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L'Égypte ancienne
La période ptolémaïque
L'Egypte antique
Le Pharaon et l'Etat
L'Ancien Empire
Le Moyen Empire
Le Nouvel Empire
La Basse Epoque
La période Ptolémaïque
L'Egypte romaine
Redevenue province de l'empire des Achéménides, l'Égypte (La Basse Époque) partagea sa destinée et passa, après la bataille d'lssos, sous la domination d'Alexandre le Grand  (332). Précédé par sa renommée, Alexandre fut accueilli en Égypte comme un libérateur. Les fâcheux souvenirs laissés par les cruautés de Cambyse et d'Ochos lui dictaient en quelque sorte sa ligne de conduite : il montra autant de respect que les Perses avaient montré de mépris pour les croyances et les coutumes du pays. II se posa en protecteur de la religion (Religion égyptienne), et le parti sacerdotal se déclara hautement pour lui. Il apporta même la plus grande affectation à prendre l'avis des oracles et alla consulter en grande pompe celui de l'oasis d'Ammon. Il ne montra pas moins de clairvoyance en comprenant le rôle central que l'Égypte était appelée à jouer par suite de l'agrandissement de la carte commerciale du monde et fonda la belle et puissante cité maritime à laquelle il donna son nom (Alexandrie).

Après la mort d'Alexandre son empire fut dirigé par Philippe Arrhidée (323-316), Alexandre IV Aegos (316-304) (dynastie macédonienne), puis, en 304, lorsque l'empire se fractionna en entités autonomes, l'Égypte échut en partage à l'un des généraux d'Alexandre, Ptolémée, fils de Lagos. Il prit le titre de roi, et sa postérité, connue sous le nom de dynastie des Lagides, ou des Ptolémées, régna jusqu'à ce que Rome s'empare du pays.  Les guerres de palais et les assassinats se succèdent en permanence pendant cette période bien peu glorieuse sur le plan politique. En revanche, sur le plan intellectuel, l'Égypte ptolémaïque, qui profite de déclin progressif d'Athènes, va briller de tous feux et Alexandrie devient à cette époque la capitale culturelle du monde méditerranéen : en mathématiques, en astronomie, en médecine, l'Antiquité connaît son apogée; seule la philosophie, égarée par les démons du mysticisme, semble s'acheminer sur une voie sans issue (Les Écoles d'Alexandrie). La prééminence d'Alexandrie durera encore au premiers siècles de l'ère chrétienne, après donc qu'Octave (le futur Auguste), vainqueur d'Antoine et de Cléopâtre, eut réduit l'Égypte en province romaine, en l'an 30 av. J.-C.

Dates-clés  :
332 av. J.-C. - Conquête de l'Égypte par les armées d'Alexandre.

304 - 30  av. J.-C. - Dynastie de Lagides (période ptolémaïque).

304-284 - Règne de Ptolémée IerSoter.

55-30 - Cléopâtre VII.

30 av. J.-C. - Conquête romaine (Octave Auguste).
 

L'État lagide

Le rôle de pharaon que leur prêtait l'imagination populaire, les Ptolémées le jouèrent, il faut bien le dire, avec un art consommé. Ils en prirent le costume parce qu'il symbolisait la toute-puissance royale, et, comme le roi d'Égypte devait être dieu, ils se firent du même coup adorer; ne se refusant pas d'ailleurs à prendre part eux-mêmes au culte rendu aux dieux et aux anciens rois du pays, en leur qualité de chefs de la religion (Religion égyptienne). Est-il besoin de dire qu'ils conservèrent scrupuleusement toutes les cérémonies et tous les usages relatifs à la royauté : panégyries annuelles, association du prince héritier au trône paternel, mariages entre frères et soeurs, pratique funéraire de l'embaumement, etc. Mais ils ne s'en tinrent pas à ce formalisme. Leur politique extérieure fut celle des pharaons. Sans doute, ils laissèrent subsister en toute indépendance le royaume de Nubie dont les pharaons, depuis Pepi (Ancien Empire) jusqu'à Ramsès III (Nouvel Empire), s'étaient efforcés de faire une province égyptienne; mais c'est qu'avec les migrations successives, le royaume de Napata s'était civilisé à l'égal de l'Égypte, et, s'il ne pouvait plus prétendre renouveler les exploits des Piankhi, des Sabacon, et de Taharqa (Basse Époque), il avait au moins la prétention de n'être pas traité en quantité négligeable. 

La constitution et l'administration de l'Égypte sous les Ptolémées furent un très habile compromis entre l'organisation indigène primitive et la conception cosmopolite que pouvait se faire d'un État monarchique une lignée de princes profondément imbue des idées d'Alexandre. Autour du roi se trouvait groupée une hiérarchie nobiliaire, à la fois égyptienne, persane et macédonienne : les parents du roi, les gardes du corps, les amis, les envoyés, et les parents catèques. A ces titres nobiliaires, qui étaient à l'origine les désignations de véritables fonctions, s'ajoutaient certains titres militaires devenus purement honorifiques. C'était dans cette noblesse que se recrutaient les hauts fonctionnaires de palais, l'épitrope, ou régent, personnage dont l'autorité balançait quelquefois la puissance royale, le garde du sceau qui était aussi directeur du musée et, en sa qualité de prêtre d'Alexandre et des Lagides, le chef du clergé grec et indigène; les archypérètes ou payeurs généraux des troupes macédoniennes,  l'archicynège ou grand veneur, l'archedeatre ou principal majordome. Au point de vue administratif, l'Égypte restait, à l'exception des communautés grecques d'Alexandrie, de Ptolémaïs et de Naucratis, divisée en nomes qui se subdivisaient en cités (kômai) et territoires cultivés (topoi). Le nome était administré par un nomarque ou stratège (charge devenue civile de militaire qu'elle était à l'origine) qui avait en sous-ordre un épistate du nome, autorité essentiellement judiciaire; la cité par l'épistate de la cité, sorte de gouverneur juge, et les territoires cultivés par un toparque assisté d'un épimélite. Le stratège avait sous ses ordres un interprète, un agoranome ou intendant des marchés, des ingénieurs chargés du service technique de l'irrigation et des autres travaux publics, des laocrites ou juges de paix, et enfin les nombreux cheikhs de tous les villages du nome (presbyteroi).

Postérieurement, l'administration provinciale de l'Égypte fut divisée en trois épistratégies ou vice-royautés : la Basse-Égypte, l'Heptanomide ou Moyenne-Égypte, et la Haute-Égypte avec Héliopolis, Memphis et Ptolémaïs pour chefs-lieux, mais sans préjudice des nomes, passés au degré de subdivision. Cette complication du rouage administratif porta aussi sur les nomes qui se subdivisèrent en toparchies. Alexandrie, capitale de l'Égypte en même temps que cité grecque, c. -à-d. divisée en phyles et en dèmes, avait le privilège de posséder une administration centrale et une administration locale. En tant que municipalité, elle avait une Boulè ou conseil élu. Elle était le siège d'un exégète, d'un hypomnématographe, d'un archidicaste ou président de la cour d'appel (les 30 juges royaux : 10 pour Memphis, 10 pour Thèbes, 10 pour Héliopolis), d'un stratège de nuit, d'un alabarque ou directeur des contributions, du dioecète ou ministre des finances, de l'hypodioecète et des autres hauts fonctionnaires de l'administration des finances, l'économe et le basilicogrammate desquels dépendaient tous les comogrammates et topogrammates de l'Égypte.

Ptolémaïs, fondée par Sôter sur l'emplacement de Psoï (aujourd'hui Menschieh) venait par rang d'importance après Alexandrie : son organisation était entièrement grecque. Naucratis, l'ancienne colonie milésienne, avait des timouques et un hellenion. Les décrets de Rosette et de Canope divisent les temples de l'Égypte en trois classes selon leur importance. Chaque temple était desservi par une corporation de prêtres composée de plusieurs phylai, dirigée par des phylarques. Chaque temple avait un conseil de vingt à vingt-cinq prêtres renouvelable chaque année et chargé de régler toutes les affaires intérieures et extérieures du temple. La hiérarchie sacerdotale, telle qu'elle nous est donnée par les mêmes décrets, comprenait les grands prêtres qui pouvaient être grecs, les prophètes, les hiérotolistes, les ptérophores et les hiérogrammates. L'organisation militaire des Lagides présente le même caractère de complexité qui se retrouve alors dans toutes les institutions de l'Égypte. Elle comprend les diadoques, troupe d'élite macédonienne casernée autour du palais, les catèques ou territoriaux qui composaient les colonies militaires. On donnait souvent le nom d'épigones aux catèques nés dans le pays, c.-à-d. fils des premiers colons, vétérans qui s'établirent après les conquêtes. Ces colons étaient de toutes origines. L'armée active se composait de mercenaires (xenoi et mistophoroi) et de troupes indigènes.

La dynastie des Ptolémées (Lagides)

Ptolémée Ier Sôter.
Ptolémée prit le gouvernement à titre de satrape à l'exemple des autres généraux d'Alexandre. Il fut d'abord servi par la mauvaise fortune de son rival Perdiccas, qui échoua devant Péluse. La troisième année de son gouvernement il avait, par des campagnes heureuses, réuni à l'Égypte, Cyrène, la Syrie, la Coelésyrie et la Phénicie. L'éloignement de sa province aurait pu le tenir à l'écart des guerres qui divisèrent les diadoques; il n'en fut rien. 

C'est ainsi que, en 315, nous le voyons s'associer aux projets de Cassandre, de Lysimaque et de Séleucus contre l'ambition d'Antigone. L'année suivante, il réprime les velléités d'indépendance que manifestent Chypre et Cyrène et engage une nouvelle campagne en Syrie contre Démétrius, fils d'Antigone. II le bat à Gaza, puis, battu à son tour dans la personne de son sous-lieutenant Cellés qui n'avait pu empêcher la jonction d'Antigone et de Démétrius, il évacue la Syrie. Le pacte de désintéressement conclu en 311 entre les quatre généraux ayant été rompu par la mauvaise foi d'Antigone, qui mettait des garnisons dans les villes grecques après avoir adhéré à la reconnaissance de leur liberté, la guerre éclate de nouveau, mettant aux prises les troupes des alliés et d'Antigone un peu partout, sur l'Hellespont, en Cilicie où Léonès, lieutenant de Ptolémée, fut vaincu, sur la côte occidentale de l'Asie Mineure, dans les Cyclades, en Grèce où la flotte de Ptolémée s'empare coup sur coup de Sicyone, de Corinthe et de Mégare. L'année 307 fut favorable aux armées d'Antigone. Après s'être emparé d'Athènes, Démétrius cingla vers Chypre, où il détruisit la flotte de Ptolémée, mais, l'année suivante, le père et le fils échouèrent dans leur attaque combinée contre Péluse. Antigone se tourna alors contre Rhodes qui résista grâce aux secours des trois confédérés. Mais Ptolémée, toujours habile, après l'avoir soutenue dans sa résistance, lui donna le conseil de traiter avec Antigone. Les Rhodiens se trouvèrent si bien de ses bons offices et de ses conseils qu'ils lui décernèrent les honneurs divins avez le titre de Sôter. Une nouvelle ligue se forma bientôt contre Antigone; aux trois confédérés se joignit Séleucus. La journée d'Ipsus, fatale à Antigone, ne mit pas fin aux rivalités. Le partage de ses dépouilles divisa les vainqueurs en deux camps et donna lieu à de nouvelles guerres, au cours desquelles Ptolémée fut assez heureux pour reprendre Chypre et Cyrène.

Une légende assez consolante pour l'amour-propre du peuple vaincu faisait naître Alexandred'Olympias et du roi sorcier Nectanébo réfugié en Macédoine. Ptolémée Sôter étant considéré comme fils de Philippe, il en résultait que les Lagides avaient tous les droits possibles à la double couronne. De fait, Ptolémée Ier Sôter se montra en Égypte scrupuleux observateur de la légalité : les monuments portant les cartouches de Philippe Arrhidée et d'Alexandre Aegos en font foi. Ce n'est qu'en 304 qu'il se décida à prendre la couronne et les titres royaux et fit frapper monnaie en son nom, mais en datant ses années de règne d'après la durée totale de son gouvernement. L'an 39 de ce comput, il associa à son trône Ptolémée, le fils qu'il avait eu de Bérénice sa première femme. Son règne n'a pas laissé que des souvenirs militaires : c'est à Sôter, en effet, qu'il faut faire honneur des rapides procès que fit la nouvelle capitale. ll construisit le phare, dans l'île de Phares qu'il relia au port, fonda l'école et la bibliothèque d'Alexandrie, attira les plus illustres des savants et des artistes grecs. Le Museon, son palais, était une véritable académie. II se montra, en un mot, fidèle exécuteur des magnifiques projets d'Alexandre.

Philadelphe.
Son fils et successeur, Philadelphe, né à Cos pendant l'expédition de 308 dans les Cyclades où Bérénice l'avait suivi, eut pour précepteurs Straten et Philètas. Le règne de ce prince s'en ressentit heureusement. Sans prendre à la lettre les louanges dithyrambiques de Théocrite, on peut dire néanmoins que, pendant les trente-huit ans de règne de Philadelphe, l'Égypte fut très prospère. Alexandrie, devenue de plus en plus la capitale intellectuelle du monde grec (Les Écoles d'Alexandrie), redoubla d'éclat et de grandeur; le phare fut achevé, la bibliothèque transportée du Brachium dans le magnifique palais du Serapeum, la Version des Septante (Bible) commencée. D'autres traductions paraissent aussi avoir été entreprises à la même époque, notamment celle d'une histoire d'Égypte par Manéthon. L'intérêt porté aux questions économiques et commerciales ne fut pas moins grand. Pour créer de nombreux débouchés aux produits des industries locales, on explore la côte orientale et l'intérieur de l'Afrique (voyages de Timosthène et d'Aristocréon) (La découverte et l'exploration de l'Afrique); le canal du Nil à la mer, repris par Neko (Basse Époque) et par Darius, est continué; des flottes partent d'Arsinoé (non loin de Suez) dans la direction de la mer des Indes et du golfe Persique. Cette révolution opérée par les idées grecques ne porte néanmoins aucune atteinte à la religion de l'Égypte. A l'exemple des pharaons, Philadelphe affecte des revenus aux temples, contribue à leur embellissement et même les reconstruit (Isis de Philae). Ses guerres avec son frère Magna, l'instigateur de la révolte de Cyrène et Antiochus se terminèrent à son avantage. Il engagea ce dernier à répudier Laodice pour épouser sa fille Bérénice.

Evergète Ier.
Son fils Evergète lui succéda en 246. Le premier acte de ce prince fut l'expédition  de Syrie qu'il entreprit pour venger sa soeur Bérénice, que Laodice venait de faire assassiner peu de temps après la mort d'Antiochus. Il parcourut en vainqueur toute l'étendue de l'empire séleucide, et rapporta triomphalement en Égypte les statues divines et les trésors des temples enlevés par Cambyse. Quelques années après (240), Séleucus II, roi de Syrie, se crut assez fort pour envahir l'Égypte. Une seconde expédition d'Evergète le contraignit à la fuite. Mais s'étant réconcilié avec son frère Antiochus Hierax, que le roi d'Égypte avait favorisé à ses dépens, celui-ci jugea expédient de conclure une trêve de dix ans. De nouveaux démêlés s'élevèrent entre les deux frères et favorisèrent les desseins d'Evergète, qui put se livrer en toute sécurité à l'administration intérieure de l'Égypte. Il éleva un temple à Canope, continua celui de Pselchis (Dakkeh) fondé par le roi de Nubie, Ergamène, ainsi que ceux de Philae et d'Esneh. Son nom ainsi que celui de sa femme et soeur, la reine Bérénice, se lisent également sur plusieurs monuments de Thèbes. Ce fut cette reine qui, pendant la campagne d'Asie, consacra à Aphrodite sa chevelure pour l'heureux retour de son époux. On sait que l'astronome Conon de Samos, pour donner une explication flatteuse de sa disparition, publia qu'elle brillait au ciel sous la forme d'une constellation (Chevelure de Bérénice).

Philopator.
Philopator, fils d'Evergète, souilla son règne du sang de son frère Magas, de sa mère Bérénice et de son hôte, Cléomène, le roi fugitif de Sparte, que son père avait accueilli. Il commit tous ces crimes à l'instigation de son ministre Sosibios, qui n'avait trouvé rien de mieux, pour conserver son ascendant, que de flatter ses plus bas penchants. Le surnom de Philopator, dont il jugea prudent de s'affubler, ne donna pas le change à l'opinion publique, qui s'obstina à le rendre responsable de la mort de son père. L'histoire militaire de son règne est remplie par ses guerres avec Antiochus le Grand. Après deux malheureuses campagnes, il défit à Raphia (216) son redoutable adversaire qui prit la fuite et se résigna à un traité onéreux. 

Philopator reprit possession des villes de Palestine et de Syrie conquises par ses prédécesseurs. II lui restait un crime à commettre : le meurtre de sa femme, Arsinoé. Peu de temps avant sa mort, il la sacrifia à sa passion pour Agathoclée. Ses forfaits ne le détournèrent pas, néanmoins, de la politique prudente des Ptolémées à l'égard du parti clérical : il le combla comme avaient fait ses pères et attacha son nom à de nombreuses constructions ou restaurations à Akhmîn, à Thèbes, à Edfou, à Philae, à Dakkeh, etc.

Epiphane.
Son fils Epiphane n'avait que cinq ans quand il fut appelé à régner. Trois régents se succédèrent pendant sa minorité : Agathaclès, Tlepolemos et Aristomène. Le peuple, lassé du premier, se révolta et arracha au jeune roi sa condamnation; le second perdit également la vie en perdant le pouvoir. Les troubles qui éclatèrent en Égypte pendant la minorité d'Epiphane incitèrent Antiochus à reprendre les hostilités. Battus par Scopas, général de Ptolémée, il ne tarda pas à prendre sa revanche et fit rentrer sous sa domination les villes de Cilicie, de Lycie, de Syrie et de Palestine qui avaient des garnisons égyptiennes. Les affaires d'Europe le déterminèrent néanmoins à ne pas abuser de sa victoire et il scella la paix de la main de sa fille Cléopâtre, qu'Epiphane épousa. Cette princesse apporta comme dot la province de Syrie. Epiphane se montra par ses cruautés le digne fils de son père; il n'épargna ni les révoltés de Lycopolis  (Assiout) qu'il fit mettre à mort, ni Scopas, son général, qu'il abandonna à la rancune d'Aristomène, ni même ce dernier, dont la tutelle lui pesait et qu'il condamna à prendre la ciguë. II n'eut pas lui-même une meilleure fin : il mourut empoisonné pendant les préparatifs d'une expédition contre le successeur d'Antiochus, après vingt-quatre ans de règne. Thèbes, Esneh, Edfou, Ombos, Philae, eurent part à ses largesses. Ses cartouches se répètent sur leurs monuments. Ajoutons que c'est en l'honneur d'Epiphane que les prêtres réunis à que rendirent le fameux décret bilingue, trouvé à Rosette et qui a été la base du déchiffrement des hiéroglyphes par Champollion.

Philométor.
Philométor n'avait que cinq ans quand il succéda à son père. Pendant sa minorité, la régence fut d'abord exercée par sa mère, Cléopâtre, puis, simultanément, par Lénéos et Euléos. La possession de la Coelésyrie, de la Phénicie et de la Judée mit encore aux prises les armées lagide et séleucide. L'appui moral de Rome que sa guerre avec Persée empêchait d'agir plus efficacement, ne put empêcher Antiochus de reconquérir les provinces abandonnées par son grand-père. II entra en Égypte, surprit Philométor dans Memphis et marcha sur Alexandrie, où le jeune frère du roi venait d'être proclamé sous le nom d'Evergète II. Une révolte des Juifs l'obligea à lever le siège, mais, avant de quitter l'Égypte, il eut soin de remettre lui-même Memphis aux mains de Philométor, avec l'espoir que la revendication de son trône mettrait ce dernier en guerre avec son frère. 

Au contraire, la crainte qu'il leur inspirait les unit dans un commun effort. Mais il ne fallut pas moins d'une nouvelle intervention de l'ambassadeur romain, Popilius Lenas, pour l'obliger à évacuer l'Égypte qu'il avait de nouveau envahie (168). Toutefois, l'espoir d'Antiochus ne fut pas complètement déçu : le partage de l'empire mit aux prises les deux frères. Evergète ne voulait pas se contenter de Cyrène et de la Libye; Philométor refusait de se rendre aux ordres du sénat romain, qui lui enjoignait d'y ajouter Chypre. Ils finirent par tomber d'accord au prix de la concession de quelques villes cypriotes, et la fin du règne de Philométor ne fut troublée par d'autres guerres que celle qu'il fit pour soutenir les prétentions d'Alexandre Bala contre Démétrius, puis celles de Démétrius contre Alexandre Bala. Heureux dans ses entreprises, il assura chaque fois le succès de son allié.

Evergète II et Sôter II.
Evergète II (Physcon), qui n'attendait que sa mort pour prendre possession du trône d'Égypte, commença par faire exécuter son neveu Eupator, que Cléopâtre avait fait proclamer roi. II faut dire qu'il n'était arrivé à ses fins qu'en épousant la veuve de son frère et en s'attribuant la régence. Une insurrection, causée par la haine et le dégoût qu'il inspirait, l'obligea à se réfugier à Chypre avec sa seconde femme, Cléopâtre II, fille de la première. Mais la victoire que remporta son parti lui rendit le pouvoir et Cléopâtre dut, à son tour, chercher refuge à la cour de Démétrius Nicator.

Sôter II ou Lathyre fut en quelque sorte imposé par les Alexandrins. Sa mère, Cléopâtre II, qui favorisait son frère Alexandre, après des années d'hostilité sourde, le fit faussement convaincre de tentatives parricides et exiler en qualité de gouverneur à Chypre (106) et fit couronner son frère. Alexandre lui marqua quelques années plus tard sa reconnaissance en la faisant assassiner. Cet acte monstrueux et beaucoup d'autres, comme la violation du tombeau d'Alexandre le Grand, réussirent si bien à lui aliéner l'affection des Alexandrins qu'il dut fuir à son tour, chassé par une émeute, et abandonner le trône à l'exilé de Chypre. Le retour de Lathyre ne rencontra pas le même accueil dans toute l'Égypte : Thèbes refusa de le reconnaître. Il se mit en route contre l'ancienne capitale, s'en empara et la livra à toutes les horreurs de la guerre. Son règne s'acheva paisiblement en 81.

L'ingérence de Rome.
Le meurtre de sa fille, Bérénice, par Alexandre II, fils de Ptolémée Alexandre Ier, et d'Alexandre II par le peuple indigné, amena eu pouvoir son fils naturel, Ptolémée Aulète. Aulète, qui avait tout à craindre des Romains, dont il remplaçait le protégé, par le libre choix du peuple d'Alexandrie, ne tarda pas à devenir à son tour leur client. Chassé d'Alexandrie par ce même peuple indigné de ce qu'il s'était laissé prendre l'île de Chypre, il dut se réfugier à Rome et y solliciter par toutes sortes de bassesses les secours nécessaires à la reprise de son pouvoir. Pompée, alors consul, lui donna des lettres pour Gabinius, gouverneur de Syrie, qu'il acheva de gagner avec des présents. C'est ainsi qu'il put rentrer en 55 à Alexandrie, accompagné d'une légion, et s'y maintenir avec une garde de soldats gaulois que lui laissa Gabinius. En vertu de son testament, dont Pompée avait été constitué dépositaire, Aulète eut pour successeurs son fils Ptolémée (Neos Dyonysios), âgé de treize ans, et sa fille Cléopâtre VII, qui en avait dix-sept. Les secours que cette dernière envoya à Pompée pendant sa guerre contre Jules César, la firent chasser d'Alexandrie ou elle ne rentra que rappelée par César après sa victoire.

L'ingérence des Romains dans les affaires des Ptolémées ne tarda pas à blesser les Alexandrins, excités, d'ailleurs, par l'eunuque Pothin, Théodote et Achillas, ministres du jeune Ptolémée, qui l'entretenaient dans une perpétuelle aversion de sa soeur. Une armée de 22 000 hommes, commandée par Achillas, marcha sur Alexandrie. César s'enferma dans le Bruchion avec Cléopâtre qu'il refusa de livrer au peuple en délire et soutint un siège qui ne prit fin qu'à l'arrivée des renforts envoyés par Domitius Calvinus. Ptolémée s'était constitué son prisonnier. Victorieux, César consentit à le délivrer, estimant que le groupement de toutes les forces autour du roi, loin de lui créer de nouvelles difficultés, lui permettrait de s'emparer de l'Égypte par une victoire décisive. Et, en effet, à peine rendu à la liberté, Ptolémée prit le commandement de son armée, essuya une première défaite en essayant d'arrêter au passage Mithridate de Pergame qui se portait au secours de César, puis fut battu et perdit la vie dans une seconde rencontre avec les troupes de ce dernier (47). Fidèle exécuteur du testament d'Aulète, César n'usa pas de sa victoire pour s'emparer de l'Égypte, mais appela le jeune frère de Ptolémée à régner conjointement avec Cléopâtre

Celle-ci resta d'ailleurs après comme avant la véritable souveraine du pays. La mort de son second mari, empoisonné après un très court règne, ne changea donc rien à la situation. Elle se résigna à régner dans la dépendance de Rome, dont les légions restaient en permanence en Égypte. César assassiné, elle prit parti pour les triumvirs et obtint la reconnaissance de son fils Césarion comme roi. On sait comment elle s'empara de l'esprit d'Antoine qui l'avait mandée à Tarse pour s'expliquer sur son attitude pendant la guerre civile. Elle sut se servir habilement de lui pour étendre les possessions de l'Égypte : c'est ainsi quelle se fit donner toute la région orientale du bassin de la Méditerranée, la Phénicie, la Syrie, une partie de la Cilicie, Chypre, l'Arabie des Nabatéens, en somme, la plupart des pays en relations commerciales avec Alexandrie. Antoine ayant répudié, pour l'épouser, sa femme Octavie, soeur de son collègue Octave, celui-ci le fit accuser devant le Sénat d'avoir démembré l'Empire et destituer. La guerre fut déclarée à Cléopâtre. La bataille navale d'Actium, perdue par Antoine, suivie bientôt de l'invasion de l'Égypte par les légions d'Octave, mit à néant les desseins grandioses de Cléopâtre. Après la prise d'Alexandrie, leur dernier refuge, Antoine et Cléopâtre se donnèrent la mort, le premier pour ne pas tomber vivant aux mains de son rival, la dernière après avoir vainement essayé ses charmes sur Octave, et pour échapper à l'humiliation d'être exhibée vivante à son triomphe (30). L'Égypte fut réduite en province romaine. (Georges Bénédite).

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