Aperçu |
La
matière
interstellaire est loin d'être répartie uniformément.
On la rencontre pour l'essentiel concentrée en masses bien définies,
des nuages de diverses sortes, dans lesquels ont peut définir en
première approche deux grandes catégories : les nuages diffus,
principalement formés d'atomes d'hydrogène,
et les nuages denses, parfois gigantesques, riches en molécules
et renfermant des poussières. En fait, il
existe également des types de nuages intermédiaires entre
ces deux familles. L'évolution d'un type à l'autre étant
possible, et pouvant le plus souvent être mis en rapport avec les
effets perturbateurs des étoiles massives
proches.
Un destin
d'atome - Synthétisé au coeur d'une étoile,
un atome peut, au cours de sa longue existence, se trouver expulsé
par le vent stellaire dans le milieu interstellaire,
ionisé d'abord, puis neutre après la rencontre avec un électron.
Il peut ensuite passer quelque temps dans un nuage diffus, se trouver lié
ensuite avec un ou plusieurs autres atomes, formant ainsi une molécule,
parmi d'autres au sein d'un nuage moléculaire géant. Il peut,
même, si quelque grosse étoile se forme
à proximité, comme il s'en forme couramment dans les nuages
moléculaires, se voir de nouveau ionisé,
au sein d'une nébuleuses brillante, se recombiner en récupérant
l'électron perdu, et briller à son tour, avant de retourner
à l'anonymat. Toutes ces transformations pourront se reproduire
souvent. Il se peut aussi tout cela s'arrête... pour recommencer
autrement. Il suffit de la rencontre avec un rayon cosmique. Une particule
porteuse d'une énergie capable de briser dans le choc notre atome.
Son noyau, en se scindant, donnera alors naissance à deux nouveaux
atomes, plus petits, mais susceptibles de s'engager eux aussi dans une
existence tout aussi agitée...
Les
nuages diffus |
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Mise
en ordre |
Ces
nuages sont excessivement diluées. Ils referment un million à
un milliard d'atomes par mètre cube. Cela peut paraître beaucoup,
mais pour comparaison, l'air que nous respirons
contient autour de 25 milliards de milliards de milliards de molécules
par mètre cube. La température des
nuages diffus est de l'ordre d'une centaine de kelvins. Dans ces conditions,
l'hydrogène s'y rencontre principalement sous sa forme atomique
neutre. D'autres atomes y sont également présents en petites
quantités ainsi quelques molécules (CN et CH, par exemple).
Du fait de l'existence d'un fond diffus UV dans toute la Galaxie,
une petite proportion d'atomes est également ionisée (ions
de calcium et de titane, notamment). Parmi les nuages diffus, il est intéressant
deux familles un peu particulières, les cirrus infrarouges,
et les nuages à grande vitesse.
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Un
ciel plombé de cirrus infrarouges...
(Document
IRAS).
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Les cirrus
infrarouges - Ces nuages couvrent littéralement la voûte
céleste, comme l'a montré dans les années 1980
le satellite IRAS qui a permis de les découvrir. De par leur leurs
caractéristiques physiques, ils appartiennent bien à la catégorie
des nuages diffus. Ils partagent cependant avec les nuages denses une certaine
richesse en poussières. Ce sont d'ailleurs ces dernières,
lumineuses dans l'infrarouge, qui expliquent leur nom. Il semble que les
cirrus infrarouge correspondent à une étape précoce
de cheminement que suivent les atomes expulsées dans l'espace par
les étoiles à la fin de leur évolution.
Les nuages
à grande vitesse - Un tiers de la voûte céleste
est occupé des cohortes par de nuages très subtils se déplaçant
à grande vitesse (de l'ordre de 400 km/s!), et qui se détectent
par la méthode qui permet classiquement de repérer les masses
d'hydrogène neutre interstellaire, c'est-à-dire la raie à
21 cm. Trop rapides pour être en orbite autour de la Galaxie, certains
de ces bolides énigmatiques qui s'ébattent, pense-t-on, dans
le halo de la Voie lactée pourraient être des trombes de gaz
intergalactique s'abattant en chute libre sur notre
Galaxie. D'autres nuages à grande vitesse ou HVCs (High velocity
clouds), pourraient en revanche avoir été expulsés
dans le halo, à partir du disque galactique, par l'effet d'explosions
rapprochées de supernovae.
Les
nuages denses
Lorsque le masses
de gaz interstellaire sont plus froides encore que ne le sont celles qui
composent les nuages diffus, elles peuvent devenir plus denses. La densité
peut y dépasser plusieurs milliards de particules par mètre
cube. Des molécules peuvent s'y former en beaucoup plus grand nombre.
Plus de 120 espèces moléculaires ont déjà été
identifiées, parmi lesquelles, comme on peut s'y attendre la molécule
la plus largement majoritaire étant celle de hydrogène H2.
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Les molécules
de l'espace
Les nuages de molécules
témoignent de la chimie complexe qui se déroule dans l'espace.
Une chimie relativement surprenante si l'on songe à leur grande
dilution et très basse température de la matière
interstellaire. Cependant, la radioastronomie, et aujourd'hui l'astronomie
infrarouge permettent la détection de centaines de composés
chimiques. Certains sont assez simples. Citons le monoxyde de carbone,
l'ammoniac, le méthane ainsi que
des alcools, des éthers, et même l'eau que l'on rencontre
en très grandes quantités dans l'univers, comme l'a récemment
révélé le télescope spatial infrarouge ISO.
Mais il existe également des molécules comportant un nombre
plus élevé d'atomes. Par exemple : CH2CHCN, C2H5OH,
ou encore HC11N, et bien d'autres.
Les études
infrarouges révèlent par ailleurs l'existence de composés
mal identifiés, mais qui rappellent le benzène, et que chimistes
et astronomes appellent des hydrocarbures polycycliques aromatiques (PAH
= Polycyclic aromatic hydocarbons). Il pourrait s'agir, en somme,
de molécules organiques géantes (pratiquement de la taille
de petites poussières). Et cela incite certains chercheurs à
aller chercher dans l'espace les molécules qui aurait pu servir
de briques à partir desquelles les molécules qui composent
les organismes vivants auraient pu se bâtir. Un raccourci qui semble
quand même un peu trop rapide pour ne pas inciter à l'aborder
avec beaucoup de prudence. |
Avec une température
d'une dizaine de degrés au-dessus du zéro
absolu, ces nuages sont les objets les plus froids de l'univers. Une
bonne part d'entre eux, les nuages moléculaires géants, sont
aussi les plus gros objets que l'on puisse rencontrer dans une galaxie.
Les
nuages moléculaires géants
On dénombre
typiquement dans une spirale comme la nôtre de mille à deux-mille
nuages moléculaires géants. Ces masses ont une forme allongée
et peuvent atteindre plusieurs centaines d'années-lumière
de long, et renfermer chacun assez de matière première pour
former cent mille étoiles comme le Soleil.
Le nombre d'étoiles qui se forment, en moyenne, chaque année
dans notre Galaxie peut se compter sur les doigts d'une main. Cela signifie
donc que ces nuages géants sont économes de leurs richesses.
il n'en demeure pas mois que c'est en leur sein que se déroule le
processus d'astration. Ce sont les seuls endroits d'une galaxie où
la matière est suffisamment pour que le mécanisme de l'effondrement
gravitationnel démarre. Il faut juste le "pousse un peu". Et c'est
ce qui se produit chaque fois qu'un nuage moléculaire géant
traverse la discontinuité du champ gravitationnel global de la galaxie
que représente un bras spiral. Le processus de formation stellaire
peut également s'engager après la collision de deux nuages
moléculaires, ou sous l'effet des chocs provoqués par les
explosions des supernovae. Dans tous les cas, nuages
moléculaires et sites de formation stellaire
vont de pair.
La fin
de quelque chose - On le sait, la plupart du temps, les galaxies
elliptiques géantes, sont pratiquement dépourvues de
gaz. On y trouve, en revanche une population presque
exclusive d' étoiles vieilles. Ici, les amours de l'étoile
et du nuage, qui font la palpitation d'une galaxie, se sont terminées
depuis longtemps. On suppose que le gaz qu'elles renfermaient initialement
à été déjà complètement transformé
en étoiles, lors des collisions des petites galaxies qui ont servi
de matériau de construction à ces grosses galaxies. De fait,
une collision de galaxies, c'est d'abord une collision de nuages moléculaires
géants, et, partant une flambée de naissances stellaires.
Il se peut également que le gaz des galaxies elliptiques ait été
en partie perdu dans l'espace intergalactique à la suite des diverses
interactions de marées qu'une galaxie
subit au cours de son existence.
Les
poussières interstellaires
Les poussières
peuvent se rencontrer à la périphérie des étoiles
froides, et certaines géantes rouges peuvent
ainsi s'entourer d'une véritable coquille de poussières,
faite à partir du matériau refroidi qu'elles ont soufflé
dans l'espace. Les poussières ainsi formées finissent par
se disperser dans l'espace, et l'on peut alors les distinguer par leur
rayonnement infrarouge, au sein de nuages diffus, appelés cirrus
infrarouges. Mais au final, le lieu de prédilection pour les poussières
interstellaires, ce sont le nuages moléculaires géants, froids
et accueillants.
Ces poussières
sont constituées de grains très fins, de l'ordre d'un demi-micron.
Selon le modèle le plus communément étudié,
elles sont constituées d'un noyau de silicates et de graphites,
enrobé de matériaux volatiles, dans lesquels domine la glace
d'eau, mais dans lequel ont peut aussi rencontrer toutes sortes de molécules,
à commencer par de l'ammoniac, également sous forme de glace.
Les modèles
les plus récents des poussières interstellaires font voir
les grains qui les constituent comme des assemblages plus complexes. Des
agglomérations qui rappellent un peu nos "moutons". Quoi qu'il en
soit, les poussières interstellaires représentent environ
2% de leur masse des nuages moléculaires géants. Grâce
aux poussières qui les rendent opaques, il est tout à fait
possible d'observer à l'oeil nu plusieurs nuages moléculaires
géants, et d'autres plus petits. |
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