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Tadjikistan
Jumhurii Tojikiston

39 00 N, 71 00 E
Le Tadjikistan est un Etat d'Asie Centrale, enclavĂ© entre la Chine, l'Afghanistan, OuzbĂ©kistan et le Kirghizistan. Il a une superficie de 143.100 km² et une population de 9 millions d'habitants en 2023. 

D'un point de vue administratif, le pays se divise en 2 provinces (viloyatho), Viloyati Khatlon (chef-lieu : Qurghonteppa) et Viloyati Sughd (ch.-l. : Khujand), et une province autonome (viloyati mukhtor), Viloyati Mukhtori Kuhistoni Badakhshon [Gorno-Badakhshan], dont le chef-lieu est Khorugh. Le reste du Tadjikistan consiste en "districts sous subordination républicaine", administrés directement depuis Dushanbe, la capitale.

Dushabe a 543.000 habitants et Khujand (145.000) habitants est la seule autre ville d'importance notable.

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Carte du Tadjikistan.
Carte du Tadjikistan. Source : The World Factbook. (Cliquer sur l'image pour afficher une carte plus détaillée).

Géographie physique du Tadjikistan

Relief.
Environ 93 % du territoire du Tadjikistan est montagneux, et abrite certains des plus hauts sommets du monde. Au nord, les chaînons de Turkestan, Zeravchan et Gissar, qui appartiennent au système du Tian Shan occidental, séparent le pays de ses voisins. Ces montagnes délimitent la vallée de Ferghana au nord, une plaine fertile et densément peuplée qui constitue une exception dans le paysage majoritairement élevé du pays.

La partie centrale et orientale du Tadjikistan est occupée par le massif du Pamir. Ce haut plateau est un noeud orographique d'où partent plusieurs des plus grandes chaînes de montagnes d'Asie. C'est ici que se trouvent les points culminants du pays, notamment le pic Ismail Samani (anciennement pic du Communisme) à 7495 mètres et le pic Lénine (partagé avec le Kirghizistan) à 7134 mètres. Le Pamir se caractérise par des paysages de hauts plateaux désertiques et froids, de profondes vallées et d'immenses glaciers, dont le glacier Fedtchenko, le plus long hors des régions polaires. La frontière méridionale avec l'Afghanistan est longée par le fleuve Panj, qui serpente à travers des gorges spectaculaires.

Climat.
Le Tadjikistan présente un climat continental très marqué, avec des variations extrêmes liées à l'altitude. Les basses terres, comme la vallée de Ferghana et les plaines du sud-ouest, connaissent des étés torrides avec des températures pouvant dépasser les 40°C et des hivers froids. En altitude, le climat devient rapidement plus rigoureux. Dans le Pamir oriental, les hivers sont glacials, avec des températures pouvant chuter jusqu'à -45°C, et les étés sont courts et frais. Les précipitations sont globalement faibles, particulièrement sur les hauts plateaux de l'est qui reçoivent moins de 100 mm par an. Les pluies et neiges sont plus abondantes sur les versants des montagnes de l'ouest, principalement au printemps et en automne.

Hydrographie.
Les deux principaux fleuves d'Asie centrale, l'Amou-Daria et le Syr-Daria, prennent leur source en partie dans les montagnes tadjikes. Le Vakhch et le Kafirnigan sont des affluents majeurs de l'Amou-Daria, et leurs vallées sont d'importantes zones agricoles. Les nombreux glaciers alimentent ces cours d'eau, assurant un débit important en été, essentiel pour l'irrigation. Le pays compte également de nombreux lacs d'origine glaciaire ou tectonique, surtout dans le Pamir. Le lac Sarez, créé par un immense glissement de terrain en 1911, est l'un des plus profonds et des plus grands lacs d'altitude au monde. Le lac Karakul, situé à près de 4000 mètres, est un lac salin endoréique.

Géologie.
Le Tadjikistan se trouve dans une région tectonique active, où la collision des plaques tectoniques de l'Inde et de l'Eurasie a formé les chaînes de montagnes du Pamir et du Tien Shan. Cette activité tectonique continue influence la géologie du pays, avec une présence notable de séismes.

Biogéographie du Tadjikistan

Les étages biogéographiques se succèdent du désert au nival. Dans les basses terres de la vallée du Ferghana ou de Khatlon, on trouve des zones de steppes sèches et des paysages semi-désertiques, dominés par des espèces xérophiles telles que l'armoise (Artemisia) ou le saxaoul (Haloxylon). Les versants collinaires abritent des formations arbustives de pistachiers, d'amandiers et d'argousiers. Les forêts montagnardes, rares mais précieuses, sont principalement constituées de genévriers (Juniperus seravschanica, J. turkestanica), souvent dispersés en peuplements clairsemés. Au-dessus de 3000 mètres, les prairies alpines s'étendent, riches en espèces herbacées endémiques, avant de laisser place aux zones de moraines, de rochers et de glaciers.

Le Pamir constitue une entité biogéographique distincte, caractérisée par des adaptations extrêmes à l'altitude et à la rigueur du climat. On y trouve une flore alpino-steppique, comprenant des espèces relictuelles d'origine himalayenne et tibétaine, ainsi qu'une faune adaptée aux hautes altitudes, comme le léopard des neiges (Panthera uncia), le bouquetin de Sibérie (Capra sibirica), l'argali de Marco Polo (Ovis ammon polii), ou encore l'aigle royal (Aquila chrysaetos). Cette faune est cependant menacée par la fragmentation des habitats et le braconnage.

La diversité floristique est importante, avec plus de 5000 espèces de plantes vasculaires, dont environ 20 % sont endémiques. Le Tadjikistan fait partie du point chaud de biodiversité irano-anatolien, et plusieurs de ses zones sont classées comme prioritaires pour la conservation, notamment les vallées de Darvaz, les forêts relictuelles de genévriers ou les pâturages subalpins. Les zones humides, bien que peu étendues, jouent un rôle écologique essentiel, en particulier dans la vallée de la rivière Vakhsh et autour des lacs de haute altitude comme Karakul ou Sarez, qui abritent une avifaune migratrice et nicheuse notable.

Le réseau fluvial constitue un axe écologique majeur, essentiel pour la faune, l'agriculture et les communautés humaines. Les lacs d'altitude, d'origine glaciaire ou tectonique, comme Iskanderkul ou Bulunkul, sont riches en espèces endémiques de poissons et d'amphibiens, mais fragiles face au changement climatique. La fragmentation écologique est accentuée par les infrastructures humaines, l'agriculture extensive en plaine, le surpâturage dans les zones steppiques et la déforestation illégale. Le changement climatique aggrave ces pressions en réduisant l'enneigement, accélérant la fonte glaciaire et modifiant les cycles hydrologiques. Les glaciers du Pamir fondent à un rythme préoccupant, mettant en danger à moyen terme l'approvisionnement en eau de millions de personnes en aval.

Des zones protégées couvrent environ 23 % du territoire, avec des réserves naturelles comme Tigrovaya Balka, Zorkul, Dashtijum et Romit. Ces aires visent à préserver des écosystèmes variés, allant des forêts ripicoles aux hauts plateaux du Pamir. Cependant, les moyens de gestion sont souvent limités, et les conflits d'usage avec les populations locales demeurent fréquents.

Géographie humaine du Tadjikistan

Population.
Le Tadjikistan est l'un des pays les moins densément peuplés d'Asie centrale. La population est d'environ 9 millions d'habitants, et sa répartition est très inégale. La majorité de la population est concentrée dans les vallées et les zones relativement plus accessibles. Douchanbé, la capitale et plus grande ville du pays, est le principal centre urbain et économique. Les autres villes importantes sont Khudjand, Bokhtar et Kulob. Une grande partie de la population vit dans des régions rurales, souvent dans des conditions de montagne. L'agriculture est une activité clé pour ces populations, qui exploitent les terres fertiles des vallées.

Quelques-unes des principales villes du Tadjikistan

• Douchanbé, la capitale, est la plus grande ville du pays avec environ un million d'habitants. Elle est située dans la vallée de Gissar, au sud-ouest du pays, à proximité de la frontière afghane. Centre politique, économique et culturel du Tadjikistan, Douchanbé abrite le gouvernement, les ambassades, les universités principales, les institutions culturelles et les infrastructures modernes. Son architecture reflète l'héritage soviétique, avec de larges avenues, des bâtiments monumentaux, des places publiques, mais aussi des quartiers résidentiels récents marqués par des constructions verticales et des rénovations urbaines. La ville connaît un développement rapide, marqué par la construction de centres commerciaux, d'hôtels internationaux et d'infrastructures de transport. Douchanbé accueille également de nombreux événements internationaux, renforçant son rôle de vitrine du pays.

• Khujand est la deuxième ville du Tadjikistan, située au nord, dans la vallée fertile du Ferghana, au bord de la rivière Syr-Daria. Avec une population d'environ 180 000 habitants, elle est un centre industriel et commercial important. Ancienne ville historique, connue sous le nom d'Alexandrie Eskhata à l'époque d'Alexandre le Grand, Khujand est également un lieu de richesse culturelle. Son bazar, l'un des plus anciens et vastes de la région, reste un centre vital pour l'économie locale. La ville possède des universités, des musées et une forte identité régionale, marquée par l'attachement au dialecte et aux traditions du nord du pays. C'est également un pôle de production textile et agroalimentaire.

• Bokhtar, anciennement appelĂ©e Kurgan-Tyube, est la principale ville du sud-ouest du Tadjikistan, dans la rĂ©gion du Khatlon. Elle compte environ 110 000 habitants et constitue un centre agricole et administratif dans une rĂ©gion très peuplĂ©e. Bokhtar est marquĂ©e par la prĂ©sence de nombreuses communautĂ©s rurales et par l'activitĂ© agricole, en particulier la culture du coton, du riz et des fruits. Elle joue un rĂ´le important dans la gestion des terres irriguĂ©es et accueille plusieurs instituts de recherche agronomique. La ville s'est 

modernisée depuis l'indépendance, avec des améliorations dans les infrastructures éducatives, sanitaires et de transport.

• Kulob est une ville historique du sud-est, située dans une vallée entourée de montagnes, à environ 200 km de Douchanbé. Elle compte environ 100 000 habitants. Kulob est connue pour sa longue histoire, ses monuments culturels et son rôle symbolique dans l'identité nationale. Elle est la ville natale d'Imomali Rahmon, le président du Tadjikistan, ce qui a favorisé un développement important depuis les années 1990, avec des investissements publics notables. La ville est un centre administratif et culturel régional, avec plusieurs universités, écoles et institutions religieuses, ainsi que des musées retraçant l'histoire du pays.

• Istaravshan, au nord du pays, est une ville ancienne fondée il y a plus de 2 500 ans, anciennement appelée Ura-Tyube. Elle compte environ 70.000 habitants. C'est un centre historique et artisanal important, réputé pour ses traditions de travail du bois, du cuivre et pour son architecture islamique. Ses ruelles étroites, ses mosquées anciennes et ses bazars lui confèrent une atmosphère de ville-musée. Bien que de taille moyenne, Istaravshan est considérée comme un pôle culturel du nord du pays.

• Tursunzoda, située à l'ouest de Douchanbé, à proximité de la frontière ouzbèke, est une ville industrielle de près de 50 000 habitants. Elle est célèbre pour son usine d'aluminium, Tajik Aluminium Company (TALCO), l'une des plus grandes d'Asie centrale, qui joue un rôle majeur dans l'économie nationale. La ville est également entourée de plantations de coton et de vignobles, bénéficiant d'un climat favorable à l'agriculture.

• Pendjikent, à l'ouest du pays, dans la vallée de Zarafshan, est une ville moyenne célèbre pour ses ruines archéologiques datant de l'époque sogdienne (Ve–VIIIe siècle), témoins d'une ancienne civilisation florissante. Elle compte environ 35 000 habitants et attire les touristes intéressés par l'histoire préislamique du Tadjikistan. C'est aussi un centre local d'éducation et de commerce, en lien avec la ville voisine de Samarcande (Ouzbékistan), située à moins de 70 km.

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Groupes ethnolinguistiques.
La majorité de sa population appartient au groupe tadjik, mais de nombreuses minorités ethniques et linguistiques y coexistent, généralement enracinées dans des régions spécifiques du pays ou issues d'héritages historiques particuliers.

La politique linguistique post-soviétique du Tadjikistan a renforcé le rôle du tadjik comme langue de cohésion nationale, parfois au détriment des langues minoritaires. Les écoles russophones ont décliné, tandis que l'enseignement en ouzbek ou en kirghiz est restreint. Cela a suscité des critiques de la part de certaines minorités, qui perçoivent une forme d'assimilation forcée. Cependant, le pays maintient un équilibre fragile entre centralisation linguistique et tolérance pragmatique, dans un contexte où la diversité ethnolinguistique demeure une réalité profondément enracinée.

Tadjiks.
Les Tadjiks constituent environ 85 % de la population. Ils parlent le tadjik, une variante du persan Ă©troitement liĂ©e au dari d'Afghanistan et au farsi d'Iran,  et qui appartiennent au groupe iranien occidental . Bien que historiquement Ă©crit en alphabet arabe, le tadjik utilise aujourd'hui l'alphabet cyrillique, hĂ©ritĂ© de la pĂ©riode soviĂ©tique. La langue est parlĂ©e dans tout le pays, mais avec des variantes dialectales marquĂ©es selon les rĂ©gions : le tadjik de Khujand, celui du Pamir ou encore celui du sud (rĂ©gion de Khatlon). Le tadjik est une langue fortement imprĂ©gnĂ©e de culture islamique et poĂ©tique, avec des figures comme Ferdowsi et Rudaki considĂ©rĂ©es comme des rĂ©fĂ©rences culturelles.

Ouzbeks.
Les Ouzbeks représentent la plus importante minorité ethnique, environ 12 à 13 % de la population. Concentrés principalement dans les régions de Sughd (au nord, autour de Khujand), de Khatlon (au sud) et dans certaines zones frontalières avec l'Ouzbékistan, ils parlent l'ouzbek, une langue turcique, également écrite en alphabet cyrillique au Tadjikistan. L'usage public de l'ouzbek a décliné depuis l'indépendance, bien qu'il soit toujours utilisé dans des écoles minoritaires et dans certains médias locaux. Les tensions identitaires autour de la langue et de la culture ouzbèke ont parfois émergé, notamment dans les années 1990, mais l'intégration socio-économique des Ouzbeks au Tadjikistan reste globalement forte.

Russes.
Les Russes, autrefois nombreux pendant la période soviétique, ne représentent plus qu'environ 0,5 % de la population. Ils sont concentrés dans les grandes villes comme Douchanbé, Khujand et Tursunzoda. Leur langue, le russe, reste une langue de communication interethnique et de haute culture, officiellement reconnue comme langue de communication entre les peuples. Elle est utilisée dans les universités, les institutions juridiques, les médias et les affaires. De nombreux cadres, ingénieurs et techniciens sont encore russophones, et le russe conserve une valeur stratégique dans les relations avec les pays post-soviétiques.

Pamiris.
Les Pamiris vivent dans la région autonome du Haut-Badakhchan. Ils forment un ensemble de groupes ethnolinguistiques iraniens orientaux distincts des Tadjiks et représentent environ 2 % de la population. Ils parlent des langues pamiriennes appartenant à la branche orientale des langues iraniennes, comme le shughni, le rushani, le wakhi ou le ishkashimi. Ces langues, très différentes du tadjik, ne sont pas mutuellement intelligibles entre elles ni avec le persan. L'enseignement et la transmission de ces langues ont longtemps été marginalisés, mais un renouveau culturel s'opère depuis les années 2000. Les Pamiris se distinguent aussi par leur confession : la majorité adhère à l'islam ismaélien, sous l'autorité spirituelle de l'Aga Khan, ce qui les distingue religieusement du reste du pays majoritairement sunnite.

Kirghizes.
Les Kirghizes forment une petite minorité, principalement concentrée dans les régions de montagne de l'est, comme dans le district de Murghab, à la frontière avec le Kirghizistan. Ils parlent le kirghiz, une langue turcique proche du kazakh et du kirghizstanien standard. Leur mode de vie est historiquement semi-nomade, basé sur l'élevage, et leur intégration dans l'État-nation tadjik a été relativement marginale. Les infrastructures scolaires et linguistiques en kirghiz sont très limitées.

Autres groupes.
D'autres petites minorités existent, souvent héritées de l'Empire russe ou de l'URSS. Les Tatars, Ukrainiens, Allemands de la Volga et Juifs Boukharans ont vu leur population chuter après l'indépendance, avec des vagues de migration vers la Russie, l'Allemagne ou Israël. Leurs langues et cultures sont en voie d'effacement, bien que certains éléments persistent dans la mémoire collective.

Il existe également une présence significative mais peu institutionnalisée de migrants afghans, en particulier des Hazaras et des Tadjiks afghans, venus chercher refuge à diverses périodes, notamment durant les guerres en Afghanistan. Leurs langues (dari, pashto) sont proches du tadjik, ce qui facilite leur intégration, mais leur statut juridique reste généralement précaire.

Culture.
La culture du Tadjikistan s'exprime à travers la langue, les rituels sociaux, la musique, les vêtements, l'architecture, la cuisine et les modes de vie ruraux, avec une forte continuité entre le passé préislamique, l'islamisation médiévale, l'époque soviétique et l'ère postindépendance.

L'héritage islamique est omniprésent dans la culture quotidienne. Le Tadjikistan est majoritairement sunnite de rite hanafite, mais il existe une forte tradition soufie, surtout dans les régions rurales, où les pratiques religieuses se mêlent aux coutumes locales. Les rituels religieux accompagnent les étapes de la vie – naissance, mariage, mort – et les fêtes musulmanes comme l'Aïd al-Fitr (Ramazan) et l'Aïd al-Adha (Kurbon) sont largement célébrées.

Les traditions populaires, comme le navrouz, nouvel an persan fêté au printemps, sont des moments d'unité nationale et de réaffirmation des racines préislamiques zoroastriennes. C'est l'occasion de danses collectives, de plats rituels comme le sumalak, et de jeux traditionnels. Le buzkashi, jeu équestre spectaculaire dans lequel les cavaliers se disputent une carcasse de chèvre, est pratiqué dans les régions rurales du nord et du sud, surtout lors des grandes célébrations.

La musique tadjike combine des éléments iraniens, turciques et indiens, avec des instruments comme le rubob, le dutar ou le doira (tambour sur cadre). Le shashmaqom, forme classique de musique savante née dans les villes historiques comme Boukhara et Samarcande (toutes deux en Ouzbékistan), est inscrit au patrimoine culturel immatériel de l'Unesco. Il est joué lors des mariages, des fêtes religieuses ou des cérémonies d'État. À côté de cette musique classique, on trouve des styles populaires plus contemporains, intégrant synthétiseurs et rythmes modernes, souvent diffusés dans les taxis ou sur les marchés.

Les arts visuels se traduisent par des formes traditionnelles d'ornementation textile et architecturale. Les tapis, les broderies, les tissus ikat et les suzanis sont porteurs de symboles protecteurs et cosmiques. Les costumes traditionnels féminins, notamment dans les régions du Badakhchan ou de Khatlon, mêlent soie colorée, longues tuniques et coiffes ornées. L'architecture vernaculaire, en particulier dans les régions pamiriennes, montre un art de la construction adapté aux contraintes climatiques, avec des maisons en pierre ou en terre crue, parfois décorées d'inscriptions religieuses et géométriques.

La cuisine est fondée sur des produits locaux. Le plov (riz sauté avec viande, carottes, oignons), plat emblématique d'Asie centrale, est préparé à toutes les grandes occasions. Le pain (non), cuit dans des fours en argile appelés tandyr, est sacré et toujours présent à table. Les soupes comme le shurbo, les raviolis (mantu), les brochettes de viande (shashlik), les yaourts fermentés (qatiq) et le thé vert occupent une place centrale dans la culture alimentaire. Les repas sont des moments collectifs, souvent pris sur des tapis au sol, accompagnés de toasts, de bénédictions et de discussions animées.

La société reste fortement marquée par les structures patriarcales et les valeurs communautaires. Les mariages, souvent arrangés, donnent lieu à de longues négociations familiales et à de vastes cérémonies rituelles. Le respect des anciens, la solidarité entre voisins, la centralité de la famille élargie et des réseaux de parenté jouent un rôle fondamental dans la régulation des comportements. Cependant, les mutations récentes – migrations, urbanisation, influence des médias et de la diaspora – modifient les représentations du genre, de la jeunesse et de l'individu.

L'époque soviétique a laissé un héritage ambivalent : la sécularisation forcée, la promotion d'une culture « prolétarienne » uniforme, mais aussi l'accès à l'éducation, la professionnalisation artistique et la construction d'infrastructures culturelles (théâtres, maisons de la culture, cinémas). Aujourd'hui, le gouvernement encourage un retour à la culture nationale, avec un discours identitaire centré sur l'héritage aryen et perse, et un encadrement strict des manifestations culturelles, notamment celles perçues comme religieuses ou étrangères.

Ajoutons que laa diaspora tadjike, très nombreuse en Russie, joue un rĂ´le croissant dans la redĂ©finition de la culture. Les transferts de fonds, les Ă©changes de valeurs, les retours au pays pendant les fĂŞtes religieuses, et les mĂ©dias numĂ©riques ont créé une culture transnationale, oĂą la tradition s'adapte aux rĂ©alitĂ©s contemporaines. 

Économie.
Pays enclavĂ© et montagneux, le Tadjikistan fait face Ă  de nombreuses contraintes gĂ©ographiques et structurelles et reste le pays le plus pauvre de l'ancienne sphère soviĂ©tique, mais dispose Ă©galement d'atouts naturels importants, comme l'eau, l'Ă©nergie hydroĂ©lectrique et les ressources minières. 

L'agriculture reste un pilier de l'économie nationale, occupant plus de 40 % de la population active et représentant environ 20 % du produit intérieur brut. Les principales cultures sont le coton, qui constitue une ressource stratégique pour les exportations, ainsi que les céréales, fruits, légumes et le riz. L'élevage, notamment de moutons et de bovins, est également répandu. Cependant, l'agriculture tadjike est vulnérable aux aléas climatiques, à l'épuisement des terres et au manque d'irrigation moderne. Le pays dépend fortement des conditions météorologiques et des infrastructures hydrauliques héritées de l'époque soviétique.

Le Tadjikistan produit près de 90 % de son électricité à partir de barrages, notamment grâce aux eaux issues de ses hautes montagnes. Le barrage de Nurek, l'un des plus hauts du monde, et le projet du barrage Rogun – encore en phase d'achèvement (2025) – symbolisent cette orientation stratégique. Le pays ambitionne de devenir un exportateur régional d'électricité, notamment vers l'Afghanistan, le Pakistan et l'Inde à travers le projet CASA-1000. Toutefois, des pénuries d'électricité subsistent durant l'hiver, en particulier dans les zones rurales, en raison du manque de diversification énergétique et de capacités de stockage.

Le secteur industriel représente environ 15 à 17 % du PIB et repose principalement sur la transformation du coton, la production d'aluminium, les industries textiles, les matériaux de construction et l'extraction minière. L'usine TALCO (Tajik Aluminium Company), près de Tursunzoda, est l'un des plus grands complexes industriels du pays, bien que le Tadjikistan ne dispose pas de bauxite locale, ce qui oblige à importer les matières premières. Le pays possède également des gisements de charbon, d'or, d'argent, d'uranium et d'antimoine, mais leur exploitation reste limitée par le manque d'investissement et d'expertise technologique.

Le commerce extérieur du Tadjikistan est déséquilibré, avec des exportations faibles en valeur ajoutée et une dépendance forte aux importations, notamment pour les produits manufacturés, les carburants, les machines et les biens de consommation. Les principaux partenaires commerciaux sont la Chine, la Russie, la Turquie, le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. La balance commerciale est généralement déficitaire, compensée en partie par les envois de fonds.

Les transferts de fonds envoyés par les migrants tadjiks à l'étranger, en particulier en Russie, représentent jusqu'à 30 % du PIB selon les années. Ils constituent la principale source de revenus pour de nombreuses familles rurales et contribuent à la stabilité sociale du pays. Cependant, cette dépendance expose l'économie aux fluctuations économiques et géopolitiques de la Russie, notamment les sanctions occidentales ou les crises monétaires. Le gouvernement cherche à diversifier les destinations migratoires, en nouant des accords avec des pays du Golfe ou d'Asie.

Le secteur des services est en croissance. Il représente environ 50 % du PIB, avec un développement lent mais constant des services financiers, des télécommunications, de l'éducation et du tourisme. Le tourisme culturel et de montagne est encore peu développé mais offre un potentiel important, notamment dans les régions du Pamir et du Haut-Badakhchan.Les lacs comme le lac Sarez, qui attirent les amateurs de nature et d'aventure. Les sites historiques et culturels, tels que les mausolées anciens et les vestiges de la Route de la Soie, sont également des points d'intérêt pour les visiteurs. Mais le tourisme est encore en développement. Le manque d'infrastructures, la difficulté d'accès et les restrictions administratives freinent cependant l'essor de ce secteur.

Les finances publiques restent fragiles, avec une dette extérieure significative, une base fiscale étroite et une dépendance à l'aide internationale. Des institutions comme la Banque mondiale, le FMI, l'UE ou la Banque asiatique de développement interviennent activement dans les projets d'infrastructure, d'éducation, de santé ou d'eau potable. La corruption, la faible transparence institutionnelle et le poids des réseaux informels entravent la mise en oeuvre efficace des politiques économiques.

Le climat d'affaires est encore peu favorable aux investisseurs, en raison d'un environnement juridique instable, de l'insécurité foncière, de la bureaucratie, et de la faiblesse du système bancaire. Toutefois, des efforts de réforme sont entrepris pour améliorer la gouvernance économique, moderniser les infrastructures et attirer les investissements étrangers, notamment chinois dans le cadre de l'initiative des Nouvelles Routes de la Soie.

Les inégalités régionales et sociales sont marquées. Les zones urbaines comme Douchanbé ou Khujand bénéficient d'une meilleure accessibilité aux services et aux débouchés économiques, tandis que les régions montagneuses, en particulier le Pamir, restent isolées et sous-développées. Le chômage, notamment chez les jeunes, et l'exode rural posent des défis structurels pour le développement durable du pays.

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