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La langue mandchoue,
langue de la famille toungouse (Les
langues altaïques), aujourdhui presque éteinte, a eu une grande importance
historique, puisqu'elle a été pendant plusieurs siècles la langue "officielle"
de la dynastie qui a règné sur la Chinelangue
(Les Toungouses).
En fait, même à cette époque, le mandchou n'était nulle part, pas même
en Mandchourie, la langue dominante;
il subsistait seulement à côté du chinois dans toutes les parties du
Céleste Empire. La langue mandchoue ne s'était
maintenue que parce que son étude était imposée par le gouvernement
chinois, et les fonctionnaires les plus importants affectaient, dans le
Nord au moins, de n'en pas parler d'autre, comme pour attester de leur
origine et du lien plus ou moins réel qui les aurait unis à la famille
régnante.
Le manchou a été l'objet de bien des
opinions diverses quant à son origine et sa composition. Siebold,
dans son Mémoire sur l'origine des Japonais, trouvait une assez
grande analogie entre le japonais et
le mandchou; un écrivain mongol,
Abougasi, ne voyait dans le mandchou qu'un mélange de mongol
et de chinois; les missionnaires, au contraire, en firent une langue
mère, sans rapports avec aucune autre; quelques philologues hardis
enfin y ont trouvé des analogies avec le grec, le latin, le hongrois,
l'allemand, etc., lesquelles sont rien moins que prouvées, quand on
fait la part naturelle des cas fortuits et celle des cas douteux.
Dans ses Recherches sur les langues
tartares, Abel Rémusat, reconnaissait trois
catégories étymologiques de mots dans le mandchou :
La première,
écrivait-il, comprend les mots qui lui sont communs avec les autres langues
toungouses : ils constituent le fond de la langue. On y trouve beaucoup
d'onomatopées, peu de termes génériques, mais des termes spécifiques
exprimant une foule de nuances d'idées : les animaux, par exemple, sont
désignés par des noms différents, selon leur couleur, leur taille, leur
âge, leurs qualités bonnes ou mauvaises; il y a, pour nommer le cheval,
autant de substantifs qu'il peut prendre d'allures, etc. La nomenclature
des adjectifs et des adverbes est d'autant plus restreinte que celle des
substantifs et des verbes est plus étendue.
La seconde catégorie
de mots comprend ceux qui ont été empruntés au mongol, depuis deux siècles
au plus; ils se rapportent pour la plupart à des objets d'une importance
secondaire.
La troisième se
compose d'une part de mots tirés du chinois, et se rapportant surtout
à des objets scientifiques, et d'autre part de quelques termes qui sont
venus de l'Inde, et qui expriment des objets relatifs au culte de Bouddha.
Les mots étrangers au mandchou forment Ã
peu près la cinquième partie du vocabulaire de cette langue. L'empereur
Kien-Long, voulant le ramener à sa supposée pureté primitive, fit composer,
pour remplacer les mots d'origine étrangère, des mots nouveaux formés
de racines mandchoues : on en créa ainsi
5 000, dont les employés du gouvernement furent tenus de se servir.
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L'écriture
mandchoue.
La langue mandchoue ne connaît ni l'article
défini, ni les genres grammaticaux; mais il a des signes pour distinguer
les nombres, et désigne les cas à l'aide de particules affixes
ou isolées. La conjugaison, très simple, rappelle celle du mongol. Dans
les verbes, l'impératif est le thème ou radical à l'état pur : des
affixes syllabiques, placés à la suite de ce thème, servent à marquer
les temps, les modes et les voix. Il y a des voix active, passive négative,
réciproque, inchoative, fréquentative, etc. Au lieu de prépositions,
le mandchou a des postpositions. L'ordre inverse domine dans la construction
: le sujet de la proposition s'exprime en premier lieu, l'adjectif précède
le substantif, le complément direct ne vient qu'après la complément
indirect, et le verbe termine la phrase. Cet ordre est rigoureusement suivi.
La prononciation du mandchou est, en général
douce et harmonieuse. Les Mandchous ne possédèrent pas d'écriture jusqu'au
XVIIe siècle de notre ère, et, par conséquent,
pas de livres : un de leurs savants, Takhai, composa, par ordre de l'empereur
Tai-Tsoung, une écriture imitée de celle des Mongols, et dont les groupes
syllabiques, très nombreux, se réduisent à 24 caractères primitifs,
dont 6 voyelles et 18 consonnes. C'est avec cette écriture que l'on a
traduit en mandchou la plupart des livres chinois. |
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