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Caballero

Caballero (D. José-Antonio, marquis de), homme d'État espagnol (L'Espagne au XVIIIe siècle), né à Saragosse vers 1760, mort à Salamanque en 1821. Après avoir occupé divers postes dans l'administration provinciale, il fut nommé fiscal du conseil de la guerre en 1794. Le 24 août 1798 il succéda à Jovellanos dans le ministère de grâce et de justice; la part importante qu'il prit à la révolution d'Aranjuez, en 1808, le fit destituer; mais comme il se rallia de suite aux vues de Napoléon, il demeura conseiller d'État, membre de la Junte, chargé de présider le conseil des finances. Il fut ensuite conseiller du roi Joseph, le suivit en France en 1814, et vécut à Bordeaux jusqu'à ce que les événements de 1820 lui permirent de rentrer en Espagne. (E. Cat).
Caballero (Fernan), pseudonyme d'une célèbre romancière née à Morges (Suisse) le 25 décembre 1796, morte à Séville le 7 avril 1877. Son vrai nom était Cecilia Böhl  de Faber, et elle eut pour père J.-N. Boehl (ou Böhl) de Faber, négociant allemand établi à Cadix et devenu membre de l'Académie espagnole en raison de ses Importants travaux littéraires. A l'âge de neuf ans, elle alla avec ses parents à Hambourg, où elle passa huit années et acquit une instruction très brillante. Revenue à Cadix, elle épousa en 1816 un jeune capitaine d'infanterie, D. Antonio Planells de Bardaxi. Depuis lors, sa longue existence ne fut pour ainsi dire qu'un drame continuel. Son mari, qui n'avait sollicité sa main que par suite d'une gageure, et qu'elle dut suivre à Porto-Rico, aux Antilles, la rendit malheureuse par ses brutalités; mais il périt dans un combat dès l'année suivante, et la jeune veuve retourna auprès de ses parents.

D'une beauté remarquable, d'une rare distinction et d'un esprit séduisant, elle fut de nouveau recherchée en mariage. Après bien des hésitations, elle consentit à s'unir (1822) à un jeune officier de la garde royale, très riche et appartenant à la haute aristocratie, à D. Francisco Ruiz del Arco, marquis de Arco-Hermoso, avec lequel elle alla habiter Séville, où leur palais devint le centre intellectuel d'une société d'élite. Ayant perdu son mari en 1835, elle fut précipitée du sommet de l'opulence dans une situation modeste, et alla rejoindre ses parents à Puerto-Santa-Maria. Cédant aux voeux de sa vieille mère, elle se décida encore à affronter pour la troisième fois les chances du mariage, en épousant (1837) D. Antonio Arrom de Ayala, plus jeune qu'elle, peu fortuné, mais d'un caractère élevé. Celui-ci, après avoir perdu son avoir et celui de sa femme dans de malheureuses entreprises, obtint une place de consul en Australie, et y fonda une maison de commerce. A force d'énergie, il y gagna une fortune; mais ayant confié la plus grande partie de ses capitaux à un négociant qui abusa de sa confiance, il se donna la mort dans un des parcs de Londres (1854).

C'est pendant la longue absence de son dernier mari que Doña Cecilia, comme on l'appelait, retirée à la campagne auprès de Huelva, se laissa aller à sa passion pour la littérature, passion qui couvait en elle depuis longtemps. Elle avait déjà écrit en allemand, à l'époque la plus heureuse de sa vie, une scène de moeurs populaires de l'Andalousie, sous le titre de Sola, qui fut publiée par son père à Hambourg, en 1834, sans nom d'auteur. Maintenant elle débuta du coup par un véritable roman, qui est resté son chef-d'oeuvre, et qu'elle avait composé en français avant de le rédiger en espagnol. Elle prit pour héroïne la fille d'un pêcheur, surnommée la Gaviota (la Mouette), créature fantasque et perverse, qui devient ensuite une cantatrice célèbre, et finit misérablement son existence comme épouse d'un barbier de village. 

L'apparition de cette charmante oeuvre littéraire dans le journal El Heraldo, de Madrid (1849), sous le pseudonyme mystérieux de Fernan Caballero (nom d'un petit village de la Manche), excita dans toute l'Espagne un enthousiasme indicible et les critiques en ont proclamé l'auteur un Walter Scott espagnol. Elle publia ensuite en peu d'années tous ses romans les plus importants : la Familia Alvareda, Lagrimas, Clemencia, Elia o la España treinta años ha, et plusieurs nouvelles qui la rendirent célèbre et extrêmement populaire. Après la mort de son dernier mari, elle ne quitta plus la plume, cherchant de l'atténuation à sa douleur dans un travail continu. Nous devons à cette circonstance une longue série de petites études de moeurs, tirés, comme ses romans, presque exclusivement de la vie du peuple andalou, qui fut l'objet de toutes ses affections et qu'elle sut peindre avec sincérité et un charme attachant. On ignora pendant longtemps sa personnalité, et le mystère dont elle s'entourait fut toujours respecté de ses compatriotes qui se plaisaient à l'appeler "notre Fernan".

En réalité elle fut la créatrice du roman de moeurs en Espagne, et à ce titre elle gardera une place importante dans l'histoire de la littérature. On la présenta à tort, à cause de sa foi ardente et de son dévouement aux principes monarchiques, comme ayant servi au gouvernement d'instrument stipendié pour la propagation de l'obscurantisme et des idées rétrogrades. Son âge et son caractère se prêtaient mal au rôle d'un apôtre officiel; elle vécut dans une retraite profonde, loin du bruit des agitations politiques, et, quoique pauvre, la seule faveur qu'elle ait accepté de la reine Isabelle fut un petit appartement à l'Alcazar de Séville, qu'elle occupa de 1857 jusqu'à la révolution de 1868. 


Son portrait, à l'âge de soixante ans, peint par F. Madrazo, se trouve au palais San-Telmo, à Séville.
Fernan Caballero est une écrivaine éminemment réaliste. Elle déclare elle-même avoir toujours emprunté les sujets de ces récits à des événements réels et n'avoir fait que poetizar la realidad sin alterarla. Elle a peint le peuple de l'Andalousie tel qu'il était alors dans ses coutumes, dans sa façon de penser, dans ses préjugés mêmes, de sorte que ses oeuvres constituent des documents pour l'histoire des anciennes moeurs de l'Espagne. Si l'on y ajoute ce qui est propre à l'auteur : un grand talent descriptif, la fraîcheur des sentiments, la vivacité du dialogue, l'étude pénétrante des caractères, la simplicité de la trame, jointe à l'intensité des situations dramatiques, le désir d'émouvoir plutôt que de frapper l'esprit, enfin une langue harmonieuse et colorée, en s'expliquera les succès que ses productions littéraires ont obtenus dans le monde entier, même en dehors des sphères qui se trouvaient avec l'auteur en communion d'idées politiques et religieuses. Ce qui augmente encore leur intérêt, ce sont des citations continuelles des proverbes, dictons et poésies populaires, dont elle publia même des recueils entiers. (G. Pawlowski).


En bibliothèque - Ses ouvrages ont eu de nombreuses éditions; la plus intéressante est celle de Madrid, Mellado, 1855-1867, 18 vol., dont chacun est précédé d'une introduction due à la plume d'un des plus éminents écrivains de l'Espagne. Nous signalerons encore celle de Brockhaus (Leipzig, 1860-1882, 11 vol. in-8). La plupart ont été traduits en toutes les langues de l'Europe. Parmi les traductions françaises, nous signalerons : Nouvelles andalouses, trad. par Germond de Lavigne (Paris, 1859); la Gaviota, trad. tronquée (Bruxelles, 1860), et complète (Paris, 1882, 2 vol. in-42); la Famille Alvareda (Paris, 1860 et 1862); Lagrimas (Paris, 1861 et 1863); Clemencia (Paris, 1873); Un jeune libéral et un Légitimiste (Paris, 1863); un Eté à Bornos (Paris, 1865); Deux Nouvelles posthumes (Paris, 1882).
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Dictionnaire biographique
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