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Froufrou, de Méilhac et Halévy

Froufrou est une comédie en cinq actes, en prose, de Meilhac et Halévy, représentée pour la première fois sur le théâtre du Gymnase le 30 octobre 1869. 

C'est dans un des plus jolis articles de Charles Yriarte à la Vie parisienne que les auteurs sont alléss chercher, sinon leur type de femme, tout au moins le nom qu'ils lui ont donné. La Froufrou d'Yriarte, ou mieux du marquis de Villemer, n'aurait guère pu être transportée sur le théâtre, dont elle eut choqué toutes les bienséances. 

"Ce sont. dit Yriarte, ces messieurs qui l'ont appelée Froufrou... Vous comprenez : on taille sa plume, on s'ennuie...frou-frou... On entend... un petit bruit charmant... une robe de soie qui frôlle les murs étroits des couloirs... Ah! voilà Froufrou. "
Dans la pièce de Meilhac et Halévy, Froufrou s'appelle Gilberte Brigard. Gilberte est une jeune fille comme il y en a tant dans les hautes sphères sociales. Son père s'est peu occupé d'elle, absorbé qu'il est par ses plaisirs. Comme l'a très bien dit Sarcey, dans le Temps, le père explique la fille. 
"Il est veuf depuis de longues années. Au temps mêmes où vivait sa femme, il était si peu marié, si peu, que ce n'était pas vraiment la peine d'en parler. Brigard est immensément riche, et il a toute l'élégance, ou, pour mieux dire, tout le débraillé de la haute vie. "
Quand des filles sont élevées par un tel père, il faut ou qu'elles se laissent gagner par cette corruption très réelle que couvre mai un vernis de bonne compagnie, vu que, par réaction, elles deviennent très sérieuses et prennent la direction de la maison qui va à le dérive. C'est ce dernier parti qu'a adopté Louise, à qui la nature a donné lui caractère réfléchi, un cœur profond et tendre. Elle est devenue la mère de sa soeur plus jeune, de Gilberte, à laquelle une extrême vivacité et des entraînements de jeunesse que rien ne vient réprimer ont valu le surnom de Froufrou. Demandée en mariage par MM. de Surtoris et de Valréas, celle-ci se décide au hasard pour le premier, parce que Louise, qui aime de Sartoris à l'insu de tout le monde, lui conseille cette union, se dévouant ainsi pour ce qui elle croit être le bonheur de sa soeur bien-aimée. Gilberte, qui ignore ce sacrifice, vit jeune femme comme elle a vécu jeune fille et se livre à toutes ses fantaisies : elle passe son temps à jouer la comédie de socété au bénéfice des pauvres et ne s'occupe pas plus de sa maison, de son mari et de son enfant que si tput cela n'existait pas. Louise, qui s'était tenue éloignée du jeune ménage, cède aux instances de M de Sartoris et de Froufrou : elle comprend qu'il y a là une nouvelle occasion de se dévouer en veillant aux intérêts de ceux qui lui sont chers, et elle ramène dans cet intérieur si abandonné l'ordre et le bonheur. Le mari est le plus heureux des hommes; il a pour ainsi dire deux femmes : l'une qui est l'ange et l'autre qui est le démon du foyer; mais la comtesse ne tarda pas à s'apercevoir qu'elle n'a pas gardé la meilleure part. Elle se voit bientôt comme une étrangers en sa propre maison. Comme elle s'est prise à aimer Valréas, qui lui donnait la réplique dans Indiana et Charlemagne, et qu'effrayée par le précipice où elle court elle a cherché en ce péril à se rattacher à ses devoirs d'épouse, elle a senti avec épouvante d'abord, avec humeur ensuite, toutes les branches se casser dans sa main. Son enfant, Louise l'a confisqué; son mari, il ne jure que par Louise, et quand elle, Froufrou, veut reprendre le gouvernement de son ménage, Sartoris ne voit dans cette tardive volonté que le résultat d'un nouveau caprice. Froufrou n'est pas femme à couver longtemps une sourde rancune. Au moindre prétexte elle va éclater. Ce prétexte ne tarde pas à venir. Un mariage brillant se présente pour Louise; Louise le refuse, et le comte n'en est pas trop fâché. Farouche, Froufrou écoute une conversation, et quand son mari, s'approchant d'elle pour prendre congé, lui dit en lui serrant la main : " Tâchez de décider votre soeur. - J'essayerai", répond-elle d'une voix altérée pur la colère. Ici se place la plus belle scène de la pièce. La jalousie de Froufrou ne connaît plus de bornes. Elle accuse Louise d'aimer Sartoris et de refuser, à cause de cet amour, le mariage qu'on lui propose. Elle ne répond à sa soeur, qui l'accable de justifications, que par des exclamations entrecoupées; que par des cris de fureur.
" Tu m'as pris ma maison, mon mari, mon enfant, s'écrie-t-elle; eh bien! garde tout!"
Et elle se sauve, elle va rejoindre à Venise M. de Valréas, qui devient son amant.
Ici était le noeud de la pièce, et les auteurs s'y sont mal pris pour dénouer des situations aussi énergiquement tracées jusqu'à cette vigoureuse sortie de Froufrou, la pièce était une excellente comédie. A partir de ce moment, elle tourne au drame et au drame ordinaire. Froufrou disparaît pour n'être plus qu'une vulgaire heroïne. Analyser les deux derniers actes serait peine superflue. M. de Sartoris retrouve naturellement sa femme, et non moins naturellement se bat avec Valréas, qu'il blesse à mort. Au dernier acte, Gilberte, l'ombre de Froufrou, revient mourir chez son mari, et obtient de lui, avec sa bénédiction, la promesse d'épouser Louise, qui deviendra ainsi la mère d'un enfant qui, depuis longtemps déjà, la reconnaît pour telle. (PL).
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