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Confucius,
nom latinisé de Kong Fou-tseu (Maître Kong) est un philosophe
chinois, né en 551, mort en 479 av. J. C. Les Chinois l'appellent
Kong tseu, le regardent et le révèrent comme le Sage par
excellence. Sa famille remontait au célèbre empereur Hoang-ti
et après avoir quitté le pays de Soung, vint s'établir
définitivement dans celui de Lou (partie du Chan-toung actuel).
Son père, Kong-chou Liang-he, n'ayant eu que des filles d'un premier
mariage, épousa en secondes noces une jeune fille de la famille
Yen, dont il eut, en 551, à Tseou, un fils qui reçut le nom
de Kieou à cause d'une protubérance qu'il avait sur la tête,
et le surnom de Tchoung-ni, qui est notre philosophe.
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Statue
de Confucius dans un temple, au Vietnam. Photo
: © Angel Latorre, 2008.
Confucius n'eut d'ailleurs lui-même
qu'un fils auquel il survécut et qui suffit à perpétuer
sa descendance, anoblie par l'empereur Kaotsou, de la dynastie des Han
(vers 200 av. J.-C.). Le chef de la famille porte le titre de duc (Kong).
Kong-kieou perdit son père à l'âge de trois ans, et
sa mère Tcheng-tsai quitta le district de Tchang-ping pour aller
s'établir dans celui de Ku-feou. Elevé d'abord par sa mère,
le jeune Kieou fut, à l'âge de sept ans, envoyé dans
une école tenue par un lettré distingué, nommé
Ping-tchoung; il ne tarda pas à se faire remarquer non seulement
par son amour du travail, mais encore par sa gravité précoce,
et son maître le choisit pour faire répéter leurs leçons
à ses condisciples moins bien doués que lui. A dix-sept ans,
il accepta un poste de fonctionnaire inspecteur de la vente et de la distribution
des grains, à dix-neuf ans, Kong épousa Ki Kouan-che qui
appartenait à la famille Ki, du royaume de Soung; il en eut l'année
suivante un fils qu'il appela Pe-yu. A vingt et un ans, sa réputation
étant devenue grande, il fut nommé inspecteur général
des campagnes et des troupeaux, avec mission de réprimer les abus.
Pendant quatre ans, il remplit ses fonctions avec un zèle qui lui
permettait d'aspirer à de hautes dignités, lorsque la mort
de sa mère, à peine âgée de quarante ans, lui
fit prendre une retraite de trois ans, renouvelant ainsi une coutume qui
s'est perpétuée en Chine
jusqu'à la fin de l'époque impériale. Confucius continua
à se perfectionner dans l'étude de la philosophie. Il fit
une visite à la ville de Loh, près de la ville actuelle de
Honan-fou, et l'on prétend qu'il y eut une entrevue avec le célèbre
Lao-tseu. En 517, l'Etat de Lou étant en pleine anarchie, Confucius
se retira à la cour de Tsi, puis il revint dans son pays, où,
pendant quelques années encore, il n'occupa aucune fonction publique.
Tchao-Koung, roi de Lou, étant mort en exil, eut pour successeur
son frère Ting-Koung qui, en 501, nomma Confucius gouverneur de
la ville de Tchoung-tou, poste dans lequel il se distingua tellement que,
l'année suivante, il était nommé ministre des travaux
publics, puis ministre de la justice. La prospérité de l'Etat
de Lou sous la sage administration de Confucius excita la jalousie du roi
de Tsi; celui-ci, pour détacher Ting de son ministre, envoya à
la cour de Lou quatre-vingts des plus belles courtisanes de Tsi et cent
vingt superbes chevaux en présents. L'effet de ce cadeau dangereux
ne tarda pas à se faire sentir; Confucius, alors âgé
de cinquante-quatre ans (497), se décida à quitter le royaume
de Lou, où il ne rentra qu'en 484. Il se mit donc à voyager
dans les différents Etats qui composaient la Chine; sa réputation
allait grandissant et le nombre de ses disciples augmentait sans cesse.
Il parcourut les royaumes de Wei, de Tsao, de Soung, de Tcheng, de Tchen,
etc. Cependant le roi Ting, de Lou, étant mort en 495, son fils
et successeur, Ngai, le rappela de Wei, mais le rôle politique du
Sage était désormais fini et il mourut à l'âge
de soixante-treize ans, le jour Ki-tcheou de la quatrième lune de
la seizième année de Ngai-Koung, roi de Lou, la quarante
et unième du règne de King-ouang, vingt-cinquième
empereur de la dynastie des Tcheou, 479 av. J.-C. Son petit-fils, Tseu-seu
étant trop jeune, ses disciples, Tseu-Koung et Koung Hi-tche, se
chargèrent des funérailles.
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Confucius.
La doctrine de Confucius est moins une
philosophie qu'une morale : une morale reposant
sur des vertus naturelles, n'ayant rien d'héroïque, avec un
côté pratique; une morale codifiant pour ainsi dire les sentiments,
prenant par exemple la piété filiale, étendant son
caractère au delà de la famille, jusqu'à l'empereur,
le gouvernement, la nation et prévoyant dans les préceptes
tous les cas, toutes les circonstances dans lesquelles les théories
doivent être mises en pratique. C'est justement ce côté
essentiellement humain, essentiellement terre à terre, qui a donné
de la durée à la doctrine de Confucius : elle est claire,
limpide, compréhensible pour tous, n'a rien des obscurités,
ni en même temps du génie de Lao-tseu. Cette doctrine est
renfermée dans les livres classiques désignés sous
le nom général de King .
Tous ces livres, quoique appartenant à l'école de Confucius,
sont loin d'être en entier l'oeuvre personnelle du Sage, dont nous
allons essayer de marquer la part. Dix sections : Che-yi, de l'Y-king;
le Chou-king est une compilation par Confucius de ce qui restait des histoires
de Yu et des dynasties des Hia, des Chang et des Tcheou; il se composait
de cent chapitres qui comprenaient l'histoire de la Chine depuis les empereurs
Yao
et Chun, jusqu'à Ping-wang de la dynastie des Tcheou (720 av. J.-C.)
; aujourd'hui l'ouvrage renferme cinquante-huit chapitres; il a subi des
remaniements, de nouvelles rédactions et des deux textes qui nous
en restent, l'ancien et le moderne Fou-wen et Fin-wen, ce dernier parait
être le plus authentique et comprend trente-trois chapitres sur cinquante-huit.
Le Chi-king est une collection des odes au nombre de trois cent onze répandues
à l'époque des Tcheou dans les petits Etats de la Chine,
recueillies et arrangées par Confucius. Le Tchoun-tsieou, annales
du Printemps et de l'Automne, est le seul des cinq grands King qui ait
été vraiment écrit par Confucius : c'est l'histoire
de son pays, du pays de Lou, de 722 à 481 av. J.-C. C'est avec des
matériaux rassemblés par ses disciples dans les archives
de l'Etat de Tcheou que Confucius a pu compiler cet ouvrage. Il faut y
ajouter les trois commentaires faits l'un par Tso Kieou-ming sous le titre
de Tso-tchouen; un second au commencement des Han par Kong-yang Kao et
le dernier vers le milieu du siècle av. J.-C. par Keou-lang. Dans
les Se-chou, quatre livres classiques, des onze chapitres qui composent
le Ta-hio, grande étude, le premier renferme les paroles de Confucius,
les dix autres sont de Tseng-tseu, son disciple; le Tchoung-young est de
Tseu-seu son petit-fils; le Luen-yu, conversations entre Confucius et ses
disciples, en vingt chapitres, n'a pas été rédigé
par lui, pas plus naturellement que le livre de Mencius. Le Hiao-king,
livre de la pitié filiale, est une conversation entre Confucius
et son disciple Tseng-tseu : il a été rédigé
par un autre disciple dont on n'a pas conservé le nom. Quoique ces
livres n'aient pas été tous, comme je l'ai dit, écrits
par Confucius, ils ont tous son empreinte et s'inspirent de ses idées.
Lorsque Chi Hoang-ti, le grand empereur
Tsin, voulut, en proscrivant les livres, anéantir tout vestige de
la dynastie des Tcheou, les oeuvres de Confucius et les rituels eurent
spécialement à souffrir de la destruction ordonnée
par ce monarque. Le Tcheou-li, rituel des Tcheou, fut particulièrement
désigné à la destruction par les Tsin, qui avaient
conservé les rites des Chang, ainsi que le Chou-king, livre d'histoire.
On raconte que, lors de la renaissance littéraire, à l'époque
des Han (178 av. J.-C), un vieillard, nommé Fun-sang, habitant
de Tsi-nan dans le Chan-toung, se rappelant par coeur vingt-neuf chapitres
du Chou-King, on put reconstituer un texte de ce livre. En 140 av. J.-C.,
sous le règne de l'empereur Wou-ti, l'habitation de Confucius fut
démolie par ordre de Kong-wang, prince de Lou, et l'on trouva dans
les murs plusieurs livres dont un exemplaire du Chou-king, du rituel I-li
du Hiao-king, qui permirent de donner de nouveaux textes de ces ouvrages.
Quelque grande que soit la popularité de Confucius, elle a été
certainement accrue par le développement des doctrines du Sage,
à l'époque des Soung, par le grand philosophe Tchou-hi (1130-1200).
Les étrangers désignent généralement
sous le nom de confucianisme ce que les
Chinois appellent le Jou-kiao, religion des lettrés, appellation
qui date du XIIe siècle (1150) et
dénote les disciples de Tchou-hi.
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Gros
plan sur l'architecture colorée du temple de Confucius, à
Pékin. Initialement construit
en
1302, le temple a été utilisé par les fonctionnaires
impériaux pour rendre hommage à l'ancien
philosophe
et éducateur. Source : The World Factbook.
Le premier de tous les saints dans le calendrier
du Jou-Kiao est Confucius en personne, Mencius lui-même n'étant
placé qu'au second rang. Ce Jou-Kiao est lié d'une façon
intime avec la religion d'Etat. La religion d'Etat comprend trois degrés
de sacrifices : 1° les grands sacrifices qui s'adressent au ciel (tien),
à la terre (ti), aux grands temples des ancêtres (tai miao),
où sont placées les tablettes des empereurs défunts
de la dynastie régnante, aux Chié tsi, dieux de la terre
et des grains; 2° les sacrifices moyens ont neuf objets : le soleil,
la lune, les mânes des empereurs et rois des dynasties précédentes,
Confucius, les anciens patrons de l'agriculture et de la soie, les dieux
du ciel et de la terre et l'année du cycle; 3° les sacrifices
inférieurs, Kioun-se, s'adressent soit à des bienfaiteurs
défunts, à des hommes d'Etat célèbres, soit
au vent, à la pluie, au tonnerre, aux montagnes, aux fleuves, etc.
C'est au solstice d'hiver qu'a lieu la grande fête de la religion
d'Etat, c'est le jour où l'empereur se rend officiellement au Tien-tan,
temple du ciel. Il est bien difficile de faire remonter l'origine de ce
culte à Confucius et à ses disciples immédiats; ce
génie positif ne connaissait que la famille et l'Etat; le devoir
envers le divin, il n'en parle pas; son commentateur, Tchou-hi, avec son
premier principe, le Tai-ki, tombe absolument dans le matérialisme;
il est aussi curieux de voir les disciples de Confucius créer le
Jou-kiao que de voir ceux de Lao-tseu créer le taoïsme; la
philosophie ne leur a pas suffi, il a fallu que non seulement leur esprit
fût satisfait, mais encore leurs yeux; avec deux théories,
l'une pratique, l'autre abstraite, ils inventèrent deux cultes avec
leurs cérémonies et leurs ministres. (Henri
Cordier).
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Confucius
et le Confucianisme (choix de textes), Pocket, 2008.
9782266182805
Une
présentation de la pensée confucéenne et de l'influence
de cet homme sur le monde chinois, ancien
et actuel. Un ouvrage qui présente un choix de grands textes et
une présentation qui en éclaire la lecture.
Lorsque
les Chinois, au début du XXe siècle voulurent mettre à
bas l'héritage traditionnel de leur nation, ils s'en prirent spontanément
à Confucius, confirmant par là son caractère indissociable
de la civilisation chinoise. Il y eut certes en Chine de nombreux courants
de pensée qui marquèrent durablement sa culture, mais seul
le confucianisme en fut pour ainsi dire le cadre qui fit de l'empire du
Milieu un monde si spécifique.
Si
l'étude de la pensée confucéenne est d'une importance
capitale à celui qui veut comprendre ce monde chinois, elle offre
également une méditation fondamentale sur l'homme. C'est
à ce titre que Confucius figure parmi les grandes figures de l'humanité
telles Socrate, le Bouddha
ou Jésus. Sa pensée est habitée
par une vision traditionnelle du monde où l'humain trouve sa place
dans un ordre naturel qu'il s'agit de respecter. L'observation des rites
alliés à la rectitude du coeur, la piété filiale
comme cadre des relations, les rapports du Ciel, des hommes et de la terre,
voilà autant de voies susceptibles d'inscrire l'homme au centre
de son humanité.
Cette
anthologie des grands textes confucianistes offre au lecteur un large champ
au sein duquel il pourra entrer de façon approfondie dans cette
pensée qui ordonna tout l'esprit d'un peuple. (couv.).
Jacques
Sancery, Confucius,
Cerf , 2009. - Grande figure de l'humanité,
Confucius le fut assurément. Pourtant, il ne fut ni un prophète,
ni le fondateur d'une religion, ni même une figure philosophique
au sens où nous l'entendons en Occident. On a parlé de moraliste
érudit, d'"honnête homme". On l'a comparé à
Socrate
ou encore à Montaigne. En vérité,
ce grand sage, doublé d'un savant, fut tout à la fois un
éducateur au charisme exceptionnel, un idéologue profondément
humaniste et un homme d'action qui chercha, durant toute sa vie, à
réformer la société de son temps qu'il jugeait en
perdition. Après des débuts incertains et grâce à
l'engagement de ses disciples les plus doués, sa pensée,
les idéaux politiques et moraux qu'il chérissait finirent
par marquer d'une empreinte indélébile la société
tout entière, s'ancrant dans les mentalités et influençant
les us et coutumes du peuple chinois pendant plus de deux millénaires.
S'appuyant sur des valeurs morales propres à transcender l'homme,
l'enseignement de celui qui fut vénéré comme le Maître
par excellence prôna une éthique universelle et intemporelle.
A ce titre, le legs spirituel de Confucius reste d'une étonnante
modernité. Dans cette étude approfondie, fruit de patientes
recherches et de longues années de travail, l'auteur s'est employé
à mettre en lumière les multiples facettes de sa pensée,
s'attachant à en dégager les lignes de force, en se référant
constamment aux sources anciennes sans négliger pour autant les
travaux les plus récents. (couv.).
Régine Pietra, La
Chine et le confucianisme aujourd'hui, Le Félin, 2008.
9782866456689 |
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