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Wagner (Wilhelm
Richard), compositeur né à Leipzig
(Allemagne)
en 1813, mort à Venise (Italie)
en 1883. Tout en faisant ses humanités à Leipzig, il étudiait
le piano avec Gottlieb Müller et le contrepoint
avec Weinlig. Ses premiers essais furent des compositions instrumentales
et l'esquisse d'un opéra, le Mariage,
qui resta inachevé. Il écrivit ensuite un autre opéra,
les Fées,
qui ne fut représenté qu'après sa mort, à Munich,
en 1888. Engagé, en 1834, comme chef d'orchestre
à Magdebourg, il put débuter obscurément avec un ouvrage
intitulé das Liebesverbot, dont il avait pris le sujet dans
une comédie de Shakespeare, Mesure
pour mesure. Peu après il passait au théâtre de
Koenigsberg, qui bientôt faisait
faillite, et allait remplir alors les mêmes fonctions à Riga,
où il faisait exécuter deux ouvertures'
Columbus et Rule Britannia.
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Richard
Wagner, par P. A. Renoir.
En 1839, Richard Wagner, qui avait épousé
une jeune actrice, Minna Planer, se rendit à Paris avec sa femme.
Il y mena une vie précaire, réduit, pour gagner sa vie, faire
les réductions au piano de divers opéras,
entre autres de la Reine de Chypre,
d'Halévy, et de la Favorite, de Donizetti. C'est pendant
son séjour de trois années à Paris qu'il écrivit
Rienzi et le Vaisseau fantôme, et, lorsqu'il retourna
en Allemagne,
il put faire représenter ces deux ouvrages à Dresde : le
premier en 1842, le second en 1843, et le succès du Vaisseau
fantôme le fit nommer maître de chapelle de la cour. Rienzi
était conçu dans la forme de l'opéra traditionnel,
mais le Vaisseau fantôme s'en écartait déjà
résolument. En 1845, Wagner donnait, à Dresde, Tannhäuser,
où l'on reconnaît encore, comme dans Lohengrin,
l'influence de Weber.
En 1849, Richard Wagner prend part à
l'insurrection de Dresde; il est poursuivi et se réfugie en Suisse.
Il publie alors plusieurs écrits : l'Art et la Révolution
(1849); l'Oeuvre d'art de l'avenir (1850); Art et climat
(1850), Opéra et drame (1851), et un Essai autobiographique
et critique (1851). C'est pendant son exil en Suisse que Lohengrin,
grâce à l'influence de Liszt, put
être représenté à Weimar
(1850). Mais déjà Wagner travaillait à sa tétralogie
de l'Anneau du Nibelung (Les
Niebelungen),
dans laquelle ses principes devaient être affirmés d'une façon
formelle, En 1860, il se rendit à Paris. Il donna, à la salle
Ventadour (Paris), trois grands concerts, et il parvint, grâce à
de puissantes protections, à faire jouer à l'Opéra
son Tannhaüser, qui tomba sous les sifflets.
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Richard
Wagner (1813-1883).
De retour en Allemagne,
il fut appelé à Munich en 1864 par le jeune roi Louis II
de Bavière,
qui lui fit don d'une riche villa sur les rives du lac de Starnberg et
lui témoigna une admiration dont Richard Wagner sut largement tirer
profit. Il commença parfaire venir son élève Hans
de Bülow, le fit nommer chef d'orchestre du théâtre royal
et lui confia le soin de monter Tristan et Ysolde,
qui fut joué à Munich en 1865, et les Maîtres chanteurs
de Nuremberg,
qui parurent en 1868. Il avait, pendant ce temps, terminé sa tétralogie
de l'Anneau du Nibelung, dont les quatre parties étaient
: l'Or du Rhin, prologue; la Walkyrie,
Siegfried
et le Crépuscule des dieux. Dès 1869, il faisait représenter
à Munich l'Or du Rhin, et l'effet produit fut tel sur son
royal protecteur, que celui-ci lui facilita l'exécution du projet
grandiose qu'il avait conçu de construire un théâtre
spécial, établi d'après ses plans (avec un orchestre
caché aux yeux des spectateurs), et destiné à la représentation
de ses oeuvres. Ce théâtre fut élevé à
Bayreuth, où il est devenu un lieu
de pèlerinage pour les wagnériens fervents. C'est là
qu'eurent lieu, en 1876, les premières représentations du
cycle complet de l'Anneau du Nibelung, en présence de Guillaume
Ier
et de Louis II. On put croire que Wagner, dans cette oeuvre colossale,
avait poussé ses idées à l'extrême; il sembla
pourtant les dépasser encore dans Parsifal (1882), qui fut
son dernier ouvrage. Wagner, qui avait rompu son premier mariage, avait
épousé en 1869 Cosima Liszt, elle-même séparée
de son premier mari, Hans de Bülow.
La renommée de Richard Wagner est
immense, comme son oeuvre. Génie d'une rare puissance, doué
d'une inébranlable force de volonté, il a poussé ses
principes à leurs limites extrêmes, et provoqué par
là, en même temps que des critiques très vives, des
admirations sans réserve. Sa conception de la musique au théâtre
l'a profondément éloigné de l'opéra traditionnel.
Écrivant lui-même ses poèmes, il en a proscrit tout
ce qui ne se rapportait pas directement à l'action et n'était
que le prétexte des « ballets » ou des « divertissements
» de l'opéra italien ou français.
Dans sa musique, coupée non plus en « numéros »
mais en actes et en scènes, aucune concession n'est faite à
la virtuosité proprement dite : les « airs », les «-cavatines-»,
les traits brillants du bel canto disparaissent; les soli sont rares. Le
chant, ou, plus exactement, la déclamation des acteurs, quand il
n'est pas noyé dans les ensembles vocaux, est presque toujours strictement
encadré dans les dessins de l'orchestre. Aux lieu et place du chant
ainsi sacrifié, la trame continue de la symphonie
coupée de leit-motive devient le moyen principal de l'expression
dramatique.
Quelle que soit la valeur propre de ce
système et les réserves qu'il faille faire sur cet emploi
continu et, disons le mot, fatigant de l'orchestre, sur la monotonie quelque
peu excessive de récitatifs trop
prolongés, sur le sacrifice, trop fréquent dans les dernières
oeuvres, de l'intérêt dramatique au symbole philosophique
ou moral, on a reconnu très tôt à Richard Wagner une
place éminente dans l'histoire de la musique,
par la splendeur et la puissance de son orchestration, la couleur et le
charme poétiques de certaines pages, où il a atteint les
limites dernières de l'expression dramatique, enfin la très
haute idée qu'il s'est faite de son art.
Poète, critique, penseur, en même
temps que musicien, Richard Wagner a laissé, outre ses oeuvres musicales
et les poèmes qu'il a composés pour ses drames lyriques,
des Lettres et des Esquisses autobiographiques,
de nombreux et importants opuscules esthétiques et philosophiques,
qui ont été réunis dans ses Gesammelte Schriften
(1871-1883), et où l'on trouve exposées ses idées
sur ce qu'il a appelé « l'oeuvre d'art de l'avenir ».
Alliance intime de la musique et de la poésie, et aussi de la danse
et de la mimique, de la peinture
et de l'architecture,
le drame wagnérien, que son créateur comparait à la
tragédie grecque, prend ses sujets
dans les mythes,
créations antiques de l'âme populaire et, en leur donnant
une valeur symbolique, vise à leur faire exprimer ce qu'il y a de
plus profond dans la destinée humaine. (NLI). |
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