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Étienne
Geoffroy
Saint-Hilaire est un naturaliste, né à Etampes, le 15
avril 1772, mort à Paris le 19 juin
1844. Ses parents le destinaient à l'état ecclésiastique,
et il obtint une bourse au collège de Navarre, et peu après,
vers 1788, un canonicat et un bénéfice. Mais ses goûts
le portaient vers les sciences naturelles, et les leçons de physique
expérimentale de Brisson ne firent que
les développer. A sa sortie du collège de Navarre, pour obéir
aux injonctions de son père, il étudia le droit et s'y fit
recevoir bachelier, mais il ne tarda pas à abandonner cette étude
pour la médecine, qu'il devait également laisser de côté
peu après, et pour l'histoire naturelle qui ne tarda pas à
le captiver entièrement. Il fut l'élève et l'ami de
Haüy,
suivit les cours de Daubenton
au Collège de France, ceux de Fourcroy
au Jardin des plantes.
Daubenton, qui le
remarqua, lui confia des travaux au Muséum; les événements
du 10 août 1792 furent la cause indirecte d'une amitié plus
vive encore entre le maître et l'élève. Haüy avait
été arrêté comme prêtre réfractaire;
Geoffroy n'eut ni paix ni trêve qu'il ne fût parvenu à
délivrer de prison son excellent maître; sur ses instances,
Daubenton fit agir l'Académie des sciences, et Haüy fut relâché
comme utile aux intérêts de la science. Grâce à
cet épisode, Geoffroy devint connu de la plupart des savants, et
sur la pressante recommandation de Haüy, Daubenton le fit nommer,
en 1793, démonstrateur au cabinet d'histoire naturelle, à
la place de Lacépède qui s'était
démis de ses fonctions.
Peu après
la Convention, sur la proposition de Lakanal, réorganisa le Jardin
des plantes sous le nom de Muséum
d'histoire naturelle, y créa douze chaires et appela à
les occuper les douze naturalistes de l'établissement; Geoffroy
se trouva ainsi, à l'âge de vingt et un ans, de droit professeur
de zoologie, et chargé d'enseigner une science qu'il ne connaissait
pas; jusqu'alors, en effet, il ne s'était guère occupé
que de minéralogie. Geoffroy offrit sa chaire à Lacépède
qui la refusa. L'année suivante, il entendit parler pour la première
fois du jeune Cuvier que lui recommandait Tessier; Geoffroy s'enthousiasma
à la lecture de quelques essais de Cuvier
et fit tous ses efforts pour le faire venir à Paris. Il fut ainsi
le promoteur, puis le collaborateur, le condisciple, le collègue
de Cuvier, pour devenir par la suite son antagoniste scientifique.
En 1798, Geoffroy,
désigné pour faire partie de l'expédition d'Égypte,
contribua à fonder l'Institut des sciences et des arts au Caire;
lors de la capitulation d'Alexandrie,
en 1801, il sauva des mains des Anglais, grâce à son indomptable
énergie, les richesses scientifiques réunies par les savants
français. De retour en France, il s'occupa de la description des
collections zoologiques qu'il avait rapportées, et en 1807 fut nommé
membre de l'Institut. En 1808, il fut chargé d'une mission scientifique
en Espagne et au Portugal et en 1809 nommé professeur de zoologie
à la Sorbonne. En 1815, enfin, les
électeurs d'Étampes l'envoyèrent siéger à
la Chambre des représentants; il remplit courageusement son mandat
jusqu'à la dissolution de la Chambre après la bataille de
Waterloo;
il ne voulut plus siéger dans celle qui suivit la Chambre des Cent-Jours.
Geoffroy applaudit à la révolution de 1830 et sauva les jours
de l'archevêque de Paris, M. de Quelen, en lui offrant un asile au
Muséum. Devenu aveugle en 1840, il offrit sa démission des
chaires du Muséum et de la Sorbonne; mais, sur les instances de
Dumas,
il resta titulaire de la dernière jusqu'à sa mort.
Geoffroy était
doué d'un esprit essentiellement synthétique qui se fait
jour dans ses moindres travaux, mais qui n'est nulle part plus manifeste
que dans sa Philosophie anatomique. Celle-ci repose essentiellement
sur ce principe fondamental. que l'organisme des animaux est soumis à
un plan général, dont les modifications de détail
donnent les espèces, qu'il est marqué au coin d'une unité
typéale, ainsi qu'on peut le déduire de la théorie
des analogues, du principe des connexions, des affinités électives
des éléments organiques et du balancement des organes; ce
principe d'unité ne perd jamais ses droits, qu'il s'agisse de l'organisme
normal ou des monstruosités. Par cela même que tous les animaux
sont soumis à un plan uniforme, toutes les espèces actuelles
doivent descendre d'une espèce primitive par voie continue de génération;
la diversité et la multitude des espèces actuelles s'expliquent
par les changements survenus dans les milieux ambiants; en un mot, toute
espèce peut se déduire matériellement d'une espèce
voisine, et entre toutes les espèces existe un rapport indéniable.
Ces idées, prises en grande partie dans Lamarck,
développées depuis par Darwin, Wallace,
etc., venaient formellement à l'encontre des doctrines de Cuvier,
qui considérait chaque espèce comme le produit fixe et invariable
d'une création spéciale, sans passage possible de l'une à
l'autre par voie de génération. Elles furent l'occasion d'un
débat fameux qui eut lieu à l'Académie des sciences
en 1830, débat auquel s'est si vivement intéressé
Goethe.
Geoffroy Saint-Hilaire
s'est principalement occupé, dans ses recherches anatomiques, du
système osseux, auquel il attribuait même une certaine prépondérance
sur le système nerveux : il considérait le système
osseux comme résultant de l'épanouissement et de l'ossification
des dernières gaines des nerfs .
Malgré cette vue erronée, et par cela même qu'il ne
se contentait pas de décrire simplement les pièces du squelette
d'un animal en les comparant à celles plus ou moins analogues des
animaux de la même classe, mais en étendant la comparaison
au type lui-même en totalité (recherche des analogues, simplification
des parties de l'organisme), il a rendu des signalés services à
l'anatomie comparée;
si l'on doit accorder à
Cuvier d'avoir
créé cette partie importante de la science, il faut reconnaître
à Étienne Geoffroy Saint-Hilaire le mérite de l'avoir
ramenée dans ses véritables voies. Les principes de l'anatomie
comparée furent, du reste, à cause de leur connexion avec
la théorie des analogues et de l'unité de composition, l'un
des objets de la discussion qui s'éleva à l'Académie
en 1830.
Rappelons encore
que c'est Geoffroy Saint-Hilaire qui, en exécution d'un ordre de
la Convention, fonda en l'an Il (1793) la ménagerie du Muséum;
il en obtint la direction et en publia les mouvements d'une manière
régulière. (Dr L. Hahn).
Satue
en marbre de Geoffroy Saint-Hilaire,
par
Elias Robert, inaugurée à Etampes le 11 octobre 1857.
Dessin
de Chevignard.
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En
bibliothèque - Nous nous bornerons
à mentionner ici quelques-uns des principaux ouvrages de Geoffroy
Saint-Hilaire : Histoire naturelle des mammifères, avec Cuvier
(Paris, 18201842, 4 vol. in-fol.); Philosophie anatomique, Des Monstruosités
humaines (Paris, 1818-1822, 2 vol. in-8, avec atlas in-fol.); Cours
de l'Histoire naturelle des mammifères
(Paris, 1828, in-8);
Principes
de philosophie zoologique, etc. (Paris, 1830, in-8); Notions synthétiques
de philosophie naturelle (Paris, 1838, in-8), etc. Il collabora à
la célèbre Description de l'Égypte (Paris,
1808-29,10 vol. jés. et 3 vol. in-fol.; 2e édit., 1824-30,
24 vol. in-8, avec le même atlas).
Isid..
Geoffroy Saint-Hilaire, Vie, travaux et doctrine scientifique d'Étienne
Geoffroy Saint-Hilaire; Paris, 1817, in-12, avec l'indication bibliographique
et analytique de tous les ouvrages, mémoires, etc., d'Étienne
Geoffroy Saint-Hilaire. - Flourens, dans Éloges
historiques. - Pariset, dans Hist. des membres de l'Acad. royale
de méd., t. II. - Hoefer, dans Biogr.
générale : Ducrotay de Blainville,
Cuvier
et Geofroy Saint-Hilaire; Paris, 1890, in-8.
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Geoffroy
Saint-Hilaire (Isidore), naturaliste, fils du précédent,
né à Paris le 16 décembre 1805, mort à Paris
le 10 novembre 1861. Reçu docteur en médecine en 1829 (Propositions
sur la monstruosité), il fut, dès l'année suivante,
chargé de suppléer son père dans sa chaire du Muséum.
Les trois années suivantes il enseigna la zoologie à l'Athénée
royal et la tératologie à l'École pratique; nommé
en 1833 membre de l'Académie des sciences, il fut appelé,
en 1837, à suppléer son père à la Sorbonne
et contribua activement à l'organisation de la faculté des
sciences de Bordeaux. Puis, il fut successivement inspecteur de l'Académie
de Paris (1840), professeur au Muséum (1844), inspecteur général
de l'Université (1844), membre du conseil royal de l'instruction
publique. En 1850, il remplaça de Blainville dans la chaire de zoologie
de la Sorbonne et résigna les fonctions d'inspecteur général.
C'est à Isidore Geoffroy Saint-Hilaire que l'on doit en grande partie
l'organisation de la Société d'acclimatation. C'est lui aussi
qui a propagé l'usage de la viande de cheval dans l'alimentation.
Ses travaux sur la
tératologie sont remarquables; il élargit la voie que son
père avait tracée à ce genre de recherches. (Dr
L. Hn.).
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En
bibliothèque - Ouvrages principaux
: Histoire générale et particulière des anomalies
de l'organisation chez l'homme et les animaux, ou Traité de tératologie
(Paris, 1832-36, 3 vol. in-8, et atlas de 20 pl.); Essais de zoologie
générale, etc. (Paris, 1840, in-8); Histoire naturelle
des insectes et des mollusques (Paris, 1844, 2 vol. in-12); Description
des mammifères nouveaux, etc. (Paris, 1843, in-4); Histoire
naturelle générale des règnes organiques (Paris,
1854-60, 3 vol. in-8). |
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