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Nicolas Vasilievitch
Gogol-Ianovski est un écrivain russe d'origine ukrainienne,
né à Sarotchintsy, dans le gouvernement de Poltava,
le 19 mars (1er avril selon le calendrier
grégorien) 1809, mort à Moscou le 19 février
(2 mars) 1852. Considéré comme l'un des pionniers de la littérature
russe moderne. Ses oeuvres se distinguent par une satire percutante,
un humour noir, et une critique de la société russe du XIXe
siècle. Elles sont imprégnées d'un style qui mêle satire, réalisme
et fantastique. Sa manière de dépeindre la société russe a profondément
influencé les générations d'écrivains qui ont suivi, de Dostoïevski
à Boulgakov.
Son grand-père qui avait servi chez les
Cosaques Zaporogues
berça son enfance du récit de leurs aventures. Son père était, lui
aussi, un fort habile conteur et possédait une riche bibliothèque. Nicolas
Gogol fit ses études au lycée de Niéjine. Il y fut un médiocre
élève, mais s'y fit déjà remarquer par sa forte personnalité. Dès
sa jeunesse, il avait eu la passion du dessin et de la littérature; il
rédigeait au collège un journal intitulé l'Étoile où il publiait
ses premiers essais; il écrivait une tragédie (les Brigands) et
une satire contre les habitants de Niéjine. Il organisa au lycée un théâtre
sur lequel il joua lui-même non sans succès, la comédie, et une bibliothèque
dont on lui confia la surveillance. En 1828, Gogol se rendit à Pétersbourg,
et, en 1830, après quelques aventures romanesques, entra au ministère
des apanages, qu'il quitta au bout d'un an; il avait l'idée d'être acteur,
mais aucune troupe ne voulut le recevoir. Il écrivit quelques essais,
les uns d'un caractère sérieux (Sur le Commerce de la Russie au XVIe
et XVIIIe, siècle), les autres purement
littéraires (notamment le poème satirique Hans Küchelgarten,
sous le pseudonyme d'Alov), qui furent d'abord assez mal reçus par la
critique. Il ne révéla réellement son talent que par la publication
du volume intitulé Soirées à la ferme de Dikanka; l'ouvrage ne
parut pas sous son nom, mais sous celui de Roudy Panko, agriculteur Ã
Dikanka. Il fut reçu avec enthousiasme. Pouchkine
et Joukovsky s'intéressèrent à la carrière de l'auteur.
En mars 1831, Nicolas Gogol fut nommé
professeur d'histoire à l'Institut patriotique. II collabora à divers
recueils et, en 1844, écrivit pour l'éditeur Smirdine une de ses meilleures
nouvelles : Comment Ivan Ivanovitch en
vint à se quereller avec Ivan Nikiforovitch. En 1834, sur la recommandation
de Joukovsky, Gogol fut nommé professeur adjoint du cours d'histoire Ã
l'université de Saint-Pétersbourg. Il publia, à cette occasion, des
Essais sur l'Histoire des Arabes et sur l'Histoire du Moyen âge,
mais après quelques leçons il se dégoûta de son enseignement et donna
sa démission. Désormais, il se consacra entièrement à la littérature
: il fit paraître, en 1834, deux recueils de nouvelles, les Arabesques
et les Récits de Mirgarod. Ils renferment le Portrait, les Propriétaires
du temps jadis, la Perspective Nevski, le Nez, la Calèche, le Manteau.
Dans ces productions, il rompait complètement avec les traditions romantiques;
leur caractère naturaliste effaroucha les conservateurs et provoqua de
vives polémiques. Gogol avait médité d'écrire une histoire de la Petite-Russie;
ce projet ne fut pas réalisé, mais les études que l'auteur avait de
s'imposer purent lui servir pour son roman
historique, Tarass Boulba.
Pouchkine, qui s'intéressait vivement
au talent de Gogol, l'engagea à entreprendre quelque oeuvre de longue
haleine où il pourrait donner pleine carrière à ses facultés et lui
fournit le sujet des Âmes mortes. Le premier volume de ce roman
satirique parut en 1849. Gogol l'avait écrit en grande partie en Italie.
C'est à Pouchkine qu'appartient aussi le sujet de la comédie le Revisor.
Gogol y met en scène, dans un cadre digne de Molière,
la corruption et la vénalité des fonctionnaires de province. Le Revisor
fut joué au mois d'avril 1836. Il excita de grandes colères, particulièrement
dans le monde des fonctionnaires auquel l'auteur s'attaquait. Gogol fut
découragé et prit son pays en dégoût. Le premier volume des Âmes
mortes parut en 1842; le second ne fut publié qu'après la mort de
l'auteur, en 1855. A dater de 1836, Gogol passa la plus grande partie de
sa vie à l'étranger, particulièrement en Italie. Sa santé était fort
ébranlée. Il inclina vers le mysticisme et fit, en 1848, le pèlerinage
de Jérusalem. Dans un accès d'exaltation
il brûla le manuscrit d'une partie des Âmes mortes.
Cette oeuvre incomparable est malheureusement
restée inachevée. Le dernier ouvrage qu'il ait publié de son vivant
est intitulé Morceaux choisis d'une correspondance avec des amis
(1847). Ce recueil singulier, empreint d'un mysticisme morbide, fit une
pénible impression sur le public. Les dernières années de Gogol furent
une lente agonie; il s'éteignit, épuisé par les jeunes, les veilles,
les macérations, au moment où peut-être son génie allait sombrer dans
la folie. Il publia la plupart de ses oeuvres sous divers pseudonymes :
Roudy-Panko, 0. 0.0.0. Alov, Gletchik, Janov, etc.
Le trait dominant de Nicolas Gogol c'est
l'humour; il excelle à dépeindre les côtés ridicules ou inférieurs
de la vie humaine. Il décrit d'un style souple et plastique les traits
particuliers de la nature russe. Nul n'a mieux que lui chanté le pittoresque
de la steppe ou la majesté du Dniepr. En appelant l'attention de ses compatriotes
sur les misères de leur vie sociale, en traçant des tableaux réalistes
de la vie rurale, il a contribué à l'oeuvre d'émancipation qui ne devait
s'accomplir que dix ans après sa mort. II a été le véritable chef de
l'école dite naturelle.
Ses Âmes mortes peuvent se comparer
aux plus grandes oeuvres des littératures étrangères, au Don Quichotte,
au Gil Blas.
C'est une véritable épopée
héroï-comique. Le titre de l'ouvrage paraît singulier et prête matière
à de fantastiques hypothèses. Il s'agit en réalité de serfs morts dont
l'escroc Tchitchikov se rend acquéreur à fort bon marché pour se constituer
ce que le code pénal appelle un crédit imaginaire. A la recherche de
cette bizarre marchandise, Tchitchikov parcourt une grande partie de la
Russie
et visite toute espèce de personnages. Dans ce cadre élastique, Gogol
a fait entrer d'exquises descriptions, des types ou des scènes d'un comique
achevé. (L. Léger).
Parmi les principales oeuvres de Gogol,
on mentionnera ici :
• Les
nouvelles de Pétersbourg (ou Contes de Pétersbourg). - Ce
recueil de nouvelles contient certaines des ozuvres les plus célèbres
de Gogol, publiées entre 1835 et 1842. Ces récits se déroulent à Saint-Pétersbourg
et examinent fréquemment la vie des fonctionnaires et des petites gens
de la ville, et mettent en avant leurs angoisses et leurs obsessions. Les
nouvelles les plus connues de ce recueil sont :
+ Le
Nez. - L'histoire absurde et surréaliste d'un homme qui perd littéralement
son nez, lequel commence à mener sa propre vie. Ce conte analyse la vanité,
la perte d'identité et l'absurdité bureaucratique.
+ Le Manteau.
- L'histoire touchante et tragique d'un petit fonctionnaire, Akaki
Akakiévitch, qui économise pour acheter un nouveau manteau, symbole d'une
dignité retrouvée. Ce récit est vu comme une dénonciation de la dureté
de la société russe.
+ Le Portrait.
- Un récit fantastique qui traite du pouvoir corrupteur de l'argent
et de l'ambition, en suivant l'histoire d'un peintre qui achète
un portrait maudit.
+ La Perspective
Nevski. - Une histoire sur la superficialité des apparences, racontant
comment deux hommes sont obsédés par des femmes rencontrées sur la rue
Nevski.
• Le Réviseur.
- Publiée en 1836, cette pièce de théâtre est l'une des oeuvres les
plus célèbres de Gogol et une satire brillante de la bureaucratie russe.
L'intrigue repose sur un malentendu : les notables d'une petite ville
russe corrompue prennent un jeune voyageur pour un inspecteur gouvernemental
envoyé pour les surveiller. À travers cette comédie, Gogol expose la
corruption, la stupidité et l'hypocrisie des fonctionnaires.
• Les Âmes
mortes (première partie publiée en 1842). - Ce roman est considéré
comme l'un des chefs-d'oeuvre de Gogol et de la littérature russe. L'intrigue
suit un escroc, Tchitchikov, qui parcourt la Russie en achetant des "âmes
mortes" (des serfs décédés encore enregistrés dans les recensements).
Il souhaite ainsi se faire passer pour un riche propriétaire terrien.
Ce roman, à la fois drôle et sombre, critique la servilité, la bureaucratie
et la déshumanisation de la société russe. Gogol projetait de faire
de ce livre une Divine Comédie russe, en trois parties, pour dépeindre
la Russie de son époque, mais il n'a achevé que la première partie.
La seconde partie fut en partie détruite par l'auteur lui-même avant
sa mort.
• Tarass Boulba
(1835, révisé en 1842). - Ce roman historique raconte l'histoire
d'un cosaque ukrainien, Tarass Boulba, et de ses deux fils. Le récit se
déroule dans les steppes ukrainiennes et explore le thème du patriotisme
et de l'amour de la liberté. Le personnage de Tarass Boulba est devenu
un symbole de la lutte des Cosaques contre l'oppression. Bien que cette
oeuvre contienne des éléments d'exaltation nationale, elle s'inscrit
aussi dans un contexte tragique où les valeurs de liberté s'entrechoquent
avec des violences cruelles.
• Mirgorod.
- Publié en 1835, Mirgorod est un recueil de nouvelles qui comprend plusieurs
récits aux tonalités variées. Certaines histoires du recueil évoquent
la culture ukrainienne, des paysages de la campagne et des récits inspirés
par le folklore. Parmi les histoires de ce recueil, on trouve notamment
:
+ Vieille
femme, La Nuit de mai. - Des contes inspirés du folklore ukrainien,
abordant des thèmes de surnaturel et de mystère.
+ La Querelle des
deux Ivan. - Une histoire qui dépeint de manière humoristique et cruelle
la bêtise et l'orgueil des personnages.
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Anciennes
éditions -
Les
oeuvres de Gogol sont rapidement devenues classiques en Russie et sont
constamment réimprimées. La première édition complète a parti à Pétersbourg,
en 1857 (6 vol.); une autre à Moscou en 1867 (4 vol.; réimprimée plusieurs
fois, notamment en 1887, 4e éd.). L'édition la plus récente est celle
de M. Tikhonravov (Pétersbourg, 1893, 5 vol.). Un volume d'oeuvres inédites
a été publié par la rédaction de la revue Tsar Kolokol (Moscou,
1892). Parmi les premières traductions françaises de Gogol, nous citerons
: Nouvelles russes, par Louis Viardot (Paris, 1845, plusieurs fois
réimprimé); Taras Boulba (1853); le Manteau, traduit par
Mérimée dans le volume Au bord de la Neva
(Paris, 1856); le Revisor, traduit par Marmier dans le volume intitulé
les Deux Héritages (Paris,,1853) et par Challandes (Paris, 1875);
les Âmes mortes, par E. Moreau (Paris, 1858) et par Charrière
(id. 1859).
En
bibliothèque -
Mejov, Catalogue
des livres russes; Saint-Pétersbourg, années 1569 et suiv. - Oeuvre
de Bielinsky, passim. - Mémoires sur la vie de N.-V- Gogol (en
russe); Saint-Pétersbourg, 1856, 2 vol. - Mérimée, dans la Revue
des Deux-Mondes, nov. 1851. - Notice de Charrière, en tête de la
traduction des Âmes mortes. - Courrière, Histoire de la littérature
contemporaine en Russie; Paris, 1875. - De Vogüé, le Roman russe;
Paris, 1886. - E. Dupuy, les Grands Maîtres de la littérature russe;
Paris, 1885. - L. Léger, la Littérature russe; Paris, 1892. |
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