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Le Barometz

A la fois plante et animal, le barometz est connu sous plusieurs autres noms : agneau de Sibérie, agneau des Scythes, agneau de Tartarie, etc. Voici ce qu'en disait l'abbé Bordelon dans la revue Cent questions et réponses, de mai 1704 :
Question Xl. Qu'est-ce que le banarets (sic) ?
Réponse. C'est une plante animale qui produit un fruit de la figure d'un agneau. Ce zoophyte tient à la terre par le nombril, et change de place autant que la souche le lui permet, et comme l'herbe se sèche partout où il se met, les Moscovites, chez qui il est, disent que cette plante fait comme le mouton, Lorsque ce fruit vient en maturité, la tige se seule, et il se revêt d'une peau velue, douce et frisée comme celle d'un agneau nouveau-né et cette peau étant préparée, elle sert de fourrure. On remarque encore de cette plante, qu'elle ne meurt que lorsqu'elle ne trouve plus d'herbe pour se nourrir, que ce fruit a le goût du mouton, et que le loup en est aussi friand que de cet animal.
On peut encore trouver mention du borometz dans le Dictionnaire de Valmont de Bomare, à l'article Agneau Tartare ou de Scythie, qui lui-même qui renvoie à Kircher et à Scaliger et qui écrit :
Borametz, le nom slave donné à cet être chimérique.
Le Manuel lexique de l'abbé Prévost qui combattait la légende disait : Agnus Scythicus ou Boramets.

Les naturalistes du XIXe siècle, adeptes obstinés de cette idée qui veut que ce petit grain de folie qui parcourt l'esprit humain avec la constance d'un lutin facétieux, et qui mène aux mythes, ne soit en définitive qu'une vérité mal exprimée, sont allés rechercher une identification du borometz dans une plante existante. Ainsi, en 1812, Damaze de Raymond, qui dans un ouvrage sur la Russie écrit :

C'est en sibérie que croît cette espèce de fougère sur laquelle on a débité tant de fables, en la désignant sous le nom de borometz, ou agneau de Sibérie (t. l, p. 8;).


(Source : le site de Rebecca Sutton, Becka's Mythology Pages).

Fougère, donc, qui par référence à cette croyance s'est trouvée baptisée polypodium baromez, parce que sa racine ressemble à une toison d'agneau. On trouve l'affirmation bien établie de cette identification dans le Dictionnaire encyclpédique des sciences médicales, 1867 :
Agneau de Scythie. Nom donné, au Moyen âge, à un prétendu animal qu'on appelait encore Agneau de Tartarie, et qui, suivant plusieurs voyageurs (par ex. Chappe d'Auteroche, lors de son Voyage en Sibérie : chap. VII), aurait vécu sous terre dans le nord de l'Asie, en Tartarie, en Chine, en Cochinchine. Les populations lui attribuaient des vertus médicales singulières. Kämpler fut le premier qui, dans ses Amoenitates exoticae, réduisit toutes ces fables à leur juste valeur. Il a démontré, dans le fascicule III de son ouvrage, que l'Agneau de Scythie est une Fougère. Sa tige, longue d'un pied environ, se dirige horizontalement audessus du sol, et elle est supportée par un petit nombre de racines qui simulent grossièrement les pieds d'un quadrupède. Toute sa surface est chargée de poils soyeux jaune foncé ou brun clair. D'ailleurs, les habitants taillaient et façonnaient la plante de manière à lui donner plus de ressemblance encore avec un agneau. Les cryptogamistes ont donné à cette plante les noms de Polypodium Barometz L., et d'Aspidium Barometz W. Ses propriétés doivent être en réalité les mêmes que celles des souches de diverses fougères employées comme amères, astringentes, anthelmintiques. De plus, les poils abondants qui couvrent la surface ont été utilisés comme succédanés de l'amadou pour arrêter les hémorragies. (H. Bn.).
Reste à dire un mot sur le vocable lui-même. Alors même que le mythe n'a visiblement jamais eu cours en Russie (comme l'ont chaque fois constaté les voyageurs qui y ont enquêté sur la question), il existe un mot de la langue populaire qui pourrait au moins fournir une étymologie : c'est le mot baranietz, et il signifie agneau...
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Dictionnaire Religions, mythes, symboles
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