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Le Jura (all. Leberberg) est un système de montagnes de l'Europe centrale, qui s'étend sur la France, la Suisse et l'Allemagne, vis-à-vis des Alpes centrales dont il est séparé par la haute plaine de Suisse et de Souabe (Rhône, Aar, Rhin, Danube). Le Jura a 680 km de long depuis le Rhône jusqu'au Main; ses formations dépassent d'ailleurs un peu ces deux cours d'eau qui se sont frayé une route au travers. Les principaux sommets du Jura sont : le Crêt de la Neige (1718 m), le mont Tendre (1680 m), la Dôle (1678), le Chasseron (1607 m), le Chasseral (1607 m), le Grand Crêt d'Eau (1621 m), le Suchet (1588 m) et le Grand Colombier (1531 m). Les couches de terrain principales sont celles des calcaires dits, justement, jurassiques à cause de leur abondance dans cette chaîne. La largeur moyenne du Jura est d'une cinquantaine de kilomètres. Sa direction est du Sud-Ouest au Nord-Est. II est nettement divisé par le Rhin en deux régions, le Jura français au Sud, le Jura allemand au Nord. Ils diffèrent beaucoup, et c'est seulement depuis qu'on a reconnu l'identité de constitution géologique des deux chaînes qu'on a appliqué au système allemand ce nom de Jura (mons Jurasus) qui d'abord n'appartenait qu'au système français. L'unité n'existe qu'au point de vue géologique : le Jura français est formé d'une série de chaînes de montagnes, le Jura allemand est constitué de vastes plateaux. Le Jura Français Le Jura français s'étend sur la France et la Suisse entre le Rhône au Sud, le Rhin au Nord, la vallée de Neuchâtel et de l'Aar à l'Est, la plaine de la Saône à l'Ouest. Il se développe sur une longueur de 310 km de long depuis le coude du Rhône jusqu'au confluent du Rhin et de l'Aar, décrivant une courbe légèrement concave vers l'Est. C'est un massif montagneux plissé; cette constitution a été étudiée avec grand détail par Thurmann : il dénombre 160 chaînons d'inégale longueur. Ils se présentent comme une sorte de filet à mailles elliptiques très allongées. Topographie. Le Jura se présente, vu de la Suisse, comme une haute muraille sur laquelle se détachent à peine les cimes, lesquelles la dépassent seulement de quelques dizaines de mètres. Du haut de ce rempart on voit le massif s'abaisser vers l'Ouest-Nord-Ouest, ses chaînes successives formant comme les crêtes de vagues décroissantes au-dessus desquelles culminent quelques sommets dominant de peu le plan général. Formes caractéristiques du relief et du paysage jurassiens. Le plissement régulier est celui où les couches sédimentaires se bombent en une voûte continue; elles s'élèvent d'un côté, se replient et s'abaissent de l'autre côté de la ligne de faite, se relevant à la suivante, de manière à constituer des séries alternatives de chaînes et de vallées longitudinales; souvent le dos supérieur s'étale en un véritable plateau; cette structure régulière se présente dans 30 des 160 chaînons, d'après les observations de Thurmann. Les autres sont plus ou moins éventrés dans le sens de la longueur, de sorte qu'il s'y creuse dans la partie supérieure des gorges ou des vallées dont les parois sont formées par les roches des sédiments sous-jacents. Ces murs sont d'altitude inégale et s'abaissent en pente douce vers l'extérieur; en plusieurs lieux ils se réunissent enveloppant la partie supérieure de la vallée dans un véritable cirque. D'autre part dans les plis principaux, il s'est fait des plis secondaires, dont la crête est parfois plus élevée que les rebords des vallées où ils s'intercalent; cela se produit lorsque le plissement a ramené au jour une couche sédimentaire inférieure formée de matériaux plus résistants. On donne le nom de combes aux vallées qui se forment au point de contact des calcaires durs et des terrains argileux ou analogues; ceux-ci moins résistants sont entraînés et les autres se dressent alors en muraille escarpée dominant la dépression creusée dans le sol plus friable; les combes se rencontrent aussi bien dans les plaines sédimentaires jurassiques que dans la montagne proprement dite. On donne le nom de ruz aux vallons ou gorges qui descendent des lignes de faite dans les grandes vallées longitudinales ou les combes; ils sont encombrés des débris écroulés du haut des murailles rocheuses. Coupes schématiques montrant les progrès de l'érosion et la formation des combes dans le Jura. On donne le nom de cluses à des vallées transversales généralement étroites et profondes qui traversent les chaînes et relient les vallées longitudinales; Thurmann a compté 90 cluses. En revanche, plusieurs des vallées supérieures sont complètement closes; au fond se forment des lacs sans issue visible comme ceux de Brévine et de Joux; à moins que le sol calcaire ne laisse fuir toutes les eaux par des entonnoirs; elles reparaissent alors plus bas en sources dont quelques-unes sont fort belles. La plupart des rivières suivent une vallée longitudinale du Nord-Est au Sud-Ouest ou du Sud-Ouest au Nord-Est, mais la principale du pays jurassique, le Doubs, traverse par plusieurs cluses les alignements du Jura septentrional. Géologie. Au Sud et au Sud-Est et dans la région de Neuchâtel, on trouve en bordure des assises crétacées inférieures; les assises supérieures manquent partout. On rencontre dans toute l'étendue du massif des terrains tertiaires éocènes et miocènes de formation marine ou lacustre. Les blocs erratiques venus des Alpes sont nombreux dans la région orientale ; on y trouve des blocs granitiques de 100 m. c.; on les trouve jusque dans les vallées intérieures. 1° Les plissements intacts dont les sommets sont constitués de Jurassique supérieur; les assises inférieures n'apparaissent qu'au fond des cluses et quelquefois sur les côtés, par suite de la dénudation mettant à nu des rochers, par exemple aux environs de Dôle. A ce type appartiennent les chaînes méridionales et celles des alignements extrêmes à l'Est et à l'Ouest. Carte de la géologie du Jura. Cliquer sur l'image pour élargir la carte et afficher la légende. Géographie. Le Jura méridional premier s'étend le long du Rhône et au-dessus du lac Léman; enfermant les plus hautes montagnes : Crêt d'Eau, Reculet, Crêt de la Neige (1723 m.), Colomby de Gex, Dôle (1680 m), qui font vis-à-vis au massif du mont Blanc; là sont aussi les chaînes les plus étendues et les plus longues vallées (Ain, vallée de Joux, etc.). Le Jura central, dont les sommets sont inférieurs d'une centaine de mètres aux autres, comprend le mont Tendre, le Chasseron (1611 m), la Tête de Rang (1423 m), le Chasseral (1609 m); le col des Loges, entre Neuchâtel et les Loges, atteint encore 1286 m; les vallées de l'Orbe et du Doubs supérieur sont les plus importantes, puis celles des Dappes, le val Travers, ceux de Ruz, de Saint-Imier, de Moutiers, etc.; les lacs sont nombreux. Le Jura septentrional, qui est à peu près entièrement compris en Suisse, est la partie la plus tourmentée du massif; on y observe des terrains complètement retournés, à tel point qu'en exploitant le sel gemme du Muschelkalk, on retrouve au-dessous le Jurassique et jusqu'aux argiles-oxfordiennes. Les principaux sommets sont le mont Terrible, le Weissenstein (1281 m), le Hasenmatt (1449 m), le Roethifluh (1398 m), le Passwang, le Hauenstein, le Laegerberg, le Rhanden. Les principales vallées sont celles de la Birse, de Delémont, de Laufen. Le Jura, par la disposition parallèle de ses chaînes, forme une frontière naturelle et crée un sérieux obstacle aux communications. Les passages principaux sont : au Sud, route de Lyon à Genève, la vallée du Rhône, gardée par le fort de l'Ecluse; dans le centre, les routes suivent des cluses : les principales mènent de la Bourgogne à la Suisse par le val de Joux, le col de Saint-Cergues vers Nyon, et par le val des Dappes et le col de la Faucille vers Genève; au Nord, les routes qui, de l'Alsace et de la France centrale, conduisent à la Suisse rhénane, passent par Porentruy et les cluses de Pierre-Pertuis, Moutier et la vallée de la Birse. Plusieurs voies ferrées ont été tracées à travers le Jura par le col de Jougne, le val Travers, les Loges, le mont Sagne, Pierre-Pertuis, le défilé de la Croix, le Hauenstein et le Boezberg. Carte du relief du Jura. Cliquer sur l'image pour élargir la carte et afficher la légende. Le Jura allemand Le Jura allemand s'étend entre la plaine danubienne, formée de terrains tertiaires, et les terrasses triassiques de la Souabe adossées aux gneiss et aux granites de la Forêt-Noire. Il forme un plateau de 435 km de long depuis la région de Schaffhouse jusqu'à Lichtenfels, et ne forme une ligne de partage des eaux que dans la Rauhe Alb; ailleurs il est traversé par une série de cours d'eau : Woernity, Altmühl, Pegnitz, Wiesent. Il ne présente pas grand obstacle aux communications. Le Jura allemand est divisé par la dépression de Nordlingen (Ries) et le val de la Woernitz en deux parties : Jura souabe au Sud-Ouest, Jura franconien au Nord-Est. Le Jura souabe. Les monts du Hegau, à l'Est des précédents, sont des cônes volcaniques situés soit dans le terrain jurassique, soit dans la plaine tertiaire du Hegau; citons le Hohenoewen (849 m), le Neuhoewen (870 m) le Hoewenegg (788 m), le Hohentwiel (692 m). La Baaralb, au Sud de la vallée de Tuttlingen, avec le Lupfen (978 m); Heuberg, dominé par l'Oberhohenberg (1012 m), point culminant du Jura allemand, dominant le rebord occidental; ce plateau de 900 m d'altitude est continué, à l'Est, par le Hardt, à peu près aussi élevé le Hohenzollernalb, entre les vallées d'Ebingen et Binladingen, possède un village situé à 912 m d'altitude (Burgfelden) et la colline couronnée par le château de Hohenzollern (855 m); Laa Rauhe Alb, large plateau creusé de magnifiques cavernes, atteint 905 m au Kornbühl; les plus célèbres cavernes sont celles de Nebel (près d'Oberhausen) et de Karl (près d'Erpfinhen). Les vallées taillées presque à pic dans ces plateaux à une profondeur de 200 à 300 m, y découpent, dans la région septentrionale, des promontoires ou même des monts isolés, d'autant que, de ce côté, reparaissent des formations volcaniques; ces monts, couronnés des ruines de viens châteaux, sont très pittoresques : Achalm (701 m), Hoheneufen (742 m), Teck (774 m), Stuifen (756 m), Hohenrechberg (706 m), Hohenstaufen (683 m). On distingue dans la Rauhe Alb plusieurs districts : Alb postérieure, de la Lauchart à la Lauter; Alb moyenne, de la Lauter à la Loue; Alb antérieure; Hardt de Münsingen; Hochstraess, au Sud, entre Ehingen et Ulm. Le Jura souabe se termine, au Nord, par l'Aalbuch, entre la Kocher supérieure et Geislingen, dominée par le Kocherberg (750 m), et le Hoerdtfeld, entre les vallées de la Rocher, de la Brenz et le Ries de Nordlingen; celui-ci atteint 697 m. Sur le plateau calcaire de l'Alb, les eaux de pluie sont immédiatement absorbées pour ne rejaillir qu'au bord. Autrefois, les habitants n'avaient d'eau que celle de leurs citernes ou des mares artificielles, eau fort malsaine. A partir de 1870, on a établi un réseau de conduites qui approvisionnent d'eau potable, élevée par des pompes. Le Jura franconien. Géologie. Flore La flore du Jura est dans son ensemble la même que celle des montagnes de nature calcaire qui forment la ceinture extérieure des Alpes, autrement dit des Alpes antérieures ou Préalpes, dont la chaîne qui nous occupe n'est séparée que par la plaine suisse et la vallée du Rhône. Cette végétation est aussi en grande partie celle des autres régions montagneuses calcaires de l'Europe moyenne. On peut d'ailleurs considérer le massif de la Grande-Chartreuse, dont le Jura ne semble être qu'un prolongement, comme le centre de dispersion des plantes calcicoles jurassiennes et savoisiennes. En effet, on y retrouve presque toutes les espèces du Jura, en même temps que ce massif possède en propre quelques espèces telles que : Anémone baldensis, Silene bryoides, Thlaspi rotundifolia, Betonica hirsuta, etc., qui ne s'avancent pas dans le Jura. Rien de plus contrastant que cette flore éminemment calcicole comparée à celle des Alpes cristallines du massif central et en général à celle de tous les terrains granitiques, schisteux ou siliceux arénacés. On y voit parmi les espèces les plus caractéristiques : Helleborus faetidus, Lactuca perennis, Digitalis lutea, Anthyllis montana, Cerasus Mahaleb, Erinus alpinus, Daphne laureola, D. alpina, Buxus sempervirens, Gentiana ciliata et autres espèces, Primula auricula, Cyclamen europaeum, des Globuria, Cotoneaster tomentosa, Quercus pubescens, Polypodium calcareum,.etc. ll ne faudrait pas croire cependant que ces espèces forment le fond exclusif de la végétation; celle-ci est surtout constituée par des plantes plus ou moins ubiquistes et d'autres plus ou moins indifférentes à la nature chimique du sol, ou préférant seulement le sol calcaire au sol siliceux. Telles sont : Helianthemum vulgare, Polygala vulgaris, Dianthus Carthusianorum, Silene nutans, Melandrium stlvaticum, Hypericum hirsutuna et autres espèces, Genista tinctoria, Acer pseudo-platanus, Trifolium pratense, Lotus corniculatus, Prunus spinosa, Cerasus dulcis, Spiraea ulmaria, Geum urbanum, Rubus saxatilis, Fragaria vesca, Potentilla verna et autres espèces, Epilabium Gesneri, Sedum telephium, Carum carvi, Heracleum sphondylium, Lonicera xylosteum, Galium verum et G. mollugo,Valeriana officinalis, Solidago virga aurea, Eupatorium cannabinum, Lithos permum officinale, Lissaria vulgaris et autres espèces, Mercurialis perennis, Paris quadrifolia, Convallaria majalis, Potygonatum multiflorum, etc. C'est au milieu de ces formes plus communes que les espèces calcicoles se montrent avec une fréquence croissante; en général elles deviennent de plus en plus prépondérantes à mesure que l'altitude augmente; en même temps la flore prend un caractère montagneux plus accentué. Par contre, on y constate l'absence à peu près complète des plantes silicicoles par excellence comme : Digitalis purpurea, Castanea vulgaris, Calluna vulgaris, Sarothamnus scoparius, Vaccinium myrtillus, Pteris aquilina, Lycopodium selago et L. clavalum, etc. Au Reculet on constate même la présence du Rhododendron ferrugineum, qui affectionne tant les terrains schisteux ou granitiques. Cependant quelques espèces manquent absolument dans les monts du Jura, même dans les localités qui leur seraient favorables; telles sont : Digitalis purpurea, Scleranthus perennis, Corenophorus canescens. D'autres, sans être nulles, sont rares ou disséminées, comme Quercus sessiliflora, Hieracium boreale, etc. Enfin, dans les régions inférieures ou dans le voisinage des habitations, parmi les espèces affectionnant les lieux vagues, on signale la rareté relative de : Centaurea calcitrapa, Onopordon acanthium, Solanuns nigrumn, Verbascum blattaria, et, chose curieuse, celle de l'Urtica dioica. Par contre, on rencontre dans les vallées des plantes moins exclusivement calcaires ou recherchant un sol plus meuble, comme Ranunculus lingua, Bidens cernua, Cicuta virosa, Alnus glutinosa, Geranium palustre, Oenanthe peucedanifolia, etc., toutes affectionnant l'humidité, puis Nigella arvensis, Lycopsis arvensis, Ajuga chamaepilys et A. genevensis, Lathyrus tuberosus et L. aphaca, Sedum villosum, Anthemis tinctoria, etc. Dans la plaine, il y a une différence radicale entre les terrains siliceux argileux d'alluvion ancienne de la Bresse, qui ne nourrissent que des espèces hygrophiles et silicicoles, et les terrains d'alluvion moderne du Doubs et de la Loue, recouverts d'espèces calcicoles; cette différence est si profonde qu'elle se manifeste entre deux champs contigus dont les mauvaises herbes silicoles et calcicoles s'excluent réciproquement, bien que physiquement et mécaniquement la constitution des deux champs soit la même. Ici il importe de mentionner l'existence exceptionnelle d'un îlot granitique, celui de la forêt de la Serre, près de Dôle, ou se trouvent nombre de plantes qui redoutent le calcaire : Cardamine silvatica, Stellaria uliginosa, Herniaria hirsuta, Seleranthus perennis, Epilobium collinum, Potentilla collina, Cytisus capitatus, Sarothamnus scoparius, Sedum elegans, Saxifrage granulata, Chrysosplenium, Senecio sylvaticus, Orobanche rapum, Luzula albida, Carex maxima, Osmunda regalis, Asplenium septentrionale et A. Breynii, Lycopodium clavatum et L. inundatum, et bien d'autres. Le climat du Jura est en géneral, abstraction faite de l'altitude et de la latitude, rude et variable. En toute saison, les températures diurne et nocturne peuvent y différer par de grands écarts. Il en est de même de la température de l'été, assez chaude comparativement à celle de l'hiver, souvent très rigoureux. La neige y tombe en abondance et forme souvent, durant prés de la moitié de l'année dans les parties élevées, des couches de plusieurs mètres d'épaisseur. Aussi, comme dans les Alpes, les plantes délicates se trouvent-elles suffisamment abritées jusqu'au réveil brusque du printemps. De plus, malgré la fréquence des orages et des pluies durant l'été, ce climat n'est pas humide et les eaux atmosphériques se bornent à alimenter les tourbières et les ruisseaux des hauteurs. Ces cours d'eau, en se réunissant, forment de préférence, en arrivant dans la région moyenne, des torrents qui s engouffrent à travers les blocs calcaires imperméables pour ne reparaître au large que dans les régions inférieures qu'ils fertilisent. De là la rareté relative des cours d'eau apparents à la surface sur de grandes étendues de la chaîne où les plantes ne trouvent l'humidité nécessaire que grâce au grand développement de leurs racines qui pénètrent à travers les fissures des rochers à des profondeurs plus ou moins grandes.
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