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L'histoire de la Belgique
Préhistoire.
Les premiers habitants de la région qui deviendra la Belgique sont des groupes de chasseurs-cueilleurs. Ils utilisent des outils en pierre pour la chasse et la préparation des aliments. Les preuves archéologiques, comme les outils en silex trouvés à Hallembaye et Spy, montrent la présence des Néandertaliens.

Après la dernière glaciation, le climat se réchauffe et les forêts couvrent la région. Les habitants continuent de vivre en petits groupes nomades, se déplaçant selon les saisons et les ressources disponibles. Les sites archéologiques tels que ceux de la vallée de la Meuse montrent des campements saisonniers.

A partir de 5000 av. JC, avec l'introduction de l'agriculture et de l'élevage, les populations deviennent sédentaires, construisent des villages et développent des techniques de poterie et de tissage. Les premiers agriculteurs en Belgique sont liés à la culture rubanée (culture de la céramique linéaire), avec des sites comme ceux de Hesbaye et du Hainaut. Au cours du Néolithique, des cultures telles que la culture de Michelsberg apportent de nouveaux modes de vie et des structures sociales plus complexes, avec des enceintes fortifiées et des nécropoles.

Protohistoire.
A partir de 1800 av. JC, environ, l'ntroduction du bronze, un alliage de cuivre et d'étain, remplace progressivement les outils en pierre. Les échanges commerciaux se développent avec d'autres régions d'Europe. Les tumulus, ou tombes sous des monticules de terre, apparaissent dans des régions comme la Famenne et le Condroz, et témoignent d'une hiérarchisation sociale croissante.

Au cours du premier âge du fer (culture de Hallstatt, 800 - 450 av. J.-C.), le fer est travaillé pour servir à la fabrication d'outils et d'armes. La culture de Hallstatt, qui une culture celtique précoce, se caractérise par des échanges commerciaux intensifs avec les civilisations méditerranéennes. Des oppida (forteresses) commencent à se développer.

Le second âge du fer correspond en Belgique l'Ă©poque de la culture de La Tène (450 - 50 av. JC). Il s'agit d'une autre culture celtique. Les tribus celtiques telles que celles des Éburons, des Nerviens, des Aduatuques et des MĂ©napiens occupent le territoire de la Belgique. Les Celtes Ă©taient des agriculteurs, des artisans et des guerriers. Ils construisaient eux des oppida, des fortifications souvent situĂ©es sur des collines, et avaient une sociĂ©tĂ© structurĂ©e avec des chefs de tribu et des druides (prĂŞtres). 

La conquĂŞte romaine.
Les Romains dĂ©signaient sous le nom de Belges les peuples celtiques qui habitaient entre la Seine et le Rhin. Les Belges, continuellement en guerre avec les Germains Ă©taient plus belliqueux que les autres Gaulois; aussi firent-ils Ă  CĂ©sar une plus longue rĂ©sistance. Les peuples de cette contrĂ©e qui jouèrent le plus grand rĂ´le  dans cette guerre furent les SĂ©quaniens, les Bellovaques et les RĂ©mois. Sous DioclĂ©tien, qui opĂ©ra le remaniement des provinces de l'empire, la Belgique fut divisĂ©e en deux provinces distinctes : la Belgique Ire Ă©tait limitĂ©e par la Belgique Ile, la Germanie, la Lyonnaise et la SĂ©quanaise; la Belgique II, limitĂ©e par la Germanie, la mer du Nord, la Manche et la Lyonnaise, comprenait Ă  peu près le territoire actuel de la Belgique.

Le Moyen âge et la Renaissance.
Au Moyen âge, et avant d'ĂŞtre soumise Ă  la domination bourguignonne, la Belgique Ă©tait divisĂ©e en un grand nombre de fiefs indĂ©pendants les uns des autres et sans aucun lien de nationalitĂ©. L'archiduc Maximilien, en devenant l'Ă©poux  de Marie de Bourgogne, fille et hĂ©ritière de Charles le TĂ©mĂ©raire, rĂ©unit le premier sous sa domination le Brabant, le Hainaut, la Hollande, la ZĂ©lande et Namur, en 1477. Le sort de la Belgique changea sous l'archiduc Philippe, fils de Maximilien. Philippe et sa soeur Marguerite avaient Ă©pousĂ© Jeanne et Jean, tous deux enfants de Ferdinand le Catholique et d'Isabelle de Castille. L'archiduc Philippe mourut en 1506 au moment oĂą il allait recueillir la succession d'Isabelle et prendre la couronne d'Espagne. Après sa mort, les Pays-Bas furent dĂ©volus Ă  l'archiduc Charles d'Autriche, plus tard Charles-Quint, et administrĂ©s, pendant sa minoritĂ©, par Marguerite, sa tante. C'est ainsi que se trouvèrent rĂ©unies la couronne d'Espagne et celle des Pays-Bas. 
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Départ de Bruxelles du duc d'Albe.
Rappelé en Espagne, le duc d'Albe quitte Bruxelles.

Les troubles religieux dĂ©solèrent ce pays pendant la domination espagnole. L'administration du duc d'Albe, qui avait promis de tirer plus d'or des Pays-Bas que n'en rapportait le PĂ©rou, et qui, en effet, ruina le pays par des impĂ´ts qui n'Ă©taient qu'une confiscation dĂ©guisĂ©e, amena une rĂ©volte gĂ©nĂ©rale. On reprochait aussi au gouverneur d'avoir fait pĂ©rir 18 000 habitants sur les bĂ»chers de l'Inquisition. Les gouverneurs qui vinrent après lui ne purent apaiser la fureur populaire. Le conseil d'État prit la direction des affaires en 1576; les diverses provinces se formèrent en confĂ©dĂ©ration, et les confĂ©dĂ©rĂ©s signèrent Ă   Gand le fameux traitĂ© connu sous le  nom de pacification de Gand par lequel ils juraient de chasser les Espagnols. Cependant, une transaction intervint, et Philippe II, roi d'Espagne, accepta par l'Ă©dit perpĂ©tuel les conditions que les Pays-Bas mirent Ă  leur soumission : Don Juan d'Autriche fut alors acceptĂ© comme gouverneur gĂ©nĂ©ral; mais les Espagnols et les autres troupes Ă©trangères durent Ă©vacuer le pays. Cependant, les confĂ©dĂ©rĂ©s ne dĂ©posèrent pas les armes, et en 1579 ils signèrent l'union d'Utrecht, qui devint la base constitutive de la rĂ©publique des Provinces Unies.

Des temps modernes, mais agités.
La lutte continua encore contre Philippe II avec des alternatives diverses; mais il fut enfin forcé de reconnaître l'indépendance des Pays-Bas. Il maintenait. cependant sa domination dans les provinces du Sud. Louis XIV, dans les guerres qu'il soutint contre la maison d'Espagne, s'empara de la plupart des possessions qui lui restaient en Belgique et dans le Nord de la France. Par le traité d'Utrecht, conclu en 1713, Louis XIV donna la Belgique à l'empereur Charles VI. Les Hollandais, profitant du dénuement dans lequel se trouvait la Belgique, traitèrent avec l'empereur pour avoir le droit d'y tenir garnison. Leur but était d'asservir la Belgique en détruisant la concurrence commerciale qu'ils pouvaient redouter de la part des Belges, et en même temps de couvrir leurs frontières du côté de la France et de l'Allemagne. A la mort de Charles VI, la Belgique appartint à Marie-Thérèse d'Autriche; mais sa souveraineté ne fut jamais bien établie, en raison de l'immixtion de la Hollande dans les affaires de la Belgique. Les Hollandais étaient parvenus à interdire la navigation de l'Escaut. Joseph Il, qui succéda a Marie-Thérèse, fut trop faible pour résister aux Hollandais, et les Belges finirent par se révolter contre lui. Le 24 octobre 1789, le peuple brabançon proclama la déchéance de Joseph II. Les Autrichiens, frappés de terreur, évacuèrent le pays sans coup férir.

Les provinces belges se constituèrent alors sous le nom d'États belgiques unis. Cependant, ne recevant pas les secours qu'ils attendaient de la RĂ©publique française, et craignant d'ĂŞtre attaquĂ©s par les Autrichiens, ils Ă©lurent spontanĂ©ment le troisième fils de LĂ©opold, empereur d'Autriche, l'archiduc Charles, grand-duc hĂ©rĂ©ditaire de la Belgique. Mais l'armĂ©e autrichienne envahit les provinces belges, et exigea une soumission complète. En 1791, une armĂ©e rĂ©publicaine française s'ouvrit la Belgique par la victoire de Jemmapes,  et elle fut d'autant mieux accueillie que le premier acte du gouvernement fut de proclamer la libertĂ© de la navigation de l'Escaut. Cependant les Belges, attachĂ©s Ă  leurs convictions religieuses, s'effrayèrent des idĂ©es nouvelles que les Français rĂ©pandaient dans leur pays, et rappelèrent les Autrichiens. Ceux-ci ne purent s'y maintenir, et la France resta en possession de ce pays jusqu'en 1814. A cette Ă©poque, les Prussiens y pĂ©nĂ©trèrent. NapolĂ©on fit de nouveaux efforts pour reconquĂ©rir le pays, mais il fut vaincu Ă  Waterloo; et dès ce moment la Belgique fut perdue pour la France. La Hollande devint alors maĂ®tresse de cette contrĂ©e. Mais en 1830, la rĂ©volution française de juillet eut son contrecoup en Belgique.

Les patriotes belges conquirent dĂ©finitivement leur indĂ©pendance, rĂ©solurent d'appeler au trĂ´ne de Belgique le duc de Leuchtenberg. Louis-Philippe, craignant les consĂ©quences de la souverainetĂ© d'un membre de la famille de NapolĂ©on sur un royaume si près de la France, contrebalança ce choix en faisant proposer son fils,  le duc de Nemours; ce prince ayant Ă©tĂ© acceptĂ©, Louis-Philippe, redoutant l'opinion des grandes puissances, refusa Ă  son tour; c'est alors que le congrès, sur la recommandation de l'Angleterre, Ă©lut LĂ©opold de Saxe-Cobourg, qui monta sur le trĂ´ne et prĂŞta serment Ă  la constitution, le 21 juillet 1831. La Hollande tenta un dernier effort pour ressaisir la Belgique; mais une armĂ©e française intervint pour faire respecter l'indĂ©pendance de ce pays. Après de longues confĂ©rences tenues Ă  Londres, et grâce Ă  l'intervention de la France, la Belgique fut reconnue indĂ©pendante. La mĂŞme annĂ©e, les deux chambres, par un votre libre, dĂ©cernèrent Ă  LĂ©opold I, prince de Saxe-Cobourg, la couronne, qu'elles avaient d'abord offerte au duc de Nemours, deuxième fils de Louis-Philippe. Ce n'est nĂ©anmoins qu'en 1839, après le traitĂ© de paix conclu entre la Hollande et la Belgique et le partage du Luxembourg et du Limbourg, que ce royaume  a Ă©tĂ© dĂ©finitivement reconnu par toutes les puissances de l'Europe. Il a Ă©tĂ© en mĂŞme temps dĂ©clarĂ© « État indĂ©pendant et perpĂ©tuellement neutre ».
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Blason de la Belgique.
Armoiries du royaume de Belgique.

Le Royaume de Belgique jusqu'en 1919.
Au lendemain de la Révolution, il y avait eu une sorte de trêve des partis, mais l'entente entre catholiques et libéraux était précaire. La sagesse du roi Léopold sut pourtant tenir entre eux la balance égale et les accoutumer à la pratique du régime parlementaire. Le ministère catholique de Theux-Muelenaere, formé en 1834, dut se retirer en 1840, à la suite de troubles dans la rue, et fut remplacé par le ministère libéral Lebeau-Rogier, qui commença par proclamer une amnistie générale. Mais une adresse du Sénat, en date du 17 mars 1841, suivie d'un vote de défiance, le força à se démettre (avril 1841). Un cabinet de conciliation fut formé par Nothomb : il fit voter une loi sur l'instruction primaire qui ranima les vieilles querelles; l'enseignement religieux, obligatoire à l'école publique, y serait donné par des membres du clergé, sous la surveillance de l'État. Les libéraux, tout en admettant la liberté de l'enseignement public à tous les degrés, entendaient qu'il fût placé sous le contrôle exclusif du pouvoir civil. Ils réclamaient en outre l'abaissement progressif du cens électoral. Au cabinet Nothomb succédèrent un ministère libéral Van de Weyer, puis un ministère catholique de Theux, remplacé, en 1847, par un ministère libéral Rogier.

Voisine de l'Angleterre, la Belgique s'inspirait de son exemple dans le jeu de ses institutions parlementaires. Mais, si l'un des deux grands partis qui s'y disputaient le pouvoir s'intitulait aussi libéral, il différait surtout de l'autre (catholique) par sa conception des rapports de l'Église et de l'État. Arrivé aux affaires en 1847, il y resta, à part le bref intermède d'un cabinet catholique (1855-1857), pendant toute la durée du second Empire, eut pour chef Charles Rogier, président du Conseil de 1847 à 1853 et de 1857 à 1868, et finit par succomber à ses dissensions intérieures comme à un retour offensif de ses adversaires, au moment même où il croyait avoir élargi à son avantage la loi électorale (1870). Favorisée par le développement économique du pays, sa prépondérance fut à la fin compromise par les premières manifestations de ce mouvement flamingant qui devait, dans la période suivante, dominer la vie politique du pays.

Le poison linguistique. - La question des langues tient une place considérable dans l'histoire contemporaine de la Belgique. La région ondulée du Sud-Est et les plaines du Nord et de l'Ouest sont habitées par des populations bien distinctes au point de la langue que des autres aspects de la culture en général : les Wallons et les Flamands. Au XIXe siècle, cette dualité s'est traduite en particulier par un conflit entre les deux langues, dont chacune fut tour à tour prédominante, suivant les fluctuations de la politique : les libéraux étant en général favorables au français et la droite au flamand, parlé surtout par les catholiques. Après 1850, la Constitution reconnut au français le caractère de langue officielle. Tout aussitôt, il se forma un mouvement qui ne cessa de se développer, le flamingantisme, et qui aboutit à faire consacrer légalement l'usage du flamand en matière de justice, d'administration et d'enseignement. La flamandisation de l'Université de Gand, au détriment de la culture française, ne devait être obtenue qu'en 1923, après une longue bataille : les Allemands, qui n'avaient pas manqué d'exploiter le flamingantisme au profit du pangermanisme, essayèrent, pendant la Grande Guerre, de dissocier l'unité belge en réalisant la séparation administrative des deux régions.
Lorsque se posa, en 1867, la question du Luxembourg, la Belgique prit part Ă  la confĂ©rence de Londres, mais sans contresigner la garantie de neutralitĂ© du grand-duchĂ©, Dans le mĂŞme temps, on s'inquiĂ©tait vivement des projets d'annexion de la Belgique que l'on prĂŞtait Ă  NapolĂ©on III. Le gouvernement prĂ©senta une demande de crĂ©dits et porta (avril 1868) le contingent annuel de 10 000 hommes Ă  12 000 hommes. Ces prĂ©paratifs demeurèrent inutiles : Bismarck qui, après Sadowa, avait fait miroiter aux yeux de NapolĂ©on III la conquĂŞte de la Belgique Ă  titre de compensation, joua l'empereur et l'empĂŞcha de rien prendre, tout en le rendant suspect Ă  ses voisins. Ainsi la Belgique se trouva, de par sa neutralitĂ©, qu'elle crut un instant menacĂ©e par NapolĂ©on III, Ă  l'abri des complications europĂ©ennes : ses deux premiers rois, LĂ©opold Ier (1831-1865) et LĂ©opold II (1865-1909), profitèrent de leurs relations de famille avec la plupart des maisons souveraines pour exercer dans les conseils de l'Europe une influence avantageuse pour leur pays. 

Sous le règne de Léopold II (1865-1909) (qui mena une politique criminelle au Congo, mais dont l'attitude à l'intérieur de la Belgique fut, comme celle de son prédécesseur, respectueuse de la constitution), le parti catholique disposa le plus souvent du pouvoir. Au cabinet libéral Frère-Orban succédèrent les cabinets Anethan (1870) et Malou (1871), sous lesquels le parti catholique prédomina, notamment en matière d'instruction publique; mais les élections de 1878 donnèrent la majorité aux libéraux et le roi confia de nouveau à Frère-Orban la mission de constituer un ministère. Frère-Orban obtint le vote d'une loi qui rendait à l'État la direction de l'enseignement (1879), et la question religieuse prit un caractère d'acuité qu'elle n'avait jamais eu. Les fêtes de l'indépendance belge purent être néanmoins célébrées avec éclat (1880); mais le mauvais état des finances et les divisions du parti libéral aboutirent, lors des élections de mai 1884, à la défaite du gouvernement.

Malou revint aux Affaires, renoua avec le Vatican les relations diplomatiques, interrompues sous le précédent ministère, et déposa un projet de loi tendant à remplacer les écoles d'État par des écoles libres. La question religieuse était devenue si ardente que le roi, en octobre 1884, choisit comme président du Conseil Beernaert qui, tout en partageant les idées du groupe catholique, entendait les appliquer avec modération. S'il remplaça la loi scolaire libérale par une loi conforme aux doctrines de son parti, il se montra prudent dans la réalisation de ses initiatives. Il se trouva bientôt aux prises avec les socialistes. Non seulement ses libéraux se pénétraient de l'esprit démocratique sous l'influence de Janson, mais encore et surtout un parti socialiste avait été fondé en 1885, par César Paepe, sur le modèle de la social-démocratie allemande. Le développement industriel et commercial de la Belgique avait concentré dans les vallées de la Sambre et de la Meuse, à Bruxelles et à Anvers, des agglomérations considérables de travailleurs : les chefs du parti les organisèrent fortement en syndicats, en coopératives, dont la principale fut le Vooruit de Gand, et utilisèrent les forces ouvrières pour des fins politiques.

Vers le mĂŞme temps, l'agitation rĂ©visionniste devint plus vive. La Belgique Ă©tait encore rĂ©gie par la Constitution de 1831, qui avait Ă©tabli le cens, et une loi du 24 aoĂ»t 1883 avait appliquĂ© en outre le système de l'adjonction des capacitĂ©s. Les socialistes organisèrent en 1890 de grandes manifestations en faveur du suffrage universel et, comme l'extension du droit de vote Ă©tait aussi dans le programme du parti libĂ©ral, Beernaert s'efforça de rĂ©aliser  l'accord des partis. Tâche difficile, car la droite Ă©tait nettement hostile, et la gauche Ă©tait divisĂ©e sur la formule Ă  appliquer.

Après de longs débats, les deux Chambres votèrent, en mai 1892, le principe de la révision, en spécifiant les articles à réviser, et la Constituante se réunit le 12 Juillet. Les votes, en matière de révision, devaient être émis par les deux tiers des suffrages au moins; or, le parti catholique ne disposait plus de cette majorité des deux questions les plus discutées étaient l'établissement du suffrage universel, réclamé par les gauches, et le référendum, demandé par le roi, mais diversement apprécié par les partis de droite et de gauche. Le rejet de la motion Janson, en faveur du suffrage universel pur et simple, amena une violente agitation ouvrière. Le président du Conseil, craignant de voir l'émeute dégénérer en révolution, conjura la droite de se rallier à la formule Nyssens, qui admettait le suffrage universel en le tempérant par le vote plural. Le vote de cette proposition à une forte majorité (21 avril 1893) amena une détente dans le pays, et les textes révisés de la Constitution furent sanctionnés par le roi, le 7 septembre 1893.

Il restait encore à examiner le projet de loi électorale, qui tendait à tenir compte de la représentation des minorités. Beernaert donna sa démission, et c'est sous le ministère Burlet - ministère de droite - que la Belgique fit la première expérience du suffrage universel (14 octobre 1894). Le parti libéral sortit presque annihilé de la mêlée, alors qu'une représentation socialiste arrivait au Parlement.

Après Smet de Naeyer (1896-1899), qui dut se retirer devant un nouveau mouvement révisionniste, Vandenpeereboom prit la présidence du Conseil. Pressé par une fraction de la majorité d'instituer la représentation proportionnelle, il proposa cette réforme dans de telles conditions qu'il provoqua une opposition très vive à la Chambre et une émeute dans la rue. Smet de Naeyer, rappelé par le roi, fit voter (décembre 1899) le scrutin de liste par province avec représentation proportionnelle pour les élections à la Chambre des représentants et pour les élections au Sénat. L'application de ce système permit au parti libéral de se reconstituer; le parti catholique conserva néanmoins la majorité, mais il se trouva affaibli par la formation d'un groupe dissident, la « jeune droite », sous la direction de Beernaert (1906).

Les Chambres avaient ratifiĂ©, en 1885, l'acceptation par LĂ©opold II de la souverainetĂ© de l'État du Congo, qui Ă©tait sa propriĂ©tĂ© personnelle. Mais les scandales qui Ă©clatèrent Ă  propos de l'exploitation Ă©hontĂ©e et des mauvais traitements infligĂ©s aux Congolais conduisit  Ă  retirer la propriĂ©tĂ© de cet État au roi. Le Congo fut cĂ©dĂ© Ă  la Belgique, qui l'annexa et en fit une colonie en 1908. Le roi Albert lersuccĂ©da Ă  LĂ©opold II, son oncle, en 1909. Broqueville constitua en 1911 un cabinet de droite sans caractère accentuĂ©. Le rĂ©sultat de la consultation Ă©lectorale de 1912 fut dĂ©favorable aux libĂ©raux, et le parti catholique, qui avait paru perdre du terrain, obtint une majoritĂ© plus forte tant Ă  la Chambre qu'au SĂ©nat. Mais, en avril 1913, les socialistes recoururent Ă  la grève gĂ©nĂ©rale pour obtenir l'abolition du vote plural, et la question fut aussitĂ´t mise Ă  l'Ă©tude par le gouvernement.

Les libéraux et les socialistes attaquaient également l'organisation militaire du pays; ils voulaient substituer au tirage au sort le service obligatoire universel. En 1912, pour mettre fin à cette agitation, et sans doute aussi en présence des préparatifs de l'Allemagne, le ministère leur donna satisfaction. La guerre de 1914 devait surprendre la Belgique en pleine réorganisation militaire. Le 4 août 1914, après avoir qualifié de «-chiffon de papier », le traité qui garantissait la neutralité de la Belgique, l'Allemagne envahit la Belgique pour attaquer la France. Ses troupes l'occuperont presque entièrement jusqu'en 1918; l'armée belge ayant cependant réussi à maintenir jusque là ses positions le long de l'Yser. (GE).


Uniformes de l'armée belge vers 1900.
La Belgique contemporaine.
A l'issue de la Grande guerre, la Belgique se voit confier par la Société des Nations (SDN) un mandat pour administrer l'ancienne colonie Allemande du Ruanda-Urundi. Elle abandonne aussi sa neutralité, en signant une alliance militaire avec la France en 1920. Au même moment, les problèmes politiques internes du pays, mis entre parenthèses pendant quatre ans, refont surface. Aux vifs débats qui opposent catholiques et socialistes, après que le suffrage universel ait été adopté par une assemblée constituante le 6 novembre 1919, s'ajoutent les revendications récurrentes des nationalistes flamands qui réclament la transformation de la Belgique en un État fédéral. Ils obtiendront finalement gain de cause en 1930, quand la Flandre et la Wallonie deviennent des régions monolinguistiques.

En 1934, le roi Albert ler meurt accidentellement et est remplacĂ© sur le trĂ´ne par son fils, LĂ©opold III, sous lequel, en octobre 1936, la Belgique opte pour un retour Ă   la neutralitĂ©. Peine perdue. Le 10 mai 1940, l'armĂ©e allemande envahit une nouvelle fois la Belgique. En dĂ©saccord avec le roi, le gouvernement s'exile Ă  Londres, au moment au LĂ©opold III choisit de signer la reddition. Le pays est occupĂ© et ne sera libĂ©rĂ© par les forces alliĂ©es qu'en 1944. La guerre terminĂ©e, on reprochera au roi (emprisonnĂ© pendant le conflit en Allemagne, puis en Autriche) sa trop grande complaisance vis-Ă -vis d'Hitler, qu'il avait mĂŞme rencontrĂ© en novembre 1940, Ă  Berchtesgaden. Un comportement bien Ă©loignĂ© de la fermetĂ© et du courage dont avaient fait preuve son père, Albert Ier, et qui inaugure ce qu'on a appelĂ© la Question royale, alimentĂ©e de plus par un remariage mal acceptĂ© par la population. Il en a rĂ©sultĂ© dans un premier temps une mise Ă  l'Ă©cart du souverain (la rĂ©gence fut assurĂ©e par son frère Charles), et lorsqu'il voulut revenir en 1950, l'agitation fut telle qu'il dĂ»t abdiquer le 17 juillet 1951. Son fils Baudouin Ier devint alors roi des Belges.

Le dénouement de la Question royale laisse entier les autres questions qui animent traditionnellement la vie politique belge. A partir de 1954, le problème scolaire continue de dresser les catholiques du parti social-chrétien, partisans de l'enseignement libre, aux partisans de l'enseignement laïque, et que défend en particulier le gouvernement Van Acker. A l'initiative du gouvernement social-chrétien du ministre Eyskens, un Pacte scolaire est conclu finalement en 1958 par les trois principaux partis (socialiste, libéral, social-chrétien), qui autorise la coexistence des deux systèmes. Il sera ratifié par une loi, en mai 1959. Quant à la question linguistique, intiment liée à celle du fédéralisme, elle s'est rallumée au moment de la question royale, quand les Flamands ont pris conscience de leur force, et ont commencé à contester, usant parfois de violence, la suprématie qu'ils disaient être celle de la partie wallone du pays. Cette fois, la tentative de conciliation, avec les loi de 1962 et 1963 sur l'égalité des langues française et flamande dans l'enseignement et l'administration ne régla, et sembla plutôt envenimer encore la dispute. Enfin, un autre problème marqua cette période, celui de la décolonisation du Congo. Préparée en catastrophe, cette indépendance est accordée le 30 juin 1960, mais débouche sur une période de troubles, au cours de laquelle la province minière du Katanga, fait sécession, sous la conduite de Moïse Tshombé. La Belgique, qui envoie des troupes sur place, semblant par là soutenir la rébellion, et inaugure une longue période de relations très difficiles avec son ancienne colonie (rebaptisée Zaïre, puis République démocratique du Congo). Ajoutons, pour clore ce sujet, que la Belgique a accordé en 1962, l'indépendance au Ruanda-Urundi, donnant naissance aux États actuels du Rwanda et du Burundi.

Toutes ces difficultĂ©s,  n'ont pas empĂŞchĂ© la Belgique de l'après-guerre de connaĂ®tre une pĂ©riode de prospĂ©ritĂ©. Elle a aussi resserrĂ© ses liens avec les autres europĂ©ens, en tant que membre fondateur de la CommunautĂ© Ă©conomique europĂ©enne (signature du TraitĂ© de Rome, en 1957). Bruxelles, qui partage avec Luxembourg et Strasbourg le siège des institutions europĂ©ennes, est progressivement devenu LA capitale de la CEE, puis, depuis 1992 (TraitĂ© de  Maastricht) de l'Union europĂ©enne, grâce Ă  l'importance croissante, surtout Ă  partir des annĂ©es 1980, de la Commission europĂ©enne qui a son siège dans la capitale belge. Elle est aussi, d'une certaine façon, la capitale de l'OTAN dont elle accueille le commandement intĂ©grĂ©, depuis le retrait de la France, en 1967.

Dans les annĂ©es 1970, la Belgique, comme tous les autres pays dĂ©veloppĂ©s a ressenti durement les contrecoups des deux chocs pĂ©troliers (1973 et 1979). Une crise Ă©conomique naissante, qui ici s'est aussi manifestĂ©e, comme chaque fois, par le resurgissement des antagonismes entre Flamands et Wallons. Les premiers se rĂ©vĂ©lant dĂ©sormais plus prospères que les seconds. Au cours des annĂ©es suivantes, sous le gouvernement social-chrĂ©tien flamand Wilfried Martens, entre 1979 et 1992,  le caractère fĂ©dĂ©raliste du royaume s'accentue, mais n'empĂŞche pas la constante montĂ©e du nationalisme flamand, dont la composante la plus extrĂ©miste, le Vlaams Blok, devenu depuis novembre 2004 le Vlaams Belang, recueille de plus en plus d'Ă©chos. La perspective de la sĂ©cession de la Flandre, sous prĂ©texte que la Wallonie serait pour elle un boulet Ă©conomique, commence mĂŞme a ĂŞtre Ă©voquĂ©e par des voix jusque lĂ  considĂ©rĂ©es comme modĂ©rĂ©es. Une solution est recherchĂ©e en 1993 par un amendement de la Constitution qui transforme la Belgique en Etat fĂ©dĂ©ral, en consacrant la reconnaissance de trois grandes unitĂ©s administratives largement autonomes, la Flandre (nĂ©erlandophone), la Wallonie (francophone) et Bruxelles (qui est une enclave majoritairement francophone, dans la Flandre).

Après qu'Albert II, ait succĂ©dĂ© Ă  son frère Baudouin, mort le 31 juillet 1993, en Espagne, la Belgique s'est trouvĂ©e confrontĂ©e Ă  plusieurs affaires de natures diffĂ©rentes, mais qui ont, chacune Ă  sa façon, fortement affectĂ© le moral de la population et tĂ©moignent du climat qui a rĂ©gnĂ© dans le pays au cours des dernières annĂ©es.  L'une (affaire Dutroux) concerne l'arrestation en 1996 d'un pĂ©dophile et assassin d'enfants, Ă  l'occasion de laquelle de nombreux dysfonctionnements dans le fonctionnement de la justice et de la police (rivalitĂ©s police, gendarmerie) ont Ă©tĂ©s mis au jour; une autre (scandale de la contamination Ă  la dioxine), en 1999, a conduit Ă  la dĂ©mission du gouvernement de coalition (formĂ© en 1992) du social-chrĂ©tien Jean-Luc Dehaene, qui a dĂ» cĂ©der la place au  gouvernement de coalition de centre-gauche de Guy Verhofstadt (reconduit en 2003, Ă  la tĂŞte d'une coalition de libĂ©raux et de socialistes); enfin, un accident de train, en mars 2001, qui a remis a vif une fois de plus le problème linguistique, puisqu'on invoque, pour l'expliquer une mauvaise comprĂ©hension  entre un locuteur flamand et un locuteur francophone. Le 13 dĂ©cembre 2006,  la RTBF (Radio tĂ©lĂ©vision belge francophone) annonce la sĂ©cession de la Flandre. C'est un canular, mais ils suscite un grand Ă©moi dans le pays tant le clivage entre francophones et nĂ©erlandophones s'est accentuĂ©.

En juin 2007, Guy Verhofstadt prĂ©sente la dĂ©mission de son gouvernement après les mauvais rĂ©sultats Ă©lectoraux de sa coalition. Il reste cependant pour gĂ©rer les affaires courantes en attendant qu'une nouvelle coalition puisse se constituer. Après plusieurs tentatives infructueuses, la Belgique est restĂ©e sans gouvernement  jusqu'en dĂ©cembre 2007, date Ă  laquelle Verhofstadt a Ă©tĂ© de nouveau chargĂ© de diriger un gouvernement d'intĂ©rim. En fĂ©vrier 2008, un accord comprenant le transfert de pouvoirs supplĂ©mentaires aux rĂ©gions fait espĂ©rer un retour Ă  la normalitĂ© politique. Le mois suivant, Yves Leterme prend la tĂŞte d'un nouveau gouvernement, ce qui semble mettre un terme Ă  neuf mois de crise. Mais en juillet, Leterme ne rĂ©ussissant pas Ă  obtenir un accord sur le partage du pouvoir entre nĂ©erlandophones et francophones propose sa dĂ©mission, qui est refusĂ©e par le roi. 

La crise atteint son apogée entre 2010 et 2011, lorsque le pays reste sans gouvernement pendant 541 jours, un record mondial. Finalement, un gouvernement est formé sous la direction d'Elio Di Rupo, leader du Parti socialiste (PS), en décembre 2011. Ce gouvernement inclut des représentants des partis socialistes, libéraux et chrétiens-démocrates.

Le gouvernement Di Rupo met en place la sixième rĂ©forme de l'État, qui transfère davantage de compĂ©tences aux rĂ©gions et communautĂ©s, renforçant le fĂ©dĂ©ralisme belge. En 2012, la circonscription Ă©lectorale de Bruxelles-Hal-Vilvorde (BHV)  est scindĂ©e, mettant fin Ă  une source majeure de conflits communautaires entre Flamands et Francophones.

La Belgique est frappĂ©e le 22 mars 2016  par des attentats terroristes revendiquĂ©s par l'État islamique. Des explosions Ă  l'aĂ©roport de Bruxelles et dans le mĂ©tro de la ville tuent 32 personnes et en blessent plus de 300.

Le Premier ministre Charles Michel démissionne en décembre 2018 après le retrait du parti nationaliste flamand N-VA de la coalition gouvernementale, provoquant une crise politique. Les élections de mai 2019 se soldent par un Parlement fragmenté, rendant la formation d'un gouvernement difficile. Sophie Wilmès devient la première femme Premier ministre de Belgique en octobre 2019, dirigeant un gouvernement de transition. Le gouvernement Wilmès gère les premiers mois de la pandémie de covid-19, mettant en place des mesures de confinement strictes. La Belgique est fortement touchée par la pandémie, avec un des taux de mortalité par habitant parmi les plus élevés en Europe.

En octobre 2020, Alexander De Croo, du parti libĂ©ral flamand Open VLD, forme un nouveau gouvernement de coalition incluant sept partis (Vivaldi) après 493 jours sans gouvernement. A partir de cette Ă©poque, la Belgique, comme de nombreux autres pays, fait face Ă  des dĂ©fis Ă©conomiques et sociaux en raison des consĂ©quences de la pandĂ©mie, de la hausse des prix de l'Ă©nergie et de l'inflation. Par ailleurs, en juillet 2021, des inondations dĂ©vastatrices touchent le sud et l'est de la Belgique, causant des pertes humaines et des dĂ©gâts matĂ©riels importants. 

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