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Thou

Thou (Christophe de), né à Paris en octobre 1508, mort à Paris le 11 novembre 1582. Il était le petit-fils de Jacques de Thou, avocat général à la cour des aides, mort le 1er octobre 1504, et le fils d'Augustin, seigneur de Bonneuil et du Bignon près d'Orléans, conseiller, puis président au parlement de Paris, mort le 6 mars 1544. Il devint conseiller au Parlement, avocat du roi, chancelier des ducs d'Anjou et d'Alençon, prévôt des marchands de Paris, enfin premier président. Il était célèbre par son luxe, il fut le premier bourgeois de Paris qui eut un carrosse. Henri III, qui l'estimait fort, lui fit faire de magnifiques obsèques. Il avait, dit-on, commencé une histoire de son temps. Il publia en 1561 les Coutumes de Touraine. Il combattit les édits de tolérance et approuva la Saint-Barthélemy.
Thou (Nicolas) frère du précédent, conseiller-clerc au Parlement, archidiacre de Notre-Dame, abbé de Saint-Symphorien de Beauvais, évêque de Chartres, essaya de défendre dans cette ville le parti du roi. Mais il fut forcé d'y recevoir Mayenne et de lancer des mandements en faveur de Charles X. Secrètement, il soutint Henri IV pendant le siège de la ville. Il prit part à l'assemblée du clergé tenue à Chartres, qui cassa les bulles de Sixte-Quint, et c'est lui qui, dans sa cathédrale, sacra Henri IV en 1594 Il mourut en 1598. On a de lui des instructions, des statuts et les Cérémonies observées au sacre et couronnement de Henri IV (Paris 1594, in-4, et 1610, in-8).
Thou (Jacques-Auguste de), né à Paris le 8 octobre 1553, mort à Paris le 7 mai 1617. Troisième fils de Christophe, il naquit faible, et se destina d'abord à être d'Eglise. Il étudia à Paris, puis sous Cujas à Valence (en 1571), et il se lia avec Joseph Scaliger. Témoin de la Saint-Barthélemy, il se retira chez son oncle Nicolas (V. ci-dessus), puis accompagna Paul de Foix en Italie, où il entra en relations avec de nombreux savants, et en 1574 en Dalmatie au-devant de Henri III. Conseiller-clerc en 1576, il fut envoyé en Guyenne en 1581 pour négocier avec Navarre et Condé; il fit alors la connaissance de Montaigne. Après la mort de ses deux aînés, il se fit relever de ses voeux (1584) et résigna ses bénéfices, devint maître des requêtes en 1586, obtint en 1587 la survivance d'un de ses oncles, Auguste, président à mortier, et se maria. Commissaire de Henri III en Normandie, puis en Picardie, conseiller d'Etat (1588), il assista aux États de Blois. A son retour à Paris, il faillit être arrêté pendant la journée des Barricades. Il réussit à rejoindre Henri III auquel il conseilla de se rapprocher du roi de Navarre, et présida le Parlement de Tours. Envoyé avec Schomberg en Allemagne et en Italie, il apprit à Venise la mort de Henri III, vint trouver Henri IV à Châteaudun, et le suivit dans ses campagnes pendant cinq ans. 

Chargé par le roi de missions nombreuses (nommé président à mortier en 1595), il n'alla pas à Venise, ambassade pour laquelle il avait été désigné, et refusa d'aller à l'assemblée de Loudun en 1596. Il essaya vainement de négocier la réconciliation du duc de Mercœur, collabora à la rédaction de l'édit de Nantes, et fut l'un des commissaires catholiques à la conférence de Fontainebleau (1600). Très gallican, il s'opposa à la publication du concile de Trente. Il fut l'un des trois personnages que la régente appela aux finances pour remplacer Sully, et représenta la cour aux conférences de Loudun (1616). Il avait éprouvé en 1611 un gros crève-coeur : on lui avait refusé la succession du premier président Achille de Harlay, son beau-frère. On le trouvait, surtout depuis la publication de son Histoire, trop peu catholique. Il travaillait à cet ouvrage depuis 1591; il entretenait, pour se procurer des documents, une active correspondance avec les savants de tout pays; ajoutez qu'il s'était fait nommer, dès 1593, grand maître de la bibliothèque du roi, charge dans laquelle il succédait à Amyot; il acquit pour le roi la bibliothèque de Catherine de Médicis; lui-même s'était constitué une fort belle bibliothèque (passée ensuite aux Rohan-Soubise et vendue 260.000 F en 1789).
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Président de Thou.
Le président de Thou.

Les 18 premiers livres (1543-1560) de la J.-A. Thuani historia sui temporis parurent en 1604. La deuxième partie (1560-1572) est de 1606, la troisième (1572-1574) de 1607, la quatrième (1574-1584) de 1608. Il préparait une nouvelle édition allant jusqu'en 1607, lorsqu'il mourut, léguant à Pierre Dupuy et à Nicolas Rigault le soin d'en surveiller l'impression (édition de 1620); Rigault compléta même le livre. De Thou aurait voulu poursuivre le récit des événements jusqu'à la mort de Henri IV. En Hollande parut, sous le titre de Thuanus restitutus, un recueil des morceaux retranchés aux cours des éditions successives. La J.-A. Thuani historiarum continuatio (1607-1628) parut à Francfort (1628, in-fol.). La première édition complète de toutes les oeuvres de de Thou (l'histoire a 138 livres) est celle de Londres (1733, 7 vol. in-fol.). Une traduction (par Georgeon, Desfontaines, Lebeau, etc.) parut à Londres (Paris) en 1734 (16 vol. in-4). Déjà du Ryer, en 1659, avait donné une traduction des 50 premiers livres (3 vol. in-fol.). L'abbé Prévost s'y était également essayé. Un abrégé en fut donné par Raymond de Sainte-Albine en 1759 (10 vol. in-12). 

Cette histoire est le plus important texte de ce genre qu'ait laissé le XVIe siècle; elle tiendrait dans la littérature historique française une place éminente si l'auteur n'avait eu la malheureuse idée de l'écrire en latin; la transcription des noms propres et des titres de fonctions la rend parfois obscure. De Thou, grâce à ses correspondants, était bien renseigné et pourvu de nombreux documents, qu'il a souvent insérés tels quels; les parties de son livre relatives à l'étranger, et où il ne pouvait controler ses renseignements, contiennent des erreurs. Ses jugements sont empreints d'une haute impartialité et d'une grande modération. Ces qualités le rendirent suspect aux catholiques zélés, qui l'accusèrent même, à tort, d'être protestant (il était père temporel de l'ordre de Saint-François en France). 

Son Histoire fut misé à l'index dès le 14 novembre 1609, et c'est à cause de ses opinions qu'on lui refusa la charge de premier président. C'est surtout pour se justifier qu'il écrivit vers 1614 ses Mémoires (aussi en latin), très utile complément de l'Histoire : on les trouvera dans les éditions complètes et aussi dans les collections Petitot (XXXVII), Michaut (1, XI), Buchon (XII) ; on en a contesté, sinon l'authenticité, du moins le caractère absolument original. Il a écrit aussi des poésies latines.

Il eut avec sa seconde femme, Gasparde de La Chastre, trois fils et trois filles. Il était connu par son intégrité et son désintéressement. (H. Hauser).

Thou (François-Auguste de), né à Paris vers 1607, mort à Lyon le 12 septembre 1642. Fils aîné de l'historien, il fut instruit sous la direction de Rigault et des frères Dupuy. Il succéda comme bibliothécaire à son père; mais, trop jeune, il fut suppléé par Pierre Dupuy. Conseiller au Parlement à dix-neuf ans, maître des requêtes, il voyagea en Italie et en Orient (ses lettres de voyage ont été publiées dans le t. VIII de la Revue rétrospective). Conseiller d'Etat, il servit d'intermédiaire entre la duchesse de Chevreuse et la reine. Sa correspondance fut interceptée. Il réussit cependant à apaiser Richelieu, mais il commit l'imprudence de se lier avec, Cinq-Mars. Quoiqu'il désapprouvât le traité conclu par son ami avec l'Espagne, il ne révéla pas le complot. Conduit au château de Tarascon, interrogé par Richelieu lui-même, traîné dans une barque attachée au bateau du cardinal, il fut enfermé à Pierre-Encise. Cinq-Mars eut la lâcheté de le charger. Condamné comme lui, de Thou lui pardonna au pied de L'échafaud et demanda à se bander les yeux pour ne pas voir son cadavre. On raconte qu'il remit à son confesseur deux lettres : l'une pour P. Dupuy, l'autre pour une dame; le P. Mambré supprima la seconde. On ne put obtenir, même après la mort de Richelieu, la réhabilitation de François Auguste.
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Dictionnaire biographique
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