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Les sécrétions de plantes |
Les réactions
chimiques continues qui ont lieu dans les cellules
végétales donnent lieu, tout comme chez les cellules animales, à deux
sortes de produits : les uns, qui peuvent être employés ultérieurement
par la plante pour ses fonctions vitales; les
autres, qui restent emmagasinés sans emploi dans des régions déterminées
de la plante ou bien sont expulsés au dehors; ces derniers sont de véritables
substances de rebut ou de déchet.
L'acte par lequel la cellule élabore ces différents produits porte le nom général de sécrétion. On dit, par exemple, que la résine des Conifères, les essences de la Menthe, de la Lavande, etc., sont engendrées par sécrétion. Par extension, les produits eux-mêmes sont appelés des sécrétions. Toutefois, on a coutume de diviser ces derniers en deux grands groupes, selon l'emplacement qu'ils occupent une fois qu'ils ont été engendrés ou sécrétés par la cellule : 1° Il y en a qui, comme les diastases digestives, restent enfermés dans les cellules mêmes qui les ont engendrés : on les appelle les sécrétions proprement dites.Nous ferons l'étude rapide de ces différentes substances en les considérant surtout au point de vue physiologique, c'est-à -dire au point de vue du rôle effectif ou indifférent qu'elles jouent dans la vie de la plante, en examinant d'abord celles dont le végétal tire un profit quelconque après qu'il les a élaborées, puis celles qui ne constituent que des déchets restant sans emploi dans la plante ou qui sont éliminés au dehors. Produits de sécrétion utiles à la plante Les plus importants de beaucoup sont les diastases digestives, matières azotées neutres sécrétées par la cellule et qui sont absolument identiques aux ferments que sécrètent les organes digestifs les animaux. Seulement, chez les animaux, les cellules qui sécrètent un ferment déterminé sont généralement réunies en masse et forment des organes plus ou moins volumineux, tels que les glandes salivaires, le pancréas, etc.; chez les végétaux, toute cellule vivante, quel que soit son emplacement, qu'elle appartienne à la racine ou à la feuille, est capable de sécréter pour elle-même des ferments digestifs qu'elle utilise pour digérer et rendre assimilables sur place les matières nutritives, sucre, amidon etc., renfermées dans la cellule. Les diastases végétales sont de même
nature et en même nombre que celles des animaux supérieurs : amylase,
identique à celle de la salive, qui digère
l'amidon et le transforme en sucre de maltose; - pepsine
acide, identique à celle du suc gastrique,
qui digère les substances albuminoïdes telles que les grains d'aleurone
et les transforme en acides aminés; - saponase, qui transforme les corps
gras en acides gras et glycérine, tout comme le liquide pancréatique
des animaux ; - invertine, identique à celle du liquide intestinal, qui
transforme le suc de saccharose en sucre de glucose et de lévulose assimilables.
Il se produit une sécrétion importante d'invertine quand on mélange
de la levure de bière avec une dissolution de sucre ordinaire ou saccharose.
Cette invertine hydrate, puis dédouble le saccharose en sucre de glucose
et de lévulose, qui subissent ensuite la fermentation alcoolique.
Mais toutes ces diastases se forment surtout pendant la germination de la graine pour y digérer les réserves nutritives de différente nature qui y sont accumulées et qui sont destinées à subvenir au développement de l'embryon, tant que celui-ci manque de feuilles et de racines. Dans certains cas, les liquides digestifs,
au lieu de rester confinés dans les cellules qui les ont engendrés et
d'y opérer une digestion intracellulaire, peuvent s'échapper au dehors;
c'est ce qui a lieu, par exemple, pour l'invertine que sécrètent les
cellules
de la levure de bière dont nous venons de parler. Mais une telle sécrétion
externe est surtout remarquable chez les plantes
dites carnivores, telles que les Droséra et les Dionées attrape-mouches.
Les Drosera ou Rossolis sont de petites
plantes qui vivent dans les lieux marécageux et qui possèdent une couronne
de feuilles très épaisses, avec un limbe
arrondi. La face supérieure du limbe est hérissée d'une multitude d'espèces
de petits tentacules, dont l'extrémité terminale est renflée et est
toujours enduite d'une petite gouttelette de gelée brillante; ce produit
est sécrété par les cellules du renflement et filtre à la surface;
il est riche en pepsine et a la propriété de dissoudre et de digérer
la chair. Quand de petits insectes se déposent
sur la feuille, ses tentacules, qui sont doués d'une très grande sensibilité,
se rabattent sur eux, les emprisonnent et la gelée à pepsine dissout
peu à peu leurs parties molles.
Les Dionées, qui vivent en Amérique
du Nord, appartiennent à la même famille que les Drosera. La partie
terminale de leur limbe est arrondie et ses deux moitiés peuvent se replier
l'une sur l'autre autour de la nervure
médiane comme charnière. De plus, la face supérieure de ce limbe porte
six petites pointes ou poils qui sont aussi sensibles
que les renflements des Drosera; d'autres poils beaucoup plus nombreux
et plus fins sécrètent un liquide à pepsine qu'ils laissent transsuder
à leur surface. Quand un insecte se dépose
sur les poils sensibles, la feuille replie ses deux moitiés sur lui et
l'emprisonne; le liquide visqueux et acide commence à liquéfier les parties
molles du corps de l'insecte.
Il est difficile de préciser dans quelle mesure les corps ainsi attaqués par le liquide des Drosera et des Dionées sont utilisés ensuite pour la nutrition de la plante. Y a-t-il réellement une absorption des peptones à travers l'épiderme de la feuille? Ce qu'il y a de certain, c'est que les deux moitiés du limbe de la Dionée s'écartent de nouveau après avoir à peine commencé de dissoudre le corps de l'insecte qu'elles ont emprisonné. Il faut encore compter, au nombre des sécrétions externes utiles à la plante, les liquides acides qui imprègnent constamment les poils absorbants des racines et leur permettent de dissoudre le phosphate et le carbonate de chaux du sol. Enfin pour terminer, citons un liquide visqueux qui recouvre les stigmates des fleurs et qui est utilisé pour la germination des grains de pollen. Produits de sécrétion non utilisés par la plante Les principaux de ces produits sont des substances minérales solides, des gommes, des alcaloïdes, des huiles essentielles ou essences, le latex et les résines : Les substances
minérales solides.
Dans le Lierre, l'oxalate de calcium affecte, au contraire, la forme de petits cristaux octaédriques isolés ou groupés les uns dans les autres en formant des sortes de cristaux « en oursins », qui sont désignés en minéralogie sous le nom de mâcles. Beaucoup de Graminées sont coupantes lorsqu'on étire leurs feuilles entre les doigts, à cause des petites aiguilles de silice qu'elles renferment. Les tiges des Prêles, connues vulgairement sous le nom de queues de rat, renferment aussi beaucoup de silice dans leurs cellules épidermiques, ce qui les a fait utiliser pour le polissage du bois. Enfin, dans les feuilles du Figuier, il existe de volumineuses concrétions de carbonate de chaux qui se développent non dans des cavités cellulaires, mais au sein même de la paroi cellulosique; celle-ci se distend peu à peu dans l'intérieur de la cellule à mesure qu'augmente la concrétion calcaire, et la masse finit par occuper presque toute la cavité cellulaire. Ces concrétions s'appellent des cystolithes. Les gommes.
Les mucilages
se rapprochent beaucoup des gommes et proviennent, comme elles, d'une gélification
de parois cellulosiques. Ils paraissent être également un mélange de
substances diverses; certains se rapprochent de la cellulose
parce qu'ils sont partiellement solubles dans l'oxyde de cuivre ammoniacal
et colorables en bleu par le chloro-iodure
de zinc; d'autres, au contraire, sont insensibles à ces réactifs et prennent
les colorants spéciaux de la pectose.
Les alcaloïdes.
Les huiles essentielles.
La plupart des essences communes se forment à la surface des feuilles ou de pétale; dans de simples cellules épidermiques dont elles font soulever la paroi externe, qui prend ainsi la forme de poils ou de petites massues; très fréquemment aussi les cellules sécrétrices épidermiques forment de petits massifs isolés comme dans le Thym et la Lavande; leur essence se trouve toujours en dehors de la cellule, sous la cuticule de la paroi. Lorsqu'on frotte entre les mains des feuilles
de Lavande, de Thym, etc., on écrase toutes les cellules sécrétrices
et les doigts restent imprégnés d'essence. Toutes les plantes de la famille
des Labiées en renferment (Thym, Sauge, Menthe,
etc.).
Dans l'écorce
de l'Orange et du Citron, il existe de nombreuses
petites poches qui sont remplies d'essence de citron; c'est cette dernière
qui s'échappe en petits jets susceptibles de s'enflammer lorsqu'on presse
fortement un fragment d'écorce d'Orange devant une bougie allumée.
Chez d'autres végétaux, les essences
prennent naissance dans l'intérieur de la plante et sont sécrétées
par de petits canaux ou canaux sécréteurs qui s'étendent parfois dans
toute la longueur de la plante et dont les parois sont formées d'une assise
de cellules sécrétrices. On en trouve de semblables chez les Ombellifères
telles que le Persil, l'Anis et la Carotte, ainsi que chez de nombreuses
plantes de la famille des Composées (Absinthe, Camomille, etc.) (Tribu
des Radiées).
Les Résines.
Le type des oléo-résines est la térébenthine des Conifères (Pin, Sapin, etc.). Par la distillation, on lui enlève une essence, qui est l'essence de térébenthine, et il reste la résine solide connue sous le nom de colophane. La myrrhe et l'encens,
produits par des plantes de la famille des Térébenthacées, sont des
mélanges de gomme et de résine.
Les résines et les oléo-résines prennent naissance dans des canaux sécréteurs qui rappellent les canaux à essences des Ombellifères. On en trouve particulièrement chez les Conifères. Chez les Pins et les Sapins, par exemple, ils sont composés de deux assises de cellules : 1° Une assise interne à parois minces qui sécrètent la résine et la rejettent dans la cavité centrale du tube;Le développement de ces canaux est d'ailleurs des plus simples : chacun d'eux est formé au début d'une seule cellule qui se découpe en quatre autres : puis celles-ci s'écartent un peu et laissent entre elles une petite cavité centrale; ensuite, chacune d'elles se découpe tangentiellement en deux autres, et il se forme de la sorte une assise interne qui sécrétera la résine, et une assise externe qui lignifiera ses parois pour devenir l'enveloppe protectrice. Ajoutons que ces canaux sécréteurs, très nombreux chez les Conifères, s'étendent sans interruption d'un bout à l'autre de la plante, depuis la racine jusque dans les feuilles et même dans les fruits. La résine s'écoule lorsqu'on pratique des incisions sur l'écorce de la tige, car les canaux blessés laissent échapper leur contenu au dehors. Le Latex.
Les petites Euphorbes des régions tempérées,produisent également un latex blanc qu'elles laissent écouler quand on coupe leur tige. Il en est de même de plusieurs plantes de la famille des Composées, les Pissenlits, les Scorsonères et les Laitues (Tribu des Liguliflores). Les fruits du Pavot (têtes de Pavot), quand ils sont encore verts, renferment dans leurs parois un latex blanc qui s'écoule au dehors lorsqu'on pratique des incisions sur ces fruits et dont on retire l'opium. Une plante voisine du Pavot, la Grande-Eclaire
ou Chélidoine, qui est très commune sur les vieux murs et le long des
haies, renferme un latex rouge qui, dit-on, fait passer les verrues.
Tous ces latex sont des émulsions ; ils tiennent en suspension des gouttelettes microscopiques appartenant à des substances diverses. Celui des Euphorbiacées renferme des grains d'amidon qui sont souvent en forme de bâtonnets, des peptones, du sucre, des matières grasses, du tanin. De plus, on y trouve des ferments digestifs très actifs : une lipase (digestion des graisses), une amylase (digestion de l'amidon) et une présure susceptible de coaguler la caséine du lait. Ce dernier ferment est particulièrement important dans le latex du Figuier; son pouvoir présurant est considérable, et à l'époque de l'Iliade et de l'Odyssée, c'était le latex du Figuier qui était employé pour coaguler le lait et préparer le fromage. Les paysans de l'île Majorque (Baléares) prépareraient encore actuellement leur caillé en agitant le lait chaud avec une branche de Figuier fendue en croix. Contrairement à une idée longtemps acceptée, le latex ne serait pas un produit d'excrétion, mais bien une réserve nutritive. D'abord, la composition de ce liquide est tout à fait celle des substances que les plantes mettent d'ordinaire en réserve; puis le latex prend naissance dans les feuilles, où les vaisseaux laticifères sont extrêmement nombreux et en rapport avec le tissu chlorophyllien. Les vaisseaux laticifères auraient par conséquent pour fonction de transporter dans les diverses parties de la plante les matières de réserve qu'ils ont puisées dans les feuilles et accumulées dans leur cavité. Cependant, les granules d'amidon, qui ne dépassent pas un micromètre et qu'on a vu prendre naissance dans des chondriocontes de forme allongée, ne présentent jamais trace de corrosion contrairement à ce qui s'observe à la surface de ceux qui sont en voie de digestion. Les cellules où se forme le latex présentent trois dispositions différentes : 1° Chez les Euphorbes, le latex se forme dans de longs tubes cylindriques, très étroits et considérablement ramifiés; ils s'étendent d'un bout de la plante à l'autre, sans jamais présenter de cloisons transversales. |
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