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Turkménistan

40 00 N, 60 00 E
Le TurkmĂ©nistan est un Etat d'Asie Centrale,  bordĂ© Ă  l'Ouest (sur 1700 km) par la Mer Caspienne et enclavĂ© entre le Kazakhstan, l'OuzbĂ©kistan, l'Afghanistan et l'Iran. D'une superficie de 488.100 km², et principalement constituĂ© de vastes plaines dĂ©sertiques, notamment le dĂ©sert du Karakoum, l'un des plus grands dĂ©serts de sable au monde, le pays est peuplĂ© de 5 millions d'habitants. Il est divisĂ©, pour son administration, en une ville indĂ©pendante, la capitale Achgabat et 5 provinces (welayatlar)  : Ahal Welayaty (chef-lieu : Anew),  Balkan Welayaty (ch.-l. : Balkanabat), Dashoguz Welayaty, Lebap Welayaty (ch.-l. : TĂĽrkmenabat), Mary Welayaty. Achgabat compte 727.000 habitants. Les autres villes importantes sont : TĂĽrkmenabat (235.000 hab.), Dasoguz (167.000 hab.), Mary (115.000 hab.).
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Carte du Turkménistan.
Carte du Turkménistan. Source : The World Factbook.(Cliquer sur l'image pour afficher une carte plus détaillée).

Géographie physique du Turkménistan

Grandes régions.
Désert du Karakoum.
Le principal trait gĂ©ographique du TurkmĂ©nistan est le dĂ©sert du Karakoum, qui occupe environ 70 % du territoire national. Ce dĂ©sert sableux s'Ă©tend du nord-ouest au sud-est et est constituĂ© de dunes mobiles (barkhanes), de plateaux caillouteux et de zones de grès Ă©rodĂ©. C'est une rĂ©gion extrĂŞmement aride, recevant moins de 100 mm de prĂ©cipitations annuelles, avec des tempĂ©ratures estivales dĂ©passant souvent 45 °C. 

Montagnes.
Le relief général du pays est relativement plat dans sa majorité, notamment dans la partie centrale et septentrionale. Cependant, on trouve des zones montagneuses dans le sud du pays, le long de la frontière avec l'Iran, où se dressent les monts Kopet-Dag. Ces montagnes constituent la principale formation orographique du pays, avec des sommets qui culminent à plus de 2900 mètres d'altitude. Elles jouent un rôle crucial dans le régime climatique local en bloquant les flux d'air humide provenant du sud-ouest, contribuant à l'aridité du centre du pays. Ces montagnes sont aussi sujettes à une activité tectonique significative, la région étant sismiquement active.

Plateau d'Oust-Iourt.
Au nord-est, on trouve le plateau d'Oust-Iourt, partagé avec l'Ouzbékistan et le Kazakhstan. Cette zone est constituée de formations rocheuses anciennes et de plateaux tabulaires entaillés de vallées sèches. Le climat y est continental sec avec de fortes amplitudes thermiques. La végétation naturelle est steppique et semi-désertique.

CĂ´tes de la caspienne.
Les zones côtières bordant la mer Caspienne, à l'ouest, sont principalement constituées de plaines basses, parfois en dessous du niveau de la mer. Cette dépression, connue sous le nom de Sarygamysh ou Karabogaz, est caractérisée par des marécages salés, des sebkhas et des lagunes. La mer Caspienne elle-même est une mer fermée (ou plutôt un grand lac) sans écoulement vers l'océan, dont le niveau varie selon les apports fluviaux et les taux d'évaporation. Les ressources halieutiques, notamment l'esturgeon, ont une importance locale, bien que fortement réduites ces dernières décennies en raison de la pollution et de la surpêche.

Hydrographie.
L'hydrographie du Turkménistan est dominée par l'Amou-Daria, principal cours d'eau du pays, qui marque la frontière nord-est avec l'Ouzbékistan. Ce fleuve est vital pour l'irrigation dans une grande partie du pays. Il alimente le canal du Karakoum, l'un des plus longs canaux artificiels du monde, qui traverse le pays d'est en ouest sur plus de 1300 km. Ce canal joue un rôle central dans l'agriculture irriguée, bien qu'il soit également à l'origine de pertes d'eau importantes par évaporation et infiltration, contribuant à la salinisation des sols et à la dégradation environnementale.

Sols.
Les sols du Turkménistan sont largement dominés par des sols désertiques (notamment des sols salins ou alcalins), peu fertiles, mais localement rendus exploitables grâce à l'irrigation. Dans les régions situées le long de l'Amou-Daria et du canal du Karakoum, les sols sont utilisés pour la culture du coton, du blé et de fruits, bien que cette agriculture soit souvent intensive en eau et sujette à des risques de salinisation secondaire.

Climat.
Le climat du Turkménistan est de type continental aride à semi-aride, avec des hivers froids et secs, et des étés très chauds. Les précipitations annuelles moyennes varient entre 80 mm dans le centre désertique et environ 300 mm sur les contreforts du Kopet-Dag. La variabilité climatique interannuelle est forte, ce qui rend la planification agricole incertaine.

Biogéographie de la Turkménistan

Le pays abrite environ 2000 espèces de plantes vasculaires, dont près de 20 % sont considérées comme endémiques. Les zones les plus riches en endémisme sont les montagnes du Kopet-Dag et certaines parties du Karakoum moins explorées. La faune est également variée avec plus de 80 espèces de mammifères, 380 espèces d'oiseaux, 60 espèces de reptiles et environ 3 000 espèces d'insectes recensées. Des espèces menacées comme la gazelle de Goiter (Gazella subgutturosa), le léopard de Perse ou encore le vautour moine sont encore présentes, principalement dans des zones protégées.

La grande majorité du pays, environ 70 %, est recouverte par le désert du Karakoum. Ce milieu est caractérisé par une très faible pluviométrie (moins de 150 mm/an) et de fortes amplitudes thermiques, aussi bien entre le jour et la nuit qu'entre l'été et l'hiver. La végétation y est clairsemée, principalement constituée d'espèces xérophiles comme les saxaouls (Haloxylon), le Calligonum, l'Artemisia, ou encore des tamaris. Ces plantes sont généralement dotées de racines profondes ou de mécanismes de réduction de la transpiration, leur permettant de survivre dans des sols sableux et salins.

La faune du Karakoum est bien adaptée aux conditions extrêmes. On y trouve des reptiles tels que la vipère du désert, le varan du désert, ou divers geckos, ainsi que des mammifères comme le renard du désert, le hérisson du désert et parfois le chat de Pallas dans les zones plus rocheuses. Les insectes, notamment les coléoptères, y sont nombreux, et certains oiseaux résidents ou migrateurs comme l'alouette de Dupont et le traquet du désert trouvent refuge dans les rares zones végétalisées.

Au sud, les monts Kopet-Dag qui longent la frontière iranienne représentent une enclave biogéographique distincte. Le climat y est semi-aride à subhumide selon l'altitude, avec des précipitations pouvant dépasser 300 mm annuels. Ce massif abrite des forêts ouvertes de genévriers, de pistachiers sauvages et d'espèces à feuilles persistantes. Il constitue une zone refuge pour de nombreuses espèces végétales endémiques du sud-ouest de l'Asie, et héberge également une faune variée, comprenant notamment le léopard d'Asie centrale (rare), le mouflon à manchettes, le lynx et plusieurs espèces d'aigles et de vautours.

Le nord-est du pays, à la limite de la vallée de l'Amou-Daria, forme une transition écologique importante entre le désert du Karakoum et les zones alluviales fertiles. On y trouve des steppes salées et semi-désertiques où la végétation est dominée par les armoises (Artemisia herba-alba), les salicornes et les salsolacées. Ces milieux, bien que pauvres en végétation, sont vitaux pour certaines espèces d'oiseaux nicheurs ou migrateurs, comme les outardes, les vanneaux ou les oiseaux limicoles.

Les zones humides les plus importantes sont associées à la mer Caspienne à l'ouest et aux deltas fluviaux. Le golfe de Kara-Bogaz-Gol, dépression salée en communication intermittente avec la mer Caspienne, présente une salinité extrême mais héberge néanmoins des communautés microbiennes spécialisées et constitue une halte pour certaines espèces d'oiseaux migrateurs. Le delta de l'Amou-Daria, aujourd'hui fortement réduit par la surexploitation des ressources en eau, abritait autrefois de vastes roselières, des forêts alluviales de peupliers et d'ormes, ainsi qu'une faune aquatique et ornithologique exceptionnelle.

Les zones agricoles irriguées, principalement situées dans les oasis naturelles et artificielles le long du canal du Karakoum et de l'Amou-Daria, ont modifié de manière significative la biogéographie locale. Si elles permettent le développement de zones végétalisées, elles provoquent également une forte salinisation des sols, une perte de biodiversité native et une artificialisation du paysage. Toutefois, elles attirent aussi de nouvelles espèces adaptées aux milieux anthropisés comme les moineaux, les renards et certains amphibiens.

Le Turkménistan compte plusieurs aires protégées, dont les réserves de Repetek (dans le désert du Karakoum), de Köpetdag, et de Badkhyz. Ces zones visent à protéger des écosystèmes désertiques, semi-désertiques et montagnards représentatifs. Cependant, les menaces sur la biodiversité restent nombreuses : surpâturage, surexploitation des nappes phréatiques, monocultures intensives de coton, fragmentation des habitats, et effets croissants du changement climatique.

Géographie humaine de la Turkménistan

Population.
La population du Turkménistan est estimée à environ 6 millions d'habitants, ce qui en fait l'un des pays les moins peuplés de la région, en rapport avec sa vaste superficie. La majorité de la population vit dans les vallées alluviales, les oasis et le long des axes d'irrigation, tandis que les zones désertiques centrales restent très peu peuplées. Des villes comme Achgabat (près des Kopet-Dag), Mary (dans l'oasis de Merv), et Türkmenabat (près de l'Amou-Daria) se sont développées dans ces zones plus favorables.

L'urbanisation est relativement faible par rapport à d'autres pays de la région. La population vit majoritairement dans les zones rurales ou dans des villes moyennes. Achgabat, la capitale, est une exception : elle concentre une forte densité humaine, des infrastructures modernes et un encadrement politique et sécuritaire strict. La ville est perçue comme une vitrine du pouvoir, avec ses bâtiments en marbre blanc, ses monuments à la gloire des présidents successifs, et ses quartiers planifiés. Les autres villes, comme Mary, Türkmenabat ou Dashoguz, présentent un développement plus modéré, généralement articulé autour de l'agriculture, des infrastructures d'irrigation et de quelques pôles industriels.

La population turkmène est majoritairement jeune, bien que le rythme de croissance démographique ait ralenti depuis les années 2000. La pyramide des âges reste dominée par les tranches inférieures, avec plus de 40 % de la population ayant moins de 25 ans, mais la baisse du taux de natalité et l'émigration prolongée tendent à vieillir lentement la population active. L'espérance de vie tourne autour de 68 ans pour les hommes et 73 ans pour les femmes, ce qui reste inférieur à la moyenne mondiale, en partie à cause d'un système de santé sous-financé, d'un accès inégal aux soins et d'une pollution environnementale localisée, notamment dans les zones industrielles.

L'émigration est un phénomène social notable. Depuis la fin des années 1990, des centaines de milliers de Turkmènes ont quitté le pays, principalement pour la Russie, la Turquie ou le Kazakhstan, à la recherche de meilleures conditions de vie ou d'opportunités économiques. Ce phénomène a des répercussions sur la démographie active et sur la structure des familles, nombre d'entre elles reposant sur les envois de fonds des membres expatriés.

Le modèle familial reste largement patriarcal et communautaire. Les structures familiales élargies sont encore courantes, notamment en milieu rural, où plusieurs générations vivent souvent sous le même toit. Le mariage est une étape sociale essentielle, parfois arrangé, avec une dot encore présente dans certaines régions. Les femmes turkmènes participent activement à l'économie domestique, à l'agriculture et aux fonctions publiques, mais leur rôle dans la sphère politique ou décisionnelle reste limité. L'éducation est officiellement obligatoire et gratuite. Les infrastructures éducatives varient ctoutefois fortement selon les régions. De nombreuses écoles rurales souffrent d'un manque d'enseignants qualifiés et de ressources. L'enseignement supérieur est contrôlé par l'État, et de nombreux étudiants qui souhaiteraient poursuivre leurs études à l'étranger rencontrent des obstacles administratifs.

L'économie fortement centralisée a façonné une société dépendante de l'État, notamment via l'emploi public, les subventions à l'énergie, et la distribution de logements. Cette dépendance s'accompagne d'un contrôle étroit de l'expression publique, des médias et des déplacements. Les ONG internationales, les organisations indépendantes et les journalistes sont fortement restreints. L'accès à Internet est limité et censuré, ce qui isole une partie de la population des courants sociétaux mondiaux.

Quelques-unes des grandes villes du Turkménistan

• Achgabat, la capitale, est sans conteste la ville la plus emblématique du pays. Elle est connue pour son architecture monumentale, ses bâtiments recouverts de marbre blanc et ses avenues larges et impeccablement entretenues. C'est un exemple frappant de l'esthétique post-soviétique mêlée à une volonté de grandeur nationale. La ville a été profondément remodelée au cours des dernières décennies pour devenir une vitrine politique, avec de nombreuses statues, musées et complexes gouvernementaux, dont beaucoup célèbrent l'indépendance et les dirigeants du pays. Achgabat est également le principal centre économique, politique et culturel du pays, accueillant les principales universités, théâtres et institutions nationales.

• Turkmenabat, autrefois appelée Tchardjou, est la deuxième plus grande ville du Turkménistan. Située à l'est, près de la frontière avec l'Ouzbékistan, elle joue un rôle clé en tant que carrefour commercial et industriel. Traversée par l'Amou-Daria, cette ville bénéficie d'une situation stratégique sur les anciennes routes caravanières. Aujourd'hui, elle est un point névralgique du réseau ferroviaire et routier du pays, facilitant les échanges régionaux. Elle possède aussi une certaine importance culturelle, avec plusieurs écoles, centres scientifiques et institutions éducatives.

• Mary, localisée dans le sud-est du pays, est une ville historique au riche passé. Proche du site antique de Merv

inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco, elle constitue un lien direct avec l'histoire millénaire de la région. Aujourd'hui, Mary est un centre énergétique majeur du Turkménistan, jouant un rôle important dans l'industrie du gaz naturel, grâce à sa proximité avec plusieurs gisements importants. La ville combine ainsi patrimoine ancien et développement énergétique stratégique.

• Daşoguz, située au nord, près de la frontière avec l'Ouzbékistan, est une ville importante sur le plan administratif et agricole. Elle se distingue par sa fonction régionale et son rôle dans l'économie rurale du pays. La région environnante est connue pour sa production de coton, culture essentielle pour l'économie turkmène. Daşoguz est aussi un point d'accès vers le site historique de Köneürgenç, ancienne capitale du Khorezm, qui attire historiens et touristes intéressés par les dynasties médiévales d'Asie centrale.

• Balkanabat, anciennement appelée Nebit-Dag, se trouve dans l'ouest du pays, non loin de la mer Caspienne. C'est un centre énergétique stratégique, spécialisé dans l'extraction de pétrole et de gaz. La ville abrite plusieurs installations industrielles liées à l'exploitation des ressources fossiles. Bien que moins monumentale qu'Achgabat, Balkanabat est essentielle dans la structure économique du Turkménistan, notamment pour l'exportation d'hydrocarbures via les corridors occidentaux.

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Groupes ethnolinguistiques.
Le TurkmĂ©nistan prĂ©sente une composition ethnolinguistique relativement homogène en apparence, avec une forte domination du groupe turkmène, mais il abrite Ă©galement plusieurs minoritĂ©s historiques issues de son passĂ© soviĂ©tique et de sa position stratĂ©gique entre le monde turcique, perse et russe. 

La langue officielle est le turkmène. L'alphabet latin a remplacĂ© le cyrillique depuis les annĂ©es 1990. L'État a menĂ© une politique linguistique de « turkmĂ©nisation » forte, visant Ă  promouvoir l'identitĂ© nationale autour de la langue et de la culture turkmènes. L'approche Ă©tatique vis-Ă -vis des langues et des groupes ethniques repose ainsi sur un nationalisme culturel fort. Le discours officiel exalte l'unitĂ© ethnique et linguistique autour de la langue turkmène, rĂ©duisant la place publique des autres langues. L'usage de langues minoritaires est tolĂ©rĂ© dans la sphère privĂ©e mais rarement encouragĂ©, et l'enseignement dans ces langues est quasi inexistant Ă  l'Ă©chelle institutionnelle. Les mĂ©dias publics diffusent exclusivement en turkmène, et les publications dans d'autres langues sont rares ou Ă©troitement surveillĂ©es. 

Les minorités religieuses, souvent associées à des groupes ethnolinguistiques, comme les orthodoxes russes ou les catholiques arméniens, vivent dans un contexte de tolérance limitée. Si la liberté de culte existe officiellement, elle est fortement encadrée par l'État, et l'islam sunnite hanafite, pratiqué majoritairement par les Turkmènes, est mis en avant comme religion dominante.

Turkmènes.
Les Turkmènes constituent environ 85 à 90 % de la population. Ils parlent le turkmène, une langue appartenant à la branche oghouze des langues turques, proche de l'azéri et du turc. Le turkmène est la langue officielle du pays et est largement utilisé dans les domaines de l'éducation, de l'administration et des médias publics. Historiquement nomades, les Turkmènes étaient organisés en tribus telles que les Teke, les Yomut, les Ersari, les Goklen et les Salyr, qui continuent d'influencer les loyautés sociales et les structures d'allégeance, bien que l'État ait officiellement aboli les références tribales dans la sphère publique. La culture turkmène est fortement valorisée dans la construction de l'identité nationale, notamment à travers l'exaltation du folklore, des épopées comme celle de Görogly , des vêtements traditionnels, et des arts tels que le tissage des tapis.

Ouzbeks.
Les Ouzbeks représentent la plus importante minorité, estimée à environ 5 à 9 % de la population. Ils vivent principalement dans les régions proches de la frontière avec l'Ouzbékistan, notamment dans la région de Dashoguz au nord et à Lebap à l'est. Ils parlent l'ouzbek, une langue turcique de la branche karlouk, distincte du turkmène. Bien que constitutionnellement égaux, les Ouzbeks n'ont qu'un accès limité aux médias et à l'éducation dans leur langue. Dans la pratique, la langue turkmène domine dans les institutions publiques, et l'ouzbek est cantonné à l'usage domestique ou communautaire.

Russes.
Les Russes forment une autre minorité significative, bien que leur nombre ait fortement diminué depuis l'indépendance du pays en 1991. À l'époque soviétique, les Russes représentaient près de 10 % de la population; aujourd'hui, ils ne constituent plus qu'environ 2 à 3 %, principalement concentrés à Achgabat et dans certaines villes industrielles. Ils parlent le russe, une langue qui reste utilisée dans certaines sphères techniques, scientifiques ou commerciales. Cependant, la place du russe dans la vie publique a été progressivement réduite, et l'accès à l'enseignement en russe a diminué, bien que quelques écoles russophones subsistent, notamment dans le cadre d'accords bilatéraux avec la Russie.

Kazakhs.
Les Kazakhs sont également présents, notamment dans les zones frontalières du nord-ouest du pays, près de la mer Caspienne. Ils partagent avec les Turkmènes une culture pastorale et une langue turcique, le kazakh, appartenant à la branche kipchak. Leur communauté est toutefois relativement marginale et peu visible dans la vie politique ou culturelle nationale.

Tatars.
Les Tatars, une autre minorité turcique musulmane, sont issus en grande partie des mouvements de population de l'ère tsariste ou soviétique. Leur présence est concentrée en milieu urbain. Bien intégrés, ils parlent le tatar et le russe, mais sont très largement assimilés linguistiquement et culturellement au cadre russophone ou turkmène.

Persans et les Baloutches.
Les Iraniens, ou plus précisément les Persans et les Baloutches, sont présents dans les régions sud du pays, près de la frontière avec l'Iran. Les Baloutches, peuple iranophone, vivent principalement dans la province de Mary. Ils parlent le baloutchi, une langue iranienne occidentale, et maintiennent des traditions tribales spécifiques. Leur visibilité dans la vie publique est très faible.

Arméniens et Ukrainiens.
Les Arméniens et les Ukrainiens, autrefois plus nombreux, ont été en grande partie assimilés ou ont émigré après l'effondrement de l'Union soviétique. Leur présence reste marginale. Ils sont concentrés à Achgabat, avec quelques institutions religieuses ou culturelles conservées, mais sans véritable reconnaissance officielle.

Culture.
La culture du Turkménistan est profondément enracinée dans les traditions nomades des populations turcs d'Asie centrale, mais a aussi intégré des influences persanes, soviétiques et musulmanes au fil de son histoire. Elle se caractérise par une valorisation marquée du patrimoine folklorique, un attachement aux coutumes ancestrales, et une forte instrumentalisation de l'identité nationale par l'État pour renforcer la cohésion sociale dans un régime autoritaire. L'expression culturelle y est donc à la fois riche et encadrée.

L'islam sunnite de rite hanafite est la religion dominante, pratiquée par la majorité des Turkmènes. Toutefois, la religiosité populaire reste fortement teintée de syncrétisme : elle intègre des éléments préislamiques, notamment des pratiques chamaniques, des cultes de saints locaux et des rites liés à la nature. Le rôle de l'islam dans la société est officiellement contrôlé par l'État, qui encadre étroitement les mosquées, les imams et toute expression religieuse, dans un souci de contrôle politique et de stabilité sociale. Les autres confessions, comme l'orthodoxie russe ou le protestantisme, sont présentes à travers de petites communautés, principalement en zones urbaines, mais leurs activités sont également surveillées.

L'héritage nomade joue un rôle central dans la culture turkmène. Les traditions tribales restent vivantes, notamment dans les régions rurales, à travers les cérémonies, les costumes, les chansons et les récits épiques. Le cheval, en particulier le pur-sang akhal-téké, est un symbole national puissant, célébré comme un emblème de la grandeur historique du peuple turkmène. Ces chevaux sont souvent représentés dans l'art, la statuaire publique et les événements officiels.

Les épopées orales, comme celle de Görogly, sont des éléments fondamentaux de la littérature traditionnelle. Transmises oralement par les bardes appelés baghshy, elles mêlent récits mythiques, poésie et musique instrumentale. La poésie populaire, les proverbes et les contes traditionnels sont également largement valorisés, particulièrement dans les programmes scolaires et les médias officiels.

La musique turkmène, traditionnellement liée à la poésie et aux cérémonies, repose sur des instruments comme le dutar (luth à deux cordes), le gijak (violon à pique), et le tüÿdük (flûte). Les performances musicales sont ordinairement improvisées et combinées à des chants poétiques. Le chant des baghshy reste un art valorisé et souvent mis en scène lors des festivals nationaux. La danse folklorique turkmène est caractérisée par des mouvements circulaires, des gestes des bras amples, et des costumes richement ornés.

Les arts décoratifs occupent une place centrale dans la culture visuelle du Turkménistan. Le tissage de tapis, en particulier les tapis de laine aux motifs tribaux, est l'un des symboles culturels les plus prestigieux du pays. Chaque région possède ses motifs distinctifs, et les tapis sont utilisés non seulement comme éléments de décoration, mais aussi comme marqueurs identitaires et dot matrimoniale. La broderie, la poterie, la joaillerie en argent et la sculpture sur bois sont également des expressions artisanales vivantes.

La cuisine turkmène, influencée par les traditions pastorales, l'Asie centrale et la Perse, est fondée sur la viande (surtout le mouton), les céréales, les produits laitiers et les légumes. Les plats emblématiques incluent le plov (riz au mouton et carottes), les manty (raviolis cuits à la vapeur), le chorba (soupe de viande), et les samsas (chaussons farcis cuits au tandoor). Le thé vert est la boisson la plus courante, souvent servi lors de rencontres sociales. Les repas sont des moments importants de la vie communautaire, marqués par l'hospitalité et le respect des invités.

L'architecture traditionnelle est fortement influencée par les structures nomades, notamment la yourte, qui continue d'être utilisée lors des fêtes et cérémonies. Dans les villes, l'héritage architectural soviétique se mêle à une monumentalité récente, caractérisée par la construction de bâtiments publics massifs en marbre blanc, des statues dorées à l'effigie des présidents et des mosquées gigantesques. Achgabat se signale par son urbanisme extravagant, davantage considéré comme une vitrine du pouvoir plutôt que comme reflet du quotidien des citoyens.

Les fêtes nationales sont des occasions majeures de démonstration culturelle. La fête de l'indépendance, le jour du cheval akhal-téké, la fête du tapis, et Nevruz sont célébrés à grande échelle avec des défilés, des spectacles folkloriques et des manifestations officielles. Ces célébrations sont souvent mises en scène par l'État pour renforcer l'unité nationale et promouvoir une image idéalisée du patrimoine turkmène.

L'influence soviétique reste perceptible dans l'organisation du système éducatif, dans l'architecture des villes secondaires, dans la littérature moderne, mais elle a été progressivement effacée des symboles officiels au profit d'un nationalisme culturel fort. L'accès à la culture mondiale reste, on l'a dit, très limité.
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Un marché couvert à Ashgabat, au Turkmenistan. Source : The CIA World Factbook.

Economie.
L'économie du Turkménistan est largement centralisée, dominée par l'État et profondément tributaire de ses ressources naturelles, en particulier le gaz naturel. Il possède la quatrième plus grande réserve mondiale de gaz naturel, ce qui en fait un acteur stratégique de l'énergie, notamment pour ses voisins et partenaires asiatiques. Malgré cette richesse, l'économie reste peu diversifiée, vulnérable aux fluctuations des prix des matières premières et fortement impactée par l'interventionnisme autoritaire du pouvoir politique.

Le gaz naturel constitue la majorité des exportations et des revenus en devises. L'État contrôle entièrement la production, la distribution et l'exportation de cette ressource. Historiquement, la Russie a été le principal client via Gazprom, mais depuis les années 2010, la Chine est devenue le principal acheteur grâce au gazoduc turkmène-chinois, qui assure un flux régulier via le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. L'Iran reçoit également du gaz, mais en volumes bien moindres. Le gouvernement cherche à diversifier ses débouchés, notamment avec le projet de gazoduc TAPI (Turkménistan-Afghanistan-Pakistan-Inde), mais les enjeux géopolitiques et sécuritaires compliquent sa réalisation.

Outre le gaz, le Turkménistan produit et exporte également du pétrole, du coton, des produits textiles, du soufre, de l'urée et d'autres produits chimiques. L'agriculture reste importante en termes d'emploi, bien que sa contribution au PIB soit limitée. Le coton est la principale culture, hérité du modèle soviétique, mais sa production souffre de problèmes d'irrigation, de salinisation des sols et d'une planification rigide. L'agriculture est largement étatisée, avec des quotas obligatoires et un système de distribution contrôlé par l'administration.

L'industrie reste peu développée et centrée sur la transformation primaire des matières premières. Des projets de modernisation ont été lancés, notamment dans la pétrochimie, le textile ou la production d'engrais, mais leur rentabilité est souvent remise en question par le manque de transparence, de concurrence et d'expertise technique. Le pays tente également d'attirer des investissements étrangers, bien que les conditions réglementaires soient peu claires, et les garanties juridiques quasi inexistantes.

Le système économique repose sur un modèle autoritaire et fermé, dans lequel les décisions économiques sont prises au sommet de l'État sans réelle consultation du secteur privé ou de la société civile. La monnaie nationale, le manat turkmène, est strictement contrôlée, avec un taux de change officiel surévalué, ce qui a conduit à un important marché noir et à des distorsions économiques. L'accès aux devises est très limité, freinant les importations, la consommation et les investissements privés. Les pénuries de produits de base, notamment alimentaires, sont récurrentes, malgré les subventions étatiques.

Le secteur privé est très restreint et fortement surveillé. Les entreprises proches du pouvoir peuvent bénéficier de contrats publics et d'accès privilégié aux ressources, mais il n'existe pas de véritable marché libre ni d'indépendance institutionnelle. La corruption est endémique, affectant l'ensemble des niveaux de gouvernance. De nombreuses organisations internationales classent le Turkménistan parmi les économies les moins libres du monde.

Le commerce extérieur est déséquilibré, avec des exportations dominées par l'énergie et des importations qui concernent principalement des biens de consommation, des matériaux de construction, des machines-outils et des denrées alimentaires. La Chine est devenue le premier partenaire commercial, suivie de la Turquie, de la Russie et de quelques pays d'Asie du Sud. L'Union européenne, bien que présente, reste marginale dans les échanges commerciaux. Les recettes issues de l'exportation de gaz permettent de financer d'ambitieux projets d'infrastructures, souvent symboliques ou orientés vers la valorisation de l'image du régime.

La politique économique repose également sur un isolement relatif. Le pays adhère à certaines organisations régionales comme la Communauté des États indépendants (CEI) et participe au corridor de transport Lapis Lazuli, mais il limite ses engagements internationaux, notamment dans le domaine financier. Le Turkménistan n'est pas membre de l'OMC, et les statistiques économiques fiables sont rares, voire inexistantes, ce qui empêche une évaluation précise de ses performances.

Le développement humain reste en retrait par rapport aux revenus tirés des hydrocarbures. L'éducation, la santé et les services sociaux sont sous-financés, tandis que les libertés économiques et individuelles sont fortement restreintes. Le chômage est élevé, mais les chiffres officiels le masquent. De nombreux jeunes cherchent à émigrer, notamment vers la Turquie ou la Russie, face à l'absence de débouchés locaux.

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