le Val-Romey et une partie du Bugey méridional, ne prenaient part au gouvernement temporel de l'Eglise de France; ils faisaient leur don gratuit au roi séparément, enfin le pays de Gex et le territoire de Chézery relevaient de l'évêché de Genève, qui, tout en étant suffragant de Vienne, n'était pas un évêché français.
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Personnages célèbres

XVIe siècle. — Gaspar de Coligny, maréchal de France sous François Ier.— Gaspard de Châtillon, sire de Coligny , fils du maréchal, n'appartient au département de l'Ain que par ses biens patrimoniaux, car il naquit à Châtillon-surLoing (1517). Amiral de France, défenseur de Saint-Quentin (1557), chef du parti protestant pendant les guerres civiles, il fut tué pendant le massacre de la Saint-Barthélemy (1572).

XVIIe siècle. — Claude Favre de Vaugelas, grammairien célèbre, membre de l'Académie française, a laissé des Remarques sur la langue française.

XVIIIe siècle et XIXe siècles. — Joseph Jérôme Le Franc de Lalande , astronome illustre, né à Bourg-en-Bresse en 1732, mort en 1807. — Lépine, horloger célèbre, né à Chalex en 1720. — Joubert (1769-1799), né à Pont-de-Vaux, général des armées de la République. En 1798, il s'efforça vainement d'arrêter la retraite de l'armée française, pressée par les Russes de Souwaroff. Il périt glorieusement à la bataille de Novi (15 août 1799). — Brillat-Savarin, né à Belley (1755-1826), magistrat et spirituel auteur de la Physiologie du goût. — Amédée Girod de l'Ain (1781-1842), magistrat et homme politique. — Jean-Baptiste Vianey , curé d'Ars, célèbre par sa piété, mort en 1859. — Edgar Quinet, né en 1803, écrivain et homme politique, — Amédée Bonnet (1809-1858), médecin.

En 1791, fut constitué le département de l'Ain, avec les neuf districts de Bourg-en-Bresse, Trévoux, Montluel, Pont-de-Vaux, Châtillon (sur Chalaronne), Belley, Saint-Rambert, Nantua et Gex. Le Consulat, lors de l'institution des préfets, établit la division actuelle en sous-préfectures. Pendant le Premier Empire, l'arrondissement de Gex fut distrait de l'Ain et donné au département du Léman.

Le premier traité de Paris (30 mai 1814) laissa ce département à la France, moins les territoires de la République de Genève; l'arrondissement de Gex s'étendait alors jusqu'au bord même du lac; mais il fut stipulé que, pour assurer les communications entre Genève et les autres parties de la Suisse situées sur le Léman, la France laisserait à la confédération helvétique le libre usage de la route par Versoy, et l'acte final du congrès de Vienne (9 juin 1815) décida que la frontière douanière de la France serait établie en deçà de cette route. 

Après les Cent jours, le second traité de Paris (19 et 20 novembre 1815) rétrocéda à la Sardaigne les parties de la Savoie qu'avait laissées à la France celui de 1814. Le département du Léman disparut et l'arrondissement de Gex fit retour à celui de l'Ain, mais bien diminué, car toute la bordure du lac était cédée à la Suisse pour être réunie au caton de Genève, et, de plus, la ligne douanière devait être établie à l'Ouest du Jura, de manière que tout le pays de Gex se trouvât en dehors. (A. Joanne / GE).

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