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Histoire de l'art > La peinture
L'histoire de la peinture
La peinture italienne au Moyen Âge
La première peinture chrétienne
Aperçu
Le Moyen Âge
La Renaissance : (I) la formation des écoles
(II) le Cinquecento Le XVIIe siècle Le XVIIIe siècle Le XIXe siècle
L'art des Catacombes.
En Italie, les Catacombes de Rome renferment les plus anciens exemples de l'art chrétien. Les décors de rinceaux, de feuillages et d'oiseaux peints pour les chambres lumineuses des villas païennes s'appliquèrent aux voûtes obscures des chambres souterraines. Plusieurs des peintures du cimetière de Domitille remonteraient à la fin du Ier siècle, et il s'en trouve au cimetière de Prétextat qu'on peut rapporter à l'âge des Antonins. Les décorations, surtout en ce qui concerne la distribution des sujets et le caractère de l'ornementation, ressemblent aux peintures murales des beaux temps de l'empire. En effet, leurs élégantes arabesques rappellent de la manière la plus frappante les fresques de Pompéi et celles des thermes de Titus, dont elles sont évidemment inspirées. Un grand nombre des fresques semblent pouvoir être attribuées au IIe et au IIIe siècle. On attribue à ce dernier siècle principalement celles du cimetière de Calixte, où l'on remarque un fini et une perfection de dessin dignes de l'Antiquité. La figure du Bon Pasteur, si commune dans les catacombes, et qui fut la première représentation symbolique de Jésus, est en général d'une telle perfection, que d'Agincourt  n'a pas craint de faire remonter jusqu'à la fin du IIe siècle une magnifique décoration de voûte dont ce sujet occupe le centre n'est inférieure aux peintures ni en beauté, ni en ancienneté.

Quant aux sujets représentés dans les peintures, ils ne pouvaient transformer ni les compositions ni les formes. En effet, d'une part la vie des premiers chrétiens a très peu de place dans ces représentations; on ne connaît qu'une scène de jugement avant le martyre; les portraits n'atteignent pas le nombre de dix, et les figures d'orantes elles-mêmes, qui sur tant de murs prient les bras levés, ne sont plus de ce monde. D'autre part, les figures des scènes empruntées à la Bible sont conçues en dehors de toute réalité : les représentations en buste du Christ et de la Vierge, qui apparaissent dès le IIe siècle, sont exceptionnelles; le drame de la Passion n'est reproduit qu'une fois; enfin la Résurrection de Lazare, l'histoire de Jonas, Moïse frappant le rocher, sont présentés, non comme des scènes historiques, mais comme de purs symboles, expression abstraite de l'espérance chrétienne, et traduction en langage figuré des liturgies funéraires. Dans les Catacombes des Saints Marcellin et Pierre, de Saint Calixte, de Sainte Agnès, réputées les plus anciennes, les artistes chrétiens ont peint Jésus sous les figures symboliques d'Orphée, de Tobie, de Daniel, du Bon Pasteur; on y voit aussi des images des martyrs entourées de couronnes de laurier, Jésus au milieu de ses apôtres, les repas des agapes, les jeunes Hébreux dans la fournaise, et autres scènes de l'Ancien Testament.
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Peinture des catacombes de Rome  : Le Bon Pasteur.
Une peinture murale du Bon Pasteur
dans les Catacombes de Rome.

Il ne faut donc pas s'étonner si ces fresques qui empruntent toute leur valeur à leur signification cachée sont copiées négligemment d'après des modèles quelconques et reproduites à I'infini sans variété, sans vie, comme les caractères d'une pieuse sentence. Mais en même temps une révolution s'annonce dans cet art tout en idées, qui, auprès des morts, a oublié la vie et n'a voulu chercher dans les souvenirs mêmes de l'histoire religieuse que ces sortes d'idéogrammes par lesquels il affirmait la foi en la résurrection. Pour des siècles, l'art chrétien répugnera à la représentation de la réalité; après s'être timidement enfermé dans les symboles, il s'élèvera aux visions du monde surnaturel et s'y fixera. Si bien qu'en Italie, au début du XIVe siècle, il faudra une véritable révolution artistique pour que les histoires évangéliques soient représentées en fresques comme des drames vivants, et une autre, cent ans plus tard, pour que les artistes regardent la société contemporaine avec autant d'intérêt que la tradition religieuse.

Les Catacombes furent encore utilisées comme cimetières plus d'un siècle après l'édit de Milan, qui, en 313, avait proclamé le christianisme religion d'Etat. Dans les peintures qui furent alors exécutées, aucun motif nouveau ne s'ajouta à ceux qui avaient été trouvés au IIe et au IIIe siècle. A partir du Ve siècle les anciens cimetières ne seront plus que des lieux de pèlerinage, ou la piété des fidèles et des papes fera encore peindre de temps à autre quelques fresques, comme celles dont Pascal Ier, au IXe siècle, décora la crypte de Sainte-Cécile dans le cimetière de Calixte. Depuis Constantin, la société chrétienne vit au grand jour et l'état de choses nouveau a suscité un art nouveau qui n'emprunta presque rien aux humbles décorations de l'âge précédent. 

Ajoutons, pour résumer, que l'on peut classer  chronologiquement les produits de l'art chrétien sous six catégories principales : peintures symboliques, représentant des idées par des signes de convention; peintures allégoriques, reproduisant les paraboles évangéliques; peintures historiques de l'Ancien et du Nouveau Testament; images de Jésus, de la Vierge et des saints; scènes diverses empruntées à l'histoire de l'Église; enfin représentations des faits relatifs à la liturgie et aux rites.

La décoration des églises.
Dès que le christianisme fut adopté par les empereurs romains, les nouveaux lieux de culte, désormais en plein jour, furent investis par les artistes. L'éclat dont rayonne aujourd'hui la basilique de Saint-Paul-Hors-Les-Murs apparaît comme un souvenir affaibli de la richesse avec laquelle furent ainsi décorées ces premières églises de Rome. Elles étaient faites non plus pour cacher l'Eglise souffrante, mais pour exalter I'Eglise triomphante. Aussi les empereurs et les papes faisaient-ils appel pour orner ces édifices de plan latin aux richesses de l'Orient

Une profusion de marbres d'Asie et d'Afrique tout taillés en plaques et en colonnes se trouvait déjà dans les monuments romains. On en dépouilla les édifices païens qu'on laissait tomber en ruine, et c'est à peine si l'on eut besoin de faire tailler expressément à Constantinople les colonnes de quelque basilique, comme Sainte-Marie-Majeure. Le pavé était fait d'une mosaïque de marbres rares, disposés en dessins géométriques fort simples. Une barrière de marbre enfermait le choeur et l'autel, et était flanquée de deux ambons incrustés de marbre de couleur : la disposition primitive s'est encore conservée à Saint-Clément de Rome. Mais tout l'effort de la décoration se portait au fond de l'église sur la voûte en cul-de-four de l'abside, qui servait de dais aux sièges des dignitaires ecclésiastiques. 

La mosaïque seule avait assez d'éclat pour l'illuminer de ses couleurs, la mosaïque étendue à des proportions que les Romains n'avaient pas connues lorsqu'ils l'employaient dans les niches de leurs laraires. Il n'existe aujourd'hui rien de plus ancien, ni de plus parfait que la mosaïque de Sainte Pudentienne, exécutée de 390 à 398 par les prêtres Leopardus et Ilicius. Saint Paulin de Nola et Saint Ambroise, qui furent contemporains de ces prêtres, font allusion dans leurs poésies à des peintures de basiliques se rattachant à la même classe. Comme à Sainte Pudentienne, le style des mosaïques au Baptistère orthodoxe de Ravenne (430), ou même à Saints Cosme et Damien au Forum (vers 530), est encore pénétré de souvenirs antiques. Le Christ est debout au milieu des saints, et sous ses pieds coule le Jourdain mystique (Fleuve) où boivent les agneaux; les costumes blancs, les têtes fortes et austères, les attitudes simples, les couleurs sobres, tout conserve la gravité romaine. 

C'est d'après ces mosaïques dont les personnages sont encore vivants et expressifs, que l'on doit restituer par la pensée les décorations de Saint-Paul et des autres basiliques romaines des IVe et Ve siècles, pour la plupart remplacées du IXe au XIIIe siècle par des oeuvres d'un autre style. Les scènes animées, illustrations de la Bible ou de l'Evangile, se déroulent déjà le long des murs de la nef, comme à Sainte-Marie-Majeure; mais ces représentations se développent surtout dans les livres à miniatures. De fait, la peinture sur manuscrits a aussi laissé à cette époque quelques oeuvres notables. (Le Virgile du Ve siècle, que possède la bibliothèque du Vatican, contient des miniatures dont la ressemblance avec les peintures des Catacombes est frappante. Dans le Térence du IXe siècle que conserve la même collection, l'imitation de l'antique est beaucoup moins sensible, et le dessin plus barbare).

A coté des basiliques, les constructions circulaires, imitées également des modèles romains, étaient employées soit comme mausolées, soit comme baptistères. Un monument ancien et précieux du premier type est le mausolée de Constance, fille de Constantin, près de la Porta Pia, qui contenait les sarcophages en porphyre de cette princesse et d'Hélène, mère de l'empereur (aujourd'hui conservés au musée du Vatican). La décoration peinte de la voûte annulaire du pourtour reproduit exactement les motifs de feuillages et d'oiseaux employés dans les Catacombes. Le plus ancien baptistère de Rome est celui de Saint-Jean-de-Latran, qui n'a malheureusement conservé que quelques fragments de son décor primitif en mosaïque, dont le dessin rappelle de près celui du mausolée.

Par ces monuments, et par beaucoup d'autres du même genre, on peut juger de la nature des images que, dès la première année de la paix, on plaçait dans la partie la plus sacrée des basiliques, et aussi de l'usage qui en était fait d'après les prescriptions et règlements des pasteurs de l'Église. A partir de cette époque, l'usage ne fit que se répandre de plus en plus jusqu'au XIe siècle de revêtir entièrement l'intérieur des églises de peintures et de mosaïques. Les voûtes, les murs, le sol même en étaient couverts. La basilique de Saint-Marc à Venise peut donner une idée de ce genre de décoration. (Sur les murs du Parthénon d'Athènes, qui, comme on sait, avait été converti en église, on voit encore des restes de peintures chrétiennes d'un bon style, exécutées avec une heureuse hardiesse sur la surface polie d'un beau marbre penthélique).

Images de propagande.
La propagande des pasteurs de l'Église voulait que les peuples eussent sans cesse sous les yeux des images saintes, comme excitation à la piété, à la componction. Saint Grégoire de Nysse ne pouvait, paraît-il, retenir ses larmes quand il contemplait la peinture si souvent reproduite du sacrifice d'Abraham. On y trouvait, comme dans les catacombes, des histoires de l'Ancien et du Nouveau Testament, les portraits de Jésus, de Marie, des apôtres, des évêques de chaque église, comme à Saint-Paul hors des murs de Rome la série des portraits des papes en mosaïque

Souvent ces peintures étaient accompagnées d'inscriptions explicatives des sujets et de sentences en lettres d'or. On y voyait même assez fréquemment des paysages, des marines, des animaux, des chasses. Ces compositions étaient quelquefois allégoriques; mais le principal but que se proposaient les pontifes des premiers siècles, en les faisant exécuter sur les murailles des basiliques, c'était d'attirer et d'occuper l'attention des fidèles pendant les agapes, et de les prémunir ainsi contre les dangers de l'intempérance. Des draperies ornées de figures flottaient devant les portes du sanctuaire et autour de l'autel.

On est frappé de la constante uniformité qui existe, quant aux sujets représentés, entre les produits des différentes branches de l'art. La peinture murale retrace les mêmes histoires, les mêmes symboles que la peinture sur verre (fonds de coupe), la mosaïque s'en empare à son tour; les sculptures des sarcophages et autres ne s'écarteront pas davantage de ce cercle, lequel sera respecté même par la glyptique, autant du moins que pourra le permettre l'exiguïté de ses produits.

Une telle régularité suppose nécessairement une règle uniforme, hiératique, tracée par l'autorité de l'Église et par la tradition, et destinée à soustraire à l'arbitraire une partie si essentielle du culte. Le magistère ecclésiastique avait sans aucun doute fixé la série de ce qu'on pourrait appeler les cycles historiques ou allégoriques, tant du Nouveau que de l'Ancien Testament, que les artistes devaient suivre religieusement, et qui, comme on sait, embrassaient une grande variété de motifs. Et cette règle devait être d'autant plus inflexible, soit pour le choix des sujets, soit pour celui de leurs accessoires et la manière de les représenter, que dans les vues de l'Église les images constituaient, comme nous l'avons dit, un vaste système de diffusion de sa doctrine.
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Décoration de la Chapelle Palatine, à Palerme.
Décoration de sytle byzantin
de la Chapelle Palatine, à Palerme.

L'influence byzantine.
Les bouleversements politiques de l'Italie, l'insuffisance des artistes et de leurs procédés, la sévérité de l'architecture romane, qui se prêtait moins que la basilique primitive à la décoration picturale, avaient provoqué le déclin de la peinture, lorsqu'au XIe siècle s'opéra l'amorce d'une renaissance, sous l'influence de l'art byzantin. Une école grecque s'établit alors à Rome; les peintures du cloître de Saint-Urbain et de celui de Subiaco lui appartiennent sans doute. Désiré, abbé du Mont-Cassin, fit venir de Constantinople des artistes habiles dans la mosaïque, et l'on croit pouvoir  leur attribuer les mosaïques de Sainte-Marie-in-Trastevere et de Saint Grégoire à Rome, de San Miniato près de Florence, et de Torcello près de Venise. Héraclius Romain au XIe siècle, Théophile Lombard au XIIe, écrivirent sur la peinture, et, au XIIIe, Venise appela Théophanes de Constantinople pour ouvrir une école. Un certain nombre d'artistes de Sienne suivirent les pratiques de l'art byzantin, mais en modifièrent l'austérité par la grâce; ce furent Guido, Parabuoi et Diotisalvi. Mino de Turrita, également originaire de Sienne, décora à Rome quelques parties de Sainte-Marie-Majeure et restaura la mosaïque de Saint-Jean-de-Latran. Gaddo Gaddi, habile mosaïste, travailla à Florence et à Rome, et ses oeuvres, comme celles de Mino, offrent le mélange de la manière grecque et du style latin. Margaritine d'Arezzo, au contraire, suivit la manière grecque sans modification ni progrès. Giunta de Pise fut celui qui, pendant le XIIIe siècle, donna le mieux à ses figures l'expression humaine.

Le renouveau.
Progressivement, la peinture et la mosaïque, sans abandonner la tradition byzantine, se sont appliquées à des sujets nouveaux pour lesquels il s'est formé peu à peu un style plus libre et plus naturel. Un premier groupe de grandes scènes apparaît dès le XIe siècle, jugements derniers, vies des saints, représentation de martyres, où les peintres mettent nécessairement plus de variété et de mouvement qu'à l'époque précédente dans les solennelles visions apocalyptiques des absides ou même dans les scènes évangéliques, servilement reproduites d'une nef à l'autre d'après les miniatures remontant à des types du Ve et du VIe siècle qui passaient de main en main. L'exemple le plus complet et le plus riche de ces grands ensembles est la mosaïque de la coupole du Baptistère à Florence, où le Florentin Andrea Tafi travaillait à côté du Grec Apollonius. D'autre part, au début du XIIIe siècle se multiplient les représentations du crucifix, rendues populaires par saint François. Ce motif devait avoir sur la formation des artistes une influence durable en les forçant à reproduire le corps nu et à donner à un visage l'expression de douleur la plus forte possible : Margaritone d'Arezzo, le plus connu des peintres de Crucifix au XIIIe siècle, accentue même d'une façon pénible la contorsion des muscles et la grimace des traits. Ces oeuvres imparfaites, plus majestueuses que belles, plus violentes que dramatiques, représentent au moins le premier effort tenté pour animer les formes desséchées des Byzantins et rendre à la peinture le mouvement et l'expression. Malheureusement, la plupart des fresques du XIe au XIIIe siècle ont disparu, victimes de l'incurie ou du mépris des siècles plus avancés, qui les ont laissé périr quand ils ne les ont pas recouvertes.(Martigny / B.).

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