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Philippe Ier est un roi de France (Moyen âge, Capétiens), qui a régné de 1060 à 1068, et est né en 1052. Il était le fils aîné du roi Henri Ier, et d'Anne de Russie. Il n'avait donc que sept ans lorsque son père le fit sacrer à Reims, le jour de la Pentecôte (23 mai 1059), par l'archevêque Gervais. Le procès-verbal de cette cérémonie nous a été conservé; elle eut lieu en présence d'un grand nombre de prélats, évêques et abbés, et de seigneurs laïques, spécialement Hugues, archevêque de Besançon, légat du pape, les archevêques de Sens et de Tours, le duc d'Aquitaine, les représentants du duc de Bourgogne, du comte de Flandre et du comte d'Anjou, les comtes de Valois, de Vermandois, de Ponthieu, de Soissons, de Clermont-en-Auvergne, de la Marche, d'Angoulême, le vicomte de Limoges. L'archevêque de Reims profita de la circonstance pour se faire confirmer le titre de grand chancelier et obtenir la reconnaissance de son droit à consacrer les rois. Henri Ier mourut l'année suivante, le 4 août 1060. Avant de mourir, il avait désigné son beau-frère, le comte Baudouin V de Flandre, pour exercer la tutelle du jeune roi et la régence du royaume, concurremment avec la reine Anne. Il semble que légalement la tutelle eût dû revenir à Robert, duc de Bourgogne, frère de Henri Ier. C'est peut-être ce qui excita dans le palais royal des dissensions sur lesquelles nous n'avons d'autre renseignement qu'une allusion dans une lettre de l'archevêque de Reims au pape Nicolas. Les premières années du roi se passèrent au centre de son domaine, à Paris, Etampes, Orléans, Senlis, Compiègne, Soissons; cependant, il accompagna à plusieurs reprises son tuteur en Flandre : nous le trouvons à Lille en 1063; il assista à la translation des reliques de saint Macaire à Gand; il était à Furnes en 1066. En cette dernière année, la tutelle prit fin. L'un des premiers actes du gouvernement personnel de Philippe eut pour résultat un agrandissement du domaine royal; il mit à profit les démêlés qui avaient éclaté entre Geoffroy le Barbu et Foulque Rechin, fils d'Ermengarde, soeur de Geoffroy Martel, et d'Aubri, comte du Gâtinais, neveux et héritiers de Geoffroy Martel, comte d'Anjou. Foulque, mécontent de la part qui lui avait été faite dans l'héritage de son oncle, prétendit dépouiller son frère de ses domaines. Dans une première guerre, Foulque fit Geoffroy prisonnier, le 4 avril 1067; il le remit en liberté. Il ne renonça pas à ses projets ambitieux; mais avant d'engager contre lui une lutte décisive, il voulut s'assurer la neutralité du roi; il détacha même le roi du parti de Geoffroy; car, le 7 août 1067, Philippe Ier et Geoffroy étaient alliés, assiégeant ensemble le château de Chaumont sur-Loire. Foulque promit au roi de lui abandonner le Gâtinais, pourvu qu'il ne le contrariât pas dans son entreprise. La guerre terminée par une victoire de Foulque, remportée à Brissac, en 1068, avant le 11 mars, et dans laquelle Geoffroy fut fait prisonnier, le vainqueur céda au roi Château-Landon et le comté du Gâtinais. L'annexion n'alla pas sans soulever une opposition de la part des chevaliers du Gâtinais, qui exigèrent du roi, avant de lui faire hommage, la promesse de respecter les coutumes de leur terre. Par cette acquisition, Philippe Ier reliait ses domaines de la vallée de la Seine à ceux de la Loire; il s'ouvrait un libre chemin entre les villes les plus importantes de ses Etats, Paris, Melun et Orléans. Quelques années après, Philippe intervint dans les affaires de Flandre. Baudouin VI étant mort, le comté de Flandre échut à son fils Arnulf, que son oncle, Robert le Frison, comte de Hollande, voulut dépouiller de ses Etats. La mère d'Arnulf, Richilde, implora le secours de Philippe, qui avait, aux comtes de Flandre, Baudouin V et Baudouin VI, des obligations particulières, le premier ayant été son tuteur et le second l'ayant armé chevalier. Un combat eut lien entre Robert et Philippe, près de Cassel, le 22 février 1071. Les troupes alliées, c.-à-d. celles d'Arnulf et de Philippe Ier, auxquelles s'étaient joints quelques chevaliers normands, furent vaincues. Mais si l'issue du combat fut favorable à Robert, il n'en tomba pas moins aux mains de ses ennemis; d'autre part, Richilde fut faite prisonnière ; quant à Arnulf, il trouva la mort dans ce combat. Le roi de France dut prendre la fuite. Il y eut échange de prisonniers. Arnulf avait un frère, Baudouin, dont Philippe Ier résolut de défendre les droits ; il rassembla une nouvelle armée à Montreuil et regagna la Flandre. La ville de Saint-Omer, qui s'était donnée à Robert, lui fut livrée par trahison, le 6 mars. Robert gagna à sa cause le comte Eustache de Boulogne, et son frère Geoffroy, évêque de Paris, par l'intervention desquels la paix fut conclue avec le roi. C'est probablement dans ce traité que fut convenu le mariage de Philippe avec la belle-fille de Robert, Berthe, fille de Gertrude de Saxe et de Florent de Hollande. On place vers 1074 une nouvelle rupture entre Robert et Philippe, à la suite de laquelle celui-ci s'empara de la ville de Corbie, autrefois donnée en dot par le roi Henri Ier à sa soeur Adèle, lors de son mariage avec Baudouin V de Flandre. A l'automne de 1076, le roi d'Angleterre, Guillaume le Conquérant, mit le siège devant la ville de Dol, en Bretagne, sans qu'on sache les causes de cette attaque. Philippe ler marcha contre lui et l'obligea à lever le siège. L'année suivante, les deux rois firent la paix. Le roi d'Angleterre était alors en lutte avec son fils Robert, qui prétendait que son père lui cédât le duché de Normandie. Le rebelle ayant rassemblé une troupe de chevaliers, allait de cour en cour sollicitant une aide contre son père. Au dire d'Orderic Vital, Philippe Ier l'aurait accueilli avec bienveillance et lui aurait assigné comme résidence le château de Gerberoy, en Beauvaisis, sur les confins de la Normandie. Il est plus probable que Robert songea de lui-même à s'établir dans cette place forte, qui était devenue un véritable repaire de bandits et d'où il pouvait exercer des ravages sur les terres normandes, car, en décembre 1079, nous trouvons Philippe ler uni au roi Guillaume pour assiéger Gerberoy : il était accompagné du sénéchal Robert, du chambrier Galeran, du bouteiller Hervé, du connétable Adam et de son propre frère Hugues. Les assiégés résistèrent. Le siège fut levé. La paix fut conclue entre Guillaume et son fils avant le 8 mai 1080. Le mariage de Philippe avec Berthe était resté longtemps stérile. Vers la fin de 1081 naquit Louis, qui, plus tard, devait succéder à son père sur le trône de France (Louis le Gros). Philippe et Berthe n'eurent pas d'autre fils, mais une fille, constance, qui, entre 1093 et le 28 octobre 1093, épousa Hugues, comte de Champagne; en 1105 ou 1106, elle obtint le divorce pour cause de parenté et épousa Bohémond, prince d'Antioche, entre le 25 mars et le 26 mai 1106. L'antique lutte entre le duc de Normandie et le roi de France pour la possession du Vexin se raviva en 1087. Les seigneurs du Vexin, et spécialement Hugues Stavelot et Raoul Mauvoisin, faisaient d'incessantes incursions sur les terres normandes; leurs razzias s'exerçaient sur la terre de Guillaume de Breteuil, autour de Pacy-sur-Eure, et sur celle de Roger d'Ivry. Guillaume le Conquérant, voulant mettre fin à ces désordres, réclama du roi de France non seulement la réparation des dommages causés à ses vassaux, mais la cession des villes de Pontoise, Chaumont-en-Vexin et Mantes, menaçant, si l'on ne faisait pas droit à sa requête, de s'emparer du Vexin à mains armées. Le roi Guillaume était déjà malade; Philippe Ier, ne s'effrayant pas de ses menaces, usa de moyens dilatoires pour éviter une réponse précise. Mais dans la dernière semaine de juillet, Guillaume se mit en marche et se présenta devant Mantes, dont il s'empara le 15 août; il mit la ville à sac. Blessé dans la mêlée, le roi Guillaume se fit transporter à Rouen, où il mourut le 9 septembre 1087. L'an 1092, Philippe Ier répudia Berthe, qui se retira dans la ville de Montreuil-sur-Mer, qu'elle avait reçue en dot lors de son mariage; puis il enleva Bertrade de Montfort, femme de Foulque, comte d'Anjou; cet événement, qui devait avoir pour le roi de si désastreuses conséquences, eut lieu le 15 mai 1092. L'église n'avait pas prononcé le divorce ni entre Philippe et Berthe, ni entre le comte d'Anjou et Bertrade. Le roi, cependant, prétendait faire bénir son union avec Bertrade; à cet effet, il convoqua les évêques de France à Paris; mais la plupart, à l'instigation de l'évêque Ive de Chartres, refusèrent de se rendre à l'invitation royale. Le mariage fut cependant célébré, sans qu'on ait pu jusqu'ici déterminer par quel évêque; car les chroniqueurs sont en désaccord sur ce point : Guillaume de Malmesbury désignant Guillaume, archevêque de Rouen; Orderic Vital, Eudes, évêque de Bayeux; Hugues de Flavigny, Philippe, évêque de Troyes, et Gautier, évêque de Meaux, et, enfin, le pape Urbain II, Ursion, évêque de Senlis. Enfin, en 1094, Philippe voulant se porter au secours de Robert, duc de Normandie, attaqué par son frère le roi d'Angleterre, l'évêque de Chartres refusa d'amener ses vassaux à l'armée royale, prétextant qu'il n'était pas tenu à l'obéissance vis-à-vis d'un roi que le souverain pontife avait frappé d'interdit. La reine Berthe étant morte en 1094, on put croire à une prompte solution de l'affaire du mariage de Philippe; mais il restait à rompre le lien qui unissait Bertrade à Foulque et à justifier l'adultère du roi, Le pape ordonna à son légat, Hugues, archevêque de Lyon, de convoquer un concile à Autun pour le 15 octobre, tandis que le roi appelait les évêques à Paris pour juger Ive de Chartres accusé du crime de lèse-majesté. Le concile d'Autun excommunia Philippe. Le pape, sur les représentations que lui firent les ambassadeurs du roi, accorda un répit. Mais, au concile tenu à Clermont, en novembre 1095. Urbain II lança lui-même l'excommunication contre Philippe. Cette sentence, levée à la suite de la promesse faite par le roi de se séparer de Bertrade, fut renouvelée en 1097 par le légat Hugues, puis par un concile réuni à Poitiers la même année et présidé par les légats du pape Pascal II, le cardinal Jean et le cardinal Benoît, malgré l'intervention du comte de Poitiers, qui pénétra avec ses chevaliers dans le lien où se tenait l'assemblée, ne pouvant souffrir, disait-il, que sur ses terres l'on excommuniât son suzerain. L'excommunication fut rigoureusement appliquée. Orderic Vital prétend que le roi ne pouvait plus ni porter la couronne ni revêtir la pourpre et que le son des cloches et le chant religieux cessaient à l'approche du roi. Et, si l'on en croit Hugues de Flavigny, le roi et Bertrade, ayant séjourné pendant quinze jours à Sens, les églises restèrent fermées sans que le clergé voulût admettre les souverains à aucun acte religieux. A ce moment, le roi était menacé au cour même de ses Etats. Guillaume le Roux, roi d'Angleterre, qui avait acquis la Normandie, reprit les projets de son père contre le Vexin. Le bruit courut qu'il voulait ajouter la couronne de France à celle d'Angleterre. Mais les seigneurs du Vexin, sous la conduite de Louis, fils aîné du roi, opposèrent une résistance héroïque aux Anglais. Pendant ce temps, le roi Guillaume portait la guerre dans le Maine. Mais en septembre 1098, il vint prendre le commandement des troupes du Vexin son intervention était d'autant plus redoutable qu'il avait fait alliance avec le duc d'Aquitaine. Il s'avança jusqu'à Pontoise, dont il ne put s'emparer; Chaumont lui résista. Il reporta ses efforts contre le pays qui s'étendait au Sud de la Seine. Le châtelain de Septeuil, Nivard, lui livra son donjon. Amauri de Montfort reçut aussi probablement les Anglais dans son château de Houdan. Guillaume vint se heurter à Montfort, à Epernon, que défendait Simon II, comte de Montfort, à Neauphle, où se retranchait Simon le Vieux. La campagne ayant échoué, il se retira en Normandie où il passa les fêtes de Noël 1098. Une trêve fut conclue. Le jeune prince Louis n'avait pas pris part à la seconde partie de cette guerre. La haine de sa belle-mère Bertrade, qui voulait assurer la succession royale à ses enfants, Philippe et Florus; l'avait éloigné de la cour. Il dut même se faire conférer la chevalerie à Abbeville, le 23 mai 1098, par Gui, comte de Ponthieu. Malgré les résistances de Bertrade et du parti qui la suivait. Philippe Ier, se rendant compte de l'impossibilité où sa position vis-à-vis de l'église le mettait de remplir complètement son office royal; associa (entre le 24 mai 1098 et le 25 décembre 1100), son fils Louis au gouvernement, en le faisant élire roi par les grands; il porta dès lors le titre « de roi désigné ». La lutte reprit plus âpre que jamais entre Bertrade et Louis. Celui-ci dut chercher un refuge auprès du roi d'Angleterre, Henri Ier; il se trouvait à Londres le 25 décembre 1100. Bertrade intrigua auprès du roi Henri pour qu'il retint le jeune roi prisonnier ; elle chercha à le faire assassiner, puis empoisonner. Dès l'année 1101, Louis était de retour en France; il prit dès lors le gouvernement du royaume, guerroyant contre les seigneurs du domaine royal, tenant des plaids, donnant des privilèges aux églises ou tout au moins confirmant ceux qui étaient délivrés au nom de son père. Celui-ci, qui avait été vaillant dans sa jeunesse, était devenu lourd, dit Raoul Tortaire, et ne songeait plus qu'à la bonne chère et au sommeil. Cependant, en 1100 ou 1101, il augmenta son domaine en achetant, pour le prix de 60.000 sols, du vicomte Arpin, la seigneurie de la cité de Bourges. En même temps, il poursuivait sa réconciliation avec l'Eglise. Celle-ci se montrait disposée à apporter des tempéraments à la rigueur du droit canon. Ive de Chartres lui-même poussait à accorder le pardon au roi. A la suite de deux conciles convoqués par le légat du pape, le cardinal Richard, évêque d'Albano, et tenus à Troyes et à Beaugency, en vue de fixer les conditions auxquelles l'absolution serait donnée au roi, et qui restèrent sans résultat, par suite de l'obstination de quelques évêques, Ive de Chartres écrivait au pape qu'il serait bon d'user de quelque indulgence envers les faiblesses du roi et de retirer le royaume de l'état critique dans lequel l'avait plongé l'excommunication de son souverain. Le pape arrêta la formule du serment que le roi et sa femme devaient prêter pour obtenir de rentrer dans la communion des fidèles. Le roi convoqua lui-même les évêques à Paris. Le pape avait délégué l'évêque d'Arras, Lambert, pour recevoir le serment da roi. Philippe et Bertrade jurèrent sur le livre des Evangiles de n'avoir plus aucun commerce ensemble. Cette cérémonie eut lieu le 2 décembre 1104. Cependant, les époux continuèrent de mener la vie commune; il y avait, d'ailleurs, dans le serment prêté par le roi une réserve qui leur permettait de ne pas se séparer complètement : « Je promets, avait dit le roi, que je n'aurai désormais aucun entretien ni aucune société avec cette femme, si ce n'est en présence de personnes non suspectes. »Nous savons que le 10 octobre 1106, Philippe et Bertrade arrivèrent à Angers; ils y furent même reçus par le comte Foulque, le premier mari de Bertrade. L'an 1107, le pape Pascal II vint en Prance pour demander l'appui des rois Philippe et Louis contre l'empereur Henri V. Les rois eurent avec le pape une entrevue à Saint-Denis. Philippe ler mourut à Melun en juillet 1108. Les chroniqueurs ne sont pas d'accord sur la date de sa mort Orderic Vital, un chroniqueur anonyme et une ancienne épitaphe donnent le 29 juillet; Clarius, de Sens, le 30; Hugues de Fleury, le 31 juillet. Le roi désigné assistait aux derniers moments de son père. Un service funèbre fut célébré à Notre-Dame de Melun par Galon, évêque de Paris, entouré des évêques de Senlis et d'Orléans et de l'abbé de Saint-Denis. Puis le corps du roi fut transporté au monastère de Saint-Benoît-sur-Loire, que le défunt avait lui-même désigné pour le lieu de sa sépulture, et enterré dans l'église, au milieu du choeur devant le maître-autel. Plus tard, au XIIIe siècle, on éleva un monument funéraire. Le tombeau fut ouvert en juin 1830. Le monument fut restauré et presque entièrement refait, puis placé sous le clocher central, entre les deux transepts, et transporté dans le transept méridional; il consiste en une dalle portée par quatre lions accroupis, sur laquelle est étendue la statue du roi en costume d'apparat. (M. Prou). |
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